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Chroniques d'Irydaë
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 La Genèse de Daënastre

Bolgokh
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La Genèse de Daënastre EmptyJeu 9 Fév - 23:18
Irys : 929949
Profession : Créateur de monde à temps partiel
Administrateur
Ce qui suit est un récit écrit par plusieurs écrivains tout au long de la jeune histoire des Daënars. Ce sont des mythes et des légendes sur la fondation de leur civilisation et comment est-elle arrivée jusque sur le continent où ils se trouvent actuellement. Ces textes ne sont pas le véritable récit. Ils ne sont ni exhaustifs, ni réalistes. Ils sont simplement là pour visualiser clairement la mentalité des Daënars par rapport à leurs homologues mages, ainsi que les bases les plus fondamentales de leur société. Il est important de ne pas prendre les événements racontés ici comme argent comptant !

Chapitre I : la prise de conscience

[justify]Une sombre nuit d’orage éclatait dans le ciel de My’Tra, la Terre des Hommes. Tout le monde s’abritait alors dans sa tente, n’imaginant pas quel présage cette tempête pouvait annoncer. Et pourtant, pourtant un enfant naquit de ce tonnerre monstrueux, et de ces bourrasques puissantes. Un enfant qui était prédestiné à sauver son espèce de la tyrannie des Dieux. Un enfant aux yeux d’océan et aux lèvres roses comme la pulpe d’un bel agrume. Des lèvres faites pour l’amour, l’amour de ses amis et de son peuple. C’est ce qu’il était chargé, par l’orage, de transmettre aux hommes. Pour l’instant, seulement, il n’était encore que le petit Alexandre Ünen, fils de Joseph Ünen, un simple artisan. Tout serait allé pour le mieux, dans la vie de ce petit garçon, si le malheur n’avait pas décidé de s’en prendre à toute sa famille. Son petit frère, d’abord, fut emporté par le courant magistral d’une rivière en crue. On ne retrouva pas son corps, on ne le chercha pas, d’ailleurs. Car les hommes de cette époque étaient tous frappés de la même malédiction : Ils étaient privés de toute mémoire des personnes qui étaient passées de vie à trépas. Le fils oublie son père, la femme omet qu’elle est veuve. C’était comme cela depuis la nuit des temps, et plus aucun homme ne s’était posé la question de ce maléfice depuis bien longtemps. Les Dieux leur avaient répondus qu’il en était ainsi. Et ainsi il en a donc été. Du moins, jusqu’à ce que le Fils du Tonnerre n'en décide autrement.

La vie humaine n’a, malheureusement, pas grande valeur aux yeux du Destin, qui aime à en faucher par dizaines comme des épis de blé. C’est donc ainsi que Alexandre Ünen, alors jeune adolescent plein de vigueur, vit s’en aller père et mère, au même moment, sans jamais avoir offensé quelque dieu que ce soit. Il priait jour et nuit les Architectes, implorant la clémence pour les siens et les autres membres de sa tribu. Et pourtant, cela ne suffisait pas. Les âmes humaines étaient des collations de choix pour les dieux, qui ne s'embêtaient pas à écouter les complaintes de ces dernières lorsqu'elles se brisaient sous leurs crocs. Quel chasseur est sensible aux cris du lapin lorsqu'il décide de le dépecer ? Mais le Destin avait visiblement décidé que cette chasse devait cesser. Il avait levé, dans le cœur brûlant de ce nomade sans histoire, l’oriflamme de la vengeance et de la passion. La famille du jeune homme était très respectée, de leur vivant, par les autres hommes et cela Alexandre s’en souvenait parfaitement. Néanmoins, conformément aux lois divines, tout le monde oublia ces personnages si aimables et généreux sitôt qu’ils s'éteignirent. Une flamme éteinte n'existe plus, et plus aucune trace d'elle ne subsiste. L’incompréhension d’Alexandre était totale. Pourtant c’était là un événement commun, il avait déjà croisé des gens qui, sous couvert d’une amnésie avilissante, oubliaient ennemis et bienfaiteurs. Les anciennes querelles ne trouvaient, tout d’un coup, plus aucun sens, ni les sempiternelles amitiés. Mais pourquoi ? A cause de quoi ?  

L’Augure songea à cela, de longues années, sans ne s’occuper de rien d’autre. Il inquiétait de plus en plus ses camarades, qui s’enquéraient souvent de son état. Ce dernier leur expliquait alors les questions qui le tourmentaient tant. Il réfléchissait sur les Architectes: leurs valeurs, leurs pouvoirs, leur cruauté toujours plus évidente à ses yeux. Étrangement, il s’attendait à un rejet complet de la part des autres hommes, étant tous d’une piété incontestable, mais ils savaient aussi réfléchir. Ensemble, ils discutèrent longuement, peignant un portrait de plus en plus nuancé de ceux qu’ils accusaient de leur voler souvenirs, passé et, par conséquent, identité. Ce groupe, contre toute attente, s’agrandit de semaine en semaine. Le charisme du jeune Alexandre, ainsi que la conviction qui animait chacun de ses mots, envoûtait les plus honnêtes hommes et les poussait à se poser les vraies questions. Et cette procession, qui désormais dépassait la centaine de membres, décida un jour de passer à l’action. On débarrassa une large clairière sur une colline, l’entourant de bougies et d’encens, psalmodiant nuit et jour des prières d’invocation pour que, enfin, les dieux viennent en personne répondre à leurs questions. Ils attendirent un an, ainsi. Une année de patience, de rites, de privations et de chagrins.

A la place d’une immense révélation, d’une confession au coin d’une oreille attentive, ou même d’un simple murmure à travers le vent, les disciples d’Alexandre n’entendirent que du silence. Mais un silence lourd, lourd de tension et d’attente, car du haut de la colline sur laquelle ils étaient ainsi perchés depuis plus d'une année, l’Augure et ses compagnons pouvaient soudain apercevoir une vaste enveloppe de poussière. Un véritable nuage, flottant à la surface du sol, encerclant les hommes. Les plus optimistes élèves virent là la consécration de leurs immenses sacrifices, et malheureusement ils ne se trompaient pas. Alexandre, étant le plus avisé de tous, compris tout de suite qui venait ainsi à leur encontre : les Elus, et leurs Légions Arcaniques. Des centaines de mages, formidablement puissants et cruels, qui sillonnaient le continent à la recherche de ceux qui avaient été condamnés par les Architectes, via les Elus, pour leur impiété et parce qu’ils risquaient d’amener le courroux divin sur tous les hommes qui peuplaient Irydaë. L’Augure était sage, sage et prudent, il hurla donc une immense harangue à ses fidèles. La fuite était l’unique solution ! Il fallait courir, courir le plus loin possible ! Ils devaient échapper à la colère des Architectes ! Ils se devaient de propager cette catastrophe, cette révélation qu’ils attendaient depuis si longtemps : "Les dieux sont mauvais !"  

La puissance abominable des Légions Arcaniques était toute dévouée à pourchasser ceux qu’ils considéraient comme des infidèles. Des langues de feu gigantesques léchaient les campements des disciples d’Alexandre, qu’ils avaient quittés aussi prestement qu’ils le purent. Jamais personne n’avait survécu à une attaque de ces monstrueuses armées. Ils étaient innombrables, noircissant la plaine de leur rage macabre. Les maisons de ceux que l’on appelait désormais les Impurs furent rasées, carbonisées, puis enfouies sous la terre meuble et la roche par une puissante magie. Plus loin, bien plus loin, l’Augure et ses compagnons ne pouvaient qu’imaginer ce qui était en train d’arriver à leur village. Ils ne pouvaient que pleurer la perte de leurs biens. Ils ne pouvaient même plus prier, car la prière apportait le malheur. Les Dieux les avaient abandonnés, ils avaient envoyés contre eux leurs immondes prophètes et les fanatiques qui les servaient. Plus jamais ils ne pourraient fouler leur terre natale en hommes libres. Alexandre ne pouvait supporter cette vision d’horreur. A sa demande, deux solides garçons l’élevèrent au-dessus de la foule. Il voulait que tout le monde l’entende, que tout le monde écoute cette sagesse innée qui illuminait les paroles du jeune homme.

Alexandre a écrit:
Mes frères, mes sœurs… Aujourd’hui, nous avons pu constater une chose : Les Architectes ne veulent pas notre salut !  Les Architectes veulent notre servitude ! Pour eux, nous ne sommes que des fourmis qui n’existent que parce qu’ils nous tolèrent ! Est-ce que c’est cette vie que vous voulez donner à vos enfants ? Soyez sincères. Ne vous résignez pas à la mort ! Au fond de vous brille encore une petite flamme, celle de l’espoir, celle de la colère ! Vous êtes en colère contre les Dieux, contre ces hommes ! Et je le comprends mieux que quiconque !! Alors nous n’allons pas nous laisser faire. Nous allons nous répandre, nous propager, comme un feu purificateur, et brûler cette ignorance, cette servitude dans tout le pays ! Je veux que chacun d’entre vous parte au-delà de ces collines brûlées par ces monstres qui se disent élus des dieux ! Allez à la rencontre des autres tribus, rapportez leur ce que l’on a vu aujourd’hui, ce que les Architectes nous ont répondus après UN AN de prières !! Nous devons rassembler les peuples, nous unir contre la soumission !! Nous ne sommes pas des hérétiques prisonniers d’un scepticisme païen ! Nous sommes les véritables hommes libres de ce monde ! Et c’est ainsi, mes frères et mes sœurs, que nous nous nommerons dès à présent !!

Alexandre était d’une clairvoyance remarquable. Qui aurait pu penser que ces gens, au-delà du désespoir, cachaient en vérité la plus sourde des colères ? Qui, après avoir subie un châtiment aussi lourd, se permettrait d’en faire le reproche aux dieux ? Et pourtant c’est ce qu’il se passa. Le discours de l’Augure avait été si grand, si éloquent, si juste que personne dans l’assistance, pourtant nombreuse, ne le contesta sur aucun point. Tous se levèrent, s’extirpèrent de l’abattement dans lequel ils avaient enfermés leurs esprits. Ils se levèrent comme une seule entité, belle et puissante, qui hurla au ciel un nom qui était destiné à être entendu même par les Architectes : Alexandre l’Augure. Il avait redonné force et courage aux hommes, aux femmes et aux enfants accablés de chagrin. Il leur avait promis un avenir radieux, plus encore que les demeures des dieux. Et tout cela, les gens l’avaient cru. Ils l’avaient cru car, au fond d’eux-mêmes, ils pensaient mériter cette vengeance qu’Alexandre leur offrait. Ce qu’il avait dit fut fait. En quelques jours, des centaines, des milliers de gens propageaient le récit de cette triste journée, celle que les disciples de l’Augure finirent par nommer le Jour de la Terre Brûlée.




Chapitre II : Plus grande est l’ascension, plus rude sera la chute

De nombreuses lunes s’écoulèrent, et toutes purent admirer avec émoi l’expansion douloureuse, mais inévitable, de la parole d’Alexandre à travers tout le continent. Douloureuse, car l’ennemi était partout, et puissant. Il était sur son territoire, maître complet de ce qu’il s’y passait, mais malgré tout l’Augure voyait le nombre de ses fidèles grandir de plus en plus. Il continuait, avec une grande ténacité, à convertir lui aussi les tribus voisines, sans jamais oublier que, partout ailleurs, d’autres gens risquaient leurs vies pour simplement écouter ses premiers compagnons. Les Elus, face à autant de débordements, n’hésitèrent pas à harceler les pauvres plébéiens qu’ils soupçonnaient d’avoir reniés les Architectes. Ceux-ci étaient bien souvent capturés et exécutés dans la plus grande souffrance. Et pourtant, ces sacrifices étaient nécessaires à la libération de tous les hommes.

Plus grand était le nombre de gens qui rejoignaient les rangs d’Alexandre à la fin de chaque jour, et au fur et à mesure de cet accroissement magnifique, ce que l’Augure avait prédit se réalisait. Plus le mouvement était puissant, plus les fidèles voyaient revenir en eux les souvenirs de leurs êtres chers. Père, mère, amis et concubines, tous reparaissaient sous leurs yeux humides de larmes émouvantes. Cette prophétie réalisée ne faisait que renforcer la conviction des disciples qu’ils ne suivaient pas une voie désespérée. Malgré les poursuites, les tortures, les massacres, de nombreuses tribus ralliaient entièrement la véritable cause. Alexandre, lui, n’avait plus aucun retour sur cette surprenante expansion depuis longtemps, car le misérable et vertueux fils d'artisan était, bien malheureusement, enfermé dans une geôle sombre et souterraine, loin, très loin au nord du continent des hommes.

Son corps brûlait d’une incommensurable, et démoniaque, douleur. Les pires supplices lui furent infligés, sous le regard satisfait de quelques sombres silhouettes. Le but de ce traitement était, d’abord, de lui faire payer chaque mot qu’il avait inscrit dans le cœur de ses frères. Pour son malheur, l’un d’eux, submergé d’effroi, l’avait dénoncé aux ennemis en échange d’une amnistie que ses « bienfaiteurs » ne lui accordèrent guère. Du fond de sa prison, l’Augure pouvait voir son enveloppe carbonisée, gisant contre un mur comme un daim dévoré. La chaleur qui se dégageait de lui piquait assidûment les yeux du jeune homme, ou bien était-ce la culpabilité. De toute façon, il ne pouvait stopper le flot de larmes salées qui s’écoulait le long de ses joues noircies et venaient revigorer la plus petite cicatrice, lui infligeant toujours plus de tourments. C’était peut-être son cœur las, son âme brisée, son cerveau souffrant, mais cette nuit-là, presque six mois après qu’il eut prononcé sa célèbre tirade, Alexandre Ünen s’éteignit, rongé de peine, sans jamais avoir su à quel point ce qu’il avait dit ce jour-là avait impacté l’histoire des hommes et du monde.

Il est évident que la mort du vénérable Augure, père de tous les Hommes Libres, raisonna à travers tout le continent comme une sinistre explosion. Les Elus saisirent chaque occasion de faire savoir à leurs ennemis que celui qui les avait entraînés là-dedans était désormais mort, et qu’ils ne pourraient plus jamais le revoir, ni même enterrer son corps. Eux ne se souvenaient déjà plus clairement de qui était Alexandre, mais ses compagnons clairvoyants ne purent que subir l’immense peine du deuil qu’ils avaient si chèrement récupéré. Mais il était impossible, pour eux, de faire quoi que ce soit pour venger la mort de leur Augure, car les enseignements qu’il prodiguait de son vivant avaient un effet dévastateur sur leurs pouvoirs magiques. Quiconque récupérait la mémoire perdait les facultés innées que son peuple possédait depuis des millénaires. C’était une perte qu’ils acceptaient sans difficultés, mais aujourd’hui elle pouvait se révéler fatale. Les Peuples Libres étaient désarmés, esseulés, dispersés, et désespérés.

Peu à peu, et malgré la croissance toujours constante de leur nombre, les disciples d’Alexandre, désormais privés de chef, commençaient à faire des erreurs. De plus en plus, des groupes d’insurgés se faisaient dénoncer ou capturés à cause d’une trop grande imprudence. La peste de la corruption commençait à gagner le rang des fidèles qui, conscients de leurs faibles chances de survies, monnayaient l’identité de leurs compagnons avec les ennemis. Les Peuples Libres, dans tout le continent, commençaient à reculer, à devenir plus discrets, et finalement à cesser leur conversion des Peuples Soumis. Personne ne savait ce qu’il fallait faire désormais, mais beaucoup étaient résignés à mourir, privés de pouvoirs. Seulement l’Augure était toujours présent, dans leur cœur, grâce à sa révolte face à l’hégémonie divine, et il laissa un message de patience et d’espoir, car sur une île perdue à l’est du continent, une femme lavait du linge dans une bassine de bois. Et parce que cette femme ne lavait pas son propre linge, mais celui de son fils Marc, déjà grand, il existait un espoir de sauver le destin des disciples d’Alexandre Ünen.




Chapitre III : L' enfant inconnu

La femme qui s’afférait si hardiment à sa tâche se nommait Almeda Shine. A trente-six ans révolus, vivant recluse sur une petite île près des côtes, elle avait depuis longtemps abandonnée tout espoir de se marier un jour. Elle péchait pour se nourrir, et n’avait à peine que quelques contacts avec des tribus proches qui marchandaient ses biens. Mais elle n’était pas seule, sur son petit morceau de vie, elle avait un fils, Marc, né d’une union sans lendemain il y a plus de vingt ans de cela. L’homme qui lui avait donné cet enfant lui fut arraché par la main sévère de ses parents. Il fut interdit à Almeda et son amant de se revoir, car l’homme était un prêtre, ayant l'obligation de chasteté et de résistance à l’égard de toute tentation. Mais ce soir-là, la beauté de la jeune femme avait été si envoûtante, elle était si douce avec cet homme frappé par le malheur, qu'aucun des deux n'eut d'hésitation avant de se donner à l'autre. La chose fut découverte, et l’on sépara à tout jamais Almeda d'Alexandre, ce jeune homme âgé de seulement vingt ans, fils d'artisan.

Mais, même avec toutes les corrections du monde, les parents de la demoiselle ne pouvaient revenir en arrière, elle attendait un enfant, son enfant à lui. Pour éviter le déshonneur sur eux, le père prit la dure décision d’envoyer Almeda très loin d’ici, chez un oncle austère qui vivait en ermite sur île à l’est. Le voyage fut long, douloureux, l’homme était définitivement rigide et morne, mais il s’occupa bien de sa nièce et de son futur enfant. Malheureusement, lorsqu’il disparut quelques années plus tard, la jeune femme se retrouva seule à élever le petit Marc, sans même savoir à qui appartenait la masure dans laquelle elle avait élue domicile. Cette vie lui convenait: malgré la solitude, elle était loin de ses parents qu’elle haïssait désormais plus que tout. Cette vertueuse femme travailla dur, nuit et jour, pour que son fils ait une éducation correcte, un corps entretenu et qu’il puisse se débrouiller seul s’il devait lui arriver malheur. Elle voulait prouver à ses parents, se prouver à elle-même, que sans aucune aide elle parviendrait à faire de ce garçon un homme vertueux et qui, lui, ne l’abandonnerait pas.

Les années s’écoulèrent, et le rêve d’Almeda devint réalité. Marc, ce téméraire jeune homme aux cheveux sombres, avait l’esprit et le corps d’un futur grand guerrier. Très bon marin, il parcourait sur son petit bateau, qu’il avait construit lui-même, les abords de son île natale pour pêcher le poisson. Une vie modeste, mais qui avait forgé ses bras en les pétrissant de puissance et de vigueur. Son âme n’était pas non plus en reste, car non content d’être aussi déterminé que sa mère, il avait hérité de la clairvoyance et de la sagesse d’un père qu’il ne connaissait pas. Son intelligence était telle qu’à seulement six ans il avait déjà dessiné les plans de son futur navire de pêche. Bien sûr, il lui fallait encore attendre pour avoir la force de couper les arbres qui lui permettraient de construire cette embarcation. Il y parvint à seulement douze ans. Almeda ne pouvait être plus fière de sa descendance, elle avait un fils valeureux, vertueux et aimant. Elle l’avait façonnée seule, et elle savait qu’il était prédestiné à devenir un grand homme.

La vie sur l’île ne permettait pas de rencontrer beaucoup de gens, il est donc logique de penser que la parole d’Alexandre Ünen, l’Augure, n’avait aucune chance d’arriver jusqu’à ce coin reculé du monde. Et pourtant, pourtant bien présomptueux est celui qui sous-estime le pouvoir de la foi du Peuple Libre. Un des disciples d’Alexandre, Agrippa, frappa un jour à la porte d’Almeda Shine et de son fils. Il avait été guidé ici, non seulement par les conseils avisés d’une tribu voisine, mais aussi par une sorte d’instinct, de pressentiment spirituel. Ces deux personnes, même si loin de tout, devaient elles aussi avoir le droit de savoir. La pêcheuse fut particulièrement accueillante avec ce téméraire cavalier. Elle l’écouta longtemps, des semaines durant, en fit même l’amant qu’elle n’avait jamais retrouvé, et intégra complètement les enseignements de celui qu’elle ne connaissait que sous l’énigmatique nom d’Augure. Selon le disciple de cet étrange personnage, les Architectes n’avaient rien de bienfaisant, les Elus non plus. Le monde dans lequel ils vivaient n’était que cruauté, servitude et ignorance. Il fallait s’en affranchir et se soulever.

Finalement, Agrippa quitta cette vie monotone qu’il partageait avec Almeda. Elle ne le retint pas, Marc non plus. Ils savaient qu’on l’appelait à un plus grand destin que de finir ses jours sur un pauvre îlot à pécher. La quadragénaire avait pour lui une immense gratitude, car il lui avait offert le plus beau des présents. Grâce à lui, elle pouvait maintenant se rappeler de son oncle disparu, de ce qu’il avait fait pour elle et Marc, et elle put se souvenir de la mort de ses parents dont elle n’avait eu aucun retour jusqu’alors. Grâce à lui, plus aucune rancœur ne l’habitait, son cœur était redevenu pur et chaleureux. Et finalement, grâce à lui, elle avait de nouveau un objectif dans la vie. Elle écrirait la vie de sa famille, elle la graverait sur le papier pour qu’elle ne se perde pas une fois sa lignée éteinte. Elle s’y attellerait avec sa détermination coutumière, elle le savait, et Marc n’en était que plus fier de sa mère.

Ce bonheur total ne dura cependant qu’une semaine. Car quelques jours plus tard, alors qu’Agrippa n’était même pas encore revenu parmi les siens, l’âme de l’Augure, Alexandre, avait quitté ce monde. C’est alors qu’Almeda Shine redécouvrit dans son cœur un lien puissant qui l’unissait depuis toujours à cet homme, car à l’instant où celui-ci trépassa, elle sentit une profonde tristesse l’envahir de toute part. Elle voyait le jeune homme, dans sa geôle morbide, suspendu à des chaînes de métal, inerte. Elle voyait alors l’unique nuit qu’elle avait passé avec lui, leur séparation tumultueuse, la naissance de Marc. Mais elle voyait aussi le fils d’artisan parlant à ses compagnons, leur disant exactement les mêmes mots qu’Almeda avait entendus de la bouche de son amant et confident. Et elle comprit. Elle comprit que l’Augure, qu’elle respectait tant, était le père de son enfant.




Chapitre IV : Un seul destin, une seule mission

Après cette affreuse révélation, la vénérable femme tomba gravement malade. Un mal si dangereux et pernicieux qu’il était impossible pour son enfant, Marc, de la soigner par quelque remède que ce soit. Il restait donc assit, au chevet de sa mère, sans pouvoir modifier, ne serait-ce qu’un peu, le cours des événements. Il était impuissant, démuni devant ce malheureux coup du sort. Pour la première fois de sa jeune existence, il ne savait pas quoi faire. De surcroît, Almeda refusait de lui parler de ce qu’elle avait découvert, restant plongée dans un sombre silence, enfermant en elle le secret de la naissance de son fils. Elle savait que si le jeune homme en savait plus sur son père, s’il savait qui se cachait derrière l’Augure, il entrerait dans une rage folle, une rage qui ne pourrait s’apaiser que par une sanglante vengeance. Ce tempérament courroucé, nul ne savait vraiment de qui il le tenait, mais d’aucun pensait que c’était là un héritage d’Alexandre, son père, que ses proches surnommaient Fils du Tonnerre.

Cette situation aurait pu se poursuivre longtemps, malheureusement le mal qui affectait Almeda Shine était aussi fulgurant qu’il était invisible. Comme un diabolique poison, s’infiltrant dans chaque veine pour en corrompre le sang. La veuve savait son heure proche, de plus en plus proche. Elle pouvait entrapercevoir la mort derrière chaque porte fermée, derrière chaque objet caché, elle l’enserrait toujours plus, plus insistante de jour en jour. Il fallait prendre une décision définitive sur l’avenir de son enfant, c’était bien là la besogne des parents. Il n’était plus temps de réfléchir, malheureusement. Lors d’une nuit nimbée d’une silencieuse brume, la mère mourante fit alors la plus douloureuse des confessions au jeune Marc. Voici ce qu’elle lui murmura, du fond de sa souffrance.

Almeda a écrit:
Mon fils… Mon enfant… tu ne sais pas combien je suis fier de toi en cet instant… Alors que le destin me murmure que ma vie touche à sa fin, la tienne sera lumineuse encore longtemps. Je dois t’avouer quelque chose, mon fils, je dois aujourd’hui te parler de ton père. Il s’appelle… Alexandre Ünen. Il vivait dans la même tribu que moi. Depuis que je vis ici, je n’ai plus eu aucune nouvelle de lui. Mais j’ai récemment apprit sa mort, et ce qu’il avait fait jusqu’alors. Marc… ton père est celui qu’Agrippa appelait Augure. C’est lui qui a poussé les gens à se soulever face aux Architectes et aux Elus… C’est lui qui a lancé cet incroyable mouvement à travers tout le continent. Je suis fier de toi, mon fils, car tu es l’enfant d’un homme incroyable… Je sais que tu auras envie de le venger maintenant, et je ne te retiendrai pas, mais je t’en prie, Marc… reste en vie. Poursuit l’œuvre de ton défunt père, sans qui je n’aurai jamais pu apprendre la mort de mes propres parents… C’est quelque chose dont tout le monde doit jouir, il ne faut pas laisser des gens comme les Elus gouverner les peuples… Va mon fils, retrouve Agrippa, parle lui de ton père… Tu dois finir ce qu’il a commencé. Je t’aime, mon enfant, et je sais depuis toujours que ton futur sera glorieux.

Alors, dans un dernier souffle d’amour pur adressé à son fils, Almeda Shine s’éteignit dans ses bras. Elle était pleinement heureuse de ce qu’elle avait accompli, et se réjouissait au fond d’elle de retrouver enfin l’homme qu’elle n’avait en fait jamais cessé d’aimer. Marc, quant à lui, pleura silencieusement sa mère durant trois jours, trois jours durant lesquels il médita sur les derniers mots de la défunte. Il venait d’apprendre qui était son père, il venait de découvrir la gloire qui baignait sa naissance et qui, probablement, poursuivrait sa descendance. Mais voulait-il vraiment marcher sur ses traces ? Sa mère avait raison, un sourd appel à la vengeance raisonnait dans son abdomen, mais tout cela semblait le dépasser. Il était seul, vraiment seul pour la première fois de sa vie. Une unique question, si brève mais si puissante… il ne cessait de se la répéter. Que faire ? Que faire ? Que faire ? Lorsque l’on donne aux hommes trop de libertés subites, ils ne savent pas en profiter d’une vertueuse manière. Marc avait peur d’ainsi tomber dans la violence, la tristesse et finalement la perdition.

Mais une voix céleste sembla entendre son désespoir. Celle-ci se présenta devant lui, sous les traits d’Alexandre Ünen. Le jeune homme ne l’avait jamais vu, et pourtant il était certain de son identité, comme si instinctivement, dans son cœur, raisonnait depuis toujours la voix mâle de celui qui lui avait légué ce destin fabuleux. L’apparition était flottante, vaporeuse, brillante, un brouillard doré et bienfaisant. C’était étrange, tout en étant infiniment familier. Rien au monde ne pouvait préparer à cela, à voir le fantôme de son défunt père. Celui-ci lui murmura, d’une voix chaleureuse et douce, des paroles de réconfort.

Alexandre a écrit:
Mon fils, je n’ai jamais eu la chance de t’avoir connu. De toute ma vie, j’ai toujours eu le sentiment d’être seul, sauf lorsque ta mère était avec moi. Maintenant, elle est à mes côtés, Marc, et elle est heureuse et fier de son enfant. Seulement elle se doutait que tu serais submergé par le doute, voilà pourquoi je suis ici. Marc… j’ai été trop imprudent, trop naïf, les Elus ne cherchent aucun compromis, ce qu’ils veulent c’est la destruction pure et simple de ceux qui ont eu le malheur d’écouter mon message et de se délivrer de leurs chaînes. Dans peu de temps, ils enverront leurs guerriers les plus cruels et puissants pour exterminer chaque personne qu’ils pensent liée à nôtre mouvement. Tu dois les sauver mon fils, on ne peut rien contre leur démoniaques pouvoirs… Il faut que tu unifies les Peuples Libres, Marc, pour pouvoir partir de cet horrible endroit et trouver la Terre Promise. Elle se trouve loin, loin au-delà de l’océan, à l’est. Pour la rejoindre, vous devez partir par le sud, là vous traverserez tout un royaume de malheurs et d’épreuves, mais au bout de la route vous pourrez goûter au fruit de votre victoire. Va, mon enfant, tu es promis à devenir l’homme le plus important de ce monde. Le seul homme qui osa défier les dieux en personne. J’ai confiance en toi, adieu Marc. Moi et ta mère, nous t’aimons.

La silhouette s’effaça en poussière brune, pour finalement disparaître dans un dernier sourire paternel. Marc ne savait pas s’il devait hurler, l’appeler, pleurer ou rire de sa possible démence. Mais son cœur, son être tout entier ne lui hurlait qu’une seule chose : Il devait suivre cette voie qui semblait toute tracée devant ses yeux. Ce fut la dernière chose que sa mère mourante lui demanda, son père ressuscita même quelques instants simplement pour l’inciter à respecter ce dernier souhait. C’était désormais clair, Marc Shine prendrait désormais le nom de Marc Ünen, il prendrait la tête de tous les Peuples Libres de tout le continent et, ensemble, ils partiraient vers un avenir plus radieux dans ce qu’ils nommeraient la Terre Promise. Une brûlante détermination enflamma le cœur de ce vertueux garçon, et il était fermement résolu à respecter la promesse qu’il avait fait à ses parents. Il parcourrait montagnes et océans, déserts et jungles denses, consentirait à tous les sacrifices, mais il serait l’homme qui affranchirait l’âme de tous les disciples d’Alexandre. Ainsi le voulait sa destinée.




Chapitre V : Errance solitaire

Agrippa les avait prévenus : quiconque suit la voie de l’Augure sera dépossédé de tous les pouvoirs naturels qui étaient offerts aux hommes. Pour Marc, ce n’était qu’un détail, il n’en savait que très peu sur la maîtrise de ces fantastiques éléments, et vivait très bien sans. Il n’eut aucun besoin de magie lorsqu’il bâtit son propre navire avec ses habiles mains, il n’en eut pas non plus besoin pour pêcher et se nourrir, sa ruse naturelle était le plus puissant de tous les outils. C’est avec cela qu’il comptait survivre, et s’acquitter de sa tâche dans ce monde. Mais avant cela, le jeune prodige devait dire adieu à sa mère, et quitter pour toujours la seule terre qu’il n’avait jamais connu. Il enterra le corps de la défunte à côté de la tombe de son grand-oncle décédé. La voilà définitivement revenue auprès de ceux qu’elle aimait. Son embarcation prête à appareillé, ses affaires dans les mains, Marc n’avait plus qu’à faire une dernière chose, symbole de sa détermination surhumaine, et de son engagement éternel. Il mit le feu à la petite masure qui l’avait vu naître, à la demeure qui avait servie à la fois de libération, mais aussi de prison à Almeda. A jamais, il se séparait de ce passé d’ignorance, et se préparait à avancer, sans jamais faillir ou reculer.

Fin navigateur, le jeune homme ne mit pas bien longtemps à rallier la terre proche de chez lui. Ce n’était pas la première fois qu’il mettait les pieds sur le continent, mais aujourd’hui un sentiment lourd de nostalgie ralentissait ses pas. Tous les êtres humains marchent à reculons lorsqu’il s’agit de s’éloigner de chez eux. D’autant plus que, aujourd’hui, il savait cette résolution définitive. Le fils caché de l’Augure lança donc un dernier regard sur le petit lambeau de terre, loin à l’horizon, les yeux dissimulés derrière quelques mèches de sa chevelure platinée. Tournant finalement les talons, le dernier espoir des Peuples Libres prit la route, à pieds en direction de l’ouest, il savait où il pouvait trouver l’ami de sa défunte mère, et que dire pour le convaincre de l’aider dans sa quête. Le chemin était déjà tout tracé, il n’avait plus qu’à le suivre.

Devant ses yeux se dressaient une importante mangrove, hostile à tout homme non préparé. Chaleur, humidité et prédateurs reptiliens seraient au rendez-vous. Heureusement, les convois réguliers qui les approvisionnaient depuis ce point avaient tracés une route praticable pour les chariots, surplombée d’immenses racines à ciel ouvert. Elle allait mener Marc Ünen jusqu’à des terres dégagées, plus à l’ouest, entourées de marécages. Là, il n’aurait qu’à trouver la tribu la plus proche de lui, pour leur demander conseil sur comment trouver la tribu de son futur compagnon. Malheureusement, il n’avait aucune idée de ce que les Elus étaient déjà en train de commettre partout dans le pays.

De longues semaines passèrent, et toujours aucune trace de l’homme qu’il cherchait. Alors qu’il faisait escale dans une tribu accueillante, Marc vit avec horreur que l’on avait dressé un immense bûcher, au milieu des tentes blanches. De sinistres hurlements s’échappaient des flammes, et une odeur de viande carbonisée envahissait l’air et faisait fuir les oiseaux chantonnant. Les disciples d’Alexandre étaient désormais tous voués à brûler si découverts. Une inquiétante vérité, qui raisonna dans le cerveau de Marc comme un avertissement. Il devrait chercher Agrippa et les autres compagnons de son père seul et discrètement.

Tandis qu’il observait, les yeux humides de larmes acides, ce macabre spectacle, une main puissante se posa sur sa jeune épaule. Par réflexe, le pêcheur téméraire se préparait à livrer bataille, pour ne pas finir à la même place que ces pauvres martyres attachés là. Mais une voix douce, et familière, le rassura alors. Il s’agissait d’Agrippa, ce nomade à l’abondante barbe brune, qui lui souriait tendrement. La tristesse du jeune homme se mua très vite en un bonheur simple et complet, il venait de retrouver le seul ami qui lui restait encore dans ce monde, après un voyage des plus longs, et des plus dangereux. De nombreuses, et viriles étreintes, furent échangées. Ils parlèrent longuement, tous les deux, à l’abri des oreilles des Elus. Marc raconta, avec une objectivité surprenante, les événements qui succédèrent au départ du cavalier. Il répéta, mot pour mot, les derniers vœux de sa mère et l’apparition d’Alexandre, son père.

Le compagnon du défunt Augure aurait pu ne croire aucune de ces déclarations, n’importe qui, d’ailleurs, les auraient pris pour de délirantes fabulations, mais l'homme avait déjà vu trop de choses, assisté à trop de miracles pour ne pas accorder de crédit au jeune Marc. C’est probablement ce qui sauva l'adolescent, d’ailleurs, car il n’aurait pas pu rester plus longtemps sans protection, au milieu du territoire des Elus. Si ces derniers apprenaient l’héroïque ascendance du garçon, aucun espoir n’était plus envisageable quant à sa survie. Mais en ce jour de grand soleil estival, Marc avait trouvé un ami, peut-être la personne la plus importante, désormais, pour lui. Grâce à Agrippa, il pouvait retrouver la foi en sa destinée, car l’homme, empli de ressource, avait déjà sa petite idée sur comment unifier tous les disciples d’Alexandre le martyre. Le plus grand exode de toute l’Humanité pouvait être sereinement planifié.




Chapitre VI : La naissance de l'espoir

Agrippa Khortoi, jadis cavalier intrépide aux ordres des Elus. Il faisait office de messager à travers tout le continent pour transmettre la parole de ces derniers à tout le peuple. Il était donc bien placé pour savoir quels desseins malveillants ils nourrissaient depuis leur lointain bastion. Par un glorieux miracle, il était présent dans la tribu d’Alexandre lorsque celui-ci exhorta son peuple à se soulever contre la barbarie des mages manipulés. Le cœur pur d’Agrippa le poussa fermement à rejoindre la cause de cet homme, à l’aider dans sa tâche, car il était intimement convaincu que seul le fils d’artisan sous ses yeux avait suffisamment de courage pour réussir la folie qu’il rêvait d’entreprendre.

Depuis ce jour, le cavalier portait la plus lourde des armures, comme symbole de la charge qu’il avait lui-même décidé de supporter. En écoutant le récit de Marc, il n’eut aucun mouvement, aucun geste trahissant sa surprise, car Agrippa n’était pas étonné le moins du monde. En réalité, cela faisait bien longtemps qu’il connaissait la véritable identité du jeune homme. Depuis que l’Augure, lui-même, lui avait fait confession de ce secret. Au fond de son esprit vertueux, il avait reconnu la faible lueur d’un fils. Il avait un héritier, un garçon capable de poursuivre sa tâche s’il venait à périr en chemin. Alexandre en fit donc part à son ami, car lui seul pouvait aider le futur héros dans sa quête.

Et aujourd’hui, il était finalement devant le fait accompli. Sa véritable mission allait pouvoir débuter. Le jeune homme sous ses yeux n’avait aucune idée précise de la tâche faramineuse qu’il avait accepté de mener à bien. Il ne savait pas, non plus, comment se battre, comment défendre son peuple, et par quels moyens le guider hors de ces terres maudites. Agrippa avait, entre les mains, un simple pêcheur, un diamant brut, qu'il fallait tailler, pour en faire un leader. Voilà une besogne digne des plus grands artisans. Rapidement, le guerrier dressa la liste de tout ce qu’il fallait faire, et ils se mirent au travail.

On commença par le plus simple, le maniement de l’épée. Les Peuples Libres avaient un gros handicap, ils ne pouvaient plus compter sur la magie pour vaincre leurs ennemis. Il fallait donc redoubler de talent les armes à la main, afin de compenser ce manque. Le jeune homme était doué, même très doué. Son ardeur innée lui permettait d’ignorer la fatigue, d’ignorer la douleur, mais la vivacité de son esprit égalait celle de ses gestes, et ce n’était pas rare qu’il stoppe le combat au moment les plus critiques. Marc avait la guerre dans le sang, sa lame devenait un véritable prolongement de son bras. Son enfance passée à survivre lui avait forgé des bras de titan, et il se battait avec la plus massive des épées aussi habilement que s’il s’agissait d’une rapière.

L’art du combat était désormais bel et bien maîtrisé. Dans la tribu qui était devenue le quartier général secret des Peuples Libres, Marc était le sujet de toutes les conversations. Aucune bataille n’avait encore été menée, mais c’était comme si un vent de victoire soufflait déjà sur le continent, et enveloppait chaque âme désespérée d’une douce chaleur. Un mois s’était écoulé depuis l’arrivée du jeune homme à la tignasse sombre, et déjà chacun portait en lui le rêve timide d’un départ victorieux du pays. Lors d’importantes réunions, Agrippa et son disciple organisaient la stratégie idéale pour informer les autres chefs de tribus insurgées que l’heure de l’exode était venue. On songea à des messagers à cheval, puis on se rendit compte que c’était une mission suicidaire que personne n’accepterai.

Ce fut lors d’une escapade solitaire qu’Agrippa trouva la réponse à cet épineux problème. Il cavalait au milieu des forêts denses depuis déjà quelques heures, regardant à peine devant lui, il réfléchissait. Comment informer des gens éloignés de plusieurs centaines de kilomètres les uns des autres d’un départ imminent ? Envoyer des oiseaux apprivoisés serait par trop hasardeux, il serait également bien trop facile pour l’ennemi de prendre connaissance du message secret. Il fallait que des hommes se chargent de cette besogne. Le cavalier en armure était tellement plongé dans ses pensées qu’il ne repéra la solution qu’en arrivant à seulement deux mètres d’elle.

Dans une large et herbeuse clairière, un troupeau de fantastiques créatures reposait tranquillement. Des créatures inconnues de tous les hommes, probablement. Un corps musclé de félin, mais par endroit recouvert d’un plumage chatoyant. Une tête de pygargue, d’immenses et puissantes ailes… C’était un cadeau du Destin ! Un véritable présage que la victoire ne pouvait qu’être de leur côté, qu’ils suivaient un chemin juste, et que toutes les forces du monde s’unissaient pour leur aplanir la route ! Avec appréhension, Agrippa s’approcha de l’un des membres du groupe les plus éloignés. Il semblait fier, farouche, mais aussi animé par une force tranquille, qui ne cherche ni l’affrontement ni les périls. L’homme descendit de son cheval, car ce dernier était bien trop effrayé pour garantir un contact serein avec la créature. D'ailleurs l'animal, d’un mouvement brusque, leva son lourd crâne du sol lorsqu'il entendit l’armure du cavalier tinter et carillonner près dans un orchestre métallique.

Un échange mystique s'en suivit alors. La main prudente d’Agrippa approcha le crâne de l’animal, qui ne bougeait pas, fixant son vis-à-vis avec une curiosité mêlée de méfiance. Il était à demi allongé, dans une position rappelant celle des plus grands seigneurs face à leurs fébriles sujets. La créature se laissa approcher et, mieux encore, l’homme en armure parvint à lui caresser légèrement la tête. Mais soudainement, une voix retentit dans son esprit en alerte. Il n’y avait pourtant personne autour, mais on lui parlait. Etait-ce la folie ou bien… l’animal ? Cette étrange animal lui parlait bien, grâce à une mystérieuse magie. Plus surprenant encore, Agrippa pouvait lui répondre naturellement. La noble créature se présenta comme étant un griffon, une antique et puissante espèce qui vivait sur ces terres bien avant les hommes et leurs sombres sorts.

Les capacités de la chimère ne semblaient pas se borner à la simple télépathie, il pouvait également lire dans les pensées de ses interlocuteurs. Il connaissait donc l’identité du cavalier, son passé, et ce qui motivait son existence. Le griffon passa donc un pacte avec Agrippa. Lui et les siens œuvreraient pour aider les Peuples Libres à quitter le continent, mais en échange ces derniers aideraient les créatures à trouver un nouvel endroit où s’établir. Leur espèce était menacée d’extinction par les Elus qui voyaient en eux une source de pouvoir extraordinaire. Agrippa accepta le marché, et repartit victorieux de la clairière sur le dos d’un de ces incroyables animaux, suivit de près par tous les autres membres du groupe. Il rapportait de quoi réussir le plan qu’ils avaient élaboré avec Marc, et rien ne pouvait le rendre plus fier.  

Inutile d’expliquer que, en voyant ces immenses ombres dans le ciel, avec Agrippa à leur tête, les compagnons de ce dernier étaient sur le point d’hurler de terreur. Mais ils comprirent bien vite les motivations de cet immense attroupement, et acclamèrent le Cavalier Céleste avec grande joie. Marc, quant à lui, était abasourdi par les capacités des griffons. L’homme était en armure, épée et bouclier compris, et pourtant sa monture ne bronchait pas d’un poil, là où n’importe quel cheval trépignerait avec mécontentement de porter autant de charge. Agrippa venait de trouver la perle rare, c’était sûr, et il reçut bien des louanges ce jour-là.




Chapitre VII : Le salut, à tout prix

La mise en place du plan fut rapide, et efficace. Les hommes qu’Agrippa choisit pour remplir la périlleuse tâche d’informer tous les Peuples Libres avaient été triés sur le volet. Tous étaient valeureux, tous étaient bons cavaliers, et enfin tous étaient prêts à mourir pour mener à bien leur mission. Le Cavalier Céleste savait que, même sous la plus immonde torture, aucun d’entre eux ne parlerait. C’était un bien triste critère à remplir pour pouvoir rejoindre les rangs des Chevaucheurs de Griffons. Mais avec la création de cette unité de messagers d’élite, bientôt toutes les tribus alliées à Marc et ses Compagnons seraient bientôt informées de leur futur, et il s’annonçait glorieux. Lorsque le fils de l’Augure leva les yeux au ciel pour voir quelques-unes des fantastiques créatures qu’Agrippa avait déniché, il sentit en lui un profond sentiment de fierté. Lorsqu’ils seraient tous ensemble arrivés à la dernière terre avant l’inconnu total ; lorsque lui, simple pêcheur, les guidera à travers les continents et les océans jusqu’à la Terre Promise ; lorsque, finalement, il sera venu le temps, pour lui, de tirer sa révérence et de rejoindre ses parents, il sera devenu grand. Infiniment grand, pour lui-même et pour ses compagnons.

Son maître d’armes le sortit expressément de sa torpeur. L’heure n’était pas encore aux rêves, il fallait déjà s’extirper du cauchemar. Ils partiraient dans quelques heures à peine, pour entamer le plus long périple qu’il était été donné de faire, de mémoire d’homme. Les chevaux étaient sellés, les caravanes montées, le passé écrasé. Un cortège de plus de dix mille âmes se préparait à prendre la route. Celui qui était destiné à les diriger était tout au-devant de cet immense troupeau. Ses cheveux d’ébène flottant au vent comme une bannière, brandissant sa lame haut vers le ciel comme pour défier les divins eux-mêmes en duel ! Aucun doute n’était plus permis, Marc Ünen était bien le digne successeur de son défunt père. Un seul mot de lui et tous se mirent en marche d’un pas léger, chantonnant presque, sachant leur futur doré et bienheureux. Ils plaçaient leur vie, et leur destin, entre les mains de celui qui n’avait pas hésité à les prendre. Le temps de l’ignorance était à présent terminé. Maintenant était venu le temps des hommes, et de la sagesse salutaire.

Cette volonté fut leur lanterne durant de longues semaines. Ils avaient entamés une bien périlleuse aventure, le danger pouvant surgir à tout instant pour les prendre au cou et faire taire leurs protestations séance tenante. Y avait-il sur Irydaë une plus grande motivation pour avancer ? Marc n’avait aucun ordre à donner, alors qu’il commandait pourtant un peuple immense. Chacun savait où aller, de ses propres pas, car la délivrance n’était qu’à un seul endroit. Malheureusement, elle n’était pas destinée à tout le monde. Rapidement, la réalité les rattrapa : maladies, boue et rats amputaient le groupe de quelques membres chaque jour durant. La jungle, les steppes, les marais, rien ne les épargnait. Qu’est-ce qu’il fallait redouter le plus ? Les terrifiantes créatures peuplant les troncs d’arbres, prêtes à vous faire bouillir les veines d’un venin diabolique ? Ou bien de voir un ciel dégagé, et un horizon plat ? A chaque mouvement de tête, on risquait de se retrouver face à l’ennemi. Heureusement, l’ennemi, lui, était bien trop occupé avec les messagers de Marc et Agrippa.  

Le voyage continuait, et les jours s’égrainaient. Il arrive un moment où l’homme arrête de compter le temps qui le sépare de son foyer. C’est à ce moment-là, souvent, qu’il est le plus déterminé. Entre la résolution et l’abandon il n’y a qu’un pas à franchir, ne pas tomber n’est qu’affaire de tempérament. Mais Marc Ünen connaissait ce sentiment mieux que personne, et il savait donc comment retenir son peuple par le bras, l’encourager et le pousser jusqu’à ses limites. Il n’y avait que cette solution pour arriver jusqu’au bout. Les différents guides des exilés s’acharnaient à dire que la fin était proche, la fin du voyage bien sûr. L’océan était de plus en plus proche, d’un côté comme de l’autre, signe que l’on s’approchait de la dernière parcelle de terre connue. Les cœurs de Marc, de son ami cavalier et de tous les Peuples Libres battaient à l’unisson, dans le but d’envoyer un message à ceux qui étaient encore persécutés par les Elus. Le calvaire était bientôt terminé.




Chapitre VIII : Le Coeur de la Montagne

L’aube se levait sur le camp du fils de l’Augure. Une forêt de tentes couleur de sable plantée dans la neige, formant une barrière invisible séparant les Peuples Libres du reste des humains ignorants. Durant leur prodigieux voyage, les compagnons de Marc avaient affrontés tous les climats, toutes les terreurs, redoutant à chaque instant du jour et de la nuit de se faire découvrir. Tant de périls planaient sur eux, depuis le départ. Maintes fois, ils durent laisser à leur sort quelques tribus qui s’étaient retrouvées entre les mains de l’ennemi. Ils ne voyageaient pas tous ensemble, c’était le plus prudent à faire, mais cela les obligeait à ne pas aller au secours de ceux qui en avaient besoin. Ils étaient conscients de cette vérité, qu’ils avaient laissé derrière eux des centaines d’âmes, mais aucun n’en voyait son moral faiblir. Au contraire, c’était une motivation supplémentaire pour achever cet exode en hommes libres.

Des messagers sur griffons arrivaient de tous les coins du continent. Des dizaines, des centaines d’autres tribus avaient entendus l’appel de Marc, fils d’Alexandre. Tous ceux qui croyaient fermement dans les idéaux du père se précipitaient désormais pour suivre l’enfant dans son épopée. Mais c’était certain, les Elus aussi devaient être au courant de cette tentative d’évasion programmée. Leurs oreilles étaient dans chaque branche, leurs yeux étaient ceux de chaque créature peuplant cette terre. Marc et Agrippa ne pouvaient que connaître la suite des événements : une guerre était inévitable. Mais comment la préparer ? Ils étaient désarmés, sans magie, et aucun n’avait vraiment d’expérience de la guerre. Le futur de tous ces exilés, qui avaient échappés aux griffes des Elus au prix de grands sacrifices, semblait compromis.

Perché sur une colline de neige lactée, le fils unique d’Alexandre l’Augure méditait sur cette épineuse question. Il ne pouvait se réfugier dans la prière, celle-ci étant à la fois inutile et avilissante. Il arpenta la plaine gelée, plongé dans ses brûlants souvenirs. Il songea à tout ce qu’ils avaient déjà affronté, et se jura de ne pas abandonner, pour ne pas déshonorer toutes les vies perdues, toutes les larmes versées. Ces larmes de deuil, étaient-elles, finalement, une si grande bénédiction ? S’étaient-ils vraiment battus jusque-là pour simplement acquérir une souffrance supplémentaire dans leurs vies éphémères ? Marc doutait, il doutait de mener un combat qui en valait la peine. Au fur et à mesure de ces pérégrinations, et sans vraiment le comprendre, le chef des Peuples Libres tomba nez à nez avec un étrange personnage. Celui-ci marchait, comme lui, dans la même direction, mais ils ne s’étaient étonnamment pas vus tous les deux : l’un car il était songeur, et l’autre car il était aveugle. L’homme avançait, yeux bandés, à l’aide d’un bâton sur la plaine blanche. Il ne portait pas de vêtements bien chauds, pourtant rien au monde n’avait l’air de l’affecté. Lorsqu’il remarqua la présence de l’Enfant Prodige, il s’avança vers lui et prononça ces mots.

Citation :
Mon enfant, ton combat est noble, n’ait aucun doute là-dessus. Tu te bats pour ta patrie, pour le salut de ces milliers d’âmes qui sont sous ton commandement. Ton cœur est pur, aucunement corrompu par l’avidité du pouvoir, ou par la haine de ces mages que vous essayez de fuir. Tu te bats parce que tu le dois, et tu le sais. Je vais te donner quelque chose qui t’aidera à accomplir ton destin, mais avant de l’avoir, il te faut répondre à la question que je vais te poser. Seul un esprit vif et éclairé pourra mener ces hommes et ces femmes aux confins d’Irydaë. Tu es prêt à entendre l’énigme ? Bien.

je suis mieux que ton foyer,
je suis pire que la mort,
les pauvres m'ont,
les riches ont besoin de moi,
si on me mange on meurt,
qui suis-je?


Rien ! Ce fut la réponse de Marc. Rien.

Bonne réponse, mon enfant. Rien n’est mieux que son foyer, rien n’est pire que la mort, les pauvres n’ont rien, les riches n’ont besoin rien, et ne rien manger c’est courir à sa perte. Tu as beaucoup d’esprit, malgré ton allure guerrière. Tu réussiras là où ton père a échoué, sois en sûr. Je te confie cette pierre, on l’appelle le Cœur de la Montagne. Brandis-là face aux perfides mages qui te feront face, et ils ne pourront plus faire de mal à qui que ce soit.

Sur ces mots, le vieil homme s’en alla, continuant son chemin vers les montagnes dont il avait arraché la substance pour la confier à Marc. Celui-ci dévisageait l’étrange joyau avec un large sourire. Si l’homme disait vrai, il avait là la clé de leur salut, à tous. Il rentra prestement au camp des Peuples Libres, et montra à Agrippa le merveilleux artefact qu’il venait d’acquérir. Entre-temps, le Cavalier Céleste avait ordonné la fabrication d’armes pour la future bataille qu’ils s’apprêtaient à livrer. Une seule mission était imputée au fils de l’Augure : faire que ce combat ne soit pas leur dernier. Et il y parviendrait, coûte que coûte. Dans l’horizon de brume, des pas lourds et résignés faisaient trembler le sol du continent tout entier. Des quatre coins du pays, les tribus alliées commençaient à arriver de toute part. En deux semaines, à peine, plus de cinq cent chefs de tribus nomades s’étaient réunis dans leur vaste campement. Ils rapportaient d’inquiétantes nouvelles. Les Elus et leurs puissantes armées se dirigeaient âprement vers leur position. Plus que quelques jours de quiétude, et la terre enneigée serait abondamment recouverte du sang de ces pauvres malheureux. Les chefs de guerres des Tribus Libérées ne manquèrent pas d’afficher leur pessimisme auprès du jeune Marc. Il dut faire un long discours face à eux pour les pousser à prendre les armes face aux Peuples Soumis qui marchaient alors dans l’intention de les massacrer. C’est ainsi que tous purent voir la détermination et la foi sans borne qui animait le cœur de cet enfant qui, quelques années auparavant, n’avait pas un plus grand destin que sa défunte mère.




Chapitre IX: Le Discours

Lors d'une matinée brumeuse, Marc Ünen réunit autour de lui, au centre du campement, à la vue de tous, les cinq-cents chefs de tribus qui avaient rejoins les rangs des Peuples Libres en venant de tout le continent. Son objectif était de motiver les troupes pour la future bataille qui pouvait bien sonner la gloire, ou le glas, de tous ces hommes qui avaient tant espérés des paroles de feu son père, Alexandre.

Marc a écrit:

Mes frères, mes sœurs, mes amis, mes compagnons... Nous ne nous connaissons pas vraiment l'un et l'autre. Je vous ai tous appelés, depuis les quatre coins de My'trä, et vous m'avez fait confiance car votre vie, et celle de vos camarades, était en danger. Vous avez bravé marécages, déserts, jungles et montagnes pour arriver jusqu'ici, car vous aviez la volonté de vivre, et d'échapper à la tyrannie de ces mages diaboliques cachés dans leurs immenses tours là-bas. Vous savez, tout comme moi, que leurs cruelles armées marchent sur nous à une vitesse grandissante. Leurs pas résonnent déjà dans nos cœurs, et nous invitent à perdre courage et à se rendre. Mais ce n'est pas ainsi que l'on œuvre pour la liberté. Nous avons tous un rêve ! Celui de quitter ces terres maléfiques qui ont engendrées des monstres comme ceux qui nous pourchassent ! Vous ne voulez plus le réaliser ? Si c'est le cas, partez tout de suite, allez retrouver les Élus et implorer leur pardon, vous comprendrez alors que, pour eux, il n'existe aucune rédemption. Nous sommes des parjures, des criminels, des hérétiques ! Plus aucun avenir ne nous attend sur ce continent où la foi est supérieure à la raison et à la famille même ! Mais cela ne veut pas dire que nous n'avons plus aucun futur...

En ce moment même, les plus vigoureux hommes s'entraînent à manier les armes que nous savons fabriquer pour lutter contre l'envahisseur lors de l'imminente bataille ! Ces hommes pourront former vos frères et sœurs pour que ceux-ci ne reçoivent pas nos bourreaux avec de simples pierres à leur jeter au visage. Pour gagner notre liberté, et notre vengeance sur ceux qui nous ont opprimés, nous devront tous nous battre ! Regardez le ciel, admirez ! Même les griffons, ces créatures antiques nous aident à briser nos chaînes ! N'est-ce pas là la preuve que notre lutte est juste ? N'est-ce pas là le signe de notre victoire ?!

J'ai, en ma possession, un artefact très puissant qui nous permettra, à coup sûr, de briser le lien terrible qui unit les Élus à leurs dieux pour quelques instants. Grâce à cela, les mages ne deviendront plus que des marionnettes sans puissance que nous n'auront plus qu'à faire saigner comme du bétail ! Nous ne pourrons pas tous les tuer avant qu'ils retrouvent leurs pouvoirs, mais cela nous permettra de faire comprendre à ces faquins que les êtres humains que nous sommes, même dépourvus de magie, peuvent parvenir à de grandes choses ! De nombreux hommes travaillent, en ce moment même, sur des navires capable de nous faire traverser l'océan afin d'atteindre les plaines inconnues au sud. Car je sais qu'elles existent. Une terre fabuleuse nous attend par-delà l'eau empoisonnée, une terre où nous serons libres, et heureux, et où nous pourrons prospérer sans l'épée de Damoclès que les Élus font flotter au-dessus de notre tête !

Alors, mes amis, puisque nous avons décidé de ne plus croire dans la bienveillance des Architectes, je me charge moi-même, au nom de mon père, de bénir notre combat ! Puissiez-vous revenir en vie jusqu'à nous, jusqu'à nos vaisseaux, afin que l'on quitte à tout jamais cet horrible endroit où ne règnent que mort et fanatisme obscur. Prenons les armes, et montrons aux Ignorants que notre mémoire retrouvée est une source de puissance bien supérieure à leur foi aveugle ! Pour la liberté !




Chapitre X: (en cours d'écriture)

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