Épave
Elle était loin la gloire. C’était bien l’une des choses les plus évidente qui sautait aux yeux d’Hex. A bord de sa frégate, il pilotait comme un automate, contrebalançant mécaniquement les différents soucis de l’appareil sans y penser. Deux ans…. Deux ans de conflit, deux ans perdus pour une terre qui ne valait rien. Une vie, une famille, des amis…. Tout avait vieilli sur le continent sans lui.
Le soldat n’avait en tout et pour tout que cet aéronef et ce qu’il contenait.
Les moteurs avaient un son inquiétant, fonctionnant sans maintenance depuis plusieurs moi, et l’officier ne regardait même plus le compte tour qui indiquait une surchauffe. Sur les quatre moteurs modifiés trois restaient seulement en état, et deux d’entre eux crachaient une inquiétante fumée noire.
L’engin était grêlé d’impact, que ce soit de balle ou de brûlure, et la cellule arborait parfois de larges trou, là ou les matériaux avaient manqués pour réparer l’engin. Au moindre virage, des centaines de douilles vides roulaient dans l’habitacle qui empestait l’huile et le métal chaud, les mitrailleuses de l’engin désespérément vide que ce soit de munitions ou d’artilleurs.
Tous étaient retournés à leurs famille, à leurs régiment… ou à la terre, et d’une époque ou la mission avait paru simple, il ne restait qu’un souvenir : une alliance rangée dans un coffre, attendant sans doute des jours meilleurs.
Le pilote n’était guère en meilleur état, son armure usée cachant fort heureusement sa fatigue aussi nerveuse que physique. Seuls ses nerfs lui permettaient encore de tenir. Deux ans, c’était long, même pour quelqu’un d’habitué à la guerre. Et deux ans avec la peur de se faire ouvrir la gorge au moindre sommeil, c’était encore pire.
Il portait toujours son casque, ce dernier lui ayant de trop nombreuses fois sauvé la vie, mais c’était surtout son exosquelette qui le portait.
C’était un modèle robuste, et pourtant, ses articulations étaient grippées à de nombreux endroit et aux mouvements de son utilisateurs, on pouvait aisément deviner que les articulations n’étaient pas le problème majeur.
De petites étincelles jaillissaient du genoux à chaque action sur le palonnier et laissaient deviner un matériel à bout de souffle qui aurait besoin de plus qu’une révision.
L’engin volait contre les éléments, et si bien des nouvelles frégates utilisaient ces derniers pour aller plus vit, l’engin blindé était comme une brique avec deux ailes comptant sur la puissance de ses rustiques moteurs pour aller toujours plus loin. Une insulte à l’architecte du vent, mais une insulte que beaucoup avaient appris à craindre.
Et voilà que Cerka approchait. Il ne savait plus vraiment si celle qu’il voulait retrouver y habitait encore, ni même si elle était encore vivante, mais l’avion n’irait pas plus loin.
Entamant des manœuvres pour se poser, le soldat constata qu’un autre moteur venait de lâcher, encrassé ou définitivement en panne, et l’engin s’affessa presque au même moment.
Hex poussa les deux derniers, espérant qu’ils lui permettrait d’atteindre la piste sans encombre. Comme pour rire de lui, plusieurs alarmes se déclenchèrent signalant des dysfonctionnement mineurs mais surtout, que le train n’était pas sorti.
Cela força le pilote à quitter son siège, claudiquant jusqu’au levier de déclenchement manuel, mais qui marcha seulement à moitié car une des trappes resta close.
Dans un soupire, il se résolu à maltraiter son propre matériel, tirant le pistolet à sa ceinture avant de viser au travers du plancher là ou aurait du se trouver la trappe.
Trois balles, trois détonations qui résonnèrent sans l’affecter plus que ça. Les projectiles vinrent casser la trappe, ou plutôt la couche de glace qui c’était formée sur la trappe, creusant trois trou supplémentaires dans la machine.
Mais Hex n’en était plus à ça prêt. Un claquement finit enfin par confirmer la sortie du train.
L’appareil était comme une brique ivre, et son parcours erratique inquiéta les contrôleurs qui indiquèrent très vite une piste éloignée et qui prévinrent les pompiers de piste.
L’avion toucha la piste , ses suspensions vide grinçant en tentant d’absorber le poids de l’engin. Ce dernier roula maladroitement jusqu’au hangar ou l’attendait déjà les pompiers et comme pour leurs donner une utilité, l’un des moteurs s’enflamma, répandant de l’huile partout au sol.
Hex ne bougea pas de son siège, ouvrant la visière habimée de son heaume pour tirer une cigarette et se mettre à fumer comme si de rien n’était
Le tabac lui permit au moins de trouver un peu de calme et de ne pas fusiller l’homme qui monta à bord avec un air furieux, mais qui devint blême en constatant l’état de l’appareil et du pilote
-Vous…. Vous allez bien Monsieur ?
-Ouais ouais génial, vous avez un mécanicien ici ?Demanda le soldat qui avait de toute façon oublié la moindre notion de politesse, et n’avais pas la moindre envie de perdre du temps
-O….oui… mais au vu de l’état de votre appareil je….ne pense pas que….Hex se leva, son exo grinçant et crachant de la fumée alors qu’il s’avançait.
-M’en fiche pas mal de ce que tu pense, fais simplement ce que je te demandeL’officier posa sa main sur l’épaule de l’homme le faisant pivoter pour fixer la verrière.
-Tu vas gentiment aller dehors, décrocher un téléphone et appeler un mécanicien, et ce dans les plus bref délais, car je n’ai pas vraiment envie de parlementer vu ?-Euh… oui oui….En temps normal, le pistard aurait sans doute été plus virulent, mais l’intérieur de l’appareil l’avait fait blêmire. Ce n’était pas l’odeur de la fumée ou de l’huile, ni même les douilles au sol, mais bien les traces de sang qui ornaient les postes. Cet engin semblait revenir de la guerre, et celle des plus jolie, il n’avait pas eu envie de risquer l’ire du pilote.
Ce dernier trottina jusqu’au téléphone, appelant au plus vite le premier atelier qui lui vint à l’esprit
-Allo… atelier Hawkes ? J’ai un client urgent pour vous…..