Epreuve 1 : SAO rpg - Les Trois Îles

RAPPEL : Soyez imaginatifs, ne restez pas accroché sur des acquis que le sujet semble vous délivrer, vous n’êtes pas obligé d’être amical avec votre contrepartie, la réciproque est vraie, on ne peut que vous conseiller de ne pas prendre les épreuves trop littéralement, mais de tout de même respecter les consignes pour ne pas faire un hors-sujet


Description :

Vous êtes perdus. Dans tous les sens du terme. Il n’y a qu’une chose dont vous êtes sûr, c’est que cette terre n’a jamais été créée pour vous accueillir, et que peu importe où vous vous trouvez, quelqu’un ou quelque chose veut votre mort. Vous vous immiscés en territoire hostile, chez des gens qui considèrent que votre vie a touché à sa fin au moment où vous avez traversé leur frontière, peut-être ? Ou bien est-ce simplement la nature qui ne tolère pas votre présence en ces lieux ? Quoi qu’il en soit, vous êtes en danger, vous et votre partenaire, compagnon de fortune dont vous ignorez tout. Camarade de survie ou menace potentielle, qu’en savez-vous ? Vous devez être prêt à tout pour survivre, vous devez faire de votre vie la priorité, quitte à tuer ou simplement laisser mourir pour vous en tirer.

« Haaaan, une anomalie !! Regarde Princesse, regarde, elle est juste lààà !!! »

Je venais tout juste de découvrir un portail de téléportation dissimulé que je cherchais seul depuis un bon moment. Fou d’excitation, je le pointais du doigt à mon familier, un petit caméléon femelle aussi impitoyable que capricieux.

Mon inventaire et mes poches étaient remplis de potions et de cristaux en tout genre. Je récupérai mon katar et l’imbibai d’un liquide paralysant. Je validai alors ma capacité à arpenter des lieux inconnus avant de m’approcher la porte lumineuse et difforme.

« Allons piller ces coffres avant que d’autres en aient l’idée, Ô Grande Impératrice !! »

Je fis un pas en avant, et le paysage changea instantanément.

Je me retrouvai dans une forêt tropicale. L’atmosphère était lourde. L’humidité et la chaleur si étouffantes que mon corps sua automatiquement à grosses gouttes. Mon équipement, constitué entre autres de bottes et d’un manteau en cuir, n’était pas du tout adapté à cet environnement.

J’aurais bien voulu tout enlever, montrer à la nature mon corps d’adolescent magnifique au point que je pourrais aisément faire partie d’un groupe de J-Pop si je le voulais. Mais cela aurait signifié dire adieu aux améliorations de stats que mes vêtements me prodiguaient.

J’avais passé quelques secondes à peine ici et pourtant, la buée de mes lunettes empêchait déjà quiconque de contempler mes yeux bruns et bridés. Pour couronner le tout, mes cheveux noirs, épais et légèrement ondulés collaient à mon front. Je les envoyai balader en arrière et fis pendre mes lunettes à mon col avant de regarder autour de moi.

« … Le portail a disparu… »

Je m’inquiétai aussitôt et récupérai un cristal de téléportation que je serrai dans ma main non armée. Il me permettrait de fuir en cas de problème… Et si je ne pouvais pas retourner en arrière, il était plus que probable que les lieux étaient parsemés de pièges.

Mais avant de pouvoir me concentrer sur les sons et utiliser d’autres compétences pour décider quoi faire, un homme à la carrure impressionnante interrompit le cours mes pensées.

J’écarquillai les yeux et fis volteface dès que j’aperçus l’expression du visage de l’homme. Dans sa voix s’étaient en plus mélangées autorité et panique : mon instinct m’obligea à courir.  



« Qu’est-ce que vous avez vu, pourquoi on cou…? »



La fin de ma phrase fut coupée par un hurlement effrayant qui me fit sursauter. Je lâchai mon cristal de téléportation, faillis tomber et manquai d’écraser le familier qui courait devant moi. De courts et sporadiques frissons me traversèrent, de la plante des pieds jusqu’aux oreilles. Qu’est-ce que c’était ?!


Je cavalai aussi vite que je le pouvais alors que d’autres sons alarmant atteignaient mes tympans. Je n’avais même pas envie de regarder en arrière. Sur quoi étais-je tombé ?!


Alors, je me rendis compte que l’homme et le caméléon couraient plus vite que moi. L’idée que je fus la première victime à proximité de la bête inconnue m’affola de plus belle. La boule de stress ainsi créée se développa dans mon ventre aux bruits des feuillages arrachés et des craquements de bois qui me parvinrent dans le dos.


Que faire ?!


Me cacher ? Rejoindre l’extrémité d’un arbre pour faire le point et peut-être voir la chose sans qu’elle ne m’aperçoive ? Sauter en avant, récupérer le familier et le balancer en arrière ? Récupérer les plus gros objets de mon inventaire et les lancer au mec jusqu’à ce qu’il se ramasse par terre ? Je haletai.



« Attends, qu’est-ce qui nous court après ? On peut p’t-êt’ le combattre ! »



J’avais dit ça, et pourtant, tout mon corps me disait de fuir. Je n’avais jamais entendu de grondements aussi terrifiants, même dans les films.


Mon corps était en nage, autant à cause de la peur que de celle de la température. Je ne savais pas du tout où nous allions, je n’avais finalement aucune information, pas même sur ce type. Et qu’est-ce qu’il foutait là en plus ?! Je pensais être le seul à avoir découvert ce portail de téléportation !


C’était la première fois de ma vie que je me sentais aussi dépassé par les événements.

Quelle foutu bonne question il posait là ! J’aimerais bien savoir ce qui nous cours après, justement ! Mais une chose était sûre : je n’allais pas gaspiller mon oxygène en palabre ! Pas avant d’avoir trouver un abri, ou au moins un endroit qui nous permettrait de faire volte-face !

J’attaquais férocement la végétation pour nous dégager le chemin. L’inconnu suivait, tout aussi presser de fuir la bête que moi. Et visiblement au moins aussi enclin que moi à l’affronter.
Enfin, une percée se profilait devant moi ! Il ne s’agissait que d’une trouée de quelques mètres, mais c’était suffisant pour voir arriver ce a quoi nous devions faire face !

L’inconnu me rejoignit bien vite et je me plaçais en position de défense, tenant ma pioche comme s’il s’agissait d’une épée. Mon corps agissait comme s’il se trouvait encore sur le champ de bataille, prêt à réagir a tout danger. Prêt à survivre.

- Je ne sais pas ce qui nous suit, mais je ne compte pas le laisser faire !

Quel que soit les plans de la chose, elle aurait du fil à retordre. J’attendis que le monstre arrive, mais le silence retomba tout à coup. Je fronçais les sourcils, à l’affut. Ça sonnait comme le calme avant la tempête…

Je jetais un coup d’œil à mon compagnon d’infortune. Un petit homme, bien trop habillé pour le climat, qui semblait se faire coller par une sorte de petit lézard étrange qui avait visiblement le don de devenir invisible. Ils ne semblaient pas d’ici. Pas plus que moi.

- Qui êtes-vous ? Qu’est ce que vous faites là ?

Je restais concentré, observant les alentours. La chose pouvait sortir de n’importe où et je ne comprenais pas pourquoi elle avait cessé sa course et ses grognements féroces. Mon cœur battait à tout rompre. Cette attente était pire qu’une confrontation directe et une peur glaçante s’insinuait lentement en moi. Je ferais face. Je faisais toujours face. Mais ça ne m’empêchait pas de ressentir une peur tenace qui me faisait trembler.

Nous avions enfin pu nous arrêter et les bruits avaient cessé. Etrangement, cela m’inquiétait encore plus. Pour couronner le tout, ma vision commençait à se brouiller à cause de la chaleur.


Bah alors, on prend ses potions, mais on récupère pas de bouteille d’eau ? Amateur !


Je secouai silencieusement mes vêtements pour y laisser passer un peu d’air. Ma transpiration ne pouvait réguler ma température dans ces conditions…



« Ari, enchanté. J’ai détecté une anomalie et j’ai été téléporté du quarantième étage à ici… Mais le portail a disparu ! Et toi ? Ça fait longtemps que t’es là ? Tu as une carte de la zone ? »



Pff, mais réfléchis, regarde sa tronche ! Lui aussi, il est complètement paumé !


Je chuchotais, même si je pressentais l’inutilité de la chose.


Je profitai de ce répit pour regarder l’homme de haut en bas. Je trouvai ses traits durs, renforcés par l’appréhension, ses yeux bruns calculateurs et ses vêtements, plus adaptés que les miens à l’environnement, très originaux, voire étranges.


Je me trouvai finalement abasourdi devant l’absence de curseur et de barre de vie au-dessus de sa tête. Mes yeux étaient exorbités. Toutes les entités de Sword Art Online avaient nécessairement un curseur. Il était quoi, ce mec, s’il n’était ni PNJ ni joueur ni monstre ?! Dieu ???


J’ouvris mon interface d’un mouvement de l’index et pianotai dessus.



« Mais…?! »



Ma compétence d’Analyse me révéla qu’il n’était… Rien du tout. Je le touchai alors du doigt. Ma main ne le traversa pas. Reportant mon attention sur mon menu, je remarquai que ma carte était vide. Aucune indication, aucun dessin, rien. Où étions-nous bordel ?! Je devais me casser d’ici !


Je récupérai mon dernier cristal.



« Téléportation, étage 1. »



Rien ne se passa.



« Je flippe grave là… Je vois même pas ton curseur ! Est-ce que c’est un bug ou ça fait partie du piège ? Faut qu’on retrouve un portail pour rentrer, ce doit être le seul moyen… »



Cette situation aurait pu me plaire. Si je n’y avais pas joué ma vie.

Je restais concentré sur la végétation et les sons, guettant toute attaque alors même que le petit homme me parlait. Et que je ne comprenais pas un traitre mot de ce qu’il racontait ! Il semblait pourtant que nous parlions la même langue, je comprenais la base de ses phrases. Mais les mots qu’il utilisait m’étaient inconnus et n’avait aucun sens…

Je le voyais gigoter à la périphérie de mon champ de vision, bouger ses doigts en l’air. Il donnait l’impression de voir des choses que je ne voyais pas. Je fronçais les sourcils. Était-il un sorcier ou quelque chose du genre ? Il me parla encore, de façon toujours aussi incompréhensible et énigmatique.

- Mon quoi ? Un portail ? Ecoute… je ne sais vraiment pas de quoi tu parles. Mais je suis d’accord avec toi, il faut sortir de ce merdier.

Un grondement féroce résonna derrière le feuillage à ma gauche. Je serrais les dents en même temps que la prise sur le manche de mon arme improvisée. Je reculais lentement, le plus possible. Il me fallait de la place. Si la chose décidait de me sauter dessus, il me faudrait le plus d’espace possible pour riposter ou esquiver.

- Si tu as une arme ou de quoi te défendre, c’est le moment ou jamais…

Lui glissais-je lentement, à voix basse. Je sentais la tension augmenter. Le monstre sauterait de sa cachette à n’importe quel moment. Il faudrait être prêt à ça.

- Je vais tenter de l’intercepter, de l’occuper. Profite en pour l’attaquer par le coté ou par derrière si tu en as l’occasion.

Un plan de bataille échafaudé rapidement. Mais avions-nous vraiment le choix ? Il était évident pour moi que je serais celui qui prendrait le plus de risque. J’étais fidèle a Orshar, dieu de la souffrance. Une divinité qui acceptait d’atténuer celle d’autrui si l’on était prêt à la porter sur nos épaules à leur place. Un dieu qui encensait le sacrifice et exécrait l’égoïsme. Je vivais selon ses principes. Je n’avais aucun doute sur la façon dont je devais agir.

Bon, on s’en bat la race de ce mec ! Il n’existe peut-être même pas !!


Je cessai de perdre mon temps et mon énergie à me demander où j’étais et qui était mon interlocuteur. Sans curseur, il n’était rien de toute façon. Dans tous les cas, il ne semblait pas dangereux pour moi et savait même se battre. J’allais me servir de lui pour rentrer dans un endroit plus familier.



« Compte sur moi. »



Je serrai mon arme empoisonnée et jetai un coup d’œil à mon familier. Il comprit immédiatement ce qu’il devait faire.


J’atteins une des branches en hauteur d’un bond agile tandis que les bruits menaçants se faisaient plus proches, plus clairs, plus terrifiants que lorsqu’ils étaient plus distants.


Alors, mon œil agité se posa sur une feuille qui venait d'être frôlée par…



« … Un lapin ? »



La langue de mon familier fouetta immédiatement le petit animal mais ne le paralysa manifestement pas. Elle continua de claquer mais, malgré les coups, le petit lapin blanc s’approchait tout doucement.


Il nous regardait calmement de ses grands yeux rouges. Comme pour l’homme étrange, il n’avait ni curseur ni barre de vie. Ses incisives étaient visibles et ses pattes semblaient ne faire qu’un avec le sol. Il avait tout sauf l’apparence d’une bête sanguinaire et féroce. Et pourtant, c’était bien de sa bouche ouverte que sortaient ces sons abominables.


Soudainement, ces derniers se transformèrent en véritables hurlements de haine et, alors que j’attendais le signal de mon partenaire pour passer à l’action, d’autres lapins blancs apparurent, et crièrent à leur tour, me dégommant les tympans. Le volume était si fort que je sentais tout mon corps trémuler au rythme des ondes sonores. Le volume était si fort que je n’entendis ni ne sentis la terre trembler, assez pour agiter l’arbre sur lequel je me tenais.


Quelques instants plus tard, des sortes de racines sortirent de terre pour danser, frapper, et trouer de leur extrémité tout ce qu’elles pouvaient. La branche sous mes pieds disparut au bout de quelques secondes après avoir été touchée.


Et je tombai.

Le premier lapin apparut. Puis des dizaines d’autres. Des centaines d’autres peut-être. Puis le monde se mis à trembler. Les arbres semblaient prendre vie. La végétation tout entière vibrait, augmentant le râle funeste qui nous vrillait les tympans. Je lâchais ma pioche, obligé de me couvrir les oreilles pour résister à cette épreuve alors que des lianes sortaient de terre, se mettant à frapper tout ce qui se trouvait aux alentours.

J’en évitait plusieurs avec difficultés. Rester en mouvement dans ce vacarme était un enfer. Je vis une masse tomber, le petit homme soudain expulsé de son perchoir.

Les boules de fourrures blanches aux yeux rouges injectés de sang qui hurlaient leur rage folle autour de nous semblèrent s’agglutiner. Elle se rassemblèrent, se montèrent les unes sur les autres, bientôt rejointe par un amas de feuilles et de branches vivantes. Le tout sembla s’agglomérer, se joindre, se fondre, pour donner une masse immense, affreuse, presque informe et pourtant terrifiante.

- Bordel de…

Je regardais le spectacle, momentanément paralysé par cette sorcellerie incroyable. Puis ce ne fut plus des lapins ou des végétaux qui se tenait là, mais un monstre gigantesque, aux crocs dégoulinant d’une substance verdâtre qui n’avait rien de rassurante.

Je ramassais à la hâte mon arme de fortune. La chose avança d’un pas lourd, faisant vibrer le sol sous nos pieds. S’enfuir n’était même pas une option, il n’y avait pas d’issue de toute façon. Prier ? Intérieurement je le fis. C’était sans doute inutile mais plus fort que moi. Je ne pensais pas mourir ainsi, dans ce lieu inconnu, aux côtés d’un homme qui me l’était tout autant.

La chose immense avança d’un nouveau pas. Sans réfléchir davantage, je me lançais à l’assaut. Je n’avais de toute façon rien à perdre. Ni famille, ni ami. L’inconnu ? Il était sans doute un fils, peut-être un père ou un frère. Alors j’attaquais ce qui me semblait être un point sensible, un coude, ou un genou. Je sentis le pic de métal s’enfoncer dans l’articulation dure, la chose tressauter et pousser un cri strident.

Le choc m’avait étourdi pendant un moment. Lorsque je me redressai, un monstre immense rouge, blanc, vert, gris et bruyant me masquait autant la vue que les mélodies habituelles de la nature. Je n’entendais que lui, un mélange inquiétant de hurlements, de grondements, de sifflements et de bruissements de feuilles.


Ma terreur était telle que j’en avais la nausée. La déshydratation devait aussi contribuer à cette sensation.


Habituellement si confiant et prudent, je cédai à la panique. Ma barre de vie était quasiment vide et je constatai que mes potions de soin ne fonctionnaient pas.  


Pétrifié, je restais au sol. Mon arme tremblait, secouée par mes mains incontrôlables. Ma tête était si lourde que je peinai à la décaler pour regarder les environs. L’inconnu se battait contre la chose, lui arrachant parfois des cris assourdissants. Ils provenaient plus de colère que de douleur.


J’aperçus alors, à quelques mètres du combattant, un objet lumineux. L’extrémité seule d’une queue multicolore et lumineuse enroulée sur elle-même.



« Princesse ? »



Je pensais que sa mort ne me ferait rien. Au mieux, que je me sentirais libéré. Je ressentais tout sauf ça.


Je me relevai avec peine et trébuchai à cause des secousses, dues autant aux déplacements du monstre qu’aux tressautements de mon corps.


Je ne veux pas mourir ici. Je ne peux pas mourir ici. Je dois rentrer.


Je repris d’un coup mes esprits. Je courus alors vers l’homme en comptant sur mon agilité pour ne pas tomber à chaque séisme. Arrivé quasiment à son niveau, je bondis et dérapai assez loin pour récupérer les restes de mon familier. Puis je fis volte-face.



« Désolé. »



Je ne l’étais pas. Cet homme n’existait pas. Il n’existait pas donc, il ne mourrait pas à cause de moi : il ne mourrait pas tout court. Il ne pouvait pas. Pas comme moi.  


Je m’éloignai du combattant et de son adversaire en courant, cherchant le moindre portail, la moindre faille dissimulée pour rentrer chez moi. J'enjambai les racines épaisses, et luttai contre les lianes et les larmes…


Avant de me retrouver face à un lapin blanc.

L’inconvénient d’être aussi énorme que cette chose, c’était qu’elle était terriblement lente. Ça me donnait l’occasion de l’attaquer et d’éviter de prendre des coups. Je tentais d’atteindre des points sensibles mais j’avais l’impression de trancher dans le vide. La bête grognait mais n’avait pas l’air d’être amoindrie. D’ailleurs elle ne saignait pas ni ne perdait aucun fluide…

Je vis le petit homme bouger vivement et se diriger vers moi. Je cru qu’il venait me prêter main forte. Mais ma désillusion fut de courte durée alors qu’il s’enfuyait finalement loin de moi et de cette horreur. J’étais assurément déçu, mais je ne lui en voulais pas vraiment. Il tentait de sauver sa vie et je l’aidais en me faisant la cible du monstre. Telle était peut-être ma destinée.

Je frappais de nouveau avec acharnement, plantait mon pic dans cette chose qui hurla en retour. J’avais visiblement visé juste cette fois, car son hurlement strident fit vibrer mon crâne et sa gueule s’ouvrit, béante, crachant une flaque de bave verdâtre. Mais si j’étais parvenu à la blesser, j’étais désormais désarmé.

Le métal s’était enfoncé profondément dans la chose et s’y était coincé. Je tirais plusieurs fois sur le manche impossible à déloger. Je lâchais prise alors que l’amas immonde tentait de m’écraser en représailles.

Je reculais vivement, me retournais pour courir hors de sa portée mais la végétation semblait s’être resserrée pour créer un mur infranchissable. Je tentais de m’accrocher aux branches, de trouver une issue mais il n’en existait aucune. Et je compris vite le sort qui m’attendais.

Je déglutis, me tournais lentement. Sa gueule était juste là. Elle pourrait m’avaler tout entier sans peine. Son haleine fétide caressait ma peau, sa sécrétion herbeuse atterrissait sur mon visage alors qu’elle grognait par anticipation sa prochaine dégustation.

Je relevais le menton. Je mourrais la tête haute. J’eus une pensée pour le petit homme. J’espérais qu’il s’en sortirait. Un rayon de soleil se refléta sur un croc terrible, m’aveuglant au passage. Puis soudain, il n’y eu plus rien. Un vide angoissant, comme un blanc, une absence de tout. Rien sous mes pieds ni autour de mon corps.