Lauren Hill

Bonjour à vous chers lecteurs,

Aujourd'hui, je vais vous parler d’un sujet inédit et je dois l’avouer, pas franchement passionnant. Car figurez-vous que l’on me demande d’aborder un thème que je connais bien : moi.

Mon enfance n’est en rien différente de la vôtre, du moins pour les plus chanceux d’entre vous. Je suis née en décembre 905 dans la ville de Laurgal en Ünellia… Lauren, Laurgal, vous saisissez ? Mon père William travaillait comme avocat dans un cabinet d’associés, il y avait une place assez importante pour que son nom apparaisse sur la plaque à l’entrée du bâtiment. Denise, ma mère, était écrivain reconnue, du moins sous son nom de plume : Denis Hiltman. Peut-être avez-vous lu l’un de ses nombreux romans dont le plus connu restera sans doute “À l’ombre de la machine” sorti en 912, si ma mémoire est bonne. Chose étonnante me concernant et que finalement peu de personne savent : je suis née en double, enfin pas réellement, n’allez pas imaginer n’importe quoi. Je suis simplement arrivée en ce monde en même temps que ma sœur Gale, avec qui je n’ai finalement pas grand chose en commun si ce n’est un visage. Quand l’on dit que les jumeaux sont proches, il n’y a rien de plus faux nous concernant… Mis à part cela, avez-vous noté l’humour de nos parents ? Non ? Souvenez-vous du nom de ma ville natale ? Enfin bref, passons.

Je grandis comme un garçon manqué, préférant grimper aux arbres ou jouer dans l’eau plutôt que de m’affairer aux taches quotidiennes dites “féminines”. Vous avez, celles qualifiées d’essentielles à l’apprentissage des jeunes filles de bonne famille. Alors que Gale travaillait à son piano pour le rendre toujours plus mélodieux ou passait des heures sur sa broderie ennuyeuse au possible, je fuyais tout simplement, préférant, et de loin, jouer aux aventuriers avec les garçons de mon quartier. Ces souvenirs m’amusent maintenant, car j’étais loin d’être une enfant facile. Si ma sœur se donnait du mal pour paraître douce et docile, ce n’était nullement mon cas. Je redoublais d’imagination lorsqu’il s’agissait de défier mes parents. C’était pourtant sans compter sur mon père qui ne plaisantait sûrement pas avec la discipline, et ne manquait jamais de me rappeler à l’ordre. De ce fait, je passais également de longues heures enfermée dans ma chambre… Oh, ne vous inquiétez pas pour moi, même privée de ma liberté, je savais mettre ce temps-là à profit. Je m’appliquais d’ailleurs à transformer la douce punition paternelle, sans réelle sévérité, en temps d’apprentissage ou d’évasion en faisant fonctionner mon imagination. En lisant d’abord, les livres de ma mère évidemment, mais aussi et surtout des romans d’aventures comme la série de roman de George Belfort “Alan Jones”, que j’ai tout simplement dévoré. Et puis, petit à petit tout naturellement, vint le moment de l’écriture. Des petites histoires d’abord, toujours illustrées par quelques croquis réalisés au fusain. Je commençais par quelques lignes par ci, par là, puis une page, deux, puis dix, etc. À douze ans, après avoir maintes fois parcouru les diverses encyclopédies et autres roman d’aventures, j'écrivis le mien. Le tout premier de mes romans et évidemment et le plus mauvais de tous, du moins je l’espère. Ne cherchez pas de preuves de son existence, celui-ci était si mauvais que je pris bien soin de le faire disparaître il y a de cela bien des années.

Ainsi, ma passion pour la littérature était née. Toute chose devint source d’inspiration et méritait quelques pages portant la marque de ma plume. Chacun pensait que je suivrais, naturellement, le chemin de ma mère et en un sens, je le pensais aussi. Seulement, l’influence de mon père jouait aussi son rôle, pénétrant sournoisement mon esprit et mon imagination, de façon insidieuse d’abord... Puis finit par me dévorer entièrement. Pourquoi se contenter d’invention alors qu’Irydaë si vaste et si riche en merveilles fournissait moult ressources et sujets passionnants et exploitables ? La vérité m’intéressait alors, plus que tout. Elle était là, partout, en toute chose, en chacun, souvent prudemment cachée attendant simplement d’être découverte avant de l’exposer aux yeux de tous. J’avais choisi ma voix : je serai reporter, prête à parcourir le monde à la recherche de secrets à débusquer.

Après les études secondaires, j’entrais à l’université d’Alexandria aux départements d’anthropologie et de littérature. J’y passais quatre années où je jonglais entre les cours et ma passion, écrivant également quelques articles pour le journal universitaire.

Néanmoins, malgré mon rêve et ma détermination, les choses n’avançaient pas forcément à mon rythme. Jeune diplômée, je me retrouvais face à la dure réalité: mon rêve était certes beau, mais pas facilement atteignable. À vingt-deux ans, alors que Gale épousait Arthur, je réussis à débusquer un emploie de bibliothécaire. Évidemment, ce travail était d’un ennui mortel, néanmoins situé en plein centre ville, il me permit autant d’écrire que de faire des rencontres plus ou moins intéressantes.

C’est ainsi que je rencontrais Léopold Arlow, rédacteur au sein d’un petit quotidien de la capitale. Nous discutions beaucoup, échangeant sur tout sujet et un jour, il demanda à voir mes textes. Quelques semaines plus tard, je débutais ma carrière, au sein d’un quotidien alexandrien, en tant que vulgaire gratte papier. Il faut bien commencer quelque part, après tout. Mon travail n’était en rien passionnant, je me contentais généralement de soutenir l’un de leur journaliste, corrigeant ses articles ou en prenant les notes à sa place. Seulement, ce dernier n’écrivait que sur des sujets qui ne m’intéressaient que très peu, voir pas du tout. Néanmoins, malgré l’ennui, cela me permit de rencontrer Edwin Bax, journaliste vedette de la tribune. Je décidais d’y aller au culot et de lui présenter mes propres articles, ceux écrits en parallèles qui traitaient de sujets peu communs tenant plus de faits divers que de politique. Étonnamment, cela lui plut tant qu’il décida de me prendre sous son aile.

J’appris beaucoup à ses côtés, Edwin était un passionné, ses articles et autres feuilletons le démontraient parfaitement. Avec lui, je voyageais partout en Daënastre, multipliais les rencontres, mais très vite le continent devint trop petit pour moi. Et bien que le travail me plaisait, que certains de nos articles communs se voyaient malgré tout publiés, j’étais encore bien loin de mon rêve : celui d’exposer les vérités de ce monde. À vingt-huit ans, je le quittais pour m'élancer seule dans ma propre quête de découverte et d’aventure. J’avais ce besoin viscéral de voir le monde, en apprendre toujours plus. J’écrivais sans cesse, sur tout sujet susceptible de m’intéresser, envoyant mes articles à la tribune qui les publiait sous le pseudonyme de Ren Hartfield, nom que j’empruntais depuis mes tout début.

Et me voilà donc aujourd'hui, je me balade sur les terres d’Irydaë, poursuivant mon but malheureusement toujours pas atteint… Hélas, je n’ai encore jamais eut la chance de me rendre en My’Trä, mais je ne désespère pas, en attendant, je continue d’écrire sur les sujets qui me passionnent, perçant, divulguant quelques secrets et qui sait, le suivant sera peut-être le vôtre...