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Chroniques d'Irydaë
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 Un os dans la coquille

Zaël
Zaël
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Un os dans la coquille EmptyDim 6 Mai - 13:12
Irys : 962209
Profession : Gharyn de Busad
My'trän +3 ~ Kharaal Gazar (homme)
Des paris bon enfant avaient cours depuis plusieurs mois quant à sur qui les œufs, les futurs dragons, porteraient leur dévolu. Si tous les protecteurs avaient eu la possibilité de leur rendre visite au moins une fois, quelques uns seulement figuraient en tête de liste. Les commandants, évidemment, quelques confirmés bien pressentis, Darim aussi et plus rarement Zaël. Lui même n’était pas intéressé, ni n’avait connaissance des paris. Il n’ambitionnait pas d’avoir un dragon pour lui, le fait qu’il y en ait deux qui résideraient dans la ville était déjà énorme. De même, leur éclosion ne devait pas se tenir en huit clos, même si toute la population ne pouvait y assister non plus. Il avait pris soin que les deux personnes à l’origine de cette situation soient prévenues aussi régulièrement que possible. Ce n’était pas évident puisqu’au aucun des deux ne semblait tenir en place. La dernière missive en date, s’il l’avait reçue, leur disait de venir pour cette semaine, que tous les signes montraient que les dragons allaient bientôt sortir. Impossible de dire quel jour.

Ce sont ceux de garde qui avaient sonné l’alarme une première fois, mais l’attente de plusieurs heures avaient été vaine. Là, c’était la seconde alarme deux jours après. Tout le monde s’était de nouveau rassemblé au même endroit, de façon peut-être un peu moins pressé : dans la forge où les œufs étaient installées pour les privilégiés et dans les rues autour de la forge pour les autres. À l’intérieur, il y avait six commandants, tous n’avaient pas souhaité venir, quelques confirmés, Zaël, Darim, l’émissaire de Dyen. Il y avait encore la place pour Thorleif si jamais il souhaitait venir et bien sûr pour Flavien et Emrys. Il avait été demandé à ce dernier de venir sans technologie à cause de la présence des deux chefs et autres personnes très sensibles à son contact. Quant à Raskhal, l’ovchin de Zaël, il observait le tout depuis son perchoir habituel : le sommet de la Tour du Désert. Il suivait les mouvements de ces petits points au sol, les bruits qui remontaient chaque fois que quelqu’un croyait voir quelque chose ou imaginait un événement tel qu’un morceau de coquille tombant. Pour l’instant rien de tel : il faisait juste très chaud à l’intérieur et les œufs semblaient identiques à eux mêmes depuis ces vingts dernières minutes.

« C’est tout à fait normal que cela prenne du temps. »

La quadragénaire, dragonnière, avait dit la même chose il y a deux jours. Le ton était peut-être un peu moins assuré cette fois et personne ne lui répondit vraiment, trop occupé à regarder les œufs immobiles dans leur nid fabriqué. En fait, personne ne lui avait rien demandé non plus. Tous dans la pièce se taisaient respectueusement dans l’attente qu’il se passa quelque chose. L’air était plus pesant que n’importe où ailleurs dans la ville. Et bien plus silencieux entre ces murs. Le son provenait de l’extérieur s’infiltrant par chaque ouverture, porte ou fenêtre, laissées grandes ouvertes pour l’occasion. La chaleur s’échappait un petit peu par la même occasion mais le temps était assez clément pour permettre de briser le cocon. Il aurait été dommage de ne pas partager ce moment de bonheur alors qu’ils se faisaient si rare. Du moins, c’était l’impression du primo-Gharyn.

Flavien Teleri
Flavien Teleri
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Un os dans la coquille EmptySam 19 Mai - 1:25
Irys : 887826
Profession : Soigneur itinérant - Guérisseur
My'trän +2 ~ Chimères
La missive envoyée de la main de Zaël l'avait trouvé au beau milieu de sa fuite de Zuhause. Une lettre assez brève, tenant plus de l'invitation que d'un courrier officiel adressé de la main d'un Gharyn, ce qu'elle était pourtant bel et bien. Ce ne fut que lorsqu'il arriva à mettre pied sur la terre ferme, fuyant l'enfer du train express sur lequel il avait embarqué clandestinement pour quitter au plus vite la capitale de Vereist en compagnie d'une troupe de troubles-faits, qu'il eut enfin l'occasion de lire le courrier qui lui était adressé.

Après une bonne heure à rester assis, collé contre le flanc de Khi'del qui faisait de son mieux pour calmer l'anxiété de son cavalier qui jura ne plus jamais approcher une locomotive de sa vie, Flavien qui avait quitté ses sauveurs d'un jour se rappela de la présence du morceau de parchemin soigneusement enroulé, qu'il avait tout simplement enfuis au fond de son sac dans sa précipitation. Le papier était froissé, légèrement déchiré, mais bien lisible. Une lettre de Zaël, l'informant certainement de la condition des œufs de Dragon.

Il se souvenait très bien de sa première missive reçue à ce sujet, lorsqu'il réalisa que le cachet de la lettre portait les armories de Busad. Pendant de terrifiantes secondes, il s'imagina les nouvelles que pouvait contenir cette lettre. La source de Magilith corrompue avait-elle repris son activité ? La guerre se pressait-elle aux portes de Busad ? Après tout, quelle autre raison pouvait bien avoir Zaël pour dépêcher une missive dans sa direction ? La raison repris le dessus sur le soigneur qui secoua la tête et détacha le cachet de cire, dévoilant une lettre bien courte. En réalité, elle contenait à peine quelques lignes, ressemblant davantage à une petite annonce publique qu'à une lettre en bonne et due forme. Les œufs de Dragons se portaient bien mais ils n'étaient pas prêts d'éclore. Il avait demandé à Zaël de ne pas forcément l'associer à cet évènement, mais apparemment le fidèle de Delkhii avait la tête dure. Ainsi, le nomade avait reçu quelques lettres comme celle-ci pendant son séjour en Daënastre.

Flavien esquissa un sourire en parcourant les lignes. Les deux œufs de Dragon recueillis par la cité allaient éclore très prochainement. Une excellente nouvelle, preuve que leur séjour prolongé dans la forge ardente leur avait fait le plus grand bien. Il s'arrêta à la dernière phrase, la relisant à deux reprises. Les œufs de Dragons allaient éclore d'ici la fin de cette semaine, et le Gharyn tenait à ce qu'il soit présent s'il pouvait se rendre jusqu'à Busad dans les temps.

S'il avait reçu cette même missive quelques semaines lui tôt, il aurait certainement décliné le rendez-vous. Il était clair pour lui que tant qu'il n'aurait pas mis la main sur la famille de Lize, il continuerait de s'entraver avec une mission qu'il rechignait de plus en plus à accomplir. Il commençait malheureusement à prendre l'habitude des injures, mais la ligne était clairement dépassée lorsqu'on tombait sur des personnes aux tendances meurtrières. Peut-être que quitter Daënastre ne lui ferait pas de mal. Juste le temps que les œufs éclosent.

C'est donc quelques minutes plus tard que Flavien s'envola en direction de sa My'trä natale. Il laissait derrière lui une milice à la recherche d'un sauvage s'en prenant aux jeunes femmes sans défense, qui avait en plus de cela le culot de résister à son arrestation et d'engager la milice directement. C'est sans regret qu'il laissa Vereist et ses magnifiques plaines glacées derrière lui. Un jour, il avait trouvé ce paysage merveilleux. A présent, il lui renvoyait la désolation de cette capitale aussi étincelante que la glace, et aussi froide que cette dernière.

La seule consolation qu'il avait de toute cette aventure, c'était d'avoir appris que la famille qu'il cherchait se trouvait à Blumar, au Sud du continent. Quoique. Devait-il vraiment parler de consolation ? Que se passerait-il si les Brandtner étaient de ceux qui méprisaient les My'träns ? Flavien supposait qu'il aurait bien vite la réponse à sa question. Non pas qu'il soit pressé de la connaitre à l'heure actuelle. Il avait besoin de calme pour se recentrer sur sa mission et mettre derrière lui ses dernières altercations en date. Un calme que seule My'trä semblait en mesure de lui apporter.

Il quitta Daënastre le soir même, sur un apparent coup de tête.

- - - - - - - - - -

Le voyage jusqu'aux terres du Kharaal Gazar se déroula sans anicroche. Khi'del était un voltigeur expérimenté et le Dalavoï prenait grand soin à ne pas voler trop vite. L'absence de selle sur le dos musclé du serpent volant rendait les trajets assez éprouvants pour le soigneur, mais à force de voler avec la créature, il prenait le bon pli et les glissades incontrôlées étaient de moins en moins fréquentes.

Flavien se posa à une trentaine de minutes à pied des portes de la cité. Depuis ces dernières semaines, la confiance de Khi'del envers son cavalier s'améliorait et le Dalavoï s'approchait de plus en plus des lieux habités. Il refusait toujours d'y mettre les pattes, mais au moins Flavien n'avait plus à marcher des heures et des heures pour rejoindre les zones habitées. Après avoir flatté une dernière fois son encolure, Flavien sauta à terre, récoltant un coup de tête affectueux de la part du serpent ailé qui étendit ses ailes et s'élança dans le ciel. A l'abri dans le ciel rosé de cette fin d'après-midi, il attendrait l'appel de son cavalier.

Le temps que Flavien mette de l'ordre dans ses affaires, notamment en contactant Aquila pour lui dire de ne pas s'inquiéter de sa présence soudaine dans la région, il faisait déjà nuit. Il la verrait très bientôt, mais il devait d'abord prévenir Léonie de son arrivée, chose assez délicate pour le soigneur qui ne savait pas vraiment sur quel pied danser. Il aurait très bien pu dire à la Protectrice qu'il avait finalement changé d'avis et avait décidé d'assister à l'éclosion, mais il savait qu'à peine quelques paroles échangées, elle verrait clair dans son jeu. Et, honnêtement, parler de son altercation à Zuhause n'était pas vraiment une chose qu'il souhaitait faire par écrit. Il passerait voir la jeune femme plus tard, lorsque les œufs auront éclos.

Le lendemain, le nomade prit la direction des forges de la cité. Il fronça légèrement les sourcils lorsqu'il décida de prendre un raccourci peu fréquenté, réalisant que malgré ses nombreux voyages, il connaissait à présent Busad plus que n'importe quelle cité d'Irydaë. Il secoua la tête pour chasser ses pensées et continua sa route. Un mouvement parcouru la population au retentissement d'une cloche et un murmure secoua la population, habitants comme simples voyageurs échangant à voix basse. Le signal avait été donné. Les Dragons allaient éclore !

Flavien pressa le pas et stoppa sa marche devant le raz-de-marée humaine qui s'amassait devant l'établissement. Le soigneur faisait partie des rares privilégiés à être autorisé à pénétrer dans les lieux, ce qu'il s'apprêta à faire avant d'être court-circuité par Selmac qui bondit de son épaule pour contourner la foule avant de se jeter sur l'épaule d'un pauvre spectateur. Flavien grimaça et se hâte de rejoindre son Aitah avant que celui-ci ne soit violement dégagé par un spectateur effrayé de cette arrivée soudaine.

- Excusez-l... Ah, Débuta Flavien avant de s'arrêter en reconnaissant un visage familier, Emrys !

Le photographe qui l'avait aidé à sauver les œufs était l'une des rares personnes à laquelle Flavien accordait sa considération. Bien qu'ils ne se soient pas revus depuis ce fameux jour, le soigneur se souvenait parfaitement du jeune homme aussi timide que courageux.

- Vous assistez à la naissance, vous aussi ?, Questionna Flavien avant de se rappeler que Selmac trônait toujours sur l'épaule du photographe. Et c'est qu'il avait l'air fier de lui, en plus !, Excusez Selmac. Il est content de vous retrouver, mais n'a toujours pas appris les bonnes manières.

Un regard en coin lancé à l'Aitah lui valut un ronronnement sonore de la part de ce dernier. Flavien leva les yeux au ciel mais ne put réprimer un sourire : maintenant qu'il était en terrain connu, Selmac état bien plus vif et joueur qu'en Daënastre.

- Vous avez reçu une invitation ?, Questionna Flavien qui ajouta, une fois la réponse d'Emrys donnée, Allons voir ce qu'il se passe à l'intérieur !

Il fut difficile de se frayer un passage à travers la foule de curieux, mais finalement les deux hommes arrivèrent à braver la marée humaine, s'engouffrant dans la forge placée sous haute surveillance.

Zaël
Zaël
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Un os dans la coquille EmptyVen 17 Aoû - 19:32
Irys : 962209
Profession : Gharyn de Busad
My'trän +3 ~ Kharaal Gazar (homme)
Pas de mouvement dans la salle, pas de ceux tant attendu en tout cas. Pourtant, ils furent remarqués. Il n’y avait pas grand-chose à se mettre sous la dent alors voir deux inconnus pénétrer si facilement dans le cercle restreint à l’intérieur avait de quoi soulever des murmures, des questionnements. L’un était myt’ran probablement adepte d’Orshin et pourquoi pas un soigneur venu assister à la naissance. Il n’était pas là la première fois, mais ça présence pouvait signifier que cette fois était la bonne. Quant à l’autre, difficile de dire, un représentant étranger ? Pourtant, il était seul, ce qui serait inconcevable pour un émissaire daënar en ces temps. Un mystère, une source de spéculation. Sauf pour ceux déjà au courant bien sûr.

« Merci d’être venu. »

Il était soulagé de voir que les mésaventures partagées avec l’adepte d’Orshin n’avaient pas été un frein à sa venue. Lui plus que tout autre méritait d’assister à ce miracle de la nature. Ainsi que le photographe, évidemment.

C’était à peine plus d’un murmure. Comme pour ne pas déranger les œufs sur lesquelles reposaient déjà le poids de l’attention de tant de monde. Ce fut le seul à parler. Les autres notèrent, ou non, d’un simple signe de tête leur présence. Ce n’était pas le temps des badinages. La dragonnière les jaugea de côté. Elle n’ignorait pas que c’était grâce à eux que le trafic d’œufs avaient été interrompu. Si elle leur était reconnaissante, elle ne fit rien pour le montrer dans l’immédiat ni ne chercha à nouer le dialogue. Ce serait pour un autre moment, probablement. Même si concrètement, il ne se passait rien. Les dragonnets savaient se faire désirer.

« Il y a une coquille qui se fêle. »

Les mots du confirmé, qui avait l’espace d’un instant oublié la présence de toutes ces personnes importantes autour de lui, furent repris et répété : il se passait enfin quelque chose ! Puis de nouveau plus rien pendant de longues minutes. Et après, tout se passa très vite. Neal, encouragé à continuer à tenir informé le peuple, n’eut plus le temps d’être embarrassé pour attirer ainsi l’attention sur sa personne. La coquille ne fut pas seulement fendillée, après des efforts répétés du petit être qui cherchait à sortir, les morceaux se détachèrent laissant apparaître le nouveau né. Mais c’était loin d’être fini. Il fallait encore que le dragonnet en sorte. Un spectacle des plus étonnants et frustrants. L’envie ne manquait pas à certain de venir aider l’être à sortir de sa coquille, d’accélérer le mouvement de cet être qui faisait ses premiers gestes dans le monde. Mais il devait le faire seul, un être humain aurait été encore plus maladroit et gênant. Ils étaient cantonnés au rôle d’observateur. Aucune interférence n’était permise.

« Ça y est, il est dehors, il descend ! »

Le petit mystère de plus tôt était totalement écrasé par le suspens présent : qui allait avoir l’honneur d’accompagner cet être toute sa vie ? Encore une fois, il fallut prendre son mal en patience. Alors que tout reposait sur lui, que chacune de ses avancées étaient reprises et rapportées mainte fois, le futur dragon avancé à son rythme, maladroitement. Sans pour autant s’arrêter ou qu’il y ait un doute sur sa route. Il ne cherchait pas à sortir, il alla droit devant lui pour venir s’accrocher au roc qu’était le Khorog. Les cris de joies fusèrent de toute part alors que la nouvelle se répandait, ce n’était pas le moment de se lamenter sur un paris perdu. Quant à Darim, étonnement, il ne fit pas un mouvement. Observant cette petite bête si stupéfiante tenter de l’escalader. Pendant quelques secondes à peine. Même lui ne pouvait être insensible à cette créature, surtout avec le lien qui s’était crée après que leurs yeux se soient croisés. Naturellement, il lui tendit la main pour qu’elle puisse monter telle qu’elle le souhaitait sur ses épaules. Observer le monde depuis les hauteurs, toutes relatives étant donné la petite taille du Khorog. À aucun moment il ne laissa paraître la gêne ou la douleur que pouvait provoquer les griffes de ce dragonnet malgré sa tunique.

« Mes félicitations Khorog, si je puis me permettre nous pouvons nous retirer pour nous occuper de lui.

-Nous attendons la venue de son confrère. »

Clairement, il n’y avait pas lieu à discussion. Si la dragonnière n’avait pas l’habitude qu’on lui dise non, un simple regard au Khorog suffit à lui faire comprendre. Il ne bougerait pas d’ici, pas tant qu’il ne l’aurait pas jugé nécessaire. Lové sur ses épaules le dragonnet semblait en accord parfait avec la patience du Maître de Delkhii.

Quant à Zaël, il était heureux. Pas parce que son Khorog avait été choisi, simplement pour la naissance, pour avoir pu y participer. Il ne put s’empêcher de se tourner vers Flavien, le plus à même de partager ce sentiment lui qui était si intimement lié à la faune. Mais aussi celui qui avait permis que cela se produise.

« C’est beau, n’est ce pas ? »

De bien faibles mots face à cette scène. Qu’importe, quoiqu’ils soient, ils seraient bien pales.

HRP:

Flavien Teleri
Flavien Teleri
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Un os dans la coquille EmptyLun 27 Aoû - 1:05
Irys : 887826
Profession : Soigneur itinérant - Guérisseur
My'trän +2 ~ Chimères
Flavien manqua de perdre Emrys en cours de route : les deux hommes ne s'attendaient pas à une telle foule se pressant à l'entrée de la forge dans l'espoir d'entrevoir le spectacle auquel ils allaient avoir la chance d'assister. Attrapant le photographe par la manche, le soigneur se dirigea vers le point de rassemblement des plus hauts dignitaires de Busad, non sans se sentir incroyablement mal à l'aise parmi ces hommes et ces femmes de pouvoir.

Il n'y avait qu'à jeter un coup d'œil vers l'arrière de l'établissement pour se rendre compte de l'ampleur de l'évènement. Les rares citoyens chanceux qui avaient réussi à grappiller une place au sein de la forge murmuraient tout bas alors qu'une excitation palpable les animait. Les Protecteurs missionnés pour garantir le bon déroulé de l'évènement se poussaient pour offrir une meilleure vue aux enfants qui avaient trouvés refuge sur les épaules de leurs parents, un fin sourire sur leurs lèvres.

Il y avait de ces évènements qui rassemblaient un peuple peu importe l'adversité qu'il rencontrait. Celui-ci en faisait partie.

Avec difficulté, les deux étrangers parvinrent à s'intégrer au cœur de l'assemblé, rejoignant Zaël au centre de toutes les attentions. Flavien fit son possible pour ignorer les murmures que sollicitèrent leur arrivée, taisant la petite voix qui lui soufflait de se fondre dans la masse plutôt que de s'afficher à découvert auprès d'autant de personnes inconnues. Les réflexes nés d'une vie rythmée de cavales avaient la peau dure, mais il tâchait de les ignorer au mieux.

Zaël leur adressa un sourire en les repérant qui s'approchaient de lui, les remerciant à voix basse de leur venue. Flavien répondit d'un signe de la tête, adoptant la même réserve que les autres membres du cercle très restreint qu'ils venaient d'intégrer.

L'heure n'était pas aux conversations, mais bien à l'observation. Les deux œufs recueillis par Busad reposaient dans leurs nids, les dragonnets qui y sommeillaient n'ayant pas la moindre idée de l'importance qu'ils pouvaient avoir pour ce peuple fébrile de les rencontrer. Leur naissance était annoncée comme imminente, mais personne ici ne pouvait se douter du combat auquel se livraient les petites créatures qui à peine éveillées à la vie avaient la lourde tâche de se défaire de leur cocon protecteur pour affronter l'extérieur. Les légères secousses que seuls les plus attentifs pouvaient distinguer de brefs moments étaient les seuls témoins de cette lutte acharnée pour leur naissance.

Enfin, une première coquille se fêla. La petite créature qui l'habitait avait eu raison de l'enveloppe protectrice, devenue une prison entravant ses mouvements. Avec une volonté et cette absence de grâce commune à tous les nouveau-nés, le dragonnet se débattait pour s'extirper tant bien que mal de son œuf, balayant les brisures qui recouvraient ses ailes et rendaient impossible leur déploiement.

La petite créature s'ébroua, dodelinant dangereusement au bord de son nid sous le regard inquiet de bien des spectateurs, avant de se ressaisir et d'enfoncer ses talons sur le support, déployant pour la première fois ses ailes. Leur envergure était impressionnante pour un si petit être et leurs couleurs qui se devinaient derrière les veinures de ces membranes fragiles l'étaient plus encore.

Prenant son envol sous les murmures enthousiastes des plus jeunes et les souffles retenus des adultes de l'assistance, le dragonnet se lança dans un ballet aérien maladroit et pourtant tellement sublime. La créature fit le tour de l'assemblée, donnant l'illusion de vouloir rendre leur salut à chaque personne s'étant déplacé pour l'accueillir en ce monde. Il n'en était rien. Le jeune dragon cherchait son frère ou sa sœur de cœur, cet homme ou cette femme si particulière dont l'essence même l'appelait à partager sa vie.

Guidé par les fils tissés par Orshin, la jeune créature rejoint son futur dragonnier qui se tenait à quelques mètres de Flavien seulement. Le Khorog de Busad accueilli le dragonnet avec révérence, offrant son bras en perchoir au nouveau-né qui ne s'en contenta pas, grimpant sur l'épaule de l'homme afin de voir le monde à son niveau. Le lien qui les unissait à présent était des plus puissants, semblable à ceux qui s'étaient tissés au fil du temps entre Flavien et ses familiers.

Flavien sourit légèrement en entendant le petit cri ravi du jeune dragon qui avait trouvé son égal en ce monde. Difficile de l'entendre clairement sous l'émerveillement de la foule, mais il était clair que la petite créature était ravie de rencontrer Darim. Tout silencieux qu'il était, le Khorog partageait clairement l'enthousiasme de celui qui deviendrait à n'en pas douter son plus loyal ami.

La dragonnière qui supervisait les naissances accorda au Khorog de rester dans l'assistance le temps que le second dragonnet les rejoigne. Flavien lui fut silencieusement reconnaissant, heureux de pouvoir admirer plus longtemps le jeune dragon et la régalité qu'un être aussi jeune était capable d'inspirer.

Zaël se pencha vers lui pour lui adresser quelques mots, toujours à voix mesurée. Si l'un des dragons était né, l'autre se faisait encore désirer et il n'était pas question de le troubler en parlant à haute voix. Le souverain de Busad souhaitait connaitre son avis, en apprendre un peu plus sur son ressentit. Il est vrai qu'il était resté silencieux, aussi stoïque qu'à son habitude malgré le sourire qui tranchait nette sur son visage plus habitué à la neutralité. En même temps, qu'aurait-il pu dire que les plus jeunes membres de l'assistance n'avaient pas encore exprimés par leurs cris enthousiastes et leurs soupirs émerveillés ?

Il avait beau être soigneur de profession, avoir côtoyé plus de créatures que certains de ces enfants le feraient dans toute leur vie, à cet instant il n'était pas plus savant qu'eux. Assister à de telles naissances était un privilège auquel seuls de rares Hommes avaient en général le droit d'assister. Seuls les dragonniers suffisamment proches de leurs frères et sœurs à écailles pouvaient normalement prétendre à ce privilège.

- C'est magnifique. Répondit simplement le soigneur, tout aussi doucement, Les dragons sont des créatures fascinantes.

Il aurait aimé approcher le Khorog pour observer de plus près le petit être lové contre lui mais n'en fit rien. Le dragonnet avait besoin d'apprendre à connaitre son compagnon et pas du regard scrutateur d'un soigneur intrigué. D'ailleurs le dragonnet ne se privait pas de faire les gros yeux à la Dragonnière proche de son mage, qui l'observait sur toutes les coutures pour s'assurer qu'il se portait bien. Il n'avait besoin de personne d'autre que de Darim et le montrait clairement à la femme qui ne souhaitait rien de plus que de veiller à sa bonne santé.

Flavien sourit en coin. La légendaire possessivité des dragons n'était pas qu'un mythe.

Détournant son attention du duo un instant, Flavien observa la petite foule rassemblée au sein de la forge. Pour des raisons évidentes de sécurité, la majorité des spectateurs avaient dû rester à l'extérieur : seuls quelques chanceux avaient eu l'occasion de leurs rejoindre dans le bâtiment. Pourtant, contrairement à ce que Flavien avait pensé en présentant son invitation à l'entrée, il n'y avait pas ici que des personnes de la haute société. Au contraire. Mis à part le cercle très fermé qu'ils formaient autours de Zaël, la plupart des spectateurs étaient des gens du peuple, des citoyens aux mains calleuses et des enfants dont les vêtements prisés à maintes reprises ne laissaient aucun doute sur leur niveau de vie.

- Je crois que je ne suis pas le seul à le trouver incroyable. Dit-il en désignant du menton deux garçons d'environ dix ans qui s'étaient frayé un passage jusqu'aux Protecteurs.

Echangeant des paroles bien trop rapides pour être assimilées par les adultes présents, ils observaient le dragonnet perché sur l'épaule de leur Khorog avec une étincelle d'émerveillement brillant dans leurs yeux.

Flavien reporta son attention sur Zaël. Le sourire discret qu'il offrit au Gharyn le seul signe qu'il approuvait grandement ce choix de la part du souverain. Il aurait pu, après tout, décider de restreindre l'assemblée pour s'assurer que le dragonnet choisirait l'un de ses proches amis. Il ne l'avait pas fait, laissant à la créature le choix de sonder le cœur de ceux qui s'étaient pressés pour le voir naître. Certes, son choix s'était porté sur le Khorog, mais rien au monde n'empêchait son frère dragon de porter son dévolu sur un citoyen des plus humbles.

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