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Chroniques d'Irydaë
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 Un mal incurable

Althéa Ley Ka'Ori
Althéa Ley Ka'Ori
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Un mal incurable EmptyVen 24 Nov - 17:06
Irys : 507592
Profession : Guérisseuse du Troisième Cercle
My'trän +3 ~ Suhury (femme)

Un mal incurable Z4fh

Un mal incurable 2hou

« Bonsoir, gente dame. Auriez-vous l’obligeance de me renseigner sur l’arrivée d’une femme il y a de cela quelques heures ? Elle est habillée de noire, et légèrement plus grande que moi.
- C’est possible.
- Elle est … brune, se hasarda-t-elle à déclarer, sans trop de conviction.
- Qu’est-ce que vous lui voulez ?
- Juste la voir.
- "Juste", ouais, mon cul ! J’en ai vu des bonnes femmes toutes polies qui viennent frapper à ma porte pour trouver unetelle, ou untel. Le moment d’après, j’me retrouve avec un cadavre sur les bras, et du sang plein les draps ! Pire que le dépucelage d’une Zagashienne.
- Je ne pensais pas vivre en Als’kholyn…
- Vous ne la verrez pas, sortez d’ici. »

Althéa eut un sourire, témoin discret de sa satisfaction. Elle se félicita mentalement, non sans une certaine fierté bien sentie, d’avoir suggéré cette auberge à Zora. Elle eût pu être renommée sous le syntagme : "le client est roi". L’aubergiste était en effet très peu disposée à vendre ses clients, faisant volontiers fî des lois établies autant que des bonnes mœurs au profit des bons clients aux pièces sonnantes et trébuchantes.

« J’arrête de te faire marcher, Pota, je suis Althéa, du clan Mahere. Je suis venue plusieurs fois avec mon frère lorsque j’étais plus jeune… »

La dénommée Pota leva le regard de son comptoir pour la reluquer sans retenue, puis partit d’un éclat de rire tonitruant, visiblement ravie de retrouver un vestige du passé. Dans son enfance, et début d’adolescence, Althéa s’était rendu de nombreuses fois dans cette auberge Reonienne afin d’y déguiser quelque manigance de Quevven. Pota, fidèle partenaire de ses méfaits, fermait les yeux, et mieux, se faisait fière intermédiaire entre le marché noir et l’aîné Ley Ka’Ori, pourvu qu’elle touchât une somme rondelette au cours de la transaction. Cette alliance prospère se doublait d’une confiance mutuelle, qui prenait source dans le plaisir des crimes sans violence. En bref, les petits délits constituaient des entorses délicieuses à la loi tandis que les grandes agressions n’apportaient qu’inhumanité et culpabilité.

« Althéa ? C’est vraiment toi ? Hahaha, mais… faut croire que t’as pas réussi à grandir après tout ce temps ! »

Althéa lui accorda un nouveau sourire, lequel aurait été plus convaincant si ses sourcils n’avaient été légèrement déformés par l’exaspération. Peut-être tenait-elle ses propres propos acerbes de cette caractérielle tenancière. En prenant cela en compte, la guérisseuse ne pouvait que difficilement se sentir froissée par une telle pique. Il fallait de surcroît reconnaître qu’elle ne se démarquait pas par sa taille, et c’était d’autant plus poignant que l’aubergiste avait la carrure costaude et intimidante des grands mâles de ce monde.

« Je prendrais plaisir à rattraper ce temps perdu (à ne pas grandir entre autres), mais j’ai des affaires à mener. Elles sont presque honnêtes, sinon j’aurais eu recours à toi ! Mais ta part de travail s’arrête à partir du moment où Angélique sort de ce charmant établissement. »

Le matin-même, elle avait proposé à Zora de se rendre seule au palais Reonien afin d’y rencontrer le khorog. Pendant ce temps, la rousse était tenue de trouver Pota, dans la fameuse auberge L’Auberge Inn qu’elle tenait de sa main de fer. Il suffirait alors de solliciter "le traitement spécial de la tenancière", qui incluait de façon synthétique un changement total d’apparence, un bon plat chaud à base de chou, une protection temporaire contre la garde et un lit miteux dans une chambre humide. Quel meilleur forfait pour un individu recherché en tout Khurmag ?

Et à qui devait-elle d’être recherchée ? A Althéa, pour l’heure ! Même si, en sa défense, la nouvelle se serait probablement répandue tôt ou tard, elle n’avait fait pour ainsi dire que précipiter l’inévitable.
La guérisseuse ne regrettait rien à ses agissements toutefois, ne vous méprenez guère. A ses yeux, il s’agissait là du meilleur compromis envisageable pour les deux alliées. Ce qui lui importait pour sa part était de se montrer irréprochable aux yeux de tous quant à ses devoirs envers sa contrée. Si Zora était incriminée et emprisonnée, elle pourrait plaider l’innocence ingénue, puisqu’elle n’aurait été que la messagère, le signe avant-coureur d’une menace rousse, dont les méfaits et le portrait étaient connus grâce à son plus entier dévouement !

Son discours auprès de sa comparse avait été tout autre, il est vrai ; l’honnêteté ne présentait que rarement un intérêt. Elle avait assuré Zora qu’elle défendrait ainsi une reconnaissance de ses mérites, de ses prouesses au nom de Möchlog. Tuer trente Daënars, la chouette devait être fière ! Il fallait que les khorogs et les gharyns en personne chantent ses louanges !
Ce compromis n’empêchait pas, et même au contraire, permettait aux deux femmes de jouir de leur relation paradoxale, de cette amitié controversée voulue par les architectes seulement.

Alors qu’Althéa allégeait sa conscience par des arguments qui ne convaincraient qu’elle, Pota la menait sans plus de cérémonie à l’étage des chambres. Sa protégée se délectait par avance du doux nom d’Angélique apposé sur sa langue ; quelle ironie, un nom si innocent, sur un visage si criminel. Il y avait de quoi ravir ses plus moqueuses tendances ! Une fois arrivée à sa porte, elle frappa néanmoins à la porte dans une tentative de courtoisie éphémère, adoptant sa voix la plus doucereuse pour appeler :

« Angéliiiique ? Allez, sors d’ici, je suis sûre que tu n’es pas si mal en brune ! »


Dernière édition par Althéa Ley Ka'Ori le Ven 12 Jan - 15:49, édité 3 fois

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Un mal incurable EmptyMar 5 Déc - 17:12

Elle se redresse, suspicieuse, lorsque des coups répétés contre la porte brisent la monotonie des lieux. Le timbre de voix qui ne tarde pas à les accompagner lui arrache cependant bien vite un soupire de soulagement. Si ça avait été quelqu'un d'autre, les problèmes auraient pu vite s'accumuler. Mais ce n'est qu'Althéa! Zora s'empresse donc d'entrouvrir ladite porte et de jeter un regard à sa comparse. Constatant que cette dernière est seule, elle lui libère l'accès à la chambre avant d'observer une dernière fois le couloir à la recherche d'un éventuel curieux. Rassurée, elle referme avec précaution la porte derrière elle avant de s'y adosser.
"J'ai cru que tu ne reviendrais jamais..." se plaint-elle avant d'adopter un air plus contrit. "Je fais un peu de... heu... ménage!"
Le cadavre coincé dans l'encadrement de la fenêtre et qui bloque la luminosité relative du soleil de Khurmag lui donnera sûrement une idée de la nature du ménage en question. Cet homme l'a irritée dès les premiers instants où elle a posé le regard sur la cicatrice de l'un de ses yeux. Une telle insulte à Möchlog ne pouvait décemment pas être ignorée. Et puis ce n'est pas comme si elle avait une foule d'activités à faire dans un coin paumé comme celui-ci... Elle n'allait tout de même pas rester les bras croisés en attendant que la noiraude daigne la rejoindre, non? Si Möchlog a mis un impure sur sa route, c'est pour une bonne raison de toute façon!
"Il avait un oeil crevé..." explique-t-elle en haussant les épaules.
Elle n'a sans doute guère besoin d'en dire plus à sa comparse. Elle se demande d'ailleurs pourquoi elle est en train de se justifier sans qu'on le lui demande, simplement parce qu'elle a fait ce que la Chouette attendait d'elle. Après un regard entendu à Althéa, donc, elle prend un peu d'élan et décoche un coup de pied dans le postérieur du cadavre qui refuse toujours de quitter la fenêtre. Avec le recul elle aurait peut-être dû le découper en morceaux, ça lui aurait facilité la tâche. Mais il y aurait alors eu du sang partout. Et par égard pour l'aubergiste que la noiraude semble connaître, elle s'est contentée de l'étouffer à l'aide d'un bouclier.

La rouquine - devenue brune pour les besoins de la cause - amplifie une nouvelle fois sa force pour accentuer la pression sur le corps. Il lui faut encore de longues secondes avant de réussir à faire basculer la masse de chair dans le précipice au bord de laquelle l'auberge a été construite. Quelques échos étouffés par la neige témoignent de plusieurs rebonds contre la paroi glacée. Puis le bruit du vent reprend ses droits. Une bonne chose de faite! C'est donc avec un regard satisfait que Zora reporte son attention sur sa comparse avant de lui envoyer la bourse du défunt. De quoi dédommager le tenancier pour ce qui sera officiellement un départ précipité de ce client indigne de vivre. Oui, elle a tout prévu!

Elle s'affaisse ensuite sur le lit et s'enveloppe dans l'une des couvertures, savourant la température agréable de la pièce. Après des jours dans le Khoral et des aventures bien trop mouvementées pour être véritablement agréables, ces instants de repos font le plus grand bien. Et elle les savoure comme il se doit, à grand renfort de boissons chaudes ou de siestes destinées à gommer les affres des dernières semaines. La jeune femme lève le regard vers son alliée et hausse un sourcil interrogateur.
"Alors? Comment ça s'est passé à Reoni?" s'enquit-elle avec une curiosité évidente. "Nous sommes devenues les nouvelles héroïnes de ce trou paumé?"
Ce serait bien la première fois qu'un dirigeant reconnaîtrait ses mérites. Mais Althéa est douée lorsqu'il s'agit de faire preuve de diplomatie ou tout simplement de s'exprimer. Et puisqu'elle lui a promis de vanter ses actes auprès du roi de Khurmag, elle peut raisonnablement espérer que les massacres orchestrés auront trouvé un écho favorable à ses oreilles. Elle s'imagine bien qu'elles n'auront pas droit à une statue. Mais un peu de reconnaissance ne ferait pas de mal, pour changer...
"Raconte-moi tout sans omettre le moindre détail, d'accord?"
La feue rouquine saisit la tasse de thé encore brûlante et s'en sert pour réchauffer ses doigts un bref instant. Elle en prend ensuite une gorgée et ferme les yeux comme pour mieux savourer le breuvage chaud qui coule le long de sa gorge. Elle espère que le récit de sa comparse sera à la hauteur de ses attentes...

Althéa Ley Ka'Ori
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Un mal incurable EmptyLun 18 Déc - 1:44
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La guérisseuse contempla, désabusée, le cadavre chuter. Elle ne l’aperçut que brièvement, trop interdite pour en détailler les attributs, encore moins les raisons physiques ayant causé son trépas. Par un sens de la déduction absolument phénoménal, elle attribua très vite sa mort précipitée à la jolie rousse qui le pressait de déserter la chambre tel un vulgaire maraud – ou un amant embarrassant, qui sait. En outre, la coupable ne se cacha pas de son méfait. Elle l’assuma pleinement dans une tentative presque risible de se justifier. Quelque part, son attitude lui sembla plus prometteuse que tous ses comportements précédents, et ce même en considérant les rares instants où elle s’était retenue d’égorger, d’éventrer, d’éviscérer, le temps d’un instant.

Une fois n’est pas coutume, Zora cherchait effectivement un motif raisonnable à son meurtre, raisonnable pour les oreilles d’Althéa de préférence, comme un voleur en appelle au ventre vide de sa petit sœur auprès du garde qui l’attrape, et le chef d’industrie plaide pour sa femme agonisante qui requiert des soins onéreux lorsque sa clientèle s’indigne. Cette attitude était loin de signifier que la rousse éprouvait quelconque regret à l’égard de sa victime ! Néanmoins, elle pouvait espérer que de par son intention de dédouanement, elle solidifiait leur alliance en lui octroyant une certaine légitimité. Elle comprenait que ses actes avaient des répercussions sur Althéa, et qu’il lui fallait donc prendre en compte leurs deux jugements pour mener à bien leur mission divine. C’est en tout cas la conclusion à laquelle elle parvint après un bref raisonnement.
C’est donc une Althéa égarée, pensive, et presque réjouie, qui répondit très sérieusement à la question de Zora.

« Raconte-moi tout sans omettre le moindre détail, d'accord ?
- Mais que ferais-tu d’une omelette sans ail ? »

La guérisseuse s’était focalisée sur la première partie de ses propos, et pas tant sur la suite de son monologue. Néanmoins, elle se rendit compte, à l’instant même où elle prononçait ces mots incohérents, qu’elle était bien loin du sujet abordé, et elle le constata à l’apparente incompréhension de son interlocutrice. Aussi, elle s’empressa de rectifier le tir comme elle le put :

« Pardon, c’est ma visite avec le khorog, j’ai dû utiliser toutes mes facultés cognitives pendant mon audience, et je n’ai plus rien dans le crâne. Je reviens. »

Sur ce, elle tourna les talons, bourse en main, pour rejoindre la pièce inférieure. Pota s’affairait à de nouvelles tâches, et elle l’interrompit à regret, l’emmenant dans un coin à l’abri pour lui chuchoter la joyeuse nouvelle. Après tout, qui ne serait pas ravi d'initier des funérailles ?

« Ecoute, ne t’affole pas, mais il y a un cadavre dans ta cour.
- Un qu’wah ?
- Tiens, ça devrait compenser, précisa-t-elle en lui tendant la bourse.
- Non, non, ça ne compense pas, Althéa, tu connais les règles ! protesta-t-elle dans un murmure paniqué. Pas de morts. Le délit oui, le crime non !
- Je sais, mais ce n’est pas un crime, il a essayé de la violer, inventa-t-elle à tout hasard.
- Elle pouvait pas se laisser faire ?
- Ca lui ressemblerait pas.
- Alors juste l’assommer !
- C’était pas volontaire, assura-t-elle avec une franchise feinte. C’est trop tard maintenant, ne me dis pas que tu aurais préféré que je laisse pourrir son cadavre et que je parte sans te prévenir. Là, au moins, je te laisse l'occasion de brûler son corps avant que quelqu’un ne tombe dessus, où que la neige plus fine de l’après-Khoral découvre un macchabée dans ton jardin. »

Pota fulminait dans sa barbe (ce n’est pas une expression, sa pilosité n'était plus à prouver !), jurant autant qu’elle ne proférait des menaces inaudibles. Sans plus attendre, elle se dirigea vers le fond de la pièce, pour ouvrir la porte arrière, s’engouffrer dans le froid, et la claquer derrière elle. Sans son affection pour Althéa, elle lui aurait sans doute fait manger son mort.

***

Quelques minutes plus tard, elle se glissait dans l’autre lit de la chambre, avec un soupir qui en disait long sur son exténuation. Elle laissa couler quelques inspirations, destinées à faire le tri dans ses multiples pensées.

« Je vais commencer par la fin. Le khorog et le primo-gharyn en personne nous intiment d’aller enquêter sur la population malade du village de Tük – je ne sais absolument pas où celui-ci se trouve pour le moment, mais il devrait être dans les environs. C’est un moyen pour eux de nous tester, de savoir s’ils peuvent nous faire confiance, tu me suis ? La raison officielle, c’est qu’ils sont sensibles à notre dévouement pour leur contrée, bla bla bla. La réalité, la version officieuse, c’est qu’ils s’assurent de cette façon de notre loyauté, et même qu’éventuellement ils espèrent en abuser pour s’attribuer notre réussite. Cela importe peu. Ce qui importe, c’est que si nous menons à bien cette mission, nous pourrons très certainement leur demander une faveur en échange. A savoir, servir de porte-parole my’trän en Daënastre. Laisse-moi finir avant de t’indigner ! En échange de quoi je fermerai les yeux sur cet… homme, qui… a fait l’affront d’avoir perdu un œil. »

Althéa fixait le plafond, et la lumière déclinante du crépuscule mettait en valeur les ombres et les cernes sur son visage. Les embûches rencontrées sur leur chemin avaient grandement épuisé la jeune adepte, et le confort relatif de son lit l’appelait à un sommeil profond et sans rêve.

« Zora, reprit-elle. Je sais que ça te déplaît, toutes ces politesses, ces insipidités protocolaires, tu dois avoir l’impression que cette mission est inutile pour notre quête, et qu’il vaudrait mieux prendre le large dès demain. Rassure-toi, tout cela me fatigue également. Mais comprend bien que de cette manière, nous aurons les deux personnes les plus influentes de Khurmag au creux de la main. Avec leur soutien, nous avons de grandes chances d’effacer toute trace de technologie du continent My’trän ! Et ce, simplement en usant de ses alliés ! Ce serait déjà une avancée que les Architectes reconnaîtront à sa juste valeur. Leurs terres, entièrement vidées de cette hérésie qui les souille depuis des décennies !
Si l’on attend encore davantage avant de se rendre en Daënastre, on aura certes perdu quelques jours, semaines, mois à traîner ici, mais le résultat a une chance d’être bien supérieur à celui que nous aurions atteint sans Aldin et Yoris. On irait à Daënastre non seulement pour anéantir la Technologie, mais surtout pour laver notre continent de sa présence. On ne serait pas deux, non, on serait Zora, Althéa, Aldin, Yoris, et indirectement, le peuple my’trän tout entier, contre Daënastre. Möchlog ne nous a pas élues pour que nous luttions seules.
»

La guérisseuse s’assoupissait. Elle rouvrit les yeux, luttant pour décoller ses paupières soudées. Le froid attaqua aussitôt le blanc de ses yeux, légèrement injectés de sang dans un modeste espoir d’endormissement. Elle se redressa, s'adossant contre le mur, pour diriger son regard vers Zora.

« Aussi… Pour cette fois-ci, il faut servir ces deux êtres-là, pour servir indirectement notre Architecte. Dorénavant il faudra que tu utilises une nouvelle identité, celle d’Angélique, comme convenu. C’est important, presque autant que de réussir cette mission. La capitale connaissait déjà tes meurtres lorsque je suis arrivée… Le khorog et le gharyn jugent ces meurtres criminels. C’est hypocrite, je le sais bien. Sous prétexte que nous ne sommes plus officiellement en guerre avec les Daënars, en assassiner un ou deux deviendrait soudainement une atrocité, là où tout cela n’apportait que gloire et honneur en temps de conflits. C’est hypocrite par essence, puisque c’est de la politique. Mais il faut comprendre que ce n’est qu’un jeu d’intérêts, que des calculs masqués sous une façade d'impostures. En pariant à ce jeu, qui sait quelle somme nous récolterons ! Je te demande de bien vouloir te plier à ma volonté pour cette fois. Demain, nous prendrons la route pour Tük, afin d'y découvrir quel mal ronge ses habitants, et mettre en évidence son lien avec les mines Daënars. Pendant tout ce temps, nous serons surveillées, par des subordonnés du khorog et du primo-gharyn. Cela implique une conduite irréprochable. Pas de meurtre, pas de vol, pas de remarque acerbe. Que du politiquement correct. »

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Un mal incurable EmptyDim 7 Jan - 11:53

Une omelette sans ail? Mais qu'est-ce qu'elle raconte?! Zora écarquille les yeux et penche légèrement la tête sur le côté comme pour mieux ausculter du regard sa comparse. A-t-elle bu? Il est vrai qu'elle a dû affronter les rigueurs hivernales pendant que la feue rouquine - Althéa la laissera-t-elle à nouveau l'être un jour? - s'ennuyait dans cette auberge. N'aurait-elle pas trompé le froid en vidant quelques gourdes d'alcool? Son aînée hume l'air à la recherche d'une quelconque effluve pouvant confirmer cette hypothèse. Mais... rien! Serait-ce plus grave?

Une part d'elle l'encourage à étendre sa main sur le front de sa compagne de purification tandis que l'autre l'enjoint à ne pas céder à l'inquiétude et à la laisser se débrouiller seule. Après tout l'intéressée est une guérisseuse. Si problème il y a, elle saura le résoudre. Et si ce n'est pas le cas alors c'est sûrement que Möchlog lui a retiré ses faveurs... Dans ce cas, toute aide serait parfaitement inutile. Ce faisant, Zora fait preuve d'une certaine amnésie. Si elle a pu profiter des derniers jours pour se reposer au chaud, c'est en grande partie grâce à l'aide que la noiraude lui a apportée. Sans elle, les choses auraient pu prendre une tournure... désagréable. Et le mot est sûrement faible si le considère le danger représenté par le Khoral.

De l'avis d'Atlhéa cependant, ce moment d'incompréhension est uniquement dû à un abus de ses capacités cognitives. Cette dernière s'empresse d'ailleurs de quitter les lieux en laissant son aînée une nouvelle fois seule. Quelle arachnophobion l'a mordue, celle-là? Zora lâche un soupire résigné en levant les yeux au ciel avant de se laisser choir sur son lit, pensive. Laisser sa comparse se rendre seule au palais reonien n'était sûrement pas une bonne idée...

**********

Il ne faut néanmoins pas trop longtemps à la noiraude pour revenir. Du moins est-ce l'impression que Zora en a puisqu'elle s'est, semble-t-il, assoupie à moitié. Il faut dire que le lit est confortable... Ce qui n'empêche pas la jeune femme de se redresser vivement lorsque sa cadette s'installe à côté d'elle. Elle lui décoche ensuite un regard appuyé pour la pousser à lui délivrer les informations qui lui font tant défaut. Et si elle doit attendre quelques instants pour que sa comparse se mette à table, le récit dont elle est finalement gratifiée est complet, concis et... parfaitement irritant!
"Non mais dites-moi que je rêve..."
Elle se redresse et commence à faire les cent pas dans l'espace réduit, les mains derrière le dos et les sourcils froncés. Laisser Althéa négocier seule fut une grave erreur. Et maintenant elle est liée à Aldin et Yoris. C'est une part de sa liberté qui vient de s'envoler et il semble désormais trop tard pour la récupérer. Zora, si elle comprend la démarche et les arguments exposés par sa cadette, ne les accepte cependant pas. Faire équipe avec elle lui demande déjà nombre d'efforts alors qu'elle a toujours agi seule. Mais maintenant, elle est obligée d'ajouter dans l'équation les dirigeants des terres enneigées...
"Et ce que je veux, moi?" râle-t-elle. "T'es-tu seulement interrogée sur mes attentes?"
Probablement pas! Sans quoi elle n'aurait pas pris la décision de former une alliance - certes bancale - avec les meneurs de Khurmag. Elle n'aurait pas jugé nécessaire d'accepter une mission qui sert leurs intérêts tout en leur faisant perdre un temps précieux qu'elles auraient pu mettre à profit pour attaquer Daënastre. Et elle aurait encore moins accepté que des gens gardent un oeil sur elles. Zora se fiche pas mal de ceux qui prétendent diriger les différents régions de My'trä mais qui sont figés dans l'immobilisme. Elle n'a pas besoin de l'aide ou de la confiance de qui que ce soit d'autre que Möchlog. Elle aurait voulu étendre ce constat à Althéa. Mais la noiraude la déçoit tellement que les mots lui manquent...
"Nous en reparlerons plus tard!" achève-t-elle. "Tu as besoin de repos et moi, j'ai besoin d'un verre! Essaie de ne pas nous allier avec d'autres hérétiques en mon absence, tu veux bien?"
Elle fustige sa cadette du regard et hoche la tête de gauche à droite pour marquer à nouveau une désapprobation qui est pourtant évidente. Après quoi elle quitte la pièce et claque la porte derrière elle avant de descendre dans la salle commune.

**********

Lorsqu'elle remonte, quelques heures se sont déjà écoulées. Il est vrai que le vin chaud a quelque peu calmé l'acerbité de la feue rouquine qui ne ressent à présent qu'une intense lassitude. Et même les allusions étranges de Pota au sujet d'un viol et ses remarques sur l'absence d'éducation n'ont pas réussi à changer cet état de fait. Aussi lorsque Zora pousse à nouveau la porte de la chambre et qu'elle s'assoit à côté de la noiraude, la réveillant en secouant son épaule avec un mélange de douceur de fermeté, ce n'est pas avec l'intention d'attiser les flammes de la discorde. Il lui faut cependant de nombreuses secondes avant d'exprimer clairement son opinion au sujet de ce voyage à Tük et sur ses implications. L'ainée de ce duo ravageur s'est également rendue compte d'une chose: ce n'est pas la colère qui prime mais... la jalousie. Un sentiment qui ne l'a que rarement effleurée jusque là et qu'elle a mis du temps à identifier.
"Je ne veux pas qu'il y ait Aldin, Yoris, Althéa et Zora..." souffle-t-elle. "Je veux qu'il n'y ait que nous deux! Et Möchlog! Nous n'avons pas besoin de la reconnaissance, de l'aide ou de la confiance des autres!"
Elle lâche un soupire avant de décocher un pauvre sourire à la noiraude. À ses yeux, le trio suffit amplement à faire face aux dangers ou à la haine de leurs congénères. Il frôle une certaine forme de perfection. Mais est-ce le cas d'Althéa? Ne lui suffit-elle donc plus? Cette prise de conscience lui fait... mal?
"Néanmoins je comprends le sens de ta démarche! Je ne l'approuve pas. Mais je la comprends, oui..." ajoute-t-elle. "Alors si tu juges qu'elle est nécessaire et que nous en tirerons parti, soit! Daënastre et Technologie ne s'envoleront pas, de toute façon! Et il ne sera jamais trop tard pour réduire l'une et l'autre en cendres! Disons qu'ils viennent d'obtenir un sursis..."
Encore un.. Cela fait si longtemps que l'hérésie insulte les Architectes que le moindre retard semble inopportun. Peut-être même dangereux. Car chaque jour, semaine ou mois supplémentaire accordé aux traîtres renforce leur puissance. On n'attend pas qu'un dragon soit devenu adulte pour l'affronter. On s'en débarrasse lorsqu'il est encore jeune, incapable de se défendre convenablement. La crainte qui anime la jeune femme? Que le temps finissent par réellement jouer en leur faveur. Que cette perte de temps soit celle de trop. Qu'il soit tout simplement trop tard pour faire face convenablement au danger, malgré les propos qu'elle vient de tenir à Althéa...
"Mais qu'on soit surveillées ou non, je ne changerai rien à ma manière de faire. Je peux tolérer, je crois, leur présence. Mais pas au point d'accepter d'épargner un impure qui se balade dans mon champ de vision! Et tu sais ce que ça veut dire, j'imagine?" demande-t-elle. "Si les habitants de Tük sont frappés par une quelconque maladie, ils devront mourir! Möchlog en a décidé ainsi! Et Sa volonté primera toujours sur celle de nos congénères ou sur les... calculs politiques, quels qu'ils soient!"
Si Zora accepte de faire un pas dans la direction de sa comparse, elle se tient pourtant prête à reculer de deux autres. Faire des efforts est une chose, se trahir en refusant de purifier ceux qui doivent l'être en est une autre. La feue rouquine fera ainsi de son mieux pour contenter Althéa et suivre le plan tordu qu'elle a mis en place. Mais seulement tant qu'elle estimera qu'elle peut décemment le faire. Si un choix doit être fait, il sera toujours en faveur de la mission que Möchlog lui a confiée voici des années maintenant, avant même qu'elle connaisse l'existence de sa cadette et que cette union fébrile voit le jour...
"Et la prochaine fois, par pitié, laisse-moi choisir mon prénom d'emprunt..." tente-t-elle de plaisanter. "Je sais bien que le ridicule ne tue pas mais... tout de même!"
**********
"Et ils sont où, tes nouveaux amis?"
Le voyage matinal jusqu'à ce fameux village de Tük a été plutôt plaisant, dans le fond. Il est vrai que le fait d'avoir des chevaux pour faciliter le trajet leur a évité bien des efforts. La bourgade est ainsi en vue, de l'autre côté d'un précipice enjambé par un pont de corde et de bois qui ne lui inspire guère confiance. Et si elle se fie à l'agitation de sa monture, elle n'est pas la seule à ressentir de l'appréhension à l'idée de le traverser.

Le fait est qu'elles semblent seules. Et Zora se surprend à espérer qu'Aldin et Yoris soient revenus sur leur décision et qu'elles seront seules sur ce coup-là. Une perspective séduisante mais qui n'a que peu de chance de se vérifier. Leurs gardes chiourmes doivent simplement avoir du retard. Vu les difficultés à voyager dans cet océan de neige et de glace, ce n'est par ailleurs guère étonnant. Encore une perte de temps...

Althéa Ley Ka'Ori
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Un mal incurable EmptyMer 10 Jan - 20:23
Irys : 507592
Profession : Guérisseuse du Troisième Cercle
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L’irritation dans la voix de sa partenaire l’interpela. L’air interdit, elle se redressa sur son lit pour chasser les avances du sommeil, clignant des yeux à plusieurs reprises devant un tel accès de colère et de frustration. En une réponse presque infantile, une irritation miroir à celle de Zora naquit dans ses veines et contamina irréversiblement ses pensées. Si sa voix paraissait tout aussi calme qu’auparavant, elle vibrait également d’une émotion plus profonde, celle de la froide fureur.

« Il me semblait que mon rôle était celui de la diplomatie, et que tu me faisais suffisamment confiance pour m’en acquitter sans te consulter ! J’ai fait ma part de notre contrat, à toi de respecter la tienne ! fulmina-t-elle. »

Zora eut probablement l’initiative de la maturité - fût l’élan volontaire ou non - puisqu’elle coupa court à cette dispute insensée ; la seconde d’après, la noirouquine s’était éclipsée de la chambre. Althéa frappa le mur du poing, et ses phalanges geignirent dans la douleur qui s’ensuivit. Celle-ci eut au moins le mérite d’apaiser sa rage tout juste contenue. Après un grognement d’exaspération, les bras tendus vers le ciel, elle s’écroula à nouveau sur le lit, et tourna puérilement le dos à la porte, comme pour se détourner de Zora et de ses reproches.

De longues minutes encore, l’incompréhension et l’exaspération l’empêchèrent de sombrer dans un sommeil récupérateur et désiré par toutes les cellules de son corps. Elle ne s’était pas attendue à un tel rejet de ses décisions, et elle s’en voulait d’avoir négligé ce facteur dans tous ses calculs. Elle était si préoccupée par son audience à venir qu’elle n’avait pas pensé à sonder l’opinion de sa comparse. La fatigue pesait sur ses paupières, mais son esprit refusa de se détourner de cette nouvelle contrariété qui suscitait en elle un inexplicable mécontentement. Elle en voulait à Zora ! Ou peut-être s’en voulait-elle à elle-même ?

Après avoir repris le même cheminement de pensées pour la dixième fois au moins, elle parvint finalement à s’assoupir, pour un instant seulement. Déjà on lui secouait l’épaule pour la réveiller, et une impression paradoxale d’avoir dormi des heures mais de s’être endormie la minute passée contraria ses sens. Elle tourna la tête pour faire face à Zora, décidée à en découdre, mais elle se rendit bien vite compte qu’elle n’avait plus en elle la colère nécessaire pour batailler. L’alcool avait sûrement eu le même effet sur son amie, puisque son ton s’était adouci lorsqu’elle prit la parole. Elle partagea une partie de son affliction, et Althéa réalisa progressivement ce qui l’avait tant touchée auparavant. L’absence d’exclusivité.

« Il n’y a personne d’autre que toi et moi dans cette mission, la rassura-t-elle gauchement, suivant son instinct plutôt que sa raison. Il n’y a que Zora et Althéa, les deux impératrices de l’échiquier, les autres ne sont que des pions à sacrifier pour le maintien de notre empire. »

Elle n’avait aucune volonté de se placer en impératrice my’trän, mais il s’agissait-là de partager une part du rêve de Zora, et l’analogie lui convenait. Si l’heure venait, elle lui laisserait cet honneur avec plaisir ; ce qui comptait à ses yeux n’était autre que leur objectif primaire, à savoir réduire la Technologie à néant. Elle acquiesça docilement au reste de ses paroles, compréhensive plutôt que réprobatrice.

« Tue les impurs, mais ne m’implique pas directement dans le meurtre de My’träns quels qu’ils soient, c’est tout ce que je te demande. Une fois en Daënastre, tout sera différent, tout sera moins… tranché… »

A sa tentative de plaisanterie, elle eut un sourire amusé, presque compatissant, et carrément taquin.

« C’est entendu. Dors bien, Angélique ! »


***


Montée sur une jument immaculée, Althéa contemplait le pont qui se dressait devant elles d’un œil critique. Il tenait de guingois, et aucun des quatre compagnons, des deux femmes ou de leurs chevaux, ne semblait enclin à s’y risquer. C’est donc une guérisseuse dépitée qui se dévoua, à la façon d’un chef de tribu menant les siens sur le chemin et s’aventurant là où personne n’ose s’aventurer - cette formulation avait ce côté épique qui la confortait dans sa décision. Elle descendit de sa monture, s’emmitoufla dans sa cape de fourrures, et posa un pied incertain sur la première barre en bois du tablier. L’inconvénient des ponts en montagne, c’est qu’ils sont rarement maintenus par autre chose que de la corde et des piquets : cela leur confère un taux de mortalité supérieur aux ponts usuels !

« Les gardes qui nous surveillent doivent déjà être arrivés. On s’est perdues trois fois je te rappelle. »

Elle avait insisté sur la fonction et la finalité des ses prétendus nouveaux amis, excédée qu’elle persiste à l’associer à ces parasites. Elle n’avait pas souhaité qu’ils les accompagnent, et ne les portaient pas dans son cœur ! Plus que tout, les gardes représentaient autant de risques potentiels de griller leur couverture. Après une ultime inspiration, elle se lança dans la conquête du pont de bois, menant fermement son cheval inquiet par la bride. Il avait le mérite d’être bien dressé, mais la résistance qu’il créait vers l’arrière l’angoissait. Après quelques minutes d’anxiété, à progresser sur cette construction relativement solide, elle parvint à l’autre bout. Son pas foula à nouveau la surface stable, quoique glaciale, de la neige des sommets. Un soupir de soulagement échappa ses lèvres, et elle crut déceler une exhalation similaire chez son destrier. Elle se retourna pour faire signe à Zora de la rejoindre. Le pont avait supporté son poids et celui de sa monture, Zora et son cheval pesaient sans doute autant ! Cela ne garantissait pas son passage, mais donnait une bonne approximation de ses chances de survie.

Alors qu’elle la regardait s’activer sur le mont opposé, un tapotement désagréable sur l’épaule la fit sursauter. Un homme d’âge mûr lui faisait face, un brin de pivoine dans la bouche - c’était à se demander où il avait pu en dénicher un dans cette poudreuse, ou, en faisant preuve de plus de réalisme, depuis combien de temps il le mâchouillait ! Il lui parut tout à fait irritant, avec ses tâches grises sur les joues, son odeur d’ermite crasseux, et sa peau flasque avant l’âge. Bien en arrière, elle avisa sa pitoyable chaumière, et se maudit de ne pas l’avoir aperçue plus tôt, trop préoccupée par le pont en lui-même.

« Bien l’b’jour mam’ ! Chuis l’garde du pônt, et ça f’ra 100 Irys !
- Irys, c’est le seul mot que vous savez bien prononcer ?
- Parlêz pô môl ! J’vis seul à répôrer s’foutu pônt tous l’y jours, alors vous m’dônnez mon dû ?
- Je préfère que mon amie paye… En attendant, vous ne sauriez pas m’indiquer le chemin de Tük ?
- C’pô dur, la gôche de la ‘tastue et droite aprês ! Elle s’dépôche d’y traverssêr la gonz’ ?»

La guérisseuse n’avait rien compris à ses propos, mais elle jugea plus sain de s’en arrêter là dans leur échange improductif. Elle finirait bien par trouver Tük par hasard avant d’avoir déchiffré les paroles de cet énergumène, qui malgré son fort accent, jugeait bon de mâcher sa paille en plus de mâcher ses mots. Pour le moins ses difficultés en langue parlée témoignaient d’un grand isolement, elle se moquait donc bien de ce que Zora voudrait bien lui infliger. Qui n’avait ni famille ni proche ne serait pas pleuré.


***


Tük en vue ! Finalement ! Althéa avait fini par déterminer que la "’tastue" n’était autre qu’une statue à l’effigie de Khugatsaa qui se dressait au croisement de deux chemins, une fine sculpture qu’on aurait presque juré être une illusion si elle n’avait été aussi palpable. Le sentier de droite menait vers les hauteurs de la montagne, tandis que l’autre, le "gôche", chutait drastiquement vers la vallée en contrebas où l’on apercevait les vagues contours d’un village reculé. Pourquoi alors lui avait-il enjoint d’aller à "droite" ? La seule raison valable était que le douanier avait prononcé le "t" silencieux de "droit", car elles parvinrent au village sans jamais emprunter aucun tournant. Si on le côtoyait suffisamment, peut-être que l’on finissait par trouver une logique à ses babillages !

« Althéa Ley Ka’Ori  et Angélique Shassdo ? »

Quatre gardes patientaient à l’entrée du village, et visiblement elles avaient bien quelques heures de retard sur eux à en juger leur air penaud et las. Althéa hocha silencieusement la tête, tandis que les trois autres gardes se redressaient machinalement avant de s’approcher des deux protagonistes avec un air qu’elle interpréta comme le devoir, ou le professionnalisme, imprimé sur le visage.

« Je suis Neldoc, mais vous pouvez m’appeler Nel. Vous êtes finalement arrivés à bon port ! Considérez-nous à vos ordres pour la durée de votre mission.
- A nos ordres, rien que ça ?
- Oui. Nous assurons votre protection au nom du khorog. Nous sommes également chargés de lui faire un rapport une fois que vous en aurez appris plus sur le mal qui ronge ce triste patelin.
- Je vois. Et bien, je crois que vous nous avez suffisamment attendues, commençons à examiner les malades dès à présent. »


Dernière édition par Althéa Ley Ka'Ori le Sam 10 Fév - 15:59, édité 1 fois

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Un mal incurable EmptyJeu 11 Jan - 17:42

Elle a bien envie de lui rétorquer qu'elles ne sont pas perdues et que des mages n'arrivent jamais en retard, ni en avance d'ailleurs, mais précisément à l'heure prévue. Mais cela n'aurait pas le moindre intérêt si ce n'est provoquer une discussion sur la ponctualité, peut-être. Et puis le froid lancinant qui tente inlassablement de leur ôter la vie a quelque peu tendance à calmer les ardeurs de la nouvellement brune. Cette dernière se contente simplement de hausser les épaules et d'accorder le redoutable honneur à Althéa de traverser le pont en premier. Si elles sont toutes les deux des élues de Möchlog, elles le sont toutefois à différents niveaux. Quitte à ce que l'une des deux périsse, que ce soit la plus sacrifiable...

Zora observe ainsi sa cadette s'engager sur l'édifice brinquebalant tout en se demandant si elle parviendra de l'autre côté. Une part d'elle-même souhaite ardemment qu'elle y parvienne. Et une autre imagine avec un certain délice qu'il lui serait sûrement plus facile de massacrer tout le monde à Tük si elle venait à être débarrassée des exigences de la noiraude. Et curieusement, elle se sent presque coupable d'envisager un tel dénouement. Car Althéa a l'étrange faculté de faire naître dans le cœur même de la feue rouquine - ou du moins ce qui lui sert de coeur - des sentiments qui ne sont guère amenés à se côtoyer.

Le fait que la traversée se passe sans encombre pour sa comparse et qu'un signe de main de cette dernière invite à présent Zora à l'imiter. Lâchant un soupire d'appréhension, elle descend donc de sa monture et en saisit la bride pour la guider à son tour sur le chemin de bois et de cordes. Elle se fait violence pour ne pas considérer le vide qui se devine entre les planches humides. Elle prie ardemment le divin Möchlog de lui permettre d'atteindre l'autre côté du précipice. Et refuse d'envisager le simple fait que son Architecte ait autorisé le passage à la noiraude tout en lui refusant ses faveurs. Ce serait... douloureusement étonnant.

C'est alors que la silhouette qui se trouvait aux côtés d'Althéa décide de venir à sa rencontre. La distance s'égrainant, l’aînée du duo purificateur constate alors que l'homme qui s'approche n'a rien d'un soldat. En réalité il semble allier avec une absence totale de gêne nombre de défauts dont un corps peut hériter. Et lorsqu'il ouvre sa bouche pour exprimer un langage des plus immondes, Zora se rend compte que l'intellect de l'intéressé est à peu près égal à son apparence physique.
"Lô ch'tite dame elle m'ô dit qu'tu pôy'rait pour la chtrôvarsé!"
"Plaît-il?"
Le semblant d'irritation qui s'installe sur le visage de l'impur ne fait qu'amplifier l'irritation de la brune qui, si elle n'a rien compris à ce qu'il tentait de dire, en a pourtant entendu plus qu'il ne le fallait. Et tandis que cette véritable insulte à Möchlog recommence à... heu... s'exprimer en usant de mots qui n'ont ma foi rien de clair, la jeune femme puise dans sa magie pour amplifier sa force et projeter hors de son chemin celui qui agresse à la fois ses sens olfactifs, visuels et auditifs. Le cri qu'il pousse en chutant du pont, quant à lui, est presque mélodieux. Suffisamment pour arracher un sourire de satisfaction à la disciple de Möchlog qui se hâte ensuite de rejoindre sa comparse sur la terre ferme.
"Il a glissé..."
Peut-être est-ce l'habitude qui la pousse ainsi à se justifier avec un haussement d'épaule. Le fait est qu'elle doute sérieusement que la noiraude lui aurait envoyé cet homme si sa survie lui importait d'une quelconque manière. Les deux élues de la Chouette se connaissent à présent assez pour savoir comment elles fonctionnent. Du moins, pour l'essentiel. Et c'est donc un sacrifice humain qu'Althéa lui a envoyé. Une manière de s'assurer que la soif purificatrice de la brune sera en partie étanchée lorsqu'elles parviendront au village qui se devine en contrebas?

**********

Angélique... Shassdo? Zora se pince les lèvres et serre les poings avec une telle irritation que ses phalanges blanchissent. Le regard noir qu'elle décoche à la noiraude, quant à lui, exprime merveilleusement bien ce qu'elle pense de l'imagination de sa cadette. Le prénom n'était déjà guère facile à porter. Pourquoi a-t-elle jugé utile de l'affubler d'un tel nom? Si ce n'est pour entraîner une patience qui n'existe que dans les espoirs de certains, elle n'a pas d'explication. Mais une promesse est une promesse. Et pour l'instant, la brune se sent encore capable de ne pas sauter à la gorge de l'un de ces soldats qui leur font face.

À les entendre, ils sont là en tant que simples renforts. Une manière sans doute élégante de dire que leur vraie mission consiste à les surveiller. Toutefois il n'y a pas que des inconvénients à ceci. Car au final, ils devront tout de même assister les deux demoiselles. Et qui dit assister, dit indirectement servir. À défaut de pouvoir purifier tout ce qui mérite de l'être, la feue rouquine aura ainsi l'opportunité d'exercer une part du pouvoir dont elle héritera lorsqu'elle deviendra Impératrice. Une forme de compensation pourtant bien dérisoire...
"L'un de vous aurait-il l'obligeance de m'aider à descendre de ma monture?" s'enquit-elle. "Le voyage a été parfaitement éprouvant..."
C'est le dénommé Nel' qui s'en charge après avoir échangé un regard avec ses camarades. Satisfaite, du moins en partie, Zora lui adresse un vague sourire accompagné d'un léger signe de tête. Elle trouve une certaine forme de réconfort dans le fait que l'intéressé ne porte pas de cicatrices visibles. Mais il est difficile de vérifier son intégrité physique dans la mesure où ce dernier n'a que le visage d'apparent. Et à moins de les forcer à se déshabiller en plein Khoral, elle devrait s'en contenter.
"Séparons-nous!" propose-t-elle à Althéa lorsque cette dernière fait preuve d'un zèle qui a l'air sincère. "Je m'occupe des bâtisses au nord! Disons que nous nous retrouvons ici dans une petite heure pour mettre nos découvertes en commun et aviser sur la suite des événements?"
La disciple de Möchlog espère ainsi vainement que les gardes suivront la noiraude et lui ficheront une paix royale. Mais c'était sans compter sur les mathématiques et les divisions. C'est ainsi deux soldats qui lui emboîtent immédiatement le pas et arrachent un soupir résigné à la brune. Tant pis...

Le trio remonte à présent une rue aussi déserte qu'enneigée. Mais la lumière qui luit à la fenêtre des différentes bâtisses prouve que le village est loin d'être abandonné. Laissant le hasard s'exprimer - à moins qu'il ne s'agisse du destin? - la jeune femme choisit une maison au hasard et frappe sans ménagement sur la porte de bois. Toc toc toc...
"Qui est là?"
"Angélique, la..."
"Angélique qui?"
"Angélique Shassdo, la soigneuse envoyée par le Primo-Gharyn et son Khorog pour vous prêter assistance!" parvient-elle à préciser, d'abord coupée par la curiosité de l'autre. "Auriez-vous l'amabilité d'ouvrir la porte, je vous prie?"
Lorsque le verrou glisse et libère l'accès à un foyer qui a l'air confortable, Zora ne se fait guère prier pour y pénétrer et fuir le froid ambiant. Elle relève alors sa capuche et avise une femme qui doit avoir à peu près son âge. Cette dernière est déjà retournée au chevet d'un homme plus âgé - son père? - auquel elle applique une compresse humide sur le front. Vu les informations en sa possession, la brune s'attendait à un spectacle nettement plus morbide. Mais ce cas-ci ne semble guère différent de bien d'autres.

Et pourtant le mal incurable qui ronge certains des habitants de Tük ne s'est pas encore révélée pleinement à la curiosité de la comparse d'Althéa. Et tandis que le dernier garde pénètre dans la demeure et referme la porte derrière lui, l'intéressée s'approche du patient sans songer un seul instant que l'infection dont il est victime est bien plus pernicieux que la plus mortelle des maladies...

Althéa Ley Ka'Ori
Althéa Ley Ka'Ori
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Un mal incurable EmptyDim 14 Jan - 16:25
Irys : 507592
Profession : Guérisseuse du Troisième Cercle
My'trän +3 ~ Suhury (femme)
    « Il a glissé...
    - Oh, feignit-elle de s’étonner. Et tu l’as laissé tomber avec sa bourse ? »


***


Althéa leva les yeux au ciel, comme à chaque fois que Zora l’exaspérait et la divertissait en même temps par son autoritarisme. Une fois la surprise passée, Neldoc et son admirable patience se chargèrent de répondre aux attentes de la farouche, et elle lui envoya une onde d’allégresse dans l’espoir de solidifier son tempérament calme. Avec un peu de chance, il saurait supporter l’impudence de sa comparse avec la droiture que son poste lui imposait. Sans surprise, il fit partie des deux gardes attachés à Zora, et Althéa les regarda s’éloigner tous trois avec un certain goût âcre dans la bouche dû à l’inquiétude.

Dans quel but souhaitait-elle leur séparation ? Elle doutait que ce fût au nom de l’efficience. Quoique, peut-être que l’idée d’en avoir fini au plus tôt (en dépit de sa bonne volonté à la tâche) la poussait à agir avec rapidité ? Elle haussa les épaules pour elle-même, et suivit les deux gardes qui l’accompagnaient plutôt que de les mener. Elle ne prenait jamais le commandement trop ostensiblement, elle préférait la subtilité de l’ombre.

Les deux frères d’arme, l’un nettement plus âgé que l’autre, à moins que ses cheveux n’aient grisé bien avant l’âge, lui expliquèrent en deux mots les quelques informations qu’ils avaient attrapé au vol dans la matinée. A savoir qu’une mine abandonnée se situait à quelques kilomètres de là à flanc de montagne, et que les premières apparitions de ce mal dataient de bien quelques mois déjà. Lorsqu’elle demanda si les symptômes précurseurs avaient été antérieurs ou postérieurs à la fermeture de la mine, ils ne surent lui répondre. Ce qu’ils savaient en revanche, c’est qu’ils la menaient actuellement vers le premier malade supposé du village. Il était malheureusement le plus accoutumé aux effets de cette maladie, et il semblait en conséquence pertinent de le rencontrer avant les autres.

Ils eurent tôt fait de déboucher sur la petite allée arborée de conifères menant à son humble chaumière. Le village était pittoresque mais pas vaste pour un sou. Althéa fut invitée à frapper à la porte, et elle obtempéra. On entendit du grabuge à l’intérieur, comme si la surprise avait interrompu le citadin au cours d’une activité fort minutieuse, de cuisine ou de bricolage à son avis.

« Qui va là ?!  entendit-on hurler de l’autre bout de la pièce.
- Althéa ! Althéa Ley Ka’Ori, guérisseuse des Cercles de l’Aube. Je viens…
- Oui, oui, on m’a prévenu, j’arrive dans un instant ! »

La disciple Möchlog attendit patiemment, étonnée de l’aplomb dont il faisait preuve pour un patient présumé. Une constitution forte, peut-être ? Quelques secondes plus tard, le battant s’ouvrait sur un homme d’âge mûr et de même carrure que les gardes qui l’accompagnaient. Elle le salua d’un signe de tête qui se voulait respectueux, mettant à l’œuvre le comportement aimable qu’elle adoptait dans l’exercice de ses fonctions.

« C’est pour la perte de mon don, hein ?
- Oui, c’est bien ça, je ne peux pas vous garantir de le rétablir mais…
- Oh, vous en faites pas pour ça. Je suis un homme résigné. Entrez, entrez, je vous sers à boire ? »

Althéa ne dissimulait plus son étonnement. Elle s’attendait à un my’trän ravagé par la perte de son pouvoir, alité et en détresse, suppliant les Architectes de lui rendre ce qu’il lui avait été ôté. Mais elle se trouvait face à un individu visiblement en parfaite santé, et manifestement satisfait de sa condition. Elle lui emboîta le pas dans la pièce unique de sa maison, un lit défait dans un coin et un bazar indescriptible sur sa table à manger témoignant presque de son statut de célibataire endurci. Elle demanda poliment un verre de lait s’il en avait, de l’eau à défaut, tandis qu’il s’évertuait à faire un peu de place sur la table en bois sommaire mais au cachet indéniable. Avec sa voix adoucie par les années de service, elle s’enquit tout en prenant place sur la chaise qu’il lui tira :

« Excusez l’indiscrétion de ma question, mais votre perte de pouvoir n’a pas l’air de vous affecter tant que cela… commença-t-elle avec une réelle hésitation.
- Hm, au début, si, je l’avoue, j’étais terrassé. Sûr de sûr. Non seulement j’étais mourant, mais en plus personne ne me croyait quand je leur disais que mes illusions avaient disparu ! Alors quand je suis venu à bout de ma convalescence, j’étais heureux de m’en sortir avec la santé, quitte à ne pas m’en sortir avec ma magie. Je me suis un peu isolé de la vie de village, on me prenait pour un givré en manque d’attention ! Et puis lorsque d’autres ont commencé à avoir les mêmes symptômes, puis à voir leur magie se dissiper… J’étais à la fois ravagé pour eux, mais aussi je me sentais enfin compris…
- Sauriez-vous me parler de votre vie d’alors ? Et de ce qui a précédé la perte de votre don ? Avez-vous essayé de le recouvrer de quelconque manière ? Tout détail, même futile, est important. »

Elle refusait de parler de la mine trop tôt, en l’évoquant elle risquait de limiter les facteurs dans l’esprit de son patient autant que dans le sien. Mieux valait qu’il en parle par lui-même. Par ailleurs, elle posa sur lui un regard ferme mais à l’écoute, les mains posées près de son car c’est ce que font les amis lorsqu’ils sont à l’aise à votre table et sincères dans leurs démarches.


Dernière édition par Althéa Ley Ka'Ori le Sam 10 Fév - 16:00, édité 1 fois

Ingrid & Sigurd
Ingrid & Sigurd
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Un mal incurable EmptyJeu 18 Jan - 22:17
Irys : 754856
Un lit de fortune avait été installé dans la pièce à vivre, vraisemblablement pour permettre au convalescent de profiter de la chaleur du poêle. La salle pas bien grande de base, s’en trouvait encombrée. Un simple regard de l’extérieur permettait de s’en rendre compte. Ainsi deux femmes suffisaient à donner l’impression que la pièce était comble, alors quatre personne ! Le malade comme sa soignante en n’avaient que faire. Rien n’était fait pour mettre à l’aise la soigneuse ou ses accompagnants et le jeune femme ne finit par lui parler qu’après avoir terminé de s’occuper de son mari.

« Vous pouvez faire quelque chose pour Edgar ? Ça fait des jours qu’il est alité. Il mange à peine, je suis sûre que c’est la même infection que les autres ont eu. Vous savez, la maladie »

Son dernier mot était clairement appuyé en plus d’être chuchoté comme si elle abordait un sujet tabou ou honteux. Un dont on ne pouvait parler qu’à demi-mot, encore plus lorsqu’on parlait avec une étrangère, même soigneuse. Son regard détourné au moment de la mention du mal étrange, retourna se fixer sur l’homme allongé les yeux fermés à côté de sa chaise.

« Enfin, vous devez savoir, sinon vous ne seriez pas là. »

Ses mots étaient adressés à la brune pourtant elle ne la regardait pas, pas plus que les gardes. Eux, ils auraient pu être des meubles avec toute la considération à laquelle ils avaient eu droit, c’est à dire aucune. Mais Nel, pas plus que sa collègue Mélodie, s’en formalisèrent. À aucun moment leur hôte leur avait proposait de quoi se désaltérer ou même tout simplement un siège. Difficile de juger si c’était son comportement habituel ou seulement l’inquiétude qui la faisait agir aussi grossièrement.

À l’autre bout du village, ce qui ne représentait pas une grande distance soyons honnêtes, la rencontre se passait tout autrement. Le malade avait l’air bien portant et pouvait répondre aux questions. Et il ne s’en privait pas, jetant un coup d’œil de temps en temps vers les gardes restés à la porte.

« Bah, je ne sais pas trop quoi dire. Il y a rien de particulier qui s’est passé. Je suis tombé malade comme ça arrive parfois, ça a commencé par une violente quinte de toux alors que j’étais dehors en train de chasser. Puis comme ça se calmait pas et que je me sentais pas bien, j’ai préféré rentrer chez moi. Je me suis pas rendue compte tout de suite pour la perte de magie vous voyez. Je l’utilise pas tout le temps. Et puis, comme j’étais bien malade quand je m’en suis rendu compte, je me suis dit que c’était temporaire. Quand j’ai vu que ça l’était pas, je suppose que c’était trop tard. Mais en vous y prenant assez tôt vous pourrez éviter cela aux autres non ? Tout le monde ne peut pas le supporter, je le sais. »

Il prit une petite pause pour boire, c’est que ça faisait des jours qu’il n’avait pas parlé autant ! D’une voix toujours aussi calme, il reprit là où il s’était arrêté.

« Mais pour répondre à votre question non, ou plutôt, j’ai arrêté. C’est très dur à chaque fois de sentir se vide, cette coupure avec notre architecte. Et je ne sais pas faire autrement que ce que j’ai toujours fait pour créer des illusions. Enfin, vous avez sûrement de meilleurs idées que moi pour changer ça ! »

Là, il se tut pour de bon, regardant dans l’expectative et avec respect son interlocutrice. Il ferait ce qu’elle lui demanderait quoi qui lui en coûta. Qui était-il pour douter de la sagesse d’une envoyée de son Khorog et primo-Gharyn ?


Dernière édition par Ingrid & Sigurd le Mar 30 Jan - 9:24, édité 1 fois

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Un mal incurable EmptyVen 19 Jan - 9:34

Zora observe d'un regard sévère la jeune femme qui semble la considérer comme une esclave à son service. L'accueil laisse clairement à désirer. Est-ce ainsi que l'on traite une disciple de Möchlog venue apporter son aide? Cette insolente devrait être prostrée sur ses genoux, en train d'implorer les faveurs de celle qui était encore rouquine la veille. À défaut elle se contente de quémander du support comme s'il s'agissait d'un droit inaliénable. Les poings de l'adepte de la Chouette se referment, le cuir de ses gants craquant sous la pression.

Mais l’exiguïté de la pièce lui rappelle aisément la présence de Nel et de son acolyte. Ils personnifient la promesse faite à Althéa: agir comme les faux disciples de Möchlog le feraient. Et par extension, soigner ceux qui n'ont pourtant plus le droit de vivre. Zora lâche un soupire résigné puis demande d'un signe de la main à la jeune femme de lui céder sa place. Elle s'installe alors sur la chaise et pose sa main sur le bras de l'homme alité. Une légère aura bleuté l'enveloppe tandis qu'elle sonde sa chair à la recherche du mal qui assaille le villageois.

La brune perçoit la température anormalement élevée de ce patient. Tout comme elle perçoit la cicatrice qui remonte le long de son poignet. Lorsqu'elle prend conscience de cette impureté, elle retire sa main par réflexe et interrompt au passage son analyse. Des regards interrogateurs se posent sur elle et la forcent à réitérer l'opération. Dégoûtée, les traits crispés, Zora finit donc néanmoins par reposer la main sur le quinquagénaire. Elle n'a sans doute jamais détesté Althéa autant qu'en cet instant...
"La grippe! Cet abr... habitant a simplement attrapé la grippe... Ce qui explique par ailleurs sa perte d'appétit ainsi que sa fièvre! Et pourquoi vous allez sûrement tomber malade dans les jours qui suivent, vous aussi!" ajoute-t-elle en levant les yeux vers la jeune femme. "Rester enfermée dans la même pièce que lui n'était pas spécialement une bonne idée, voyez-vous?"
Bonjour les germes... Pourtant ce verdict ne répond pas à la question primordiale, celle qui explique également la présence de la fausse brune en ces lieux: pourquoi ne peut-il pas user de sa magie? Elle n'a pourtant rien ressenti d'anormal. Et s'il est vrai que Zora n'est guère habituée à soigner les autres, elle reste malgré tout capable d'exercer son art avec efficacité. Pourquoi donc n'a-t-elle rien trouvé? A-t-elle seulement cherché au bon endroit? Est-ce que la grippe altère l'efficacité de sa lecture arcanique du corps?

Fort heureusement il se trouve que l'homme n'est pas le seul villageois qu'elle a sous la main. Celle qui doit être sa fille semble parfaitement en forme. Et pourtant elle doit elle aussi être atteinte de ce mal qui ronge Tük. Elle est donc un sujet d'étude tout indiqué - et certainement plus pur - que la personne alité. Peut-être vaudrait-il mieux commencer par elle?
"Quoi qu'il en soit il devrait sans remettre avec un peu de repos supplémentaire. Hydratez-le régulièrement et si Möchlog le veut, il survivra!" explique-t-elle sans la moindre émotion. "Maintenant venez-ici! Il est temps que je me penche sur votre cas!"
Elle en a déjà trop perdu en s'occupant de son père. Sa mission n'est pas de soigner les maux bénins des résidents de ce village mais bien de découvrir la nature du mal qui les prive de la magie. Un manque de foi? L'idée serait plausible si les symptômes s'appliquaient à une seule personne. Là, c'est tout un village qui est victime de cette malédiction. De quoi alimenter quelque peu la curiosité de la feue rouquine qui pose à présent sa main sur l'épaule de la jeune femme.
"Usez de votre magie!" commande-t-elle.
"Mais je ne peux pas!"
"Je sais, oui, merci!" glisse-t-elle avec impatience. "Mais invoquez-la comme vous le faisiez avant que vous en soyez privée!"
Zora commence alors à sonder ce nouveau corps. Sa perception de ce dernier est plus claire qu'elle l'était avec son père. Sûrement parce que la grippe ne s'est pas encore déclarée. Mais la majeure partie de la magie de la brune n'est pas destinée à découvrir ce qui pourrait bloquer l'usage de la magie chez sa nouvelle patiente mais bien à se prémunir elle-même contre une éventuelle contagion. Le sort des habitants de Tük l'indiffère. Au contraire du sien...

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Althéa Ley Ka'Ori
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Un mal incurable EmptyMer 24 Jan - 20:34
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Profession : Guérisseuse du Troisième Cercle
My'trän +3 ~ Suhury (femme)
« Cette perte de magie, elle est donc apparue subitement, puisque vous ne vous en êtes pas rendu compte immédiatement ? Ou vous la pensez au contraire progressive ? Si cette question ne vous évoque rien, dites-moi plutôt combien de jours se sont écoulés entre le moment où vous avez réalisé en être dépourvu et la dernière fois que vous avez pu l’utiliser. »

La guérisseuse poursuivait son interrogatoire, mais en réalité, la situation échappait à son entendement. Comment résoudre un mal sans en connaître la cause, à partir des symptômes seuls ? Pour justifier de l’état de ses compatriotes, on lui avait suggéré l’implication potentielle des mines de magilithe voisines. Elle trouvait néanmoins préférable de se voir imposer cette théorie via des preuves limpides plutôt que de dégager par elle-même cette obscure causalité. Le professionnalisme certain qui la caractérisait lui dictait cette démarche impartiale, à savoir de soupçonner chaque chose avant d’en inculper quelqu’une. De cette façon elle éviterait toute erreur médicale inopportune.

Althéa se retrouvait donc forcée de tâtonner laborieusement, en quête du moindre indice susceptible d’incriminer la magilithe plus que tout autre facteur. Et par extension, d’incriminer les Daënars.
De fait, elle s’était rarement plongée dans une situation semblable. Personne dans son entourage proche, encore moins elle-même, n’avait connaissance de la maladie étudiée, et cela indisposait sa sérénité. Engendrer la perte des dons naturels des My’träns, c’était une menace réelle et effroyable, voire une arme quasi-politique très utile à l’ennemi. Par ailleurs, il lui était arrivé de peiner à trouver la pathologie responsable de curieux symptômes, mais jamais d’en découvrir une inconnue au bataillon en s’appuyant sur presque rien. Il fallait partir sur de toutes nouvelles bases, et donc revoir ses méthodes. Ses talents lui serviraient-ils dans ses recherches ? Elle était guérisseuse, et la santé de l’homme paraissait parfaite, sa convalescence loin derrière lui… Pourtant elle demeurait convaincue que Möchlog l’avait menée jusqu’ici pour une raison. Il lui faudrait simplement faire preuve de créativité.

Avec un peu de chance, songea-t-elle soudain, il restait une empreinte tenace de la maladie qui avait drainé la magie de l’homme. C’est là-dessus qu’elle parierait. Après avoir attentivement écouté la réponse de son interlocuteur, elle sortit quelques bouquets de son attirail, et sélectionna minutieusement deux ingrédients qu’elle présenta à la vue de tous sur la table. Elle désigna en premier une poudre rosâtre, nuancée d’azur, qu’enveloppait du papier kraft.

« La fleur des Architectes, peut-être en avez-vous entendu parler, mais dans le doute, je préfère vous en expliquer ses effets. J’ignore si vous pouvez recouvrer votre magie de quelconque manière, ni s’il est possible de prévenir le mal de s’octroyer celle d’autres. Je refuse tout bonnement de vous donner de faux espoirs quand votre situation est si singulière. Néanmoins cette fleur a des vertus certaines d’amplification de la magie, s’il vous en reste ne serait-ce qu’une once, j’ose espérer que ses propriétés soient suffisantes à nous le faire paraître. C’est un maigre réconfort pour vous, et votre foi, mais le côté positif, c’est que nous serons fixés. Le seul autre recours serait qu’un architecte vous visite… Bien, si vous le voulez bien, mettez la poudre florale sous la langue et n’avalez plus votre salive. »

La guérisseuse pinça les lèvres, et se résolut à reprendre contenance. Elle se laissait prendre par la résignation de son patient, pourtant tous les moyens n’avaient pas encore été mis en œuvre ! Qu’il n’espère pas trop était une bonne chose, mais cela ne suffisait pas pour sa profession. Aussi elle désigna du regard la deuxième plante, sous formes de feuilles celles-ci.

« Ces feuilles-là sont grandement employées chez les guérisseurs, certains de ses composés ont tendance à traquer les composants étrangers dans notre corps, autrement dit les parasites. Elle passe mieux en thé que sucée… Je vous préviens, le goût est très âcre. »

Lorsqu’il eût assimilé toutes les informations, elle tendit la main sur la table, paume ouverte vers le plafond. Une fois qu’il serait prêt, elle lui demanderait d’établir un contact physique, avec l’intention de faciliter la connexion magique. Elle traquerait le moindre signe de parasite dans son corps, de constante anormale, d’écho d’anomalie. La présence de magilithe, à tout hasard.


Dernière édition par Althéa Ley Ka'Ori le Sam 10 Fév - 16:00, édité 1 fois

Ingrid & Sigurd
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Un mal incurable EmptyMar 30 Jan - 10:45
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La situation était clairement de plus en plus inconfortable pour la jeune femme. Déjà sur les nerfs à l’arrivée du petit groupe, il n’en fallait pas beaucoup pour l’irriter ou la perturber. Le commentaire de l’adepte de Mochlög passa inévitablement mal. Pour toute réponse, elle reçu un regard acerbe la prenant de haut : quel conseil idiot, elle ne pouvait que faire comme d’habitude ! Cela ce serait sans doute mieux passé avec l’autre, les Protecteurs avaient dit qu’il y en avait deux, bien sûr il avait fallu qu’elle tomba sur l’incompétente !

Elle souffla, ferma les yeux. Le regard scrutateur de la brune et des deux gardes en arrière plan était trop. Les rouges écarlates, elle essaya de toutes ses forces de faire appel à sa magie. Pour faire juste un petit truc anodin, qu’elle faisait souvent sans y penser avant, rendre la pièce plus lumineuse et chatoyante. Mais rien. Elle sentait la magie non loin d’elle, c’était le plus frustrant, et elle ne pouvait l’atteindre, ça bloquer. Quelque chose avait sali, altéré son corps et l’empêchait de se connecter avec son architecte. Zora pourrait sentir très clairement cet état abjecte tout comme la présence de magilithe sous forme infinitésimale et difficilement perceptible.

« Madame, prenait un verre d’eau »

Avant même que la soigneuse n’eut réagi Mélodie avait amené de quoi se désaltérer à la jeune femme qui semblait sur le point de s’écrouler. Ce n’était peut-être pas de son ressort mais elle n’avait pu rester sans rien faire devant la détresse de cette Khurmi. Elle avait beau ne pas être sympathique, on ne pouvait souhaiter ce qui lui arrivait à personne !

« Non désolé, difficile de dire si quelque chose est rapide ou non quand on ne s’en rend même par compte. Je dirais cinq, non huit jours. Je l’utilise pas vraiment quand je chasse voyez-vous. »

Il avait pris le temps de réfléchir avant de répondre. Comme depuis le début de l’entrevue, il s’efforçait d’aider au mieux son interlocutrice. Il était désolé de ne pouvoir faire plus. Silencieusement, il la regarda sortir ses bouquets. Certaines plantes ne lui était pas inconnues mais celle qu’elle sélectionna l’était. Il écouta donc ses explications avec d’autant plus d’attention. Évidemment, elle ne pouvait rien lui promettre. C’était une femme honnête, une bonne soigneuse. Mais il s’était préparé à cette épreuve dès qu’on lui avait annoncé leur visite. Lui aussi devait faire tout ce qui était en son pouvoir pour aider.

« Je vais essayer, je ne vous promets rien non plus. »

Il avait dit ça avec un petit sourire tentant d’alléger la tension due aux attentes de chacun et à ses craintes. Doucement, il plaça la première poudre sous la langue. C’était très inconfortable de ne pouvoir déglutir mais il faisait de son mieux. Il hocha simplement la tête à la mention de la deuxième plante ne voulant rater l’application des consignes et prit la main tendue sans un mot. Toute cette situation était étrange mais pas plus que les circonstances qui l’y avaient amenée.
Son essai se déroula de façon différente de celui de l’autre maison. Déjà il avait les yeux ouverts, et ensuite les sensations n’étaient pas les mêmes. Il n’avait même pas la sensation d’être bloqué, il ne sentait rien du tout. Et ce pendant de longue et pénible minute. Il secoua la tête avant de parler. Chez lui aussi il y avait la présence envahissante et insidieuse de magilithe.

« C’est au tour de l’infusion maintenant ? »

Il s’exécuta, c’était un bon moyen de ne s’attarder sur la déception. Althéa avait malgré tout réussi à rallumer un brin d’espoir en lui. Après avoir laissé infusé quelques minutes, il se servit et bu la concoction.

« Effectivement c’est amer ! C’est gênant si je rajoute un peu de miel ? »

De la même façon qu’avant, il reprit la main tendue d’Althéa et tenta de nouveau l’expérience. Rien, toujours rien. Puis un feint et lointain écho. Il ne pouvait s’en servir, le lien était trop tenu mais toujours là ! Finalement, quoiqu’il eu dit avant, l’euphorie l’envahi. Il brisa le lien pour aller enlacer la soigneuse puis il la fit tourner dans les airs avant de la reposer au sol gêné. Les deux protecteurs avaient laissé faire, pas sûr de devoir intervenir.

« Excusez-moi je m’emporte. »

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Un mal incurable EmptyMar 30 Jan - 16:52

Elle ferme les yeux tandis que la magie se répand dans le corps de sa patiente. Elle use d'arcanes basiques pour évaluer l'état physique de celle qui n'est plus en mesure de se connecter à son Architecte. Zora la plaint sincèrement. Et elle n'ose d'ailleurs imaginer ce qu'il se passerait si elle venait à être séparée de Möchlog. Il est vrai que son lien avec la Chouette est privilégié, loin d'être égalé par celui que cette villageoise peut avoir avec le dieu en qui elle place sa foi. Si la feue rouquine venait à être privée de ses arcanes, elle en mourrait. Elle le sait. Raison de plus pour se préserver au maximum d'une possible contamination.

Toujours est-il qu'après un certain temps l'adepte de Möchlog parvient à identifier le problème. Et elle comprend alors aisément pourquoi l'auscultation du père de la demoiselle n'a pas porté ses fruits. La présence de la grippe altérait celle, plus ténue, de la magilithe. Probablement réduite en poudre. Le lien avec la mine qui a explosée quelques jours plus tôt semble alors évident. Se pourrait-il que le minerais des dieux, transformé en poussière, ait été porté par le vent d'Amisgal jusqu'à ce village et aux bourgs voisins? Le problème viendrait alors de l'inhalation de cette roche divine...

Zora ressent alors une profonde colère qui brise instantanément le lien magique avec sa patiente. Elle lâche un reniflement de dédain avant de s'écarter et rejoindre la fenêtre, se murant dans un silence. Mais elle se fiche pas mal de l'incertitude dans laquelle peut se trouver la jeune femme. Et encore plus du rôle qu'elle a promis d'endosser à Althéa pour mener à bien cette mission. Sa haine envers les daënars occulte ses autres pensées. Ces hérétiques ne se contentent pas seulement de piller la magilithe et d'en faire des armes. Leur incompétence, fusse-t-elle involontaire, cause peut-être davantage de dégâts encore.

La crainte que les hérétiques prennent conscience des conséquences de l'explosion et qu'ils se mettent à exploiter l'avantage qui en découle lui arrache un frisson. Ils ne doivent pas savoir! Ils prendraient alors un avantage certain sur la balance qui les oppose aux my'träns. S'ils venaient à être privés de leur magie lorsque la guerre éclatera... Que deviendraient-ils alors sinon des cibles faciles pour les bruyantes armes des daënars?
"Vous avez pu trouver quelque chose?"
"Ouais! Vous allez mourir!" répond-t-elle négligemment.
Perdue dans ses pensées, elle se contente d'exprimer son indifférence sans chercher à ménager la sensibilité de cette patiente qui n'a déjà plus le moindre intérêt. Un long silence envahit l'espace tandis que des regards réprobateurs se mêlent aux pleurs de la villageoise qui, visiblement, n'apprécie pas le verdict délivré par la "guérisseuse". Zora finit par se rendre compte de la situation et se fend d'un léger sourire.
"Ho ça va je plaisante!" soupire-t-elle. "Vous, les Khurmis, vous avez vraiment un problème avec l'humour..."
La puissance des regards désapprobateurs de Nel et de son acolyte s'intensifie. L'adepte de Möchlog lève les yeux au ciel, désapprouvant ce jugement moral bien loin de ses préoccupations. Pourquoi prêter attention aux considérations de la "malade" alors que l'avenir de My'trä pourrait bien être en jeu?
"Vous n'allez plus pouvoir user de votre magie, par contre! Le mal dont vous souffrez est si profondément ancré dans votre organisme que l'en extraire signifierait la mort! Je ne suis pas capable d'y remédier. Mais voyez le bon côté des choses: vous êtes vivante!" ajoute-t-elle en haussant les épaules. "Vous auriez pu vous retrouver avec un régisseur sur le dos! Avouez que ça, ça aurait encore moins drôle que ma petite taquinerie!"
La fausse brune remonte son écharpe sur son nez et sa bouche, cherchant maintenant à éviter d'être contaminée par la magilithe qui pourrait encore voltiger dans les airs aux alentours du village. Ce faisant, elle se sonde une nouvelle fois pour s'assurer qu'elle n'en a pas inhalé. Les signes sont encourageants. Mais elle ne tient pourtant pas à rester une seconde de plus au sein de ce village maudit.
"Bon et bien je vous souhaite une belle vie et plein de bonheur! Ho et je vous offre la consultation! À chaque jour suffit sa peine, pas vrai?" conclue-t-elle avant de se tourner vers Nel. "Nous partons! Je dois m'entretenir avec ma collègue!"
Elle adresse un dernier regard aux deux résidents et se retrouve à nouveau bien vite dans le froid. Un froid presque rassurant, cette fois-ci. L'ambiance dans cette demeure était parfaitement détestable. Peut-être plus fraîche encore que le vent ou la neige qui fouettent à nouveau son visage. Zora s'affaire dès lors à retrouver sa comparse, pressée d'avoir une discussion avec celle qui l'a entraînée dans ce cauchemar...

~~~~~~~~~~

Son poings s'écrase sur la porte. Elle l'ouvre sans attendre de réponse et glisse sa tête à l'intérieur, ravie de découvrir Althéa en présence des bouseux locaux. Ne prêtant guère attention aux intéressés, elle se contente d'adresser un signe de tête à sa comparse pour lui indiquer que sa présence est requise. Après quoi elle l'attend quelque peu en retrait du groupe formé par ses propres gardes-chiourme.
"J'imagine que nous sommes arrivées à la même conclusion?" questionne-t-elle son alliée lorsque cette dernière la rejoint. "Je savais que ces mines symbolisaient le mal. Mais j'ignorais à quel point... C'est une catastrophe!"
Et elle pèse ses mots... La rouquibrune se passe une main dépitée sur le visage tout en décochant un regard aux soldats envoyés par les dirigeants de Reoni pour les "assister". Elle ne sait guère comment présenter la chose qui la turlupine à sa camarade. Elle lui a promis de ne pas faire de grabuge. Mais les circonstances étaient alors bien différentes.
"Écoute... Si jamais les daënars apprenaient que la magilithe peut avoir de tels effets sur notre peuple ils ne mettraient pas longtemps avant de créer une nouvelle arme." lui énonce-t-elle sur le ton de l'évidence. "Je sais que tu n'aimes pas ça mais le seul moyen de s'assurer que le secret perdure est de réduire les infectés au silence. Une rumeur vaut toujours mieux qu'une certitude..."
Ses désirs personnels se mêlent à l'intérêt général. Si cela ne tenait qu'à elle, ce village brûlerait déjà. Mais si l'on considère la situation dans son ensemble, la mort des résidents serait profitable à My'trä toute entière. C'est un mélange d'altruisme et de fanatisme qui guide les paroles de la disciple de Möchlog. Mais il reste à convaincre Althéa du bien fondé de cette proposition. Pour peu, bien sûr, qu'elle ne soit pas déjà arrivée à la même conclusion. Puis tenter de rallier les soldats à leur cause. Ou, le cas échéant, les empêcher d'être une gêne...

Zora relève un regard aussi suppliant qu'inquiet pour croiser celui de sa camarade. Elle ne pourra rien faire sans elle...

Althéa Ley Ka'Ori
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Un mal incurable EmptySam 10 Fév - 17:24
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Althéa avait fait la moue à l’idée de rajouter du miel dans la concoction. Par mesure de précaution, elle préférait limiter les excipients susceptibles d’interférer avec le produit initial. Aussi inoffensif qu’était le miel, elle n’avait aucune garantie qu’il irait de pair avec les principes actifs.

L’homme s’exécuta, et elle lui en fut reconnaissante. Ils reprirent leur protocole, plus tendus que la corde d’une harpe. Althéa se rendit compte qu’il s’agrippait à son poignet avec toute la force dont l’espoir se savait capable lorsqu’il était particulièrement ténu. C’était le revers d’espérer ; moins on croyait la chose possible et plus on s’y attachait corps et âme. Elle s’apprêtait à mettre fin à ce futile rituel de pseudo-guérison, irritée de se sentir si démunie face à ce mal, face à cette espérance qu’il lui transmettait, lorsqu’elle sentit quelque chose vaciller. Ce n’était pas de la magie, elle était bien incapable de la ressentir depuis qu’elle s’était défaite des arcanes illusionnistes. Non, c’était plutôt la magilithe qui vacillait, s’ancrait un peu moins dans ce corps meurtri. Avant qu’elle n’ait pu réaliser tout à faire de quoi il s’agissait, l’homme la prit dans ses bras et la fit virevolter. Ses joues virèrent au cramoisi, et elle resta quelque peu sans voix, chancelante lorsqu’elle remit un pied à terre.

« Il n’y a pas de mal, s’empressa-t-elle de le rassurant, espérant mettre un terme à leur gêne respective. »

Il lui était plus qu’inhabituel d’être enlacée, qui plus est par un homme autre que ses frères ! Elle était plutôt accoutumée à toucher les patients que l’inverse. Aussi pragmatique fut-elle, Althéa n’en demeurait pas moins un être prude et socialement en retard lorsqu’on parlait de relations affectueuses ! Zora fit une irruption à point nommée, qu’elle accueillit comme un miracle. Elle se retourna vers l’homme, qu’elle n’osait plus regarder dans les yeux pour l’heure, et l’informa :

« Les composés sont encore en train d’agir, n’avalez rien d’autre pour l’instant, et nous verrons si l’on peut aller plus loin dans le traitement. Les Architectes sont toujours présents en vous, de cela soyez assuré. »

Elle se voulait réconfortante, mais ils étaient loin d’avoir recouvré sa magie. La foi était présente, la volonté divine également, mais la magilithe devait être éradiquée ! Néanmoins, elle-même trouvait agréable de penser que les dieux veillaient encore sur ce village, et que seule la magilithe rendait impossible l’usage de leurs dons. Khugatsaa n’abandonnait pas ses enfants, c’est les daënars qui interféraient indirectement sur ce lien. Réprimant sa colère croissant à l’égard des exploitants de magilithe, Althéa s’empressa de rejoindre sa partenaire à l’extérieur. Son bilan semblait bien plus pessimiste que le sien ! Entre ses deux déclarations, elle parvint tout juste à gronder :

« Oui, ces mines sont maléfiques… »

La suite de ses propos, en revanche, la laissa interdite, puis lasse. La rouquine ne perdait pas un prétexte pour tuer, assassiner à tout prix ! Elle baissa volontairement le ton pour lui répondre. En son for intérieur, elle s’attristait que malgré l’intelligence et la ruse dont Zora était capable elle se fît aveugle aux plus simplissimes des indices, menée par ses pulsions plutôt que maîtresse de celles-ci.

« Réfléchis, Angélique, tu crois que les Daënars ignorent vraiment les effets de la magilithe sur notre magie ? Certains My’träns travaillent dans les mines, d’autres sont esclaves sur leurs exploitations, ils sont bien imbéciles s’ils ne s’en sont pas rendus compte à l’heure qu’il est ! Et on ne peut pas se permettre de les penser imbéciles, quand bien même ils l’étaient. La Technologie est dans leur camp, on ne peut rien laisser au hasard. Alors dis-moi sincèrement, tu préfères que l’on élimine tous nos tracas immédiats dans l’espoir ignare de repousser l’inévitable, ou avoir avoir une longueur d’avance sur l’ennemi ? »

La laissant assimiler la rhétorique de sa question, Althéa s’engouffra à nouveau dans la chaumière à pièce unique. La priorité était de trouver un palliatif à ce mal, éliminer la magilithe de l’intérieur – car raisonnablement l’arracher physiquement serait un processus long et dangereux. Elle offrit un sourire conciliant à son patient.

« Comment vous sentez-vous ? Les premiers signes étaient encourageants, mais il va nous falloir poursuivre le traitement. Tenez, prenez le reste des feuilles. En thé, une fois par jour entre deux repas pour commencer, ce devrait être suffisant... Puisse Khugatsaa continuer de veiller sur vous. »  

Tous les espoirs du village reposaient sur ces larges épaules. La guérisseuse fit une révérence courtoise de la tête, et se retourna vers les deux gardes encore présents, leur faisant signe qu’ils pouvaient tous trois disposer pour l’instant. Le groupe de six se retrouva donc assez naturellement en cercle irrégulier, devant la chaumière du chasseur. Althéa s’adressa principalement à Neldoc, mais elle regardait de temps à autres les trois gardes sous son commandement, évitant soigneusement le regard de Zora.

« Je pense qu’il est nécessaire de discuter avec le gharyn et le khorog de ce village. Vous avez plus de légitimité que moi, la décision vous revient, et la parole également. Vous parlez au nom de Yoris et Aldin, et je ne suis qu’une émissaire. Mais si vous désirez mon conseil, il n’y a que deux options envisageables : enterrer la mine ou déplacer le village. Il faut par ailleurs fournir les malades en Az Jargal, les feuilles sont onéreuses mais les herboristes de Reoni en ont probablement en stock. Il faudrait peut-être se concentrer sur la population de Tük pour l’heure, afin de vérifier ses effets, avant d’étendre le traitement aux autres villages touchés. Pour ma part, je vais me renseigner auprès de mon dispensaire de Darga pour envisager plus de traitements, mais c’est là l’étendue de mon verdict. Je pense qu’Angélique partage mon avis. »

Ingrid & Sigurd
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Un mal incurable EmptyMer 14 Fév - 9:01
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La blague de Zora fut fracassante mais pas dans le bon sens. Le regard choqué de la patiente se transforma en un d’incompréhension puis de haine violente. Qui était cette femme pour se permettre de jouer ainsi avec ses nerfs, avec sa vie ? Elle se plaça inconsciemment entre cette personne maléfique et son mari. Que lui avait-elle fait et à elle ? Des larmes coulaient alors qu’elle entendait le second prognostique, le vrai ? Que pouvait-elle croire ? Elle ne voulait certainement pas que ça soit vrai non plus mais c’était beaucoup trop complexe pour une simple plaisanterie de mauvais goût. Muette dans son désarroi, elle fouilla des yeux la mine fermé des Protecteurs à la recherche d’un signe, de n’importe quoi pour dire que c’était encore des mensonges mais rien. Sans lui laisser le temps de la questionner, la soigneuse disparaît de façon aussi disgracieuse que l’ensemble de sa visite, Nel sur les pieds et un verre d’eau qui va se fracasser non loin de la porte D’un commun accord Mélodie est restée derrière pour réconforter un peu la patiente. Autant qu’elle pouvait avec le temps limité que la protectrice pouvait lui accorder…

Le patient d’Althéa avait un comportement bien différent, mais il fallait dire que la soigneuse aussi et son prognostique était bien meilleur. Il regardait cette dernière écoutant chaque mots et les gravant dans son esprit. Tout comme le visage de celle qui avait fait tant pour lui. Le visage rayonnant devant l’espoir retrouvé, il ne pouvait que remercier chaleureusement sa bienfaitrice.

« Je ferais tout ce que vous me direz ! Si vous avez besoin de tester le remède, je suis votre homme ! »

Les gardes laissèrent une certaine distance entre leur groupe et les soigneuses, leur laissant l’intimité nécessaire pour discuter. Ils en profitèrent également pour échanger sur ce qui s’était passé dans chacune des demeures. Des regards dubitatifs se posèrent sur la fameuse Angélique, cherchait-elle même à accomplir sa mission ?

Il reposa son verre d’eau dès qu’il vit Althéa pénétrait à nouveau chez lui. Il répondit toujours aussi d’humeur aussi joyeuse.

« Bien mieux grâce à vous ! »

Les feuilles allèrent directement dans un panier à fruit vidé à la hâte, il rangerait correctement plus tard, il n’allait pas retarder la soigneuse qui devait avoir beaucoup à faire !

« Et qu’il veille aussi sur vos pas ainsi que Möchlog. Vous aussi protecteurs. »

Cela fait, tous purent sortir pour avoir une discussion sur la marche à suivre. Une discussion des plus sérieuses et aux conséquences importantes. Neldoc, en tant que responsable du petit groupe, prit le temps de réfléchir avant de répondre aux propos de la jeune femme. La précipitation était rarement bonne conseillère.

« C’est une excellente nouvelle que nous puissions faire quelque chose fasse à ce mal, peu importe le coût. On suivra vos conseils dans ce domaine quand vous estimerez avoir trouvé un remède adéquate nous pourrons l’étendre à toutes personnes touchées. Quant au village, je pense qu’à l’heure actuelle il est plus prudent de l’évacuer. Si nous fermons la mine cela n’annulera pas immédiatement la cause tout ça si ? Et sa fermeture risque de ne pas être immédiate, il nous faut d’abord en référer à Réoni. »

Il s’arrêta un instant. Regardant l’autre guérisseuse, celle dont au final il ne connaissait que le nom. Ça ne lui plaisait pas de la laisser seule. Autant il faisait confiance à Althéa autant là il craignait ce qu’elle pouvait dire aux Khurmis malade…

« Je me charge de discuter avec les dirigeant de Tük, il faut effectivement les informer de vos découvertes. Et je me chargerais de prévenir le Khorog et son primo-Gharyn. Je vous laisse Mélodie, Johan et Hal pour aller à Darga, ou ailleurs si vos chemins se séparent ? Une de vous reste-t-elle ici pour surveiller l’évolution du traitement donné ? »

Il posa un regard interrogateur sur Angélique. Le choix serait vite fait, si leur chemin se séparait, c’était elle qui aurait deux protecteurs pour la suivre.

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Un mal incurable EmptyJeu 15 Fév - 7:26

Elle soupèse l'argument d'Althéa tandis qu'elle lui adresse un regard sceptique. L'intrigue est un art dans lequel la noiraude semble se complaire mais qui nécessite un certain pragmatisme. Cherche-t-elle réellement à obtenir un avantage tactique face aux daënars - y'en a-t-il seulement besoin? - ou s'en sert-elle pour cacher son désir de sauver ces gens? Les choses n'ont jamais été très claires entre elles. C'est la vision de la rouquine qui explique leur rapprochement, non le jeu des affinités. Et c'est encore grâce à cette vision que la fanatique accepte sa compagnie ou même de se plier aux règles de ce qui n'est qu'une plaisanterie à ses yeux.

Et pourtant elle ne peut ignorer le désaccord profond qu'elle ressent envers la stratégie choisie par sa cadette. Elle doute que les esclaves my'träns puissent faire de la magie en présence des daënars qui exploitent les mines. Elle doute également que les hérétiques aient put soumettre des gens pratiquant réellement la magie. Et, finalement, elle doute que les exploitants des mines prêtent une quelconque attention à la qualité de vie ou à la santé de ceux dont ils se servent pour creuser la terre. Que sont ces derniers à leurs yeux sinon des outils semblables à ceux que Technologie leur a offerts?

Zora lâche un soupire désabusé en prenant conscience de la portée des paroles prononcées par Althéa. Et ce qu'elles sous-entendent... Il faut croire qu'elle préfère cultiver sa réputation auprès des lâches qui siègent à Reoni plutôt que d'accomplir la volonté de Möchlog. Elle préfère l'humain au divin. Et c'est un constat des plus déstabilisants. La rouquine croyait avoir compris les intentions de la noiraude. Et à présent elle se rend compte qu'elle les aura à peine effleurées...
"Je veux simplement que nous fassions ce que notre Architecte souhaite que l'on fasse!" nuance-t-elle. "C'est en la lui que je place ma foi, pas en des stratagèmes basés sur des suppositions ou animés par l'ambition personnelle! Nous n'avons pas besoin de Reoni dans l'équation!"
Mais cette réflexion semble se perdre dans le vent puisque Althéa est déjà en train de retourner au chevet des blessés. Des armes infortunées privées des joies de la magie. Des victimes privées d'espoir. Ils ne sont pas coupables, loin de là. Et pourtant ils doivent mourir. Leur âmes doivent être extirpées de leurs corps contaminés. Que se passerait-il s'ils devenaient des anomalies? Althéa et ses commanditaires pensent-ils réellement pouvoir sauver tous les infectés? Elle pourrait rire de cet optimisme si seulement la situation se prêtait à une quelconque forme de plaisir...

~~~~~~~~~~

La main refermée sur la bride de sa monture, sa capuche rabattue sur le visage, Zora écoute les recommandations de sa comparse au quatuor de protecteurs. Elle reste silencieuse mais n'en pense pas moins. En réalité elle fait même de son mieux pour ne pas suivre les pulsions qui lui commandent de mettre fin à cette pathétique comédie. Et elle y parvient avec un semblant de réussite. Car elle a fait une promesse. Et si elle la regrette, elle n'a malheureusement qu'une parole. Elle sera tout simplement moins prompte à réitérer l'expérience...

Pourtant elle relève un regard empli d'espoir en direction de Neldoc lorsque ce dernier est confronté à un choix: fermer la mine ou évacuer le village. Puis un nouveau soupire quitte les lèvres de la fausse brune lorsqu'elle entend que ce sera encore aux my'träns de payer le prix des erreurs daënars. Des erreurs encore amplifiées par les manquements de Reoni.
"Fermer ces mines n'annulera pas le mal qui a déjà été fait, non!" souligne-t-elle d'un ton sombre. "Mais cela pourrait empêcher une future catastrophe comme celle-ci, par exemple! Vous voulez éviter que davantage de villages subissent le même sort que Tük? Alors détruisez le mal à sa source!"
La jeune femme monte alors sur sa monture et caresse un bref instant l'encolure de l'animal avant de reporter son attention sur les personnes présentes. Althéa leur a donné ses recommandations. Il lui semble normal de faire de même. La rouquine ne s'est jamais sentie à l'aise dans le rôle d'une suivante docile, de toute façon.
"Vous voulez savoir ce que j'en pense? Oui, évacuez ce village! Permettez aux victimes de Technologie d'aller raconter à vos compatriotes ce qu'il s'est passé à Tük et dans les villages voisins. Qui sait? Avec un peu de chance ils prendront les armes et régleront eux-même les problèmes inhérents à la présence des hérétiques sur vos terres. Car pendant que vous débattez sur le bien-être de la population locale vous semblez bien prompte à oublier que certains des vôtres triment sous le sol et contribuent bien malgré eux à renforcer nos ennemis! Leur sort serait-il moins important que celui de ces villageois?"
Une question des plus rhétoriques. La réponse, elle la connaît. Et elle sait également que nombre de ceux qui prétendent protéger leurs peuples sur My'trä ne sont rien de plus que des lâches qui ont oublié ce que signifie être des Enfants des Architectes. La fanatique décoche un regard de dégoût à Neldoc avant de reporter son attention sur Althéa.
"Tu sais où me retrouver!" lui rappelle-t-elle avant de s'adresser aux protecteurs. "Vous connaissez à présent la nature du mal qui règne en ces lieux! Mon travail est donc terminé. Faites le vôtre!"
Une manière de leur signifier qu'elle n'a pas besoin de leur "aide" et encore moins d'une escorte. Elle fait tourner les sabots à son cheval et regagne le pont qui lui permettra d'atteindre l'autre côté du précipice. Il est désormais temps de retourner à Suhury et de fuir le froid glaçant de cette contrée...

Althéa Ley Ka'Ori
Althéa Ley Ka'Ori
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Un mal incurable EmptyJeu 8 Mar - 20:46
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Profession : Guérisseuse du Troisième Cercle
My'trän +3 ~ Suhury (femme)
Althéa acquiesça lentement aux observations de Neldoc, heureuse qu’il fût réceptif à ses conseils. Elle se montra cependant moins expressive au coup d’éclat de son acolyte. Jusqu’alors irréprochable -du moins sur l’échelle de Zora, elle avait fait preuve de plus de raison qu’escompté-, elle se montra fort odieuse envers les protecteurs.

La guérisseuse laissa échapper une expiration lasse, se résignant au mutisme le temps que la tempête ne cède à l’accalmie et que Zora s’en retourne à ses occupations usuelles. Nul doute que d’ici quelques jours on entendrait à nouveau parler de ses crimes ! Avec un plaisir égoïste et un pincement au cœur douloureux, elle la regarda s’éloigner dans un dramatisme digne des grandes tragédies théâtrales. En son for intérieur, elle lui enviait la simplicité avec laquelle elle agissait, selon son instinct et sans filtre aucun, et elle craignit le temps d’un instant qu’elle ait mis fin par le présent départ à leur fragile collaboration. Elle chassa bien vite ces pensées malvenues pour se tourner vers Neldoc, l’air à la fois gêné et calme face à cette effusion de colère.

« Je tiens à m’excuser pour l’attitude d’Angélique. Elle est fidèle aux mœurs suhurs en terme de tact, et elle craint qui plus est que les infectés soient des anomalies – comprenez de potentiels sources de contagion, y compris pour elle. Je n’ai aucun moyen de le vérifier à l’heure qu’il est, mais je pense que si leur état justifiait d’un tel statut, alors les régisseurs auraient rasé ce village paisible depuis longtemps. »

La guérisseuse n’avait pas trouvé meilleur mensonge pour répondre de son attitude ; tout un chacun ne craignait-il pas l’infection contagieuse des anomalies ? Cela excusait-il, au moins en partie, un comportement aussi ingrat ? Elle considérait pour sa part que la mission avait été un succès. Zora avait prouvé qu’elle savait refreiner ses pulsions, chose dont elle doutait jusqu’alors. Les protecteurs la voyaient probablement comme un élément perturbateur, et c’était regrettable, mais s’ils avaient eu une vision plus globale de l’entourloupe, ils auraient sans doute partagé son étonnement quant à la retenue exemplaire de la fameuse Angélique Shassdo. Elle se promit en revanche de ne plus jouer avec le feu de la sorte. Elle était bien chanceuse qu’aucun mort n’ait été signalé dans le sillage de Zora pour cette fois ! Sa crédibilité en aurait pris un coup irrémédiable.

« Néanmoins, à sa décharge, Angélique est sensée sur au moins un point ; l’exploitation minière n’a que trop duré. Si elle en vient à nous retirer ce qui nous est le plus cher, ce qui nous définit en tant qu’individu et en tant que patrie, alors sa légitimité me parait compromise. J’ignore si le khorog et le gharyn seront prompts à agir, mais je suis à présent convaincue et prête à tout pour négocier la fermeture des mines. Pacifiquement s’ils en ont la sagesse. »

Althéa avait d’ores et déjà prévu de s’entretenir avec Aldin à ce sujet, mais l’opportunité n’était pas de trop. Des deux missions entreprises en lien avec les mines, l’une imposée l’autre choisie, elle tirait le constat accablant que les conséquences sur la population my’trän ne connaissait nulle contrepartie digne de ce nom. Les daënars étaient tolérés sous le conjecture que cette indulgence préserverait la paix. Mais qu’était la paix lorsqu’elle aliénait l’homme qui la prônait ? Plus que la liberté des my’träns esclavagisés et l’intégrité des travailleurs accidentés, c’était leur essence-même qui se voyait menacée par la magilithe. Ce matériau était celui des dieux, et ils punissaient ceux qui s’en approchaient de trop près.

« Pour ma part je resterai ici pour étudier pas à pas l’évolution des infectés, et constater de mes propres yeux qu’ils sont bel et bien à même de recouvrer leur magie. J’enverrai une missive aux guérisseurs de Darga depuis Reoni en même temps que je me réapprovisionnerai en herbes si les signes continuent à être encourageants. Je ferai mon rapport auprès d’Aldin en personne une fois que j’aurai une meilleure appréhension de cette guérison tout juste initiée, mais j’espère qu’il sera heureux d’entendre de votre voix qu’il y a de l’espoir. »

Elle le faisait autant par souci du travail bien fait que pour avoir une preuve que les Daënars ne détenaient pas un tel aval sur les My’träns. S’ils avaient entre leurs mains un moyen de leur retirer leur magie, alors elle était plus qu’inquiète pour sa patrie ; elle déplorait déjà les désastres que cela engendrerait. Ils n’auraient qu’à répandre de la magilithe brute chez les plus fervents pour amoindrir leurs pouvoirs ! C’en était risible de facilité ! Et c’était une arme qu’ils ne pouvaient leur concéder. A bien des égards, leur présence en My’trä était une erreur politique issue de la démagogique seule.

Ingrid & Sigurd
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Un mal incurable EmptyMar 13 Mar - 10:40
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"Fermer ces mines n'annulera pas le mal qui a déjà été fait, non! Mais cela pourrait empêcher une future catastrophe comme celle-ci, par exemple! Vous voulez éviter que davantage de villages subissent le même sort que Tük? Alors détruisez le mal à sa source!"

Elle déformait ses propos. Ce n’était pas ce que Neldoc avait sous voulu dire. Il ne pouvait agir sur un simple coup de tête, ni sans l’aval de la capitale. Les conséquences pouvaient être importantes. Et le fait est que même fermé l’environnement resterait altéré tant qu’ils n’auraient pas trouvé de solution. Du moins, il ne voyait pas de raison qu’il en fut autrement. Les mots de la fanatique trouvaient pourtant un écho dans les pensées enfouies des protecteurs présents. Eux-aussi souhaitaient voir cette insulte faite aux Architecte disparaître de leur terre.

« Nous ne comptons pas la laisser ouverte contrairement à ce que vous pensez. »

Le chef de groupe avait été quelque peu piqué à vif par l’accusation d’incompétence de cette drôle de soigneuse. Lui tenait son métier à cœur et ne se laissait pas aller à des plaisanteries de mauvais goût envers les gens qu’il servait.

"Vous voulez savoir ce que j'en pense? Oui, évacuez ce village! Permettez aux victimes de Technologie d'aller raconter à vos compatriotes ce qu'il s'est passé à Tük et dans les villages voisins. Qui sait? Avec un peu de chance ils prendront les armes et régleront eux-même les problèmes inhérents à la présence des hérétiques sur vos terres. Car pendant que vous débattez sur le bien-être de la population locale vous semblez bien prompte à oublier que certains des vôtres triment sous le sol et contribuent bien malgré eux à renforcer nos ennemis! Leur sort serait-il moins important que celui de ces villageois?"

Pourquoi était-elle venue ? À part attiser les tensions, elle n’avait rien fait de bien au contraire d’Althéa. Tout ce qu’elle disait été déformée par le spectre de la haine. Que répondre à de telles inepties ?! Fallait-il même y répondre… Cette fois les mots de l’adepte de la chouette ne réussit qu’à heurter les protecteurs cette fois. Mélodie posa une main sur le bras de Neldoc qui était visiblement tendu, inutile de s’emporter face à elle. Il croisa le regard de sa collègue avant de répondre plein de dépit.

« Vous mélangez tout. »

Il lui retourna sans ciller son regard de dégoût. Cette femme était plus perdue dans ses illusions qu’un khurmis !

"Vous connaissez à présent la nature du mal qui règne en ces lieux! Mon travail est donc terminé. Faites le vôtre!"

Ses mots furent un soulagement. Ils perdaient peut-être une soigneuse mais elle avait été ni consciencieuse ni très dévouée. Ils gagnaient clairement à ce qu’elle partit. Bien sûr cela bouleversait ce qu’ils avaient prévu de faire, mais ce n’était qu’un menu détail. Personne n’entrava sa route ni ne fut émue de son départ. Ou même prit la peine de lui répondre.

« Je tiens à m’excuser pour l’attitude d’Angélique. Elle est fidèle aux mœurs suhurs en terme de tact, et elle craint qui plus est que les infectés soient des anomalies – comprenez de potentiels sources de contagion, y compris pour elle. Je n’ai aucun moyen de le vérifier à l’heure qu’il est, mais je pense que si leur état justifiait d’un tel statut, alors les régisseurs auraient rasé ce village paisible depuis longtemps. »

Le petit groupe se détendit visiblement après le départ de la fausse brune. Neldoc sourit même aux explications de la seconde soigneuse, pas pour se moquer même s’il était sceptique face à ses mots, mais pour sa prévenance. Son sens de la responsabilité était louable, c’était elle après tout qui avait amené Angélique sur la mission.

« Oui, il n’y a que peu de doute à ce sujet.

-Néanmoins, à sa décharge, Angélique est sensée sur au moins un point ; l’exploitation minière n’a que trop duré. Si elle en vient à nous retirer ce qui nous est le plus cher, ce qui nous définit en tant qu’individu et en tant que patrie, alors sa légitimité me parait compromise. J’ignore si le khorog et le gharyn seront prompts à agir, mais je suis à présent convaincue et prête à tout pour négocier la fermeture des mines. Pacifiquement s’ils en ont la sagesse.

-Je pense que nous en avons tous consciences ici. Et nous pouvons avoir foi dans la réactivité de nos dirigeants face à cette situation des plus préoccupantes. Johan, tu pourras porter les nouvelles à la capitale, quant à nous, nous restons à votre disposition ainsi que pour aider à l’évacuation.

-Pour ma part je resterai ici pour étudier pas à pas l’évolution des infectés, et constater de mes propres yeux qu’ils sont bel et bien à même de recouvrer leur magie. J’enverrai une missive aux guérisseurs de Darga depuis Reoni en même temps que je me réapprovisionnerai en herbes si les signes continuent à être encourageants. Je ferai mon rapport auprès d’Aldin en personne une fois que j’aurai une meilleure appréhension de cette guérison tout juste initiée, mais j’espère qu’il sera heureux d’entendre de votre voix qu’il y a de l’espoir.

-Vous nous avez donné plus que de l’espoir, vous avez trouvé la source du mal. Je vais de ce pas discuter avec le khorog et le gharyn de Tük pour mettre en marche l’évacuation. Inutile de prendre des risques en restant dans le village même. Nous pourrons vous aider pour interroger les gens pour préciser éléments concernant la contamination, si vous nous dites quoi chercher. Je reviens tout de suite. Hal, viens avec moi. »

Le groupe se dispersa bien rapidement, ne laissant que Althéa et Mélodie derrière. Les discussions ne durèrent pas longtemps, ou moins que ce qu’aurait pensé Neldoc. Évidemment, les habitants n’étaient pas vraiment ravi de devoir quitté leur hameau. Mais le fait que ce ne soit que temporaire, ou du moins en théorie, et que cela signifiait aussi le début de la guérison pour nombre d’entre eux aida. Les gens comme le loup solitaire qu’avait soigné Althéa furent d’une aide précieuse pour convaincre les réticents, comme la jeune femme traumatisée par Angélique. Les protecteurs aidèrent à transporter les villageois alité sur des civières. Le soir venu tout le monde campait à cinq kilomètres du village. Une petite distance qu’ils prévoyaient d’agrandir. Il était déjà heureux qu’ils aient pu déplacer une centaine de personne aussi rapidement.

À la même heure, Johan était encore sur les routes. Il n’arriva que tard la nuit. Néanmoins, l’entretien se passa quand même à son arrivée. La situation était assez urgente pour réveiller les dirigeants, Yoris et Aldin. Les deux étaient concernés par cette sombre affaire. Ils furent ravi d’apprendre qu’un remède était en bonne voix d’être trouvé beaucoup d’entendre les raisons de la contamination ou le comportement suspect de la seconde guérisseuse. Ils auraient aimé voir cette mystérieuse Angélique. Enfin, là il y avait plus pressent, ils devaient faire évacuer deux autres villages touchés par ce mal et les envoyer avec les habitants de Türk. Il fallait aussi s’assurer de l’approvisionnement de tout ces déportés. Il fut réfléchit à l’opportunité de les faire venir à Réoni. Bien sûr un autre sujet occupa les discussions : la fermeture de l’usine responsable. Le primo-Gharyn ne pouvait se rendre sur place à cause de toute la technologie. Il devrait faire confiance à ses émissaires pour porter son message, ramener le dirigeant mais aussi inspecter discrètement les lieux. Plus ils auraient d’élément prouvant leur responsabilité le mieux la fermeture se passerait. Et le mieux était d'envoyer une personne déjà impliquer dans cette affaire, Hal. Un homme efficace et minutieux même si durant l'enquête à Tük il n'avait pu faire montre de ses capacités.

Althéa Ley Ka'Ori
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Un mal incurable EmptyJeu 29 Mar - 4:19
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La discussion prit fin sur un accord tacite. Maintenant que l’élément réfractaire du groupe s’en était allé à bride abattue, le groupe se découvrait une cohésion nouvelle, voire irréelle. Elle effaça Zora de sa mémoire temporairement, et se prit à espérer qu’elle n’avait été qu’un songe lointain et effritable. Mais il fallait se rendre à l’évidence. Aussi paradoxale soit-elle, cette expérience -onirique ou concrète- avait fait naître en son sein des envies vibrantes et ardentes d’adrénaline, d’accomplissement. Elle ne niait pas son soulagement, d’achever cette mission sans sa présence ô combien compromettante, mais elle n’ignorait pas l’impact de cette sérendipité naissante. Les soins constituaient une véritable vocation, mais ils étaient dénués de convictions vivaces, d’ambitions absolues. Depuis trop de mois déjà elle procrastinait indéfiniment, retardait un départ envisagé maintes fois, et il se pouvait bien que Zora fût la prophète de sa nouvelle quête.

Elle expira d’un air pensif, et fit ce qu’elle faisait de mieux lorsque les nœuds mentaux paraissaient insolvables ; elle consacra toute son énergie aux tâches qu’on lui attribuait. Elle alterna entre mots réconfortants et faussement compatissants, et aides physiques pour le transport des vivres primaires à quelques kilomètres de là. Certains étaient sceptiques quant à la nécessité de déserter les lieux, d’autres venaient épancher leur curiosité naturelle par rapport au mal identifié, mais d’aucuns requéraient son support pour des services plus terre-à-terre comme transporter tel coffre jusqu’à une charrette ou tels paniers jusqu’aux mules. Somme toute, elle retrouvait-là son rôle parmi le clan des Mahere ! De surcroît, elle fit don de son cheval le temps de la migration du hameau vers un campement provisoire, puisqu’elle resta essentiellement dans le village-même ; c’est là que les dubitatifs se montraient capricieux et s’accrochaient vainement aux poutres de leurs maisons. Il lui revenait la tâche de les convaincre de s’en défaire, dans la mesure de ses moyens et dans la limite de l’ouverture d’esprit des habitants.

    « Dites à cette fille de partouze qu’elle peut aller moisir dans le ventre d’un chotgor malade !
    - Je vous demande pardon ?
    - An-gé-li-que ! fit-elle irritée en détachant les syllabes comme s’il s’était agi d’une insulte. Et puis rejoignez-la tant que vous y êtes ! Vous êtes là depuis quelques heures seulement et vous avez déjà ruiné nos vies ! »


Althéa entrouvrit les lèvres, se ravisa après une courte inspiration infructueuse. Les mots ne franchirent pas ses lèvres, par peur du goût acide qu’elle lui procurait sur la langue. Mélodie prit d’ailleurs le relai pour éloigner l’hostile, et tenta des heures durant de la raisonner. Malgré toute sa bonne volonté, la Khurmi refusa d’être délogée, et insista pour garder son homme grippé sur place. Impuissante, la protectrice dut abandonner ses efforts, assurant à Althéa sur le ton de la confidence qu’elle était trop butée et blessée pour entendre raison, mais que le temps, lui, aurait raison de sa détermination. Il s’avérait qu’elle disait vrai. Une poignée de jours plus tard, elle fit de nouveau son apparition, trainant un mari convalescent mais avec meilleure mine, et se fondit dans la masse et dans un mutisme obstiné. Elle se contenta d’observer les avancées réalisées.

    « Hier, j’ai ressenti une émotion… Oh, pas la mienne, non ! Celle de Jay’raf, j’en suis certain. C’était bref et intense… j’avais oublié combien il était bon de ressentir les sentiments d’autrui, cela m’a réconcilié avec la communauté. Peut-être que mon insensibilité magique s’est muée à mon insu en solitude… J’étais sociable et populaire, jadis !
    - Ce n’est pas les qualités qui vous manquent, en effet. Vous avez de l’empathie par nature, l’absence de votre magie n’est qu’un prétexte.  »


Son timbre était monotone, presque indifférent, mais son visage conservait cette puérilité tendre et désarmante. Parler compassion avec si peu d’émotions pouvait sembler paradoxal ! L’homme eut d’ailleurs un sourire reconnaissant et embarrassé à la foi avant de se résoudre à prendre congé. Althéa avait examiné de près son traitement. Elle s’était absentée une demi-journée afin de se réapprovisionner en herbes, suggérées en grand partie par son dispensaire, puis avait suivi au jour le jour le rétablissement encourageant du chasseur et de deux autres cobayes volontaires pour participer à l’expérimentation. Ils eurent un avant-goût de la cure, de leur état d’antan, recouvrèrent de leurs pouvoirs, se lièrent à nouveau à Khugatsaa le temps d’un cruel soupir.

Son chasseur, sur lequel reposait ses espoirs, tomba subitement malade. La nuit du cinquième jour avait engendré une terrible fièvre et des douleurs musculaires dans tous les membres qu’il savait nommer. Réveillée par un protecteur, elle se tenait à son chevet depuis quelques minutes, et opérait au mieux pour atténuer la chaleur intense qui émanait de chaque pore de sa peau et étouffer les courbatures qui le poussaient à gémir, puis inévitablement à tousser. A chaque sursaut dû à une quinte de toux, Althéa s’enfonçait davantage dans son impuissance, et des rides d’inquiétude déformaient les traits de la jeunesse sur son visage.

    « Je vais y rester ?
    - Non.
    - Alors pourquoi cette tête d’enterrement ?
    -
    - C’est pour la magie que c’est mort, n’est-ce pas ? »


La guérisseuse eut une crispation des lèvres qu’il interpréta correctement. Le même mal qui l’avait saisi des mois plus tôt était revenu à la charge, plus virulent que jamais, pour réduire à néant tous les efforts entrepris. Le peu de magie recouvré avait été à nouveau dévoré par la maladie qui rongeait son être via les particules de magilithe qui parasitaient son corps. Une telle itération rendait les procédés médicaux dérisoires, comme le traitement d’une pathologie chronique dont on ne peut que retarder l’occurrence sans jamais l’empêcher. Elle le savait depuis qu’elle avait accouru à ses côtés, et il le savait depuis qu’il avait tenté d’employer sa magie, quelques secondes plus tôt. Sa question était de celles du désespéré qui voudrait se convaincre que reproduire une situation identique en tous points à la précédente donnera des effets divergents, si tant est le médecin accepte de le lui faire croire !

Geste insolite pour le moins, la guérisseuse posa une main à la fois réconfortante et désolée contre la joue de son patient. Elle ne pipa mot jusqu’à ce qu’il s’endorme d’un sommeil récupérateur, artificiellement provoqué par sa magie. Les symptômes d’un état grippal n’avaient rien d’inquiétant en soi, c’était la reprise de la maladie qu’elle déplorait, pas ses effets sur son corps. Elle dut fournir des soins similaires aux deux autres cobayes et prit la décision logique d’interrompre le traitement. Lorsqu’elle put enfin se rendormir, l’aube pointait déjà son nez et les oiseaux chantaient ses louanges. Le soleil s’extirpa du versant Est de la montagne, et au même moment une altercation la tira de son court assoupissement. Elle s’enveloppa promptement de sa cape pour voir de quoi il en retournait. La patiente d’Angélique injuriait Mélodie, et la protectrice, dont la patience était d’or, tentait au mieux de l’intimer au calme. La nouvelle avait circulé vite.

    « Suhurs, imposteurs ! Ils se disent guérisseurs, mais ce sont des altérateurs ! ... Regardez-la, elle vaut pas mieux que la sale garce qui l’accompagnait ! Piire encore, elle nous a fait croire qu’on avait une chance de s’en remettre ! »


Les dissensions entre contrées avaient l’existence tenace, et Althéa se retrouva sans armes face à cette véhémence. Le débat serait stérile, quand bien même certains, notamment le chasseur, seraient susceptibles de défendre ses intérêts. C’est en restant sur place qu’elle alimenterait les conflits et donnerait matière aux litiges. Impassible, elle abandonna un peu lâchement Mélodie à son essai de retour au calme pour rassembler ses affaires. Un battement de cils plus tard, elle était de nouveau hors de sa tente, et se hissait péniblement sur son destrier. Pour sa part, l’indignée se faisait passer la morale par des habitants tout aussi désappointés que leur camarade. Mélodie était parvenue à se détacher du groupe pour rejoindre la guérisseuse.

    « Gardez votre sang-froid, nous avons encore besoin de vous ici.
    - Je ne pense pas, Mélodie. Mes confrères et moi avons œuvré au mieux pour résoudre ce mal, mais il faut se rendre à l’évidence ; il est incurable avec les moyens qui sont les nôtres, et ce n’est pas de la suffisance de dire que les meilleurs guérisseurs my’träns se sont concertés sur la question. Les habitants de Tük n’ont plus besoin d’un guérisseur, ils ont besoin d’un coupable sur qui rejeter l’injustice qui leur est faite, et je suis le candidat idéal en l’absence d’autres personnes à accuser.
    - … Mais vous étiez supposée rendre visite à Aldin. ajouta-t-elle avec hésitation.
    - Je serai à Reoni pour quelques jours s’ils souhaitent s’entretenir avec moi, mais je pense que cette affaire les occupera pleinement... Je suis navrée de ne pas avoir mené à bien ma mission. »


Elle s’en allait sans sou et sans gloire, avec pourtant le sentiment d’avoir donné le meilleur de soi-même. Un goût âcre rendait sa salive pâteuse, et elle ne put nier le frisson d’effroi inexplicable qui lui parcourut l’échine à la vue du chasseur qui se hâtait à sa rencontre, toussant et tremblant. Il vint poser une main intrusive sur son mollet, et si sa monture renâcla, elle se figea sur place. Elle eût aimé ne jamais croiser ce regard empli de peine, de solitude et de compassion à la fois, mais il attirait le sien avec autant d’aisance que la gravité la clouait au sol.

    « Ne regrettez rien. Vous avez eu du courage ! D’affronter ce mal inconnu, j’entends. Grâce à votre intervention nous connaissons sa source, et d’autres ne subiront pas le même sort. Pour ma part, je n’ai peut-être pas retrouvé ma magie, mais j’ai au moins retrouvé ma sensibilité d’antan.  »


La guérisseuse resta muette de stupéfaction. Elle aurait aimé le remercier chaudement, être à même de l’enlacer dans ses bras pour lui témoigner toute l’intensité de sa gratitude. Mais aucun mot de remerciement ne fut prononcé. Elle était comme tétanisée par des années de refoulement d’émotions, et bien qu’elle ne doutât pas une seconde qu’elle regretterait de ne pas avoir témoigné de ses sentiments en cet instant, elle ne pouvait se résoudre à franchir le pas. L’expression indéchiffrable, la pupille impénétrable, elle saisit la main qui reposait sur le bas de sa jambe, et après une douce pression, la rendit à son propriétaire.

    « Je reviendrai triomphante ou jamais.  »


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