Des pirates en pagaille [Terminé]

L’hiver de Marnaka entame son deuxième mois dans des conditions climatiques désastreuses. Des températures polaires, un soleil qui se reflète sur la neige blanche aveuglant tout le monde aux alentour, des vents qui glaceraient la moindre parcelle de chaleur sur des miles à la ronde et des tempêtes de neige capable d’engloutir une maison en quelques heures.

La vie dans les sous terrains n’en est étrangement que plus agréable. A l’abri des tempêtes et des caprices de la météo, il y règne une douce chaleur permettant de s’y mouvoir sans avoir à porter de manteaux fournis en laines et fourrures. Seuls les explorateurs intrépides ou les marins et ouvriers des docks osent sortir du cadre chaud et de la relative sécurité des sous terrains d’Aildor. Relative, car le moindre tunnel ou passage éloigné dans l’ombre peut se transformer en coupe gorge pour un individu instable dont la seule motivation sera d’assouvir les désirs des voix dans sa tête.

Dans tout ce brouhaha et ce désordre apparent circule un homme dont la tête dépasse largement le troupeau. Habillé d’une chemise usée et trouée par son travail harassant à la forge et l’armurerie, d’un pantalon de cuir plusieurs fois rapiécé et de grosses bottes montantes en cuir parsemée d’acier, il arpente les rues en direction d’un quartier qu’il connait bien : Le quartier des tavernes et des maisons closes.

Sa hache dans son dos, maintenue dans son fourreau dont les sangles forment un « X » sur sa poitrine, un revolver calibre 44mm à 6 coups à la ceinture et un fusil à double canon harnaché à la cuisse droite, il avance.

Sur son passage les gens s’écartent, soit par manque de place, le colosse étant plus large que n’importe qui, soit par crainte de recevoir un coup d’épaule et de finir au sol, piétiné par une foule qui n’en aura rien à faire. Du haut de ses 2 mètres 15 et fort de ses 160 kilos, il avance, droit devant lui, ciblant sa destination. Il veut se rendre à la taverne afin de déguster une bonne bière après une journée pénible d’un travail éreintant.

Ses bras et ses épaules sont imposants, congestionnés après avoir soulever des heures durant des tonnes d’acier. Le travail du métal est difficile et une condition physique optimale est nécessaire. Visiblement, Eylohr, c’est le nom de ce géant, n’est pas en reste.

Au détour d’un virage qui le mène enfin au quartier qu’il désire atteindre, il percute involontairement un homme visiblement trop occupé à passer inaperçu pour regarder constamment devant lui. Le pauvre tombe alors brusquement sur ses fesses lorsqu’il heurte le géant. Ses yeux globuleux transpiraient la peur de recevoir de la part de cette brute en puissance un coup fatal qui l’enverrais bien trop tôt rejoindre ses aïeux. A la place, il reçu un regard empli de dédain de la part d’Eylohr qui continua sa route afin d’arriver jusqu’à la taverne, où, étrangement, la vie semblait s’être brusquement animée.

Il y avait du grabuge dans l’air.

Aildor sans ces Tavernes et Bordels, ce n'était pas Aildor. Aildor sans ces bagarres de Tavernes, ces troussages de catins, ce n'était toujours pas Aildor! Dans les tunnels de cette cité souterraine du bout du monde, là où la vie était la plus rude par le fait de ce climat inhospitalier, vivait une communauté inhospitalière mais dont la cohésion était pourtant réelle, malgré les préjugés. L'environnement était propice au refuge des malfrats de la pire espèce, aux escales des vaisseaux pirates de tout bord. Pedro de Sousa aimait ce cadre particulier, foulant plusieurs fois par an la Cité d'Aildor, à la fois pour y écouler sa marchandise, recruter des membres d'équipages, mais aussi et surtout consommer sans modération les plaisirs qu'offraient ce nid a bandit.

Les tavernes et bordels, il les connaissait tous, il y avait ces petites habitudes. Ce soir là, lui et son équipage avait prit possession de l'un de ces établissements. Le rhum et la bières coulait à flot dans une ambiance festive, si l'on définissait "festif" par quelques altercations musclés pour quelques futiles raisons. Enfin bref, tout semblait aller pour le mieux jusqu'en milieu de soirée et l'apparition d'un équipage rival dans les effluves d'alcool de les nuages de fumée causé par les herbes à pipe.

Au fond de la salle, de Sousa et ces plus proches compagnons profitaient de la soirée, l'oeil alerte du Vieux Loup surveillant le moindre dérapage un peu trop sérieux. Et si jusque là, ces hommes se tenaient plutôt correctement, l’apparition d'une quinzaine de forbans allaient peut être changer la donne. Qui était donc à la tête de cette tripoté de marins d'eau douce? Pedro eut réponse à sa question en voyant finalement apparaître l'un de ces plus fidèle ennemi juré : Antonios Lopez Cortez!

Qu'est ce que ce salopard foutait là?! Si les forbans des deux vaisseaux se mélangèrent parmi la foule déjà présente, la moindre rixe pouvait se transformer en bataille rangée. Mâchoire serrée, les deux Capitaine s'épièrent, s'affrontèrent du regard... S'installant à une tablée non loin, la première demi-heure fut tel un round d'observation pour Antonio comme pour Pedro. Plus le temps passait plus la tension montait d'un cran, jusqu'à ce que le vieux Loup n'entend de la bouche de son rival un graveleuse moquerie à son encontre... et là...

En moins de temps qu'on eut pu l'imaginer, la taverne s'anima d'une ambiance qui n'avait plus vraiment de connotation joyeuse. Si Pedro avait déclenché les hostilités en se portant personnellement face à son ennemi, renversant l'intégralité de sa mousse sur la barbe de ce dernier avec un air supérieur, la contagion gagna les équipages. Chaises, table, bouteilles, catins (et oui elles aussi ^^) valdinguèrent au travers de la pièce, on ne comptait bientôt plus les ecchymose et fractures de tout ordre. Étrangement dans ce no mans land, les deux tables du fond furent épargné par les projectiles, grâce à un cordon d'hommes des deux camps qui entouraient les deux principaux protagonistes se toisant d'un air mauvais.

A l'arrivée de l'impressionnant colosse, dépassant la foule de plus d'une bonne tête voir deux, cette présence n'avait semblé calmer les ardeurs de deux équipages rivaux, mais en bref état de la situation semblait attester que les effectifs de de Sousa commençait à se faire déborder... Pourtant, même en sous nombre, Pedro ne lâchait le cap face à son homologue qui pourtant le lui fit bien remarqué.

- Vieille Branche, tes gars vont se faire tailler en pièce. Déguerpis de mes plates bandes avant de devoir remplacer tous les croulant compagnons.

Pedro grogna de mécontentement à ces mots, ces piques, ces menaces. Molardant dans le bogue vide d'Antonio, il dégaina ces deux pistolets qu'il braqua sur l'insolant ennemi.

- Répète et j'fais d'ta tronche un gruyère! C'est mon quartier ici! Et là tu m'déclare ouvert'ment la guerre!

Antonio restait imperturbable, tout comme l'était Pedro d'ailleurs. La situation tait pensante alors que les hommes de mains qui entouraient leur capitaine respectif avaient tous sorti les armes à feu, les dirigeant chaque sur le capitaine adverse. Eylohr Lothar, de sa hauteur pouvait apercevoir au loin la scène et il comprenait sans doute rapidement qu'une sérieuse échauffourée venait de naître dans cette taverne entre deux équipages pirates de la pires espèce!

Eylohr avait vu juste. La soudaine agitation qui avait eu lieu alors qu’il approchait de la taverne trahissait les prémices d’une bataille aussi mémorable qu’inattendue et, pour sûr, à l’issu fatale.

Lorsqu’il entra dans la taverne sous les yeux médusés des clients apeurés, il découvrit la scène : deux armées de pirates malfamés et enivrés par l’alcool et les filles de mauvaises vies, se faisant face par le biais de leurs capitaines prêts à en découdre, et dont l’agitation alentour ne troublait nullement leur colère. Qu’allait-il donc se passer ici alors que, devant lui, Eylohr pouvait voir les pirates se tenir en respect, les doigts rivés sur les gâchettes afin d’envoyer leurs rivaux ad patres.

Il était chez lui ? Etais-ce bien ce qu’Eylohr avait entendu ? Comment des êtres infâmes ne venant à Aildor que deux ou trois fois dans l’année et participant à son pillage et sa mauvaise réputation pouvaient être chez eux ici ? Cette ville appartient à ceux qui la construisent et la font vivre, c’est d’ailleurs pour cela que toute la pègre aide et estime ceux qui vivent ici et travaillent ici, quand tous les autres ne sont que de passages.

Non, ils n’étaient pas chez eux. Aucunement. Eylohr découvrit, et ce fut fort à propos, que les deux capitaines ne se connaissaient que trop bien. Et que l’un de ces deux protagonistes possédait moins de soldats que l’autre. L’orgueil légendaire des pirates allait encore une fois fournir à la terre son lot de cadavre à décomposer.

Voyant cela, et sentant alors monter en lui la colère d’un homme dont le territoire est attaqué, il s’avança dans la taverne, poussant devant lui les curieux restés pour miser sur les vainqueurs. Il s’avança alors en toisant de toute sa hauteur les protagonistes et leurs armées tout en dégainant sa lourde hache d’arme, prêt à fendre en deux le premier inquisiteur qui oserait se mettre en travers de son chemin.

Mais peut-être avait-il son épingle à tirer du jeu ? Si ce Cortez lui était inconnu, ce De Sousa quant à lui, lui était familier. Familier dans le nom et la réputation plus qu’un quelconque sentiment ou un quelconque passé commun. Ce forban, pilleur de navires, tueur invétéré et amateur de violences et, parait-il, des plaisirs de la chair non consentis, il serait peut-être un atout pour Eylohr, une occasion de voyager, de travailler ailleurs et, peut-être même de connaitre la technologie qui lui plairait temps pour améliorer et créer armes et prothèses.

Dans son esprit se dessina alors l’hypothèse de rejoindre le camp de ce De Sousa, aussi malfamé soit-il. Mais pour ce faire, il fallait venir à bout de la quinzaine de grognard qui bloquait le passage. L’idée de tuer ne lui déplaisait pas, et il avait remarqué un corsaire au postiche ridicule qui semblait le toiser sans vergogne. Lui, il le finirait à petit feu. Il s’approcha ainsi du groupe d’homme, dont certains continuèrent à prendre en joue le capitaine adverse tandis que d’autres prirent en joue le colosse qui se posta juste devant eux, les obligeant à lever les yeux vers lui.

Tout en regardant De Sousa, certainement trop afféré à épier sa future proie pour daigner regarder derrière, Eylohr s’adressa à lui :

« Besoin d’aide ? » demanda-t-il de sa voix grave et rauque tout en balayant l’assemblée du regard, la hache dans ses mains, prêt à s’en servir telle une faux fauchant les blés.

Tels des Loups s'affrontant du regard pour marquer leur territoire et leur domination, les deux Capitaines se faisaient face dans une atmosphère des plus pensante. Pedro semblait faire abstraction de l'environnement qui l'entourait lorsque l'imposant colosse eut l'audace de s'inviter dans cette étrange réunion de famille. Son regard braqué sur Cortez il faisait fi de toute autre présence et lorsqu'Eylohr de sa voix grave lui réclama attention, Pedro lâcha une remarque dans le feu de l'action.

- Va jouer aux osselets ailleurs, bigorneau, et laisse parler les Grands.

Son Second tout à coté, qui avait prit le temps d'aviser de la carrure du gaillard, se permit alors de glisser une remarque à l'oreille du Vieux Loup.

- J'veux pas te froisser hein mais j'crois qu'le type mérite... intérêt.

Si Cortez face à lui semblait soudainement un peu moins narquois et enclin à la provocation, ces deux éléments qui venait parasiter l'affrontement des deux Capitaines força Pedro à plisser l'oeil gauche et lever le sourcils droit. La scène se figea un instant avant que de Sousa tourne la tête sur son flanc, apercevant une épaisse épaule. Il était déjà bien grand, mais l'intrus devait l'être plus encore, forçant alors le pirate à relever le menton pour finalement pouvoir dévisager l'intrus qui ne pouvait passer inaperçu.

- Bigre! C'quoi c'molosse!

Un instant plus tard, l’œil alerte du Vieux Loup se posa sur l'impressionnante hache, Pedro révisant son jugement au sujet de l'intrus.

- B'soin d'aide tu m'disais!? Hmmmm... Tu vois l'gars face à nous à la fâcheuse habitude d'marcher sur mes plates bandes et d'me manquer d'respect, moi, l'capitaine d'Sousa! Et c'couillon profite qu'mes gars aient bien entamé une bonne soirée festive pour m'porter un coup bas! S'pas bien n'est-ce pas? Tu s'rais capable d'lui botter l'cul à lui et ces hommes contre une bonne récompense?

Il toisa un instant Cortez, ajoutant tout en haussant les épaules.

- Après tout, coup bas pour coup bas, ça devr'ait pas t'poser problème hein Cortez?!

L'ennemi ne savait quoi répondre, moins sur des ces forces... Tout portait à croire qu'Eylohr venait de capter l'attention de l'ensemble des participants et que chacun restait pendu aux lèvres de ce dernier avant d'agir... la poudre n'avait pas encore parler, mais celle attentisme ne tenait plus qu'à un file à présent!

Eylohr se tenait droit, le torse bombé, les muscles saillants et le regard balayant toute l’assemblée d’Infamie sans épargner quoi qui que ce soit. La remarque du capitaine ne l’effleura point, conscient qu’il était le seul à ne pas avoir daigner reconnaitre sa présence. Mais en revanche, il ne s’arrêtait plus d’irradier de son regard de braise le second de De Sousa jusqu’à ce que, finalement, il lui murmure quelques mots.

L’ensemble des grognards se retourna alors, dévisageant la montagne devant eux, certains, avec une pointe de peur et d’appréhension dans leurs yeux qui, c’était certains, ne déplaisait pas au colosse. Il resta stoïque le temps que les deux capitaines jaugent, réfléchissent, spéculent sur leurs chances avec Eylohr une fois dans leur camp. De Sousa fut le premier à prendre la parole.

Alors, le bigorneau se transformait en molosse digne d’intérêt et qui, pourquoi pas, pourrait contrecarrer le coup bas porté par Cortez et ses hommes. Et en plus de cela, une récompense était à la clé. Il espérait plus une place de choix dans son équipage qu’une bourse remplie d’Irys clinquants. Mais pour savoir quelle récompense il avait en tête, il fallait jouer son atout final : Lui.

Sentant bien que le balle avait changée de camps, et que, même si tous ses pirates avaient un doute sur les attentions d’Eylohr, ceux engagés avec Cortez doutaient encore plus. Quel camp le géant du nord allait-il choisir ? Est-ce que sa lourde hache allait décapiter l’ensemble des pirates ou est-ce qu’elle irait se focaliser uniquement sur ceux qu’un camp plus que l’autre ?

Sentant que tout dépendrait dorénavant de lui, il prit quelques secondes pour feindre le désintérêt et l’accalmie, cherchant à abaisser les défenses des hommes de Cortez. Puis, d’un ton sec et décidé, il dit à De Sousa :

« Je suis capable de tout »

A la seconde où il prononça ses mots fatidiques comme un juge prononcerait un jugement ou le bourreau appliquant une sentence, il décrivit avec sa hache un mouvement de balancier qui allait chercher loin derrière son épaule gauche. Qui dit balancier, dit mouvement d’un côté, et de l’autre. Lorsque la hache fut apportée suffisamment loin pour avoir l’élan espéré par Eylohr, il appliqua toute sa formidable force pour assener un coup magistral.

Tenant orienté sa hache de façon à ce que la lame ait un angle parfait pour la découpe, le moulinet entamé se rapprocha dangereusement d’un groupe de cinq hommes de Cortez qui s’étaient placés devant Eylohr.

Ne leur laissant que le temps d’armer le chien de leurs pistolets ou de lever les bras pour viser, la lame trancha les chaires d’une façon si propre et ni nette qu’il n’y eu aucune éclaboussure de sang. Le mouvement fut si large et balaya un si grand espace que les cinq hommes furent touchés, et qu’un sixième fut tranché au niveau de la gorge, laissant apparaître toute la machinerie physiologique à cet endroit, artères et veines, tranchée et cartilages de la pomme d’Adam, dans un gargouillement immonde.

Doucement, les cinq têtes se désolidarisèrent des épaules qui les portaient jusqu’à ce jour, et tombèrent au sol en libérant de sombres filets de sang. D’abord pulsant d’un rythme régulier, le flot devint plus écoulant et emplissait déjà les vêtements des porteurs défunts. Le sixième homme quant à lui avait cessé ses gargouillements, et le sang sortait de sa bouche et de la vilaine plaie, après quoi, il s’effondra au sol dans un dernier râle.

Eylohr n’était même pas éclaboussé, mais son moulinet avait fait mouche. Avec toute la froideur du nord et la cruauté de cette contrée, il s’adressa à De Sousa en ces termes :

« J’accepte ».

Pendus au verdict du colosse, les pirates des deux n'eurent pas le temps de réagir à la prise de position de ce manieur de hache venu de nul part que ce dernier exécuta un mouvement d'arme qui se révéla aussi efficace qu'il laissait présager d'un véritable carnage. Si d'instinct le Capitaine de Sousa s'écarta de quelques pas pour éviter de se trouver dans la trajectoire de la large lame, il profita de l'effet de surprise de ce précieux acolyte qui venait de choisir son camp pour faire parler la poudre de ces deux pistolets qu'il tenait au poing.

Judicieusement il avait visé les deux garde du corps de Cortez qui en quelques secondes se trouva bien demuni... autour de lui huit de ces dix hommes composant sa garde rapprochée venait de trepasser. Si le Vieux Loup s'était montré opportuniste et réactif, il baissa rapidement le regard vers l'amoncellement de cadavre sans tête gisant au sol. Grimaçant, il se mit soudainement à rire aux éclats, en quelques secondes et grâce à cet intrus, il venait radicalement de modifier la donne.

La voix rauque se fit alors à nouveau entendre, transformant sa prouesse physique et guerrière en mots, acceptant l'offre du Capitaine de Sousa. Froid et cruel il s'averait incarner un allié puissant de circonstance.

- A la bonne heure!... Heuuu... c'quoi ton nom, la Montagne ? C'bien c'surnom, t'trouve pas!? Ahah!

Derrière eux, les rixes redoublaient d'intensité, un cordon de pirate à la cause de Pedro protégeant la zone où se tenait les trois protagonistes principaux. Sentant le vent tourner, Cortez chercha à négocier vu sa position de faiblesse.

- Hey les gars ! Voyons! Pas de ça entre nous! On est entre adulte... on va trouver un terrain d'entente non...? Pedro, voyons, depuis tout ce temps? On va calmer nos gars et trinquer à ce colosse? Hein? Allez, comme à la bonne époque !

Pedro lui offrit en retour et pour toute forme de réponse un sourire acéré avant de se tourner vers Eylhor.

- Bon que j'te fasse le topo, sa rangée de molaires c'de l'or blanc, ça vaut une blinde, j't'en fait cadeau, offert par la maison.

Les deux derniers garde du corps de Cortez se placèrent devant leur capitaine, permettant à ce dernier de tenter la fuite dans cette taverne réduit à l'etat de scène d'abordage. Pedro ignorant la tentative de fuite de son homologue, il se retourna criant à tutête tout en se lançant dans le désordre ambiant, galvanisant ses troupes, non sans lâcher au colosse.

- 50 irys par tête mon brave, 500 pour Cortez!! HIIIIIIHHHHAAAAAAA!!!!!

Le forgeron avait déjà obtenu 300 irys, un beau petit pécule de départ quI szns doute espérait-il voir grandir. De Sousa ne connaissait encore pas ces motivations, il aviserait lorsque la menace serait écarté et que l'établissement retrouverait un semblant d'ordre.

De Sousa fut bien inspiré de faire parler la poudre de ses pistolets en mettant hors-jeu deux brigands de plus. Cette action portait à 8 le nombre de tués dans les rangs de Cortez qui, de toute évidence, commençait à se raviser.

Les cadavres ensanglantés jonchaient le parquet souillé par d’anciennes querelles et des litres de bières renversés. Les profondes blessures avaient causé d’abondants saignements. Un homme moyen est constitué de 5 litres de sang. Imaginez cette abondance de liquide rougeoyant dont l’odeur de fer emplissait toute la salle causant chez certains spectateurs des relents incontrôlés.

De Sousa harangua Eylohr en lui parlant de la dentition de Cortez qui, selon toute vraisemblance pouvait rapporter gros. Pour toute réponse, il hocha la tête en direction du corsaire qui avait senti le vent changé et qui voulait s’en servir contre vents et marrées. Bien qu’Eylohr avait choisit son camp, il semblait toujours être en position de force face au forban sans âme et sans cœur.

Les deux derniers hommes de Cortez s’étaient rassemblés autour de lui, pistolets dégainés et leurs froques suffisamment remplis pour leur tenir chaud tout l’hiver. Leurs mains tremblaient, et ils regardaient tantôt De Sousa, tantôt Eylohr, ne sachant pas lequel des deux allait continuer le massacre.

De son côté, De Sousa haranguait les foules et ses hommes en hurlant, riant, faisant de grands gestes évocateurs de l’euphorie qui régnait en cet instant chez lui.
N’attendant pas que les trois survivants puissent prendre l’initiative du combat. Eylohr reprit sa hache et la positionna de façon à ce que le plat de la lame frappe les ventres des deux gardes du corps.

Il releva la hache puis fit quelques pas en avant, et asséna un coup sec et fort sur les bedaines des deux gardes du corps qui valsèrent en arrière, emportant Cortez avec eux. Ils vinrent se plaquer contre le mur derrière eux.

Aplati derrière ses deux gardes du corps, Cortez n’osa lever le petit doigt, tandis que ses deux hommes tenaient leurs ventres en grimaçant, le coup leur ayant coupé le souffle.

Eylohr souleva de nouveau sa hache et changea de main. Désormais il allait frapper comme un droitier et non plus comme un gaucher. Une nouvelle fois il orienta sa lame de façon à ce qu’elle pénètre les chaires sans peine et avec force et dégâts. Là encore, son moulinet provoqua la découpe nette et précise des deux têtes des brigands apeurés. Mais Eylohr avait ajusté son coup pour que sa lame détruise le bas du visage de Cortez.

La mâchoire du capitaine défait vola en éclat sous l’impact de la lame de la hache d’Eylohr. Les dents volèrent une par une et l’ont pu aisément voir l’appareil dentaire en or blanc quitter son propriétaire et voler en éclat lui aussi.

Au milieu des corps de ceux qui furent ses derniers gardes du corps, Cortez s’agenouilla en hurlant à la mort et en passant ses mains sur ce qui restait de son visage ensanglanté et détruit par la folie d’un homme et l’efficacité d’une lame. Les cris étaient si horribles qu’ils provoquèrent l’effroi dans les cœurs de ceux qui avaient suivis la scène, impuissants.

Finalement, Eylohr s’approcha de Cortez et s’agenouilla à ses côtés. Il laissa alors sa hache au sol, baignant dans le sang de ses victimes, et prit à sa cheville son couteau qui ne le quittait jamais. Le couteau avait une lame de 40 cm de long, crantée à son extrémité et aiguisée sur toute sa longueur. Eylohr plaça l’épaisse lame sur la gorge ensanglantée de Cortez et d’un coup sec lui trancha la gorge sur presque 5cm de profondeur, terminant d’achever Cortez qui s’éteignit dans un dernier râle, un dernier gargouillement, un dernier soupir.

Eylohr essuya sans remord sa lame sur l’habit de Cortez avant de le remettre dans son fourreau à sa cheville. Puis, comme une ultime contribution, il ramassa les appareils dentaires en or blanc qui étaient tombés là, les mis dans sa poche et alla s’assoir sur une table où avait été servie une bouteille de whisky et deux verres. Il s’en servit un, et servit un second qu’il laissa sur la table et qu’il poussa légèrement en direction de l’extrémité de la table, comme une invitation pour De Sousa. Il posa sa hache contre la table de façon à ce qu’elle puisse tenir sans tomber.

« Jolies dents » Dit-il en regardant la dentition en or blanc entre ses doigts avant de ranger cela dans sa poche.

Euphorique et fort de ce soutien de poids de dernière minute, le Capitaine de Sousa n'avait pas vraiment prêter attention au carnage initié, que dis-je, entretenu par son complice à la carrure de colosse tout droit venu d'ouvrage mythique. S'en donnant à cœur joie, de Sousa et son équipage, galvanisés par ce retournement de situation improbable, réduit à peau de chargin les effectifs du camp adversaire. Dans le chaos le plus total, le sol de la taverne se nimba d'un tapis rouge vermeille jusqu'à ce que les forbans ralliés à la cause de Cortez n’aperçoivent la mise à mort de leur capitaine.

A cet instant, les survivants décampèrent pour certains, d'autres capitulèrent dans l'espoir d'obtenir une place dans l'équipage du Capitaine de Sousa. Sourire victorieux aux lèvres, Pedro fit s'agenouiller les quelques captifs avant de leur accorder asile. Le Vieux Loup n'était pas stupide, du sang frai était toujours bon à prendre, un pirate était par définition corruptible et passait volontiers d'un camp à un autre pour s'assurer une situation.

S'essuyant le front, le barbu daigna enfin se retourner avant d'aviser le colosse qui avait prit ces aises à table, l'invitant à le rejoindre pour trinquer à cette réussite. Rengainant alors ces pistolets, tapant quelques épaules pour signifier sa satisfaction auprès des siens, il reprit place sur sa chaise, allongeant ces pieds, talents de ses bottes contre le bois. Se saisissant de la bouteille, il rempli son verre, le levant alors pour trinquer, non sans lâcher un rire entendu à l'adresse d' Eylohr Lothar lorsqu'il lui montra l'appareil dentaire.

- T'as bien mérite c'trophet l'ami! D'ailleurs, c'quoi ton p'tit nom?

Alors que ces hommes évacuaient les cadavres non sans les dépecer de leur biens, Pedro s'offrit un bon rafraîchissement de gosier avant de toiser le manieur de hache avec plus d'intérêt.

- Bon mon gars, t'as toute ma gratitude mais j'suis l'premier à savoir qu'on a rien sans rien! Si t'ma sortir d'ce bourbier, c'est forcément qu't'as quelqu'chose derrière la tête. Alors dis moi, tu veux quoi? des Irys, des femmes, un fabuleux trésors? Ton prix s'ra l'mien! J'ai une dette envers toi! Et crois moi, un pirate paie ces dettes, enfin ceux qui veulent vivre assez longtemps pour trousser toutes les gueuses d'Aildor!
MWHOUAHAHAH!!!!!

Détendu, son séant bien calé au fond de sa chaise, Pedro de Sousa attendait avec impatience de savoir comment il allait pouvoir aider cet inattendu "sauveur" que la chance lui avait fait croiser son chemin au bon moment au bon endroit.

Eylohr leva son verre à son tour lorsque le vieux pirate fit de même. Ils entrechoquèrent leurs verres dans un sourire partagé. Entendant la question du capitaine euphorique, Eylohr bût le sien d’un trait avant de daigner répondre, tout en s'en servant un autre.

Je m’appelle Eylohr. Eylohr Lothar Dit-il d’une voix rauque, après quoi, il descendit cet autre verre en une gorgée. Mais par ici, on m’appelle « Le géant du froid ».

Il servit à nouveau son verre ainsi que celui du capitaine sans lui demander l’autorisation. Moyen de briser la glace ? Ou tentative de diminuer une potentielle défense ? l’idée était saugrenue mais peut-être avait elle effleurée l’esprit du vieux loup.

Les hommes du capitaine dégageaient les cadavres ensanglantés dont les seules traces de leur existence étaient les flaques de sang. Certains étaient portés, d’autres étaient trainés au sol dans une grande trainée poisseuse de sang et de cervelle. Eylohr regardait le résultat de ses actes avec une certaine satisfaction bien qu’aucun sentiment n’éclairait son visage.

Le capitaine reprit la parole en évoquant ses interrogations quant aux actes d’Eylohr et ce que lui pouvait dors et déjà promettre. « Ton prix sera le mien » avait-il dit ? Il n’en fallait pas plus pour Eylohr pour mettre son plan en route.

Ouai, on a rien sans rien, répondit-il de sa voix grave et avec une assurance légèrement cachée. Ce que je veux ? C’est simple. Lorsque vous passerez à Aildor, votre premier arrêt c’est chez moi ! J’vous ferai un prix sur les armes et les armures, promis. Ensuite, j’ai des employés, et les expéditions au Nord c’est la merde. Alors j’veux une place dans ton équipage. Et j’te préviens, j’suis pas un simple marin. Compris ?

Eylohr reprit alors un verre qu’il vida aussitôt. Puis, il planta à nouveau son regard dans celui du capitaine, tout en prenant sa hache en main, frappant le bout du manche sur le parquet de la taverne.

Eh au fait, ton nom est pas inconnu ici, Pedro De Sousa, mais il y a des règles, reprit Eylohr très sérieusement. J’te conseil de payer le tavernier pour qu’il coopère. Si il y a bien un truc à pas faire ici, c’est se mettre les habitants à dos.

Puis, pour ne pas changer, il servit à nouveau un verre au capitaine, et un autre pour lui-même, qu’il porta à hauteur de visage comme pour signifier un accord.

Alors ? Demanda enfin Eylohr de sa voix rauque et grave. Ce prix te conviens ?

Pedro mettait enfin un nom sur le visage de ce colosse, Eylohr Lothar. Il possédait même un surnom, Le géant du Froid. Ça lui allait comme un gant. En tout cas le molosse prenait ces aises resservant le Capitaine de Sousa sans même demander son approbation. L'attitude plaisait au Vieux Loup. Après tout, ne disait-on pas, après l'effort le réconfort? Celui était sans nul doute l'alcool.

- Ainsi donc le Géant du Froid rencontre le Vieux Loup.

Conclu le pirate pour toute forme de procès. Si les annales ne relateraient sans doute pas l’événement, il resterait dans les mémoires des forbans présent ce soir. Passé l'euphorie, Pedro rangea finalement ces jambes sous la table, les expressions sur son visage bien plus sérieuses qu'elles ne les avaient été depuis le début de cette soirée. Le forgeron joua alors carte sur table. Prenant considérations des propos tenus par son vis à vis, le Vieux Loup opina finalement du chef, la proposition étant des plus acceptable après tout.

- Hmmm... tout ça m'semble honnête. On fr'a fructifier tes affaires et on prendra sous notre protection tes employés. Pis rassure toi, d'avis qu'mes gars et moi on va pas t'prendre pour un mousse va! héhé! J'te vois pas en vigie ni à récurer le plancher sur le pont d'mon rafio!

S'en suivi une démonstration de virilité du colosse, frappant le plancher du manche de son imposante hache de combat pour se montrer des plus inquisiteur face au pirate à la réputation qui n'était plus à faire. Fixant Eylohr, Pedro de Sousa se prit à pouffer de rire face à l'attitude de son sauveur.

- AHAHAH!!! Rassure toi, j'connais les règles à Aildor! L'tavernier s'ra pas en reste, il s'ra grassement dédommagé va!

Un énième verre fut servit, symbolisant là l'accord que souhaitait passer, entériner le forgeron guerrier du Nord. Si le prix lui convient?

- A ta santé l'Géant du Froid! Qu'notre entente soit longue et profitable!

Il trinqua à l'accord, avalant alors d'une traite le liquide fortement ambré.

- Ahhhhhh! Ça nettoie bien les conduites s'truc là! Bon dis-moi, j'vais encore crécher ici quelqu'jours, mes gars vont finir de nettoyer et r'gagnerons l'rafio! Maint'nant j'ai quartier libre pour en savoir un peu plus sur toi et passer une première p'tite commande! On aura l'occasion d'se pencher sur nos projets commun à court terme. j'reste jamais longtemps à Aildor mais j'y passe régulièrement.

Eylohr affichait de temps à autres un sourire satisfait quant aux propos du vieux loup de mer. Son coup de poker avait fait mouche. En plus de compter dans son carnet d’adresse ce vieux corsaire connu de tous, il pouvait également compter sur lui pour aller boucaner au large, piller villages et navires, et, pourquoi pas, massacrer quelques-uns de ces mages arrogants.

Eylohr n’aimait pas beaucoup les mages, et il espérait qu’il en allait de même du pirate. Mais s’il fallait côtoyer des mages, autant que ce soient des femmes enchainées dans les geôles humides du navire. En mer, une femme c’est comme une oasis. Parfois.

Un autre sourire apparut sur son visage lorsque le vieux loup de mer indiqua qu’il connaissait les us et coutumes du coin et que le tavernier serait dédommagé pour tout ce qui avait été occasionné. Eylohr étant lui-même un habitant d’AIldor, son statut ne le protégeait cependant pas des règles, dont les transgressions lui apporteraient tout de même leurs lots de conséquences fâcheuses.

Enfin, le pirate indiqua qu’il avait quelques jours encore à passer dans cette sombre et délictueuse ville, et que, de surcroit, il en profiterait pour passer une première commande au forgeron attablé. Il n’en fallait pas plus pour qu’Eylohr s’installe confortablement sur sa chaise bien que très petite pour lui, et fasse signe au tavernier d’approcher.

- Pour la peine, c’est mon tour. Qu’est-ce que tu manges, capitaine ? Demanda-t-il tout en décrochant un léger sourire comme pour symboliser que l’accord se muait en une possible amitié, même si l’amitié, dans un monde comme celui des deux protagonistes, c’est très surfait.

Eylohr attendait de connaître les envies de capitaine afin que le tavernier puisse tout prendre et les servir dans les meilleures conditions. En attendant, Eylohr réfléchissait à comment amener au vieux renégat l’idée de passer à sa forge une fois les estomacs bien remplis.

- Une fois le dîner terminé, que diriez-vous de passer à la forge ? Demanda-t-il non sans scruter le visage du pirate à la recherche du moindre signe trahissant une gêne, un agacement ou quoi que ce soit qui pourrait interrompre ce moment convivial et prometteur.

Le serveur prit la commande d’Eylohr qui, comme son habitude, commanda la plus grosse côte de bœuf saignante dont l’auberge disposait, accompagnée de pommes-de-terres et d’un verre d’un alcool local capable de décaper la rouille du fer.

Qu’allait-il se passer ensuite ? Le vieux loup n’étant pas connu pour sa minutie ni sa flagornerie, allait-il tout envoyer bouler ou succomberait-il à une soirée plus calme après toutes ses péripéties. Plus calme, pour le moment. Peut être les hommes de Cortez reviendraient en force, ou, pire, un autre adversaire pourrait faire son apparition, plus armé, plus fort et mieux entouré ?

Advienne que pourra.

L'envoyer bouler? Meuuhhh non, pourquoi donc? Déjà le colosse se montrait avenant, offrant le couvert au pirate. Lorsque le tavernier s'approcha du duo, de Sousa laissa le forgeron passer commande d'une pièce de bœuf saignante, fallait bien ça pour un solide gaillard comme lui, même si Pedro lui les préférait "bleu", enfin ce n'était qu'une question de gout et de cuisson.

- Met moi donc ta plus grosse poularde tavernier!

Il posa une main sur son avant bras, un large sourire aux lèvres, non sans rajouter d'un ton graveleux.

- D'la volaille hein, pas une des putains qui scouate ton établissement, qu'on soit bien d'accord l'ami! Héhéhé!

Non, on ne referait décidément pas ce Vieux Loup! Reportant alors son attention sur Eylohr, de Sousa prit également ces aises. Ni gêne ni agacement se lurent sur son visage, le forgeron n'avait aucune crainte à avoir, ce programme lui convenait, même si la digestion de son plat serait plus longue.

- Ca m'va l'géant du Froid! T'façon, mieux vaut ne pas trop traîner ici. C'qui c'est passé, va vite faire le tour d'Aildor, autant se mettre au vert pour la fin d'soirée! Héhé.

Les deux hommes bavardèrent, laissant le temps filer jusqu'à ce que les bonnes odeurs provenant des cuisines ne chatouillent leur odorat.

- Hmmmm, j'sent qu'on va s'régaler!

Deux énergumènes comme ceux là... nul doute qu'il ne fallait pas s'attendre à les voir déguster avec délicatesse les pas que le tavernier allait leur apporter! Les bonnes manières? Que Diable! Les événements avaient creusé leur estomac, ils allaient se empêtres très certainement de la plus sauvage des manière.

La salle fut bientot nettoyé de toute trace du carnage, le Second du capitaine s'étant permi de revenir murmurer quelques mots aux oreilles de son patron, de simple formalités, l'équipage se tiendrait à carreau sur le rafio pendant la petite escapade de leur capitaine.

De toute évidence les deux protagonistes avaient trouvé un accord qui se scellerait autour d’une pièce de viande ardemment consommée. Même si aucun d’entre eux n’était habitué aux us des mets les plus fins et des restaurants gastronomiques, ils savaient profiter de la vie et de ce qu’elle offre. C’était à n’en pas douter.

L’humour du marin était aussi caustique qu’attendu. C’était là la réputation des marins et des pirates. Bons combattants mais mauvais gentlemans. Cela ne déplaisait pas à Eylohr qui trouvait dans cette nouvelle amitié un moyen de profiter pleinement de la simplicité des choses.

Le repas fut alors servi par le tavernier et les deux ogres mangeaient avec un appétit insatiable. Cette viande tout droit venue de Daënastre. Elle était délicieuse et tous les cuisiniers et restaurateurs du monde se seraient ouverts les veines en voyant le destin qu’ils réservaient à ces pièces gastronomiques.

Le repas fut finalement plus long que ce qu’on aurait pensé, bien que certains mafieux se soient aventurés jusqu’à l’auberge afin de s’assurer que le grabuge était terminé. Finalement, le tavernier rassura ces derniers d’un signe de la tête. Tout était sous contrôle.

Après le repas, Eylohr se leva plus lentement qu’à son habitude. Il faut dire qu’autant de viandes ça alourdissait son homme !

- On passe au dessert ? Proposa Eylohr tout en se redressant et en prenant avec lui sa gigantesque hache qu’il remit aussitôt dans son fourreau, dans son dos.

Laissant quelques minutes au capitaine pour se préparer, ils prirent ensuite le chemin de la forge qui se trouvait à quelques minutes de marche. La cohue des rues d’Aildor n’aidant pas, il fallait se frayer un chemin ce qui agrandissait le temps de trajet. Finalement, après bien des coups d’épaules et après avoir jouer des coudes, ils arrivèrent devant l’enseigne d’Eylohr.

Une partie de l’enseigne était vitrée, celle où il exposait ses créations et ses armures, mais l’immense majorité de l’endroit était seulement surélevé de quelques centimètres, et donnait directement sur la rue, avec toute la chaleur de la forge et l’odeur du métal chauffé à blanc, ainsi que les bruits des marteaux contre l’enclume.
Au-dessus de la forge et de certains points chauds se trouvaient une espèce de cheminée, ou plutôt, un conduit d’évacuation. Les fumées s’échappaient par ces immenses conduits ce qui permettait d’aérer les lieux et de ne pas suffoquer.

Le colosse et le capitaine se rendirent ensuite dans l’arrière-boutique, là où les armes fabriquées étaient inspectées, contrôlées et, si besoin, détruites. Il y avait un impression stock d’arme, allant de la plus petite dague au plus grand marteau de guerre.

Tout était là, devant eux. Epées, sabres, dagues d’apparat ou dague d’assassin, arcs, arbalètes, hache, espadons…
Et dans l’autre salle, celle correspondant à l’armurerie, des armures de cuir, de fourrures, d’acier et de plates. Face aux mannequins de bois et aux meubles où étaient entreposées les armures se trouvaient les fusils et les revolvers. Il y avait même trois fusils de précisions, dont deux avaient été fabriqués par Eylohr et ses employés grâce au troisième, qui avait été capturé par un groupe de contrebandier après de féroces combats avec les troupes Daënars.

La technologie nécessaire pour produire un fusil de précision aussi bon que celui qui avait été capturé aux Daënars était hors de portée d’Eylohr, mais il s’y était employé avec ardeur. Il n’avait jamais testé les deux fusils fabriqués, mais il était sûr qu’ils étaient moins puissants et moins précis que le modèle Daënars.

La capitaine n’avait que l’embarras du choix. Qu’allait-il demander au géant avant de partir pour prendre la mer ?

- Servez-vous Dit Eylohr à peine la visite terminée. Et prenez-en pour vos hommes.

Pauvre cuistot ! Dans un sens, les deux lascars faisaient honneur à ces plats, certes, mais la manière n'y était vraiment pas! Les deux gloutons dévorèrent leur assiette, de Sousa offrant quelques vocalises dans les rots "abominable", mais c'était sa manière à lui de montrer sa satisfaction. Quoi qu'il en soit, le Vieux Loup et le Géant du Froid furent repu et sur proposition du forgeron, ils quittèrent finalement l'établissement pour se rendre à l'échoppe de ce dernier. Si Pedro était déjà passé dans cette ruelle, il n'avait effectivement jamais passé jusque là le pas de la porte de cette établissement, c'était donc la bonne occasion de découvrir l'univers d'Eylohr.

Suivant le pas du colosse, le pirate s'imprégna des lieux, laissant traîner un regard curieux et intéressé tout du long de la visite guidé. Epées, sabres, dagues d’apparat ou dague d’assassin, arcs, arbalètes, hache, espadons, armures de cuir, de fourrures, d’acier et de plates, fusils et enfin revolvers, Pedro semblait impressionné par la diversité des produits proposé par le forgeron. S'attardant sur quelques lames et quelques fusils, Pedro jaugea du tranchant des unes et des canons des autres alors que son hôte lui laissait toute la latitude pour se servir.

- Hmmm... y a d'quoi faire ici ma parole! J'te prendrais bien une douzaine de coutelas et une demi douzaine d'fusils avec les munitions biensure! Ton prix s'ras l'mien, j'dirais à mon second d'passer avant d'lever l'ancre pour récupérer les caisses, ça t'va l'ami?!

Flânant dans l'arrière boutique, il continuait son petit tour non sans questionner le géant du froid et lui adresser quelques remarques.

- T'es un gars plutôt atypique dans l'milieu... forgeron et guerrier de surcroît! C'quoi ton but dans la vie? T'ma l'air bien implanté, mais comme moi tu dois avoir des projets, non?

Il cherchait à percer un peu la carapace de son nouveau partenaire. S'ils devaient collaborer sur le long terme, ils devaient apprendre à se connaître, c'était le béa ba de toute relation d'affaire. Le pirate avait des ambitions, le projet de se munir d'un vaisseau hors du commun et de faire trembler les airs et les océans de sa présence, mais qu'en était-il d'Eylohr Lothar? Aildor lui suffisait? Il était resté flou sur ces ambitions, même s'il comptait profiter des services du pirate pour le faire voyager au quatre coin d'Irydae.

Eylohr laissait libre à cours à la curiosité et à l’envie du vieux pirate. Il pouvait ainsi tout voir, tout tester, tout peser, tout calibrer. Son choix se porta, comme s’y attendait Eylohr, à la gamme des couteaux et des armes à feu, et les munitions évidemment.

L’ambiance dans l’arrière salle était posée. Aucune tension ni aucune méfiance, les deux guerriers s’étant déjà jaugés à peine une heure avant. De plus, ce serait contre les intérêts d’Eylohr que de vouloir réaliser un coup bas au vieux loup de mer, puisqu’ils venaient de passer un accord qui serait plus que profitable pour Eylohr qui souhaite s’évader du quotidien d’Aildor et, de surcroit, en apprendre davantage sur les technologies Daenars.

-Un prix ? C’est cadeau l’ami ! Comme dit le dicton : Prends soin de tes amis pour les garder prêts de toi, hum ? Dit Eylohr en cherchant l’approbation du vieux loup de mer. En revanche, les munitions, ce sera la moitié du prix que j’les vends. Donc 150 Irys la boite de 100 cartouches de fusils. Les munitions… C’est emmerdant à faire, j’te jure !

N’attendant pas la réponse du corsaire au service du pavillon noir, Eylohr s’empressa de commencer à faire le compte de munitions. Techniquement, pour seulement 6 fusils, il fallait compter, pour ratisser large suivant la durée du voyage avant un prochain hypothétique ravitaillement, 100 cartouches pour chaque fusil. Les corsaires étant connus pour leur amour du bruit, de la mort et de la poudre tout autant que celui du rhum, Eylohr prépara ainsi 12 caisses de cartouches basiques.

Mais il n’avait pas échappé aux questions du vieux forban, et il allait s’y soumettre, décidant que, s’il pouvait lui faire confiance en mer, il pourrait lui faire confiance sur terre.

-Pas vrai hein ? Répondit Eylohr tandis qu’il s’employait à soulever les lourdes caisses de bois et d’acier. J’suis l’fils d’un khashin et d’une contrebandière, j’devrais déjà m’estimer heureux d’être encore d’ce monde ! Mais ta vus juste cap’taine, j’ai un but. J’ai ma forge et mon armurerie qui tourne avec trois employés, j’peux dire que j’pourrais déjà prendre ma retraite pépère. Mais j’en veux plus. J’veux du daenars. Des armes et des prothèses magithèques. C’te technologie t’en trouva pas au marché noir, ou presque ! Devine le filon qui a là-dedans ! Et puis ce s’rait la perfection d’mon art ! Et aussi, j'veux massacrer du My'Trän. C'te vermine mérite pas d'vivre.

Eylohr finissait d’entasser les boites les unes sur les autres qu’il plaçait bien en évidence afin que personne ne se trompe sur le destinataire et la destination. Il s’occupa ensuite de mettre les fusils et les coutelas dans d’autres caisses, le tout finissant sur un espèce de chariot à tracter. Tout était prêt.

-Quand tu veux Chef !

C'gars lui plaisait de plus en plus! Bon, pas le genre d'acoquinage où le Vieux Loup pouvait mettre quelques cartouches entre les cuisses! Ahah, vous avez vu? Je reste dans le thème!! Hum bon bref, Pedro était donc agréablement surpris par la générosité du Géant du Froid et sa réplique avait tout son sens, c'est que l'gaillard n'était pas qu'une masse de muscle, mais doté d'intelligence et ce dictons était clairement des plus approprié! Pas mécontent de faire quelques économies, il acquiesça à ce gens d'amitié et de confiance et pour les munitions, il n'y voyait aucune objections.

- C'est qu't'a la verbe, géant du Froid! On peut que s'entendre tous les deux Héhé!

Alors que le forgeron, se mit immédiatement à honorer la commande, préparant les caisses, de Sousa papillonnait toujours non loin, admirant les différent travail d’orfèvre de son nouvel associé d'affaire et compagnon de route, levant un sourcils curieux lorsque ce dernier le gratifia d'une réponse franche et limpide, permettant au pirate d'en connaître d’avantage sur le passé et l'avenir d'Eylohr Lothar. S'il jouissait d'une confortable position, il avait tout de même des projets comme semblait l'avoir deviner le quadragénaire barbu.

- Ah la technologie Daenars! J'peux que t'comprendre l'ami!

Toutefois s'il partageait l'avis du colosse nordique sur ce sujet, il n'était pas vraiment sur la même longueur d'onde au sujet du peuple My'Trän. S'il vouait une haine contre ces individus doués de magie, lui n'en avait aucune.

- Perso' j'ai rien contre ces types là, mais j'suis curieux de savoir les sources de ta haine à leur encontre! Enfin, on aura bien le temps d'en discuter une fois que nous aurons prit la large.

Si le Capitaine de Sousa avait prévu d'envoyer son Second récupérer la marchandise, il semblait que le forgeron veuille personnellement livrer sa production sur le pont du vaisseau pirate. Qu'à cela ne tienne.

- Allez hop, s'parti, on met les voiles! J'te préparerais ta bourse une fois sur place.

Sur ces mots, le duo prit la direction du Port à l'extérieur d'Aildor. Une amitié et surtout une prometteuse association venait de naître dont sans doute les deux camps allaient tirer parti. Echange de bon procédé! Héhé!!