Epreuve 2 : The Fifth Being - Lacrimosa

Onirisme

RAPPEL : Soyez imaginatifs, ne restez pas accroché sur des acquis que le sujet semble vous délivrer, vous n’êtes pas obligé d’être amical avec votre contrepartie, la réciproque est vraie, on ne peut que vous conseiller de ne pas prendre les épreuves trop littéralement, mais de tout de même respecter les consignes pour ne pas faire un hors-sujet

Description :

Ici, rien n’a de sens, le monde tel que vous le connaissez a changé, les règles ne sont plus les mêmes. Le feu vous refroidit, l’eau vous assèche, les éléphants se mettent à voler … voilà une rêverie très étrange, toutefois, vous n’êtes pas seul à songer dans cet univers sans loi logique. Votre partenaire a décidé d’envahir votre petit monde, serez-vous assez aimable pour l’y accueillir, ou bien comptez-vous garder votre repos pour vous-même ? Comptez-vous vous échapper, ou au contraire, rester à jamais dans ce havre séduisant d’originalité ?

Cyr Cavaleri:

ONIRISME

Il ouvre les yeux et les étoiles attirent son attention en premier : elles ont été rallumées trop récemment à Pandémonium pour qu'il puisse ne serait-ce qu'envisager de s'en lasser. D'un geste devenu réflexe depuis que le ciel de son monde d'origine n'est plus une opacité noire, l’artiste bascule la tête en arrière en un arc de gorge blanche mouchetée de peinture multicolore.
Et fronce les sourcils, curieux.

Dans le bleu sombre de cette nuit, les points colorés ne correspondent pas aux constellations. Il le sait. Il a passé trop de temps le nez dans les tableaux d'avant la fin du monde, à scruter des étoiles perdues et à les peindre partout. Les agencements ne correspondent à rien de connu. La couleur ne cadre pas non plus, réalise-t-il : les teintes sont trop chaudes et trop proches, les nuances chaleureuses et l'alignement...
C'est une ville.
Vue du ciel.
Où il se tient debout.

La réalisation produit un basculement. Le monde pivote sous lui, autour de lui et le vertige le saisit alors que sa crinière turquoise cascade vers ce qui est donc le bas.

"Oh."

Le son est bref d'un étonnement qui tourne au ravissement. Lorsqu'il baisse le regard vers ses pieds posés dans le vide, le gris de ses iris contient trop de curiosité et pas assez d'instinct de survie. La bataille entre les deux sentiments est brève et l'issue prévisible : Cyr n'a pas le pouvoir de voler, ne l'a pas emprunté... et lever un pied pour voir s'il continuera à tenir sur la voûte céleste est, objectivement, une très mauvaise idée.

Il le fait quand même.

La science a ses raisons que la raison ignore.

Codage par Libella sur Graphiorum

Gabriel O'Dahnan:

Onirisme

Où suis-je ?

Le rêve est étrange. Je rêve souvent, m’en souviens la plupart du temps, mais jamais encore je n’avais eu conscience d’être pris au piège d’un de mes songes. Et pourtant tel est le cas alors que j’observe la ville, les yeux grands ouverts dans lesquels se reflètent les torches qui éclairent les rues. Enfin, il me semble qu’il s’agit de torches. Je n’en suis même pas sûr. Rien ne m’est familier. Les maisons sont trop hautes pour être de simples maisons mais trop hautes pour être des châteaux.

J’observe la ville qui évolue au-dessus de moi et mon regard dérive. J’ai beau rêver, je ressens l’angoisse, non, la terreur en constatant que je suis suspendu dans le vide. A mes pieds, un ciel sombre, étoilé, scintillant tel le lac un soir de Liekki. Jamais encore je n’avais fait de rêve si intense, si chargé de détails, probablement sortis tout droit de mon imagination. Je reporte mon attention sur la ville suspendue dans les airs et sans le réaliser, je lève la main vers elle, tentant de la toucher. Et c’est alors que je le sens, cet effleurement contre mon bras. Je fronce les sourcils et rejette la tête en arrière.

Qu’est-ce donc que cela ?

Je tressaille, tremble et ramène rapidement ma main dans mon giron. Des cheveux. Non. Mes cheveux. Dressés haut, au-dessus de ma tête, leurs pointes tentant d’atteindre la ville suspendue. Alors je comprends. La ville ne flotte pas au-dessus de moi. C’est moi qui l’observe depuis le plafond de la voûte céleste, astre parmi les astres tandis qu’elle se tient bien sagement sur terre.

Un mouvement dans mon champ périphérique et je tourne brusquement la tête, les yeux écarquillés. Ce rêve est trop réel pour moi. Je n’en veux plus. Je sens le vertige me saisir et faire tanguer la ville ainsi que la silhouette que je devine non loin.

Qui est-ce ?

J’ouvre la bouche, dois m’y reprendre à plusieurs fois avant qu’enfin un son ne sorte d’entre mes lèvres.

« Etes-vous… Un habitant de ce rêve ? »

Codage par Libella sur Graphiorum

Cyr Cavaleri:

ONIRISME

Lever un pied sans tomber : check.
Reposer et lever l'autre pied sans tomber : check.
La question interrompt l'artiste en plein questionnement quant au bien-fondé d'une tentative de sauter, juste pour voir où il retombera - ou s'il volera. Cillant, il tourne la tête vers la silhouette qu'il n'avait pas vue ou qui, peut-être, n'était pas là - et qui se tient, comme lui, les pieds sur le ciel et la tête en bas.

Habite-t-il les rêves ? Probablement à titre de résidence secondaire, à ce stade. Habite-t-il ce rêve ?

"Pas à ma connaissance, désolé."

La sincérité court sur ses traits. Son geste de dénégation trace sur le ciel un coup de pinceau bleu électrique alors que sa crinière ondule sous le geste. Soudain très conscient de sa gorge dénudée par la gravité, le Cadutie y passe la main, trouve à même sa peau l'armure de mouchetures de peinture. Si son vis-à-vis a la pâleur de certains vampires, au moins n'en arbore-t-il pas l'aura de danger liquide...

"Vous non plus, du coup, je suppose ?"

Distraitement, il tapote du pied la surface sur laquelle ils se tiennent sans réaction notable de l'univers. La curiosité mal placée des scientifiques et la déraison des artistes refont surface en choeur concordant d'idées douteuses. Sa spontanéité s'en mêle, l'emmêle et précipite ses pensées dehors sans filtre :

"J'ai envie de sauter - pas vers le haut, enfin... vers la ville. Le haut et le bas sont un peu confus en ce moment. Mais juste vers le ciel. Pour savoir."

S'il plonge dans la ville, se dispersera-t-elle en nuée de lucioles et d'étoiles filantes ? S'il retombe sur ses pieds, passera-t-il sur un envers du ciel ? Il faut qu'il sache. Qu'il explore, avant que le rêve ne touche à sa fin comme le font tous les rêves que la réalité rattrape et ravage.

"... Je crois que je vais essayer. Vous venez ?"

Codage par Libella sur Graphiorum

Onirisme

Je ne suis étrangement pas rassuré à la réponse de mon vis-à-vis. Qu’aurais-je souhaité ? Je n’en sais rien… Mais sûrement pas qu’il me réponde avec cette franchise désarmante et cette honnêteté peinte sur ses traits. Trop réaliste. Beaucoup, beaucoup trop réaliste. J’observe le mouvement de sa chevelure dont je n’avais pas remarqué la couleur auparavant. Je fronce les sourcils. Bleue. Comme ma contrée. Comme l’eau qui y circule. Serait-il l’incarnation d’une de nos divinités, à qui j’aurais donné forme humaine ? Ai-je prié récemment ? Je ne crois pas. Je ne sais même pas quoi répondre à sa question et hausse les épaules.

« A vrai dire je ne sais plus trop… Je pensais rêver mais les émotions… Peut-être une forme de transe… »

Je ne sais plus rien. Tout ce que je sais, c’est qu’en le voyant lever les pieds, je me sens malade. Mes jambes tremblent, mes mains aussi et partout où je pose le regard je ne vois plus que l’immensité du ciel dans lequel nous sommes suspendus. Je ne me sens vraiment pas bien et ces nausées me paraissent bien trop réelles à nouveau.

« Attendez… quoi ?! »

Je me retourne brusquement en réalisant le sens de ses paroles, oubliant toute sensation de vertige. Sauter ?! Je le regarde, bouche bée, avant de relever les yeux – ou de les baisser, vraiment je ne sais plus – vers la ville. Sauter ou tomber ? Si c’était sauter, ça m’irait. Tomber en revanche, pas du tout. La nuance est là et fait toute la différence.

« Vous… Vous êtes sûr de vouloir essayer ? »

A nouveau, le tremblement dans mes jambes. Pourquoi cette peur ? Ce n’est qu’un rêve, un songe, au pire une transe dans laquelle j’aurais été plongé sans le savoir. Il ne peut physiquement rien m’arriver. En théorie. Mais arriverai-je à décoller mes pieds du sol qui n’en est pas un ?

« J’ai… J’ai le vertige. Vraiment. C’est… Si c’est une chute libre qui nous attend… Mais en même temps, rester ici… Vous êtes vraiment sûr de sûr ? »

Je panique.

Codage par Libella sur Graphiorum

Cyr Cavaleri:

Dans la voix de l’inconnu, dans son attitude, une nuance familière d’une façon triste et terrible attire l’attention de l’artiste. Le début d’une réalisation l’arrache à sa liste d’expériences. Il relève les yeux, alerté.

Face à lui, le rêveur ressemble à un reflet – cheveux longs, pâleur catastrophée, l’espoir d’une transe à même les mots… plus âgé que lui ne le sera jamais, aussi : les Caduties ne vivent pas vieux, et ceux avec les sales habitudes de Cyr encore moins.
Et la peur au bord des lèvres.
Il se demande s’il a cette expression, quand la claustrophobie l’entrave et l’envahit et le réduit à rien qu’un cri.

Le bleu ouvre la bouche. La referme avant de demander trop sincèrement à cet Icare involontaire s’il est sûr de vouloir rester à l’apogée de son vertige. Ce serait cruel. L’empathie transforme sa tentative de sourire rassurant en quelque chose de plus hésitant.

"Je ne sais pas si je suis sûr, mais je suis curieux. Il parait que c’est un vilain défaut mais pas un péché. Et ce n’est qu’un rêve – un bad trip, une transe comme vous l’avez appelée."

Il lui tend une main à la peau trop pâle percluse de tâches de peinture et de restes de fusain, d’équations qui se brouillent dès qu’il pose les yeux dessus. Le bleu de bavures d’aquarelle se mêle à celui de ses veines.

Prenez ma main, fermez les yeux. Je me charge de…"

Ne dis pas « sauter ». Ne dis pas…

"Planer."

C’est à peine mieux. Un bref éclat d’embarras accompagne le double sens, qu’il échoue à chasser et se résout à embrasser :

"Il parait que je suis doué pour ça."

Lorsqu’il secoue la tête, sa crinière bleue danse comme les flammes qu’il aurait voulu avoir en pouvoir et l’auréole, le découpe contre les cieux sombres.

Codage par Libella sur Graphiorum

Onirisme

Curieux. Moi aussi je suis curieux. Pour mon plus grand malheur. Mais jusqu’à présent, ma curiosité m’a plus souvent apporté d’ennuis que de bienfaits, aussi je ne suis pas pressé de savoir si l’inconnu nappé de bleu aura plus de chance que moi. Je réponds à son sourire par une grimace tremblante. Et lorsqu’il me tend sa main… Je prends une longue et lente inspiration, résistant à l’envie de hurler qui me tiraille. Un rêve. Ce n’est qu’un rêve. Rien d’autre qu’un rêve. Rien n’arrivera à mon enveloppe charnelle et je doute qu’il arrive quoique ce soit à ma psyché à part un réveil brusque en sursaut. Oui, c’est ça. Rien de rien. Juste un mauvais rêve. Peut-être de la sueur collant ma chemise à ma peau et rien d’autre. Seulement mon lit, ma chambre, mes parchemins et moi.

Alors je la prends, sa main. Je la prends, malgré les tremblements qui ne cessent pas. J’observe les mèches bleues volant autour de nous, comme hypnotisé, avant de hocher lentement la tête.

« D’accord… euh… Planons. »

Je n’ai pas la moindre idée de ce que cela veut dire et honnêtement, je ne veux pas le savoir. Je fléchis légèrement les jambes mais surtout, je ferme les yeux avec force, sans me rendre compte que dans le même geste, je commence à broyer la main de mon compagnon d’infortune.
Je ne dis plus rien, je ne sens rien. Mes pieds n’étaient pas posés au sol alors je ne ressens pas la sensation de mes semelles quittant la terre ferme. Je ne ressens à vrai dire rien du tout. Ni la morsure du vent, ni la sensation d’une chute sans fin.

« Hum… Est-ce que… Est-ce qu’on plane ? Ca y est ? »

Je m’étais retenu d’extrême justesse de demander si nous nous rapprochions de la mort. Un rêve, Gabriel. Un rêve. Je ne sentis rien d’autre qu’une étrange sensation sur ma main. C’était humide. Mais aussi chaud. On aurait dit de la pluie. Mais elle n’était pas froide. Il était hors de question que j’ouvre les yeux pour vérifier.

Réveillez-moi.

Codage par Libella sur Graphiorum

Cyr Cavaleri:

La main de l’inconnu tremble dans la sienne – serre fort. La sensation est étrange. Un peu trop réelle, un peu trop inhabituelle pour lui qui tient les gens à distance.

Cyr inspire. Saute.

Tout est un rêve ; rien n’a d’importance.
La sensation de flotter s’accroche à eux en une apesanteur étrange. Le monde alentour se tord et se déforme, comme s’il refusait de plier aux lois de la logique qui exige qu’il se rapproche ou s’éloigne. À la place, toute sa perspective se redessine et donne à l’artiste le vertige.
La ville explose en nuée de lucioles et de feux follets silencieux.
La pluie de lumière ruisselle à même leurs peaux, chaude et impossiblement humide, pétillante lorsque le Cadutie porte un doigt maculé de brillance à sa bouche.

"On plane en douceur" rassure-t-il.

L’averse lumineuse devient orage autour d’eux : des vents comme des néons liquides tourbillonnent à pleine vitesse et leurs chevelures dansent à contre-sens de ces courants.

Flash blanc.

Des rémanences colorées gravées au fond des pupilles, l’artiste vacille quand ses pieds retrouvent quelque chose de solide. La main de son compagnon de rêve toujours dans la sienne, il baisse les yeux sur le sol métallique, perclus de fils électriques colorés. À intervalles irréguliers, des creux de verre abritent des lumières – bougies, diodes de toutes les couleurs, vieilles ampoules rondes, flammes ouvertes, bocaux brillants et petits arcs électriques…

"Vous pouvez ouvrir les yeux, on a les pieds sur… sur un sol."

Et si l’endroit est étrange, au moins n’est-il pas vertigineux. Les parfums de cire se mêlent à ceux de l’électricité mal câblée, embaument d’un rien d’ozone et quelque chose d’entêtant qu’il ne saurait pas identifier. Lorsque le bleuté expire, son souffle se condense dans l’air trop frais pour les feux alentours.

Plus loin, une arche se dresse, sous la lampe d’un phare.

Cyr l’ignore pour s’accroupir près d’un cierge, la main de son rêveur au creux de la sienne et, avec la curiosité de ceux que rien n’arrête, passe le doigt sur la flamme – froide.

"Comment ça marche, une transe, chez vous ?"

Codage par Libella sur Graphiorum

Onirisme

Il m’encourage et je me force à ouvrir les yeux. En effet, je l’ai senti, enfin, ce sol que j’attendais tant, cette stabilité qui me fait espérer que la gravité soit à nouveau de retour dans cet étrange espace-temps. J’ouvre un œil, puis l’autre. Et je ne comprends pas ce que je vois.

« Où est la ville… ? »

Elle a disparu. Je sens encore cette pluie chaude – et brillante – venir couler le long de ma nuque et le vent souffler tel une vague. Je tiens toujours la main de mon compagnon et enfin, je vois sur quoi nous avons posé le pied. Je ne comprends pas toujours pas. A nouveau des lueurs, des lumières, tantôt brillantes tantôt affaiblies, rougeoyantes ou d’un blanc laiteux. De longs fils noirs, épais et rigides parcourent la surface et retiennent toutes ces lumières prisonnières. Il s’accroupit, je suis le mouvement, ma main toujours dans la sienne comme s’il ne fallait surtout pas que nous nous lâchions. Il observe un cierge, je vois l’arche au loin, ou plutôt l’énorme structure dont une lumière aveuglante s’échappe. Je ne vois plus rien d’autre. A sa question, je mets du temps à répondre, car je ne sais plus ce que je dois dire.

« A vrai dire… C’est la première fois que j’en vis une… C’est tout bonnement stupéfiant. »

Je murmure et me relève. Il faut que nous passions cette arche. Cette lumière est si belle. Elle qui m’aveuglait, me caresse de sa douceur.

« Vous l’entendez ? »

Je l’ai entendu m’appeler. J’ai entendu mon nom, murmuré dans un soupir, une caresse sur mon âme et je ne peux y résister plus longtemps.

« Elle nous appelle… »

Je dis « nous » car il ne peut pas ne pas l’entendre. C’est impossible. Le murmure s’est transformé en plainte déchirante, une supplique à la mélodie dont l’écho retentit dans chaque part de mon être. Et les larmes me viennent, sans que je n’en comprenne la raison.

Codage par Libella sur Graphiorum

Cyr Cavaleri:

"Oh, elle est plus ou moins partie pas en fumée mais en pluie."

Il repasse la main dans la flamme et le froid le brûle, la ressort dans la fraîcheur ambiante – et recommence. Froid. Frais. Froid. Frais. La curiosité déplacée le pousse vers le bougeoir d’à côté. Une impossible humidité pétille sur ses doigts.

Le mouvement de son compagnon l’entraîne et le relève – lui fait tendre l’oreille. Depuis l’arche, quelque chose chante et tente et appelle. La symphonie est comme un mot qu’il aurait sur le bout de la langue, familière alors même qu’elle se dérobe.
Qui lui donne envie de céder.
Qui lui donne envie de rester.

Il sait reconnaître une fin quand il la voit – il regarde la sienne dans les yeux depuis trop longtemps pour ne pas savoir.

Il n’en suit pas moins cet inconnu trop réel dans un monde trop rêvé, ralentit devant le portique où la lumière ne l’aveugle pas tout à fait assez. Au travers, flou comme un mirage, des bribes familières affleurent – la blancheur d’une aile d’ange et le parfum de l’opium, ses tableaux au musée et le rire des soirées de gens bien élevés…

"Qu’est-ce que vous voyez, vous ? Personnellement, je vois chez moi."

Et aucun « chez moi » ne devrait porter les intonations désabusées qu’il y met mais elles hantent la façon dont il freine alors même que la musique enlace son âme et l’élance.

"Alors si vous voyez aussi votre monde… je crois que c’est un au-revoir. Et si jamais ça l’est…"

Il resserre brièvement les doigts sur cette main qu’il n’a pas lâchée. C’est un songe, sans logique, alors il peut oser tout faire à l’envers. Un sourire hésitant d’honnêteté éclaire ses iris gris où les lumières se reflètent en un milieu d’étoiles artificielles.

"Je suis Cyr. Enchanté d’avoir voyagé avec vous."

Codage par Libella sur Graphiorum

Onirisme

« Je crois… Oui je crois que je vois chez moi aussi. »

Nous nous sommes avancés. Près de l’arche, nous avons regardé au travers. Je peux voir la mer scintillante, l’océan de ma belle capitale, son Académie. Un bateau aussi, je crois. Celui de Toran il me semble, mon cher ami. Oui, à travers cette arche, je peux voir Aap, Seele. Ma maison.

Quel étrange rêve…

J’entends la note désabusée dans sa voix et je me retourne de moitié, voulant prononcer des mots que je garde secrets. Cette musique est si belle, si douce. Sa mélodie me transporte et m’appelle et je résiste. Car je sais ce que cela signifie. Nous le savons tous deux. Nos mains ne se lâchent pas. Je prends alors pour la première fois réellement conscience du contact de sa peau contre la mienne. Elle est tiède, vivante.

Quel drôle de rêve…

Il prononce les mots le premier et je ne peux que hocher la tête. Oui, nous devons nous dire au revoir, car cette arche signe la fin. La fin du rêve, la fin du voyage. Ou peut-être le commencement. Le début du réveil, le commencement de la journée. Pourquoi est-ce que je me sens nostalgique ? Presque triste ? Je ne regarde pas en arrière, je ne cherche pas à retrouver la ville ou les cieux où nous étions suspendus, ni toutes ces lumières étincelantes. Il presse doucement mes doigts dans sa main et je me retourne complètement vers lui, observant les nuances de bleu couvrant sa peau et sa chevelure, son regarde gris alerte et brillant et son sourire presque timide. Et à mon tour, je lui souris enfin. Un vrai sourire, sans tremblement, sans peur, sans questionnement.

« Et moi je suis Gabriel. Merci d’avoir voyagé à mes côtés. »

Merci à toi rêveur. Même si je m’éveille, je me souviendrais de ce songe. Car finalement…

Quel beau rêve…

Codage par Libella sur Graphiorum