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Chroniques d'Irydaë
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Et merci d’avoir choisi notre agence de voyage EmptyJeu 3 Mai - 22:49
Il était temps de se ressourcer un peu. Fuir, sans aucun complexe, la vie compliquée dans les terres du sud. Bien qu’à l’échelle de Sakari, où la complexité se bornait à survivre, suivre les ordres, acheter à manger et tuer des gens, on ne pouvait pas vraiment parler d’un quotidien harassant.
     Ce n’était pas vraiment la routine asphyxiante, qu’elle fuyait, mais le fait que ça puisse en devenir une. En effet, depuis quelques temps, ses principes moraux n’avaient été que mis en sourdine par des contrats, qui se résumaient en empiler les corps, et parfois pour rien.
     Il ne faut pas croire. Elle était douée, diablement douée, à ce jeu là, mais tuer des animaux ou des Khashans, la différence n’est que lexicale, qui menacent votre famille est bien plus aisé que de massacrer des étrangers, qui malgré le fait qu’ils soient d’une culture différente, ont leur propre vie, leur propres ambitions.
     Et Sakari était curieuse. Très curieuse, des mœurs des étrangers. Elle avait très bien saisi que pour appréhender leur technologie ou leur magie, il fallait s’imprégner de leur mode de pensée, et ça passait avant tout par les respecter au moins autant que, bon, pas un autre Nunaqortoqut, mais au moins un Aildorain.
     Voilà peut-être pourquoi elle avait accepté ce contrat provenant de l’armée daënare. Ou toute autre désignation officielle qu’elle avait oublié aussi sec. Les Mÿ’trans n’ayant pas d’armée, elle se contentait d’appeler l’armée nationale de l’UNE « l’Armée ».

     Le lieu de rendez-vous avait très simplement été donné sur le port d’Aildor. Sakari venait accompagnée de son patron du moment, en la personne de Mark von Heïnster, qu’elle appelait simplement « patron » sinon elle allait le fatiguer à force de glousser suite à une moue ennuyée de l’intéressé après qu’elle eut écorché son prénom avec son terrible accent.
     Les instructions avaient été données à Myträ Andreïev par courrier. Elles détaillaient qu’il était inutile de venir avec des armes ou de l’équipement, la seule chose dont elle allait avoir besoin étant des vêtements assez chauds pour faire la traversée et dont elle n’aurait plus besoin sur place, ainsi qu’une cassette pour acheter le matériel dans Aildor. En effet, quand on veut apprendre la survie en milieu hostile, la première chose à savoir, c’est comment gérer son matériel, comment repérer le bon du mauvais, et comment l’améliorer pour qu’il nous convienne mieux. Il est de notoriété publique qu’un clochard sans le sou équipé à l’aildoraine – avec du premier prix au marché noir et des bricolages personnels – aura plus de chances de survie qu’un Daënar douché de frais dans les dernières technologies hors de prix, mais dont il est incapable de remplacer un composant défectueux sans un technicien derrière.


     Il y a une grande différence entre la guerre telle que la pratiquaient les nomades et les sédentaires. Les premiers se moquent des lignes logistiques, combattent avec peu de ressources et avec ce qu’ils improvisent. Ils ne peuvent se permettre de perdre la moindre troupe, car on ne parle là pas de soldats, mais de guerriers. Ceux qui combattent font cela depuis leur plus tendre enfance, et là où le soldat doit protéger avec sa vie quelque chose de plus important, mettons sa terre ou sa famille, le nomade ne doit préserver que sa vie. Il n’a par nature pas de terre, et sa famille combat avec lui, ou bien ne peut pas aisément être capturée – du fait de son caractère mobile.
     Ils ne pratiquent donc jamais la bataille rangée, sauf dans des cas particuliers. En effet, la bataille rangée classique est une technique visant à faire fondre son ennemi dans le chaudron de la guerre et de retirer de lui toute envie et capacité de résister. C’est donc un duel à qui a les meilleures tactiques, les meilleurs soldats et les meilleurs armes. Or par nature, les nomades ne peuvent se permettre de risquer le moindre de leur homme dans un événement décisif, car ils sont trop peu nombreux. La guerre des nomades ne vaut que tant qu’ils sont sûrs de gagner. Dès que la tendance devient indécise, comme ils n’ont pas de territoire à défendre, ils brûlent tout et repartent avec le butin.
     Ce que Sakari allait enseigner, c’était précisément ce type de guerre, exclusivement offensive, et qui s’étalait sur le temps long en guérilla, sabotages et escarmouches, et fuite devant un affrontement indécis.

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Et merci d’avoir choisi notre agence de voyage EmptyVen 4 Mai - 17:57
Myträ observait avec une certaine curiosité les blocs de glaces passer le long de la coque du bateau. La blonde était une fille des glaces, ayant grandie dans un pays où souffle en permanence un vent givrant et où la neige ne fond qu’au plus fort de l’été. Pourtant, elle n’avait encore jamais vu des morceaux de glace s’égayer librement comme autant de troupeau de moutons sur les prairies bleues de l’océan.

La militaire cracha du haut du bastingage un éclat écarlate qui s’écrasa sur une tête de bétail givré, marquant celui-ci d’un sceau rougeoyant. La blonde massa également la commissure de ses lèvres éclatée qui commençait à s’orner d’un joli bleu turquoise.

Bien sûr qu’elle s’était battue. Difficile de faire autrement avec la vermine qui partageait son bateau. Tous des bandits, des parias et des fourbes sans dignité. L’intégrité et la droiture de la capitaine ne pouvaient souffrir bien longtemps de la présence de ce genre de misérables. Oh, elle savait parfaitement que sa patience allait être mise à rude épreuve durant cet entrainement en milieu sauvage auquel elle s’était portée volontaire. Marnaka était le repère de toute la lie de l’humanité. Le résidu de la décantation du vice et de tout ce que l’humanité pouvait produire de déchet en tout genre.

C’était aussi pour adoucir ce genre d’opinion absolu et manichéen que Myträ s’était décidée à venir dans ce pays glacé. La jeune femme était fière de son caractère droit et juste, mais il lui manquait une dose de tolérance pour relativiser ces nobles idéaux. Et puis, si on pouvait crapahuter dans la neige, sucer des cailloux en guise de petit déjeuner, et manquer de crever à chaque jour que Delkhii fait, Myträ était toujours partante. Entre le besoin de se dépasser ou le plaisir de risquer sa vie, difficile d’établir la motivation prédominante.

-Sa… Salope… couina un type prostré au sol.

Il fit écho à un concert de couinement, car un parterre de ses semblables gisait également sur le pont du bateau, se tenant tous une partie de leur anatomie en gémissant – plus ou moins fort en fonction du membre touchée -. Myträ ne fit aucun commentaire et s’éloigna plutôt de ses anciens adversaires, attendant que le bateau accoste d’une minute à l’autre au port d’Aildor. Comme indiqué dans la consigne, elle n’avait apporté aucune arme, ni équipement. Elle n’avait qu’un petit sac pour transporter ses sous-vêtements de rechange ; le reste était sur son dos. La capitaine revêtait la version polaire de l’uniforme des Forces Expérimentales. Une veste noire à col doublé de fourrure qui se fermait à l’aide d’une rangée de bouton argentée. En surpiqure, l’emblème des Forces Expérimentales était clairement visible, ainsi que son grade pour ceux qui savent lire les galons. Une épaisse cape de fourrure enveloppait le tout, scellée par une broche frappée du symbole de l’U.N.E. Myträ n’était pas en vacances et ne comptait pas rester incognito, même hors de la juridiction de Daënar.

Armée de sa bourse remplie d’irys et de son petit sac de voyage, elle fut l’une des premières à descendre sur le quai une fois la passerelle installée. Myträ était soulagée de laisser ces jours de promiscuité derrière elle, et c’est donc avec impatience qu’elle cherchait du regard son contact. On lui avait bien donné une description mais ces gens se ressemblaient tous. Cependant, après avoir éliminé les badauds qui ne semblaient attendre personne, la militaire se dirigea vers Sakari.

- Bonjour, fit-elle très laconiquement. C’est moi, Andreïev.

Sans blague ! C’était elle, en effet. Il faut dire qu’on la voyait venir de loin dans son uniforme rutilant. Cependant, elle ne transpirait pas la suffisance et la confiance qui colle d'habitude aux gradés de la prestigieuse Force Expérimentale. Au contraire, ses yeux bleus fuyaient obstinément tout contact visuel. De plus, si elle ne disait rien d'autre qu'une vague salutation et son nom, ce n'était pas parce qu'elle était la caricature du vétéran taciturne. Vous savez, le dur à cuire qui ne boit que de l'alcool pur, tue des cohortes d'ennemis rien qu'avec son couteau et qui ne parle que pour lâcher des punchlines menaçantes. Ce n'était pas du tout le cas de Myträ. La petite blonde était simplement timide et introvertie. Elle ne parle guère aux gens qu'elle ne connait pas...

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Et merci d’avoir choisi notre agence de voyage EmptyLun 7 Mai - 12:43
     À son grand désarroi, son patron ne serait pas du voyage. Elle venait de recevoir un télégramme indiquant en quelques mots lapidaires que son emploi du temps et ses obligations politiques ne lui permettait pas de faire le trajet. Bien que Sakari fut quelque peu ennuyée de ne pouvoir dès aujourd’hui l’emmener voir son beau pays, cette nouvelle la soulagea aussi. Ça faisait un touriste de moins à devoir surveiller.
     Ceci dit, la personne avec qui ce voyage allait être entreprit ne donnait en rien l’impression d’être ici pour admirer la vue. C’était bien. La coutume, pour les mercenaires veut qu’on passe plusieurs longues secondes, immobile et silencieux, à jauger du regard celui avec qui on va travailler, pour déceler ses faiblesses et ses forces.
      D’un côté, on avait Sakari, dans son épais manteau doublé de maille, qui en portait un autre roulé en boule et un large sac à dos, ainsi que ses nombreuses armes bien visibles. Son fusil en bandoulière sur son ventre, sa lance courte et son arbalète à répétition sur les côtés latéraux du sac, son goliath et un gant muni d’un ceste à la ceinture, et son couteau ainsi que son pistolet de paume planqués quelque part dans ses manches.
     De l’autre, un soldat droit comme un piquet et avec rien d’autre que des vêtements légers et un petit sac, mais qui imposait une certaine assurance et force. Elle était une combattante hors pair, c’était évident, même pour quelqu’un qui était incapable de saisir l’héraldique militaire affichée sur sa sobre tenue. Voilà qui s’annonçait très positif.


     Enchantée par cette première impression, elle fit un pas devant.
     « Oui ! Mettra des draps mièvres, c’est vous, très bien. Ben moi c’est Sakari Naasoqineq.  »
     L’accent des Nunaqortoqut est quelque chose de terrible, pour qui n’y est pas habitué.
     « Ou juste Sakari, c’est bien aussi. On va passer, oh, je dirais, une trentaine de jours ensemble si les éléments sont avec nous, autant apprendre à se connaître. Vous verrez, à plus d’une occasion, votre, oh, ta survie sera entre mes mains, et l’inverse sera vrai aussi. Bon, avant tout, il faut acheter le matos, hein. C’est la partie que je préfère. »
     Elle déclara cela très exactement comme une Alexandriote aisée à son amie qui allaient faire les boutiques. À ceci près que les talons étaient remplacés par des grappins, les friandises par de la viande séchée, les sacs par des fusils de chasse et les robes par des sangles et des mousquetons. Il est vrai que pour Sakari qui avait été éduquée dans les collines de Nunaqortoqut, où la fortune personnelle se limitait à un couteau, un arc, ses vêtements, ses couverts, quelques gris-gris et héritages de famille ainsi qu’une tente pour les familles, faire les magasins ou tout n’était qu’opulence la fascinait toujours autant, même après y avoir goûté pendant des années.
     « Ah oui, et mets ça. »
     Elle lui donna son manteau de fourrure supplémentaire. Il était à peu près à la taille de Myträ, les deux femmes ayant une corpulence relativement proche et le vêtement étant très ample.
     « Il a le double avantage de te tenir chaud, et de masquer ta tenue d’orientale. En temps normal, je dis pas, du moment que tu vas pas trop profond, mais il y a eu une esclandre avec un officier, un pistolet qui ne devait pas être chargé, beaucoup de bouteilles vidées et la pute préférée d’un baron du coin. Terrible histoire. Enfin, ça arrive. Il faut juste être prudent et discret et tout ce passera bien. »
     Sakari n’ignorait pas la fierté des orientaux, et se doutait bien que d’une manière ou d’une autre, ça allait mal ce passer. C’est pour ça qu’elle avait prévue de rejoindre des amis à elle, qui étaient sur Aildor en ce moment, et qu’elles allaient rejoindre un peu plus tard. La précaution est une vertu, dans ces rues, mais pour Sakari, y circuler sans problème était presque devenu une seconde nature. Quand on s’est engouffré dans le labyrinthe souterrain infesté de prédateurs qui parcourt les montagnes acérées au nord de la cité, quelques boyaux mal éclairés où traînent des mâcheurs de khat est une promenade dans un bosquet.

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Et merci d’avoir choisi notre agence de voyage EmptyMar 15 Mai - 20:26
Myträ haussa un sourcil doré. L’incompréhension colorait ses traits fins tandis qu’on la voyait redoubler d’attention pour pouvoir déchiffrer l’accent de la nunaqortoqut. Elle n’avait pas bien saisi le nom de famille de cette dernière et serait totalement incapable de le prononcer. ‘Sakari’ avait une sonorité bien plus facile à assimiler et des phonèmes très utilisés dans le langage daënar. De son côté, la dénommée Sakari semblait également avoir du mal avec son patronyme.

- Myträ, prononça-t-elle distinctement. Salutations, Sakari.

Se vexer parce qu’une personne qui fait l’effort de parler dans sa langue écorche son nom ? Myträ n’était pas assez bête pour s’abaisser à ça. Sakari pouvait bien l’appeler ‘chaise de jardin’ ou ‘tasse à café’ si cela facilitait leurs futurs échanges, elle n’y voyait aucune objection tant que c’était bien une erreur de prononciation et non une moquerie.

Par ailleurs, la capitaine n’indiquait que très rarement son prénom pour des raisons évidentes. Mais elle se doutait bien que si Sakari avait du mal avec ‘Myträ’, elle ne parviendrait jamais à lui faire prononcer ‘Andreïev’ correctement. De plus, ce prénom ingrat devrait lui apporter moins d’inimité à Aildor que sur le sol de sa mère patrie.

La capitaine attrapa le manteau qu’on lui tendait et le passa docilement sur ses épaules. Encore une fois, elle ne faisait pas la démonstration d’un quelconque mauvais caractère ou d’une fierté mal placée. Seule une moue boudeuse témoignait de l’immense désagrément que cela représentait de cacher ses insignes. Evidemment que cela lui coutait, surtout après s’être convaincue qu’elle n’avait rien à cacher même dans ce cloaque à bandits. Elle exécutait pourtant les directives de Sakari. La discipline est sans doute la plus précieuse qualité d’un soldat. Lorsque l’on appuie sur la gâchette de son arme, on s’attend à ce que le coup parte immédiatement. Un soldat est une arme ; la moindre hésitation peut être fatale pour son utilisateur.

- Merci, lâcha-t-elle en ajustant la fourrure.

Elle était lourde et pesait sur les épaules de la militaire. Elle ne s’imaginait pas courir dans la neige pendant plus de deux heures avec ça sur le dos. Et pour ce battre, ce devait être encore pire. Difficile de faire preuve d’agilité avec une carcasse de bestiole qui vous écrase sous prétexte de tenir chaud.

Tandis que Sakari lui expliquait pourquoi il ne fallait pas montrer son uniforme de l’U.N.E, une bande de bras cassés descendait à son tour par la passerelle du bateau. Claudiquant à moitié et se soutenant les uns les autres. De son côté, Myträ qui n’avait que d’yeux que pour la nunaqortoqut n’accordait guère d’attention à ses anciens camarades de voyage. En effet, elle voyait bien que Sakari essayait de lui faire comprendre que ses manières d’orientales pourraient poser des problèmes ici. C’est vrai que son peuple avait tendance à se montrer arrogant et à cheval sur des valeurs que tout le monde était censé partager sous peine d’être considéré comme un sauvage. Myträ se devait de rassurer la jeune femme sur le fait que ce n’était pas son habitude de faire des vagues et qu’elle ne lui causerait pas d’ennui.

- Sakari, l’interpella-t-elle. Je tiens à t'assurer que je suivrai tes instructions à la lettre. Bien que je sois daënar, je ne suis pas du genre à me faire inutilement remarquer…

La brute à qui Myträ devait son hématome l’aperçut et pointa un doigt rageur vers elle. Les regards convergeaient vers le bonhomme qui gueulait un chapelet d’injures emportées par le vent avant d’atteindre les oreilles de la blonde. Une haine presque palpable s’éleva parmi la bande d’estropiés en voyant celle qui les avait rossé.

- … j’évite de me fourrer dans les ennuis autant que possible et je suis certaine de ne vous causer aucun tort durant notre voyage …

Fermement retenu par ses camarades, la brute gesticulait péniblement en direction de Myträ voulant visiblement sa revanche. Si ce n’était la foule sur le quai, sans doute auraient-ils tous fondu sur la blonde pour la rouer de coups. Mais la sagesse leur dicta de se retirer avant d’attirer plus l’attention.

- … De plus, mes insignes sont masqués maintenant, et je n’ai pas d’ennemis dans cette ville.

La troupe de brutes lança un ultime regard noir à la capitaine avant de disparaitre dans l’ombre des bâtiments,foudroyant sa nuque dans l'expectative d’une vengeance prochaine. Ils guetteraient une situation plus propice pour passer à l’action. Aildor n’était pas si grande que ça. Ils n’auraient aucune difficulté à retrouver la capitaine et lui planter un canif dans le flanc au détour d’une ruelle. Ce retrait n’était que partie remise…

Myträ se força à arborer un mince sourire qui se voulait rassurant afin d’appuyer son discours. La jeune femme faisait de son mieux, mais elle restait une orientale percluse de principes moraux propre à sa culture. Si elle voyait le moindre comportement qui ne lui plaisait pas, probablement qu’elle ne pourrait s’empêcher d’intervenir. Malgré tout ce qu’elle venait de dire et ses bonnes résolutions, chassez le naturel et il revient au galop.

Sur ce... Elle était prête à suivre Sakari pour acheter le matériel. La capitaine se doutait bien qu’il s’agissait d’une étape importante et que c’était là le but de sa bourse d’irys. Savoir faire des courses était semble-t-il une condition sine qua non pour survivre dans un environnement hostile.

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Et merci d’avoir choisi notre agence de voyage EmptyMer 16 Mai - 18:25
     Les militaires. Sakari n’avait pas souvent, en fait jamais, eu l’occasion de travailler avec eux, et elle se rendait compte à mesure que la discussion avançait que ça avait été une grave erreur. Ils sont si serviables ! L’ordre est une notion qui est très différente selon que l’on est chez eux ou chez les ruffians, mercenaires et pirates avec qui elle avait l’habitude de travailler – ils ont la leur, et elle est souvent plus rigoureuse qu’à l’armée, car on n’est pas envoyé dans un fleuve avec des chaussures en béton si on raye l’automobile de son lieutenant.
     Sakari était de ceux qui chassent, dans son peuple. Les chasseurs sont aussi les expéditionnaires, les explorateurs. Ils se déplacent dans des petits groupes où l’égalité est totale et la hiérarchie inutile. Sa mère était comme elle, ainsi que beaucoup de ceux de sa lignée prestigieuse, jusqu’à l’ancêtre commun du clan, Ningapok Tukilangit, toujours représenté dans ses fourrures noires, avec sa lance et ses dents acérées. Une figure à la fois maléfique et protectrice, qui défend sa portée et son clan en déployant la plus grande violence contre ses ennemis.
     C’était pourtant là une exception, et Ningapok lui-même était plus connu pour ses capacités de guerrier que de chasseur. La hiérarchie dans son peuple était une notion importante, car c’était un peuple guerrier. Sakari avait donc une certaine aisance et appréciation des qualités de cette relation hiérophante, mais ne pouvait s’empêcher de regretter la camaraderie des bandes de chasseurs et de mercenaires, qui dans son architecture de pensée étaient les mêmes, dans deux civilisations différentes.

     « Pas d’ennemis ? Ah. Hé bien, tant mieux. »
     Elle ne devait jamais y être allée, donc. Mais quand on ne créée pas le conflit, on l’apporte avec soi, car à Aildor, il vient, qu’on le veuille ou non. Il était franchement difficile de ne pas remarquer la bande amochée en arrière-plan, qui produisait un saisissant effet d’ironie malsaine aux paroles rassurantes de son élève.
     Qu’à cela ne tienne. « À partir de maintenant, les cours commencent. On va bien s’amuser, toutes les deux. » Massacrer des revanchards n’était pas au programme, mais ça allait le devenir. Avant de s’engouffrer dans les profondeurs de la ville, elles firent une escale par un comptoir commercial, sur le port. « On va voir des amis. »
     Dès que Sakari passa la porte, elle fut assaillie par une petite boule de poil faisant une tête de moins qu’elle et qui piaillait comme l’enfant qu’elle était à la vue d’une personne depuis longtemps perdue de vue. Sakari la pris dans ses bras, et toutes deux commencèrent à parler dans leur patois, et la vitesse, l’enthousiasme et le fait qu’elle ne faisait aucun effort pour articuler interdisait à Myträ de comprendre plus que le fait qu’il s’agissait de retrouvailles, que la petite avait grandi et que Sakari n’avait pas changé d’un poil, et une histoire sur une mère et un grand monsieur effrayant, aussi.
     Le susnommé fit aussi un petit coucou, et de sa voix plus grave demanda à la jeune de laisser passer les deux invitées. Il y avait encore une troisième personne dans la pièce, qui commença aussi à parler dans son patois, avant que Sakari ne les arrête tous.
     « S’il vous plaît ! Voici Me trait André Ève. C’est une guerrière orientale, du sud. Je l’emmène au pays. »
     L’homme maugréa, la femme mûre resta impassible, se contentant de jauger du regard l’étrangère, et l’adolescente continua à inonder la pièce de paroles et de questions.
     « S’il te plaît, Wawi, dans leur parlé.
     – Pardon, Kirinette. Bonjour… madame. Moi c’est Tuwawi Kissipoq, elle c’est ma mère, et tu viens avec nous ! »
     Elle devait avoir à peine dix-huit ans, sans doute un peu moins. La mère susmentionnée ne ressemblait pas vraiment au professeur de Myträ, mais pour qui connait un peu l’organisation clanique, et constatait la différence d’âge entre Sakari, qui frôlait à peine la trentaine, alors que la mère de Tuwawi avait passé la quarantaine, on pouvait en supposer que pendant que la mère était à la chasse ou à la guerre, Sakari qui n’était donc encore qu’une jeune fille avait gardé la petite étant bébé. Un clan est avant tout une grande famille.
     Toklo s’absenta un instant.

     La mère voulut clarifier les choses pour leur invitée.
     « Bonjour, officier. Vous avez la roideur d’un soldat, ça ce voit. Je suis Ataneqi Kissipoq. Ma fille, moi-même et Toklo Pikkorippoq, qui ne parle que peu, veuillez l’excuser, l’intéressé répondit par un simple geste de main qui pouvait signifier tout et son contraire, avons prévu de retourner à Nunaqortoq. Nous sommes du même clan que Sakari, vous ferez donc une partie du trajet avec nous. »
     Elle avait un ton juste et n’avait pas trop de mal à prononcer les mots compliqués de la langue daënare, ce qui suggérait qu’elle avait séjourné bien plus à l’étranger que Sakari, ce qui était vrai. Même si, cette dernière étant à temps plein au sud des montagnes, l’écart allait être comblé très rapidement.
     Toklo revint et daigna enfin prendre la parole.
     « Sakari. Avec moi. Trois au carreau, un derrière. »
     L’interpellée ne put s’empêcher de vouloir traduire : « Il semblerait que des gens louches observent le bâtiment. Ça m’étonnerait pas qu’ils soient des potes de ceux qui t’aient suivi, ou bien Toklo fait une montagne d’un tas de pierre. »
     – Si tu fais allusion au matar de bois, il faisait nuit et j’avais mal dormi. »
     – Ouais. Bon, les filles, on vous laisse, sortez par la porte de derrière. Au fait, ou sont les autres ? Et Biisaiyowaq ?
     – Partis contrôler de la marchandise, ils reviennent que demain. On les attend ?
     – Non. Le temps ne le permet pas. C’est aujourd’hui ou dans une semaine. Sakari va partir aujourd’hui, quoi que vous fassiez…
      – Ça c’est vrai. J’ai un mois devant moi, pas plus.
      – … Donc vous la suivez ou non, mais je viens avec elle. »
      Et les quatre Nunaqortoqut de partir dans une début de discussion en patois, râlant sur le ton sentencieux et ridiculement menaçant de Toklo, qui ne dura pas longtemps. C’était un phénomène, celui-là, et Myträ pouvait déjà le comprendre.
     « Bon, vous deux, allez vous occuper de son équipement, moi et Toklo on va leuf faire un petit coucou. On se retrouve à la porte nord. Ah, et… »
     
n, serif]Elle quitta l’entrée, où se tenait le comptoir de cet établissement spécialisé dans le commerce de fourrures de Marnaka, puis revint par la porte du couloir, qui menait à la remise et à une ruelle à l’arrière de la boutique avec un Aildorain dans les bras, qui gesticulait et poussait de petits cris terrifiés, une lame de couteau sur la gorge. Tuwawi débarrassa en vitesse la table où étaient posés des échantillons de marchandises, Sakari y plaqua le petit homme terrifié.
     « T’es là pour elle ?
Sakari montra Myträ du doigt.
     – Oui ! Sélyndra Kaël ! C’est elle qui commande ! Me tuez pas ! Me tuez pas !
     – Ah non ? »
     Elle lâcha un mot à Toklo, qui l’attrapa. Il fut emporté hors du bâtiment, mais comme Sakari n’avait pas retiré sa lame assez vite, un filet de sang coulait légèrement de son cou, qu’il se tenait en gémissant. Le pauvre type fut balancé dans l’eau glacée. Voilà qui allait lui apprendre à écouter aux mauvaises portes.
     Sakari ne put s’empêcher de glousser. C’était ça, Aildor ; la justice s’y fait soi-même et on rencontre des gens rigolos qui font de la violence un badinage.
     Et elle partit, laissant les trois femmes ensemble. Ataneqi avait eu tout son temps pour examiner l’équipement sommaire de Myträ et en tirer des conclusions.
     « Bien. Vous n’aurez pas besoin de grand-chose, on a déjà tout ce qu’il faut en avance. IL faudra juste vous acheter des armes, mais connaissant Sakari, elle va les briser et vous demander de fabriquer les vôtres, pour vous apprendre comment faire. Enfin, avant ça, il vous faut un couteau, un arc, un pistolet et des cordes, ainsi que du matériel d’escalade. Ce sont les seules pièces d’équipement qui doivent être personnelles. Enfin, on papote, on papote, mais c’est très impoli, tout ça. Parlez-moi un peu de vous ! Vous voulez quelque chose à manger, à boire ? »

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Et merci d’avoir choisi notre agence de voyage EmptyVen 18 Mai - 18:34
Myträ inspira une grande bouffée d’air froid et entra à la suite de Sakari. Le petit comptoir accueillait quelques ressources qu’on ne trouvait qu’ici dans l’optique d’être échangées avec des marchands de passage. Des fourrures intéressant fortement le marché du luxe en orient, mais pas que. Daënar était particulièrement consommatrice de graisse d'animaux endémique à Als'kholyn qui en faisait d’impressionnantes réserves pour se protéger du froid. Cette graisse était inflammable et servait dans des domaines divers et variés, notamment l’éclairage publique. Voilà pour ce que Myträ savait du commerce avec Marnaka.

Le clan de Sakari était là. Ou plutôt sa famille, car l’orientale n’avait pas encore saisi la différence entre ces deux termes. Elle jaugea chacun des membres qui lui étaient présentés, renonçant à corriger une énième fois Sakari sur la prononciation de son nom. Difficile de dire s’ils étaient tous liés par le sang, même si c’était plus ou moins évident pour la petite et la mère.

- Bonjour Wawi, lança Myträ avec une douceur qui ne lui ressemblait pas.

La blonde parvint même à décocher un sourire à la toute jeune fille. D’autant plus que Tuwawi débordait d’un enthousiasme typiquement enfantin. Myträ se sentait plus à l’aise avec les enfants, même si l'adolescente avait presque tout d'une femme accomplie. Elle restait encore adorable et presque innocente. Ainsi donc, la gamine n'avait pas eu à produire beaucoup d'effort pour mettre dans sa poche la taciturne daënare.

Les autres devaient se contenter d’être jaugés de haut en bas, concluant chaque présentation d’un signe de la tête. La mère de famille eut droit à un « Merci » supplémentaire et a un hochement de tête plus prononcé. Sans doute une manière pour Myträ de la remercier plus "chaudement" pour son accueil. Qu'on se rassure, la blonde ne resterait pas aussi froide et réservée pendant tout le voyage. Mais il lui faudrait du temps pour être plus à l’aise en présence de tout ce petit monde.

Après un bref échange avec le seul homme du clan et Sakari, les deux disparurent sous le regard interloqué de l’orientale avant de revenir avec un des types qui était sur le bateau avec elle. C’était surprenant de le retrouver là et Myträ ne put cacher sa stupeur en apprenant que c’était après elle qu’il en voulait. Pour la militaire, leurs différents avaient été réglés sur le bateau. Si elle avait su qu’ils garderaient une rancœur contre elle, Myträ les aurait tués au lieu de simplement leur donner une correction. De toute manière, leur mort n’aurait en aucun cas pesé sur sa conscience.

- Nous avons eu une dispute sur le bateau, expliqua Myträ à Sakari. L’un de ses amis se vantait ouvertement d’avoir enlevé une gamine à Wal sur les côtes de Vereist pour la revendre. J’ai peu de patience envers les marchands d’êtres humains, surtout lorsqu’ils font le récit détaillé de ce qu’ils font subir à leur jeune « marchandise ».

Myträ ne se considérait pas comme une justicière du dimanche, mais il y a des limites à ce qu’on peut supporter. Le monde serait bien plus agréable à vivre sans ce genre de personnes. Elle aurait simplement du finir le travail, or débuter un voyage par un meurtre n’était pas une bonne idée. Mais dés lors que ces hommes mettaient Sakari et sa famille en danger, la donne avait définitivement changée.

Lorsque le bonhomme fut jeté à l’eau et l’affaire réglée, la mère redoubla d’hospitalité en proposant à Myträ de quoi se restaurer. Elle aurait bien voulu la remercier de cette attention par une moue aimable, mais son visage strié demeurait invariablement figé dans un masque d’impassibilité.

- Non merci, déclina la militaire. A vrai dire le voyage a été long. Je dois aller me rafraichir. Je reviens dans un instant.

Elle avait dit ça comme une de ces précieuses dames de la haute société daënare. Cependant, Myträ s’empara discrètement d’un couteau pour racler les peaux et le coinça dans sa ceinture.

La jeune femme sortit par la porte principale du comptoir et s’éloigna en resserrant la fourrure autour d’elle afin d'empêcher l’air glacial de pénétrer ses vêtements. Son museau à demi-masqué par l’épais col, on pouvait toujours discerner cette tignasse blonde qui longeait la rive. Elle ne parcourra qu'une cinquantaine de mètres avant de se retourner enfin pour s’adresser à la ruelle déserte qui la précédait.

- Montrez-vous, intima-t-elle. Je suis seule et vous êtes armés.

Devant ce constat implacable, les trois hommes dissimulés sortirent en effet de l’angle derrière lequel ils se cachaient. Deux serraient des surins tandis que le meneur faisait nonchalamment se balancer une matraque en bois. Sans perdre de temps en invectives inutiles et tout en ignorant celles de ses adversaires, Myträ fit rouler ses épaules pour se débarrasser de la lourde fourrure. Son uniforme des Forces Expérimentales étaient de nouveau visible, ainsi que le couteau qu’elle tenait en prise poignard. Elle leva sa garde devant son regard bleu. La petite blonde n'était plus là pour distribuer des corrections et redevenait l'arme létale qu'elle avait toujours été.

Le meneur lança les hostilités en envoyant un coup ample qui offrait toute la longueur de son bras à la militaire experte en clé articulaire. Ainsi coinça-t-elle le membre offert entre ses avant-bras et le fit pivoter jusqu’à entendre le craquement caractéristique de la cavité synoviale éclatée. Le bonhomme n’eut pas le temps de crier sa douleur que la pointe du couteau lui tranchait déjà la gorge de part en part.

Une ombre en périphérie de sa vision provoqua un réflexe chez la capitaine qui lui épargna de se faire transpercer la tempe. A la place, le surin mordit dans sa joue et ajouta une estafilade qui barrait ses vieilles cicatrices. Elle encaissa également un vicieux coup de pied qui la fit tomber à genoux. Et alors que les deux malfrats s’apprêtaient à la cribler de coups de surin, Myträ roula sur l’un d’eux et l’entraina avec elle au sol. Elle continua ensuite sur sa lancée et emporta la jambe de son adversaire dans la roulade. Celle-ci émit un craquement sinistre. L’autre essayait bien d’aider son camarade mais ses tentatives pour atteindre Myträ s’avérèrent imprudentes, pour finalement se solder par un couteau de tannage planté dans le cœur.

- Pitié, fit le bandit à la jambe brisée, le seul qui respirait encore. Me tuez p…

Myträ lui trancha proprement la gorge en tirant sa tête en arrière de manière à faciliter l’évacuation du sang qui giclait à gros bouillon du sourire écarlate. La militaire poussa ensuite les cadavres dans l’eau saumâtre et récupéra la fourrure de Sakari avant de trouver le chemin du retour.

Evidemment qu’elle avait pris des risques, mais elle ne faisait que corriger sa mansuétude passée. De plus, Myträ devait le faire seule pour éviter de mettre ses hôtes encore plus en danger par sa faute. Ils auraient sans doute accepté si elle leur avait demandé de l'aide, mais il était hors de question de leur faire prendre le moindre risque. Et si l’un d’eux était blessé à cause d’elle ? Et s’il arrivait quelque chose à la gamine ? Impensable. Sakari était peut-être payée par l'armée, mais on n'est jamais assez payé pour mourir.

La blonde poussa la porte du comptoir et remit le couteau là où elle l’avait trouvé, l’essuyant au passage. Toute discrétion était inutile sachant qu'elle s’était laissée toucher au visage. Ca ne servait rien de continuer à mentir. Elle prit une chaise et s’assit en grognant, son mollet étant endoloris. Il n’était pas cassé heureusement, sinon cela aurait sonné le glas de son aventure, mais elle allait avoir un sacré bleu.

- Je veux bien quelque chose à grignoter finalement, s'il vous plait, madame Kissipoq, demanda-t-elle en essuyant sa joue sanguinolente. Et je voudrais bien savoir qui est cette Selyndra Kaël.

Avec la chance qu’elle avait, c’était surement la plus grande mafieuse du coin et elle se l’était aliénée en abattant ses hommes. Même si c’était ça, Myträ n’avait aucun regret. Elle avait fait ça à l’extérieur du comptoir et ses hôtes n’étaient pas impliqués dans le meurtre. En espérant que ces précautions suffiraient à ne pas leur causer d’ennuis.

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Et merci d’avoir choisi notre agence de voyage EmptySam 19 Mai - 12:54
     Que la militaire s’offusque de tels actes et les venge par la violence était tout à son honneur, et alors que Toklo et Sakari marchaient dans les rues pour trouver les assaillants, ils approuvaient d’un commun accord sa réaction. À ceci près que Toklo, qui avait un certain sens du cérémoniel, les aurait décapité au vu et au su de tous, puis aurait balancé leurs cadavres à la mer, alors que Sakari, qui était plus joueuse et avait un sens du pratique plus poussé, en aurait d’abord fait saigner un, puis les aurait tous balancés par dessus le bastingage une fois que les requins seraient arrivés.
     C’est sur ces spéculations qu’ils retrouvèrent la piste des malandrins affiliés à Sélyndra. C’était en fait très simple car ils tournaient autour du comptoir des Nunaqortoqut comme les prédateurs marins susnommés. Ils avaient semblait-il décidé une approche indirecte, et voulaient passer par l’arrière de la boutique. Les deux amis d’enfance se planquèrent à un coin de rue, pour observer le nombre, les armes et la résolution des ennemis.
     À leur grande surprise, ce fut Myträ elle-même qui se pointa devant eux, et sans armes.
     « Ah merde. On y va, dis ?
     – Non. Elle a choisi d’être là. Elle est ton élève, je crois. Alors observe ses capacités.
     – Si tu le dis. »
     Myträ fit tomber le manteau au sol, révélant une petite arme blanche.
     « Ah mais non, le sol est tout boueux, pas sympa…
     – Elle a le regard. »
     Et elle l’avait en effet : on pouvait voir d’ici que ces petites frappes sentaient la peur. Il était marqué dans les prunelles de leur ennemie qu’elle allait vaincre, et ne montrer aucune mansuétude. Sakari avait tout de même son fusil pointé sur la tête de celui avec la batte, juste au cas-où.
     « Ouh, ça fait mal, ça, ouïe ouïe ouïe.
     – Elle sait utiliser la portée de son adversaire à son avantage. Ça ne s’apprend pas. Rapide. Ses armes sont des prolongations de ses membres. Ses gestes sont fluides et naturelle. C’est beauté à voir.
     – Tu la demanderas en mariage. »
     Toklo fit une moue de dégoût à cette idée, masquée par son foulard. S’accoupler avec une étrangère ? Mais quelle horreur. Il respectait beaucoup la guerrière et ses valeurs, pour le peu dont il était au courant, mais ça ne pouvait pas faire sauter des interdits comme ça. Sakari le savait pertinemment, et son ton badin fut assez mal perçu.
     « Il faudra qu’on parle de ta relation aux étrangers. Et quand je dis on, je veux dire ce que tu sais.
     – Par les poils de Ningapok, Toklo. »
     Il était un bon compagnon, mais qu’est-ce qu’il pouvait être insupportable parfois, avec son orthodoxie rigoriste. Évidemment, que Sakari refuserait de porter les enfants d’un habitant du sud des montagnes, et qu’il ose penser l’inverse en se basant sur sa boutade était très irrespectueux envers elle.
     « Utilisation pertinente de l’anatomie. Combat dans l’espace. Ah, et elle est d’une précision remarquable. J’aime moins sa manière d’exécuter. Trop mécanique.
     – Et elle a pris des coups. Combien ?
     – Deux. Deux de trop, donc.
     – Mm. Bon, menace éliminée, on va se faire leurs potes ?
     – Allez. »
     Ne voulant pas entacher son honneur en faisant comprendre à Myträ qu’ils l’avaient observés et qu’elle ne risquait pas grand-chose dans ce combat, car ils pouvaient venir la sauver à tout moment, ils ne repassèrent pas par le comptoir pour la féliciter.

     De leur côté, la mère et sa fille se retrouvaient seules devant une boîte de petits biscuits et des infusions à l’eau chaude, attendant poliment, mais avec une certaine incompréhension. Se rafraîchir ? À Aildor ? Ça n’avait aucun sens. Il faut être fou. Surtout que les sudistes n’étaient pas du genre à aimer le froid.
     La petite Tuwawi était aux anges, par contre, et elle et sa mère s’amusèrent à chercher un diminutif rigolo pour le prénom de Myträ, qui était de toutes façon impossible à prononcer peur elles. Le courant semblait être passé tout de suite entre les deux, et Ataneqi ne pouvait qu’en être ravie. Sakari la boute-en-train, sa fille, Toklo le pince-sans-rire et une amie pour sa fille qui semblait avoir un certain caractère malgré sa tendance au laconisme, voilà qui n’allait pas être un voyage ennuyeux.
     Elle partait avec une petite soif, et revenait en ayant souillé un outil de sang.
     « Hé bien hé bien. Vous avez une façon bien personnelle de vous « rafraîchir. » Prenez des gâteaux, je vous en prie, et suivez-moi, on va acheter votre équipement. »
     L’explication allait se faire en marchant. Ataneqi emmena Myträ et sa fille à travers des chemins qui auraient paru peu usuels pour qui avait une carte de la ville dans la tête. Il s’agissait surtout d’esquiver les endroits où les amis de la pute qui s’était faite tuer par le Daënar avaient l’habitude de traîner. La démarche de leur hôte était très aisément décelable comme celle d’un militaire.
     « Sélyndra est une petite baronne locale. Trafic d’êtres humains, si je me souviens bien. Très protectrice envers ses hommes de main, donc très aimée. Je crois qu’elle était dans la politique en Orient, avant. Enfin bref, Nos deux bourrins de service vont sens doute lui conter une jolie histoire. »
     Tuwawi chuchota à l’oreille de Myträ : « Ils vont lui fendre le crâne. »

     « Ah, on y est. Entrez, entrez. »
     Le premier magasin était dévolu aux armes blanches. La population my’träne, non-négligeable dans la ville, rendait obligatoire des échoppes de ce genre, spécialisées dans la vente d’articles compatibles avec les préférences des magiciens. Un Mÿ’tran, d’ailleurs, aisément reconnaissable à ses tatouages typiques de Zagash, tenait la boutique.
     « Bonjour mesdames ! Je suis honorée de voir des Marnakains dans ma boutique. Je peux faire quelque chose pour vous ?
     – Oui ! On rentre À Nunaqortoqut, et il lui faut un équipement. »
     L’enthousiasme de Tuwawi avait parlé, et elle avait désigné la militaire. À la vue de celle-ci, le Mÿ’tran, d’un noir d’ébène, haussa un sourcil quelque peu suspicieux. Il trouvait dérangeant de vendre sa marchandise à une ennemie, c’était certain. Mais très vite le professionnalisme reprit le dessus, car il ne sentait aucune technologie impie.
     – Ah, oui, très bien. Bon, alors… Venez voir. Levez les bras… Très bien… Montrez voir vos mains… Bien. »
     Il avait mesuré la taille de ses membres et constaté le type de main de sa cliente. Les Nunaqortoqut étaient en général très sourcilleux sur la qualité, car ils fabriquaient eux-même leur armes et avaient un certain talent en la matière. Il serait donc impensable qu’ils achetassent quelque chose de qualité inférieure à ce qu,ils pouvaient avoir dans leurs greniers. Au passage, le vendeur se fendit d’une remarque.
     « Pas d’inquiétude, madame. Autant en dehors de ces murs, je ne dis pas, autant à Aildor, les affinités et les affiliations n’existent plus. Il n’y a que le professionnalisme et l’appât du gain. Plutôt quel type d’arme ? Lourde, légère ? Je ne vous propose pas de lance, de masse ou de hache lourde, vu votre trajet. Hache, épée, masse, couteau, quel est votre style de prédilection ? J’avoue n’avoir aucune idée de quels armes que les Architectes n’ont pas proscrit vous utilisez dans vos armées. »

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Et merci d’avoir choisi notre agence de voyage EmptyMar 22 Mai - 20:26
Myträ glissa une pogne dans la boite à gâteau et en sortit une pleine poignée. Elle se hâta de suivre ses hôtes non sans fourrer le plus de biscuits possible dans ses bajoues. Les rues de la ville étaient particulièrement étranges et la jeune fille y laissa dériver un regard curieux tout en se faisant guider à travers le labyrinthe. En effet, il ne s’agissait pas vraiment de rues mais de tunnels sous la glace qui protégeait des intempéries. Ce système avait ses avantages mais également ses inconvénients alors que les immondices s’accumulaient sans possibilité d’évacuation.

Ataneqi ouvrait la marche et louvoyait entre les badauds. Myträ lui accorda une oreille attentive lorsqu’elle répondit à sa question. Son visage se fronça légèrement en l’écoutant. Non pas parce qu’elle avait soudainement peur de cette Sélyndra, mais parce que Sakari et Toklo étaient partis de leur côté pour lui régler son compte. Un risque inadmissible pour la fière daënare qui malgré la tonne de biscuit lui scellant le bec, ne put s’empêcher d’exprimer ses légitimes réserves.

- Ch’est t’ès dange’eux, s’alarma-t-elle en trottinant pour se mettre à la hauteur de la mère. Je ‘efuse qu’ils p’ennent un ‘el ‘isque pou’ moi.

Les protestations restaient lettre morte, ses hôtes n’ayant probablement pas compris un traitre mot de son baragouinage. De plus, le commentaire de Wawi n’était pas pour la rassurer. Elle resta donc avec ses sombres inquiétudes avant d’être distraite par la boutique dans laquelle Ataneqi l’invitait à rentrer. Myträ était comme une enfant dans un magasin de bonbon. Il y avait des armes partout. C’était un musée dédié à l’art. L’art martial, bien entendu.

Le visage de la petite blonde s’éclaira tandis qu’elle s’émerveillait des différents articles qui s’étalaient devant ses yeux, mais il se renfrogna aussitôt en croisant le regard du marchand. Elle prit une allure excessivement guindée et avança avec dignité jusqu’au comptoir. Elle s’était refermée comme une huitre en apercevant le myträn, mais gardait la colère sous contrôle. Ces gens étaient cruels et sauvages. Des animaux plus que des hommes. Et encore, un animal a l’excuse de ne pas savoir ce qu’il fait.

Si Myträ n’était pas très loquace d’habitude, cette fois-ci elle était totalement mutique. Elle se contentait de fusiller le myträn du regard non sans coopérer à son examen. Elle se retenait effectivement de lâcher des remarques corrosives à chacune de ses viles paroles. Qu’est-ce qu’il pouvait bien voir de ses bras ? Et qu’est-ce que ça pouvait lui foutre d’examiner ses mains ?

Cependant, la retenue de la daënare était aussi fragile qu'une flammèche en pleine tempête. Une petite étincelle était suffisante pour mettre le feu aux poudres. Aussi, le myträn aurait-il dû continuer de servir ses clientes tout en ignorant leur allégeance. Et éviter le sujet à tout prix ! Le regard bleu de la militaire s’enflamma alors qu’une haine viscérale, auparavant contenue, grignotait peu à peu son visage de porcelaine fissuré.

- Vraiment ? Vous allez me vendre une arme ? Cracha Myträ d’un ton dédaigneux. Tout en sachant que je l’enfoncerai très probablement dans le ventre du premier my’trän qui croisera ma route. Vous autres, sauvages, avez-vous seulement une once de scrupule ?

La militaire attrapa une épée courte et la soupesa avant d’en tester l’équilibre. Elle avait parfaitement conscience de la menace qu’elle faisait planer sur le marchand qui n’était qu’à une longueur de bras de l'arme. A vrai dire, elle n’attendait que ça. Que le my’trän se sente menacé et qu’il sur-réagisse. Ainsi en état de légitime défense, la capitaine aurait eu toute latitude pour lui ôter la vie sans être en faute.

Une telle haine et une telle colère avaient bien entendu une racine bien plus profonde qu’un simple embrigadement. Tous les daënars détestaient les my’trans car on leur disait depuis tout petit qu’il s’agissait de sauvages sanguinaires. De son côté, Myträ était persuadée que c’était le cas, car ce sont des my’trans qui lui ont infligés ses cicatrices, consciemment et totalement gratuitement. Un pur acte de cruauté qui était l’apanage de tous ces gens-là. D’ailleurs, dans la bouche de Myträ « sauvages » ne dénonçait pas le manque de modernité dans la civilisation my’tränne mais bien leur manque d’humanité. Ils étaient foncièrement mauvais et exsudaient tout ce qui fait de l’homme la pire des créatures sur Irydaë.

- Alors ? Vous voulez toujours me le vendre ? Demanda-t-elle en reposant le glaive sur le comptoir.

Peu importe la réponse. Les my’träns ne pouvaient en aucun cas remonter dans l’estime de la blonde. S’il lui donnait une réponse positive, cela la conforterait dans ses positions, et s’il refusait, elle en conclurait que ce n’était que par excès de fierté. Face à quelqu’un qui vous hait de toutes ses forces, il n’y a généralement aucune bonne réponse.

Quant au choix de l’arme, le style martial de Myträ était tout en vitesse et en nervosité. Elle avait besoin d’une arme maniable et légère. Même si elle préférait un simple couteau, le glaive lui procurait l’allonge nécessaire pour se battre avec des adversaires non-humains. Effectivement, elle se doutait que ses hôtes combattaient plus régulièrement la nature que les hommes. Elle devait donc s’équiper en conséquence.

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Et merci d’avoir choisi notre agence de voyage EmptyMer 23 Mai - 21:26
     Hélas pour Myträ, le marchand à qui elle avait affaire était un provocateur, et un connard. Il attrapa le glaive, le scruta et tendit la poignée vers sa cliente. Tenant la lame à l’horizontale, il s’en servit pour adosser son menton sur le plat de la pointe, et se fendre d’un sourire bête.
     « Honnêtement, entre être tué par une de mes fabrications et être déchiqueté par une de vos infamies cracheuses, je pense que n’importe lequel de mes contemporains choisirait la première option. »
     Il avait bien saisi la haine de cette personne, qu’il trouvait bien naïve et ignorante, à la fois sur ce qu’implique le fait d’être à Aildor, mais aussi et surtout sur la nature du rapport de force qui s’était dressé dans ce magasin.
     « Essayez donc, vous me ferez un très grand plaisir, ça fait longtemps que je n’ai pas vu une daënare ayant une haute opinion d’elle-même et de sa sous-culture de dégénérés se faire pourfendre. Au fait, vous allez lui dire ? Non parce que si elle va avec vous, elle ne va pas y couper. Ou bien vous préférez la mettre devant le fait accompli ? »
     Cette dernière phrase s’adressait aux deux Nunaqortoqut. Myträ ne l’avait pas remarquée, sans doute car une mère et son enfant étaient typiquement le couple de personnages en qui on peut placer une confiance totale, mais leurs armes étaient sorties, et leurs regards n’étaient pas pointés vers l’occidental. Il était en effet folie de croire que ceux-ci préféreraient se ranger dans le camp d’une parfaite inconnue que Sakari avait déniché quelque part et qui n’avait pas caché son hostilité, que dans celui d’un Aildorain fermement établi, qui connaissait du monde, était sinon un proche au moins une bonne connaissance des Nunaqortoqut – en tout cas assez pour connaître leurs goûts de consommation d’arme, et leurs coutumes – et avait des amis qui avaient des amis qui avaient des amis. Leur allégeance n’allait certainement pas en priorité à une cliente de Sakari, mais à eux-même ; à leur propre sécurité, comme tous les mercenaires.

     Ataneqi rangea son poignard, sortit deux flèches et plaça leurs pointes sous les gorges des deux ennemis, puis poussa légèrement sur leur peau pour les faire reculer. Myträ pouvait remarquer que la flèche était retournée sous le cou du marchand : l’encoche ne risquait pas faire grand mal à sa peau. Tuwawi attrapa le glaive, pour éviter qu’un mouvement brusque finisse en une bavure irréparable.
     « Mimi, viens, ’faut qu’on discute. »
     La petite fille lui saisit le bras et la tira vers le fond de la boutique. Elle avait une certaine force, ce que sa taille ne laissait pas suggérer. C’était ça que d’avoir un régime alimentaire composé quasi-exclusivement de viande. Ataneqi, qui avait rangé ses flèches, allait discuter avec le vendeur, qui ne quittait pas son ton plaisantin.
     « Bon, comment je t’explique. »
     Tuwawi avait l’air un peu soucieuse. Elle allait adopter le ton de la grande sœur, auquel elle était habituée car elle avait en effet un petit frère, qui faisait beaucoup de bêtises.
     « Ici, ce n’est pas ton pays. Il disait pas du faux : les allégeances n’existent plus, ici. Tu n’es plus une guerrière des armées de ton peuple, il n’est plus un guerrier du sien. Sakari a une expression : ce continent est une pause. La guerre est en pause. La paix est en pause aussi. Tu es, tu dois être un dé au nord partout dans ce monde, sauf ici, ici tu dois cesser de l’être. Tu peux faire ça pour nous ? Si tu ne le fais pas pour ta propre survie. »

     Le glaive, lui, était tout de même d’une bonne qualité, et Ataneqi était en train de marchander en se livrant à un examen minutieux. Elle ne faisait cela que pour entraîner le marchand sur son terrain d’expertise et intérêt, pour détourner son attention et tenter de faire oublier l’incident. Après tout, il adorait parler, donc quand elle commença à pinailler sur la qualité du cuir de la poignée, il ne put s’empêcher de lui sortir son baratin mercantile, ce qui occupait son cerveau à autre chose. C’était un jeu de dupe qui ne trompait personne ; le prix allait être au moins le double, c’était la moindre des choses à aligner pour laver l’affront qui avait été commis.
     Un commerçant normal se serait naturellement moqué de l’affront, car le dédain est l’expression de l’impuissance des faibles – et de la puissance des forts –, mais son échoppe était la propriété d’une mafia mÿ’trane puissante. Les Nunaqortoqut étaient certes de très bons guerriers, mais il y un monde entre tabasser quelques imbéciles irrespectueux inféodés à une pirate de second rand pour se faire un coup de publicité, et provoquer une organisation prospère et ancienne, qui avait bâti et incinéré jusqu’aux catacombes beaucoup de bâtiments de cette ville, et avec lesquels on avait de très bons accords commerciaux. La grille de lecture des dominés et dominants était très difficile, dans cette ville, car l’interdépendance économique était totale, et ne s’exprimait pas que par les échanges monétaires. Les relations, la protection, la puissance strictement martiale, l’influence, tout cela était autant de marchandise – et d’armes.

     De leur côté, Sakari et Toklo s’amusaient bien. Ils avaient réuni tous les mécontents qui voulaient faire la peau de Sélyndra Kaël. Ils étaient nombreux, car le trafic d’êtres humains produit des mécontentements plus que tout autre commerce. Il fut facile de réunir des anciens esclaves évadés, quelques militaires Daënars de passage qui se prenaient pour des justiciers improvisés, des gens qui devaient aux Nunaqortoqut un service, et même un couple de Mÿ’trannes qui avaient sauté sur l’occasion pour s’exercer au combat.
     La petite équipe formée se pointa la bouche en fleur devant la maison de Sélyndra, qui avait été fortifiée à la va-vite par ceux de ses fidèles qui n’étaient pas déjà en train de postuler pour un nouvel emploi, plutôt que de se faire trouer la peau juste parce que certains de leurs collègues avait eu l’extrême stupidité d’ennuyer la mauvaise personne.
     Sakari était parfaitement consciente que sa troupe hétéroclite et peuplée de personnes se haïssant entre eux éclaterait au premier problème. Sa position était en vérité bien moins favorable qu’on pourrait le croire. On avait là en grande partie des gens qui voulaient meubler un après-midi de glandouille, et pas du tout des mercenaires déterminés et fidélisés par de fortes sommes et un esprit de camaraderie bâti en plusieurs années.
     Le plan était donc très simple. Elle délégua le commandement à un capitaine pirate manchot qui voulait expérimenter son dernier achat à Daënastre. Ils allaient se contenter de tenir les rues attenantes et de flinguer les fenêtres, hurler de temps en temps et partager des saucissons. Elle et Toklo allaient s’infiltrer en passant par le dédale obscur et dangereux au possible que formait les égouts.

     C’était hélas trop évident. Autant leur manœuvre que les contre-mesures prises par Sélyndra. Il fallait s’y attendre. Des mines, deux gardes en faction, tous les accès à la cave bloqués sauf un seul très étroit et qui est presque imprenable car défendable par une seule personne… Une fois arrivés, les deux Nunaqortoqut placèrent des anciens esclaves armés de fusils pour maintenir l’idée d’une attaque.
     Le second plan de Sakari était bien plus inventif selon elle, bien plus stupide selon Toklo. Ils se défirent de leurs épais vêtements et passèrent par la cheminée, qui donnait sur la surface sous laquelle les galeries de la ville s’étendaient. Toklo refusa de la laisser passer en première, et s’engouffra dans le boyau de briques et de suie. Il déboula dans le séjour, deux hachettes à la main, suivi de près par Sakari avec son goliath et son couteau.
     Les deux firent merveille. Les pièces étaient petites pour conserver la chaleur, ce qui avantageait très bien les deux combattants, qui pouvaient ainsi nettoyer chaque pièce une à une. Il devait y avoir une petite quinzaine de gardes que Sélyndra avait récupérés, et ils n’étaient pas de grands combattants, ni prêts à sacrifier leur vie pour elle. Personne n’y serait prêts, à vrai dire.
     Quelques minutes après leur entrée fracassante, Toklo brisa une porte d’un couloir, frappa un ennemi à une fenêtre, lança sa hache sur un autre, puis entra dans une chambre, à la fois pour massacrer ce qu’il y avait à l’intérieur, et pour laisser Sakari finir la salle à coup de fusil. À sa vue de leurs camarades découpés, tailladés et pulvérisés, plusieurs ennemis baissèrent les armes. Naturellement, Sakari n’avait rien contre faire des prisonniers, mais à la fois pour les punir et les éloigner de la zone de combat, elle propulsait par une fenêtre tous ceux qui se rendaient.
     Au troisième garde qui plut du deuxième étage et se cassa une jambe, les assaillants à l’extérieur entrèrent en masse. Les Mÿ’trannes balancèrent un sortilège qui noya les gardes défendant l’entrée, en faisant exploser des tonneaux d’eau apportés et en créant des bulles d’eau autour de leurs visages, puis tous entrèrent en cassant et pillant tout ce qu’ils trouvaient.
     Sélyndra s’était repliée avec ses relativement fidèles dans une pièce fortifiée, aux murs épais et en bois solide, creusée dans la cave. Taquine, Sakari bloqua les arrivées d’air, perça un petit trou et demanda aux magiciennes de faire entrer de l’eau. Très vite, les assiégés comprirent ce qui ce passait et se rendirent. Avant d’ouvrir la porte, Toklo et Sakari se foutaient déjà d’eux.
     « Cheville.
     – Ouah, t’es dur. Non, au moins genou, ça fait pas mal de temps qu’ils sont dedans.
     – Tu parles, à peine deux minutes.
     – Il y a peut-être une marche.
     – Ce serait débile. Non, tu sais quoi, je dis même, rien du tout, ils ont pu monter sur des trucs pour ne pas se tremper. »
     Hélas, ils perdirent tous les deux, car l’eau avait à peine mouillé les semelles, mais Sélyndra avait reçu un coup de poing et était tombée à l’eau, donc elle était trempée et tremblante de froid. Toklo l’attrapa par le col, la plaqua contre un mur et posa son couteau sur son cou, ce qui lui força à limiter ses tremblements.
     « Hé bien, hé bien.
     – C’est… c’est… vous, quoi… ?
     – Non, là j’ai rien compris.
     – Pourquoi vous m’atta – m’atta – m’attaquez ?
     – Un de tes employés a insulté une de mes clientes, alors du coup elle les a buté, et comme ils voulaient attaquer notre piaule, oh, on s’est dit qu’on pourrait passer te voir.
     – Vous allez… vous allez faire quoi ?
     – Te tirer l’oreille.
     – Pardon ? »
     Sakari lui tira l’oreille. Puis elle lui mit une petite claque humiliante, et pris son ton le plus maternel et infantilisant.
     « C’est pas bien, Sélynette ! »
     Devant tant de témoins, la crédibilité de la personne s’était évanouie à jamais. Elle serait un sujet de railleries dans toutes les tavernes d’Aildor. Naturellement, elle pourrait tenter de se venger, mais elle avait déjà passé les cinquante-cinq ans et n’avait pour toute gloire dans sa vie qu’une entreprise minable et méprisable qui était tombée à l’eau suite à l’erreur d’un petit truand recruté à la va-vite pendant une beuverie. Les Nunaqortoqut faisaient partie de ces quelques groupes aildorains qui avaient une réponse très disproportionnée à l’acte commis contre eux, mais ne s’engageaient jamais et faisaient tout leur possible pour ne déranger personne, cela pour faire oublier à tout le monde l’idée qu’ils pouvaient obtenir leurs services martiaux. Ils étaient une mission commerciale, pas un groupe de mercenaires en maraude. Ainsi, tous les puissants les ignoraient et profitaient des échanges commerciaux, et tous les faibles évitaient de les provoquer.

     Pendant que Tuwawi expliquait la vie à Myträ, la main de Sakari souillait de la joue et la renommée de Sélyndra. Il fallait maintenant payer un verre à tous les participants de cette sauterie, puis on pourrait rejoindre les filles. Mais pas avant un bain pour se débarrasser de cette suie.

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Et merci d’avoir choisi notre agence de voyage EmptyJeu 24 Mai - 19:30
Il en avait du courage ce my’träns. Présenter ainsi sa gorge à une petite boule de nerf blonde. Il comptait peut-être sur le fait qu’elle n’était pas assez en colère pour l’abattre de sang-froid, ou bien qu’elle avait assez de jugeote pour craindre les conséquences d’un tel acte ? Ahah ! Grave erreur ! Qu’on se le dise, Myträ avait beaucoup de qualités. Elle était courageuse, intègre, sensible et juste, mais elle n’était pas la plus futée. Et si le marchand comptait sur le discernement d’une inconnue pour survivre, c’était lui l’imbécile.

Sans une once d’hésitation et ne voulant surtout pas rater l’occasion d’ôter cette immonde verrue de la surface de la terre, elle attrapa la poignée de l’épée avant de s’immobiliser. Elle n’avait pas changé d’avis en cours de route mais une pointe de flèche placée sous sa gorge l’avait figée sur place. Avant qu’elle se décide toute seule à baisser le glaive, Wawi le lui confisqua en ne lui laissant que son regard assassin pour tenter d’achever le my’trän.

Enfin, les nunas séparèrent les deux ennemis héréditaires. Ataneqi se chargea de remplacer Myträ au comptoir en marchandant le glaive à sa place, tandis que Wawi l’éloignait pour mettre les choses au point. La gamine avait du toupet de lui parler comme elle le faisait. C’était elle l’adulte ici. Elle n’avait pas de leçon à recevoir d’une gamine, étant parfaitement mature elle-même.

- C’est lui qui a commencé ! Se justifia-t-elle donc avec maturité. Je n’aurais pas réagi comme ça si ce marchand ne m’avait pas fait un laïus sur ses architectes et l’armée daënar. Et puis, il a été trop loin en se mettant sa propre arme sous la gorge. Je n’ai fait que l’insulter sans le menacer, c’est lui qui a escaladé dans la violence.

Myträ parlait fort et avec de grands gestes comme si cela donnait plus de portée à son argumentaire maladroit. Prends-en de la graine gamine !

- Tiens…Pour ta mère, dit-elle en baissant le ton. Qu’elle en prenne autant que nécessaire.

Myträ confia sa bourse d’irys à Wawi et sortit de la boutique pour aller se calmer dehors. Pas besoin de prolonger la plaidoirie, on peut être sûr que la répartie fulgurante de la blonde avait suffi à convaincre son auditoire. Et il fallait surtout qu’elle soit seule pour dissiper sa fureur. Elle s’assit donc sur le palier et ceintura ses jambes, son visage encore rouge pivoine.

La colère est un feu qui se nourrit de tout ce qu’on est assez bête pour lui donner. La solitude était le meilleur remède pour l’étouffer. Du moins c’était la méthode qu’employait Myträ même si elle avait rarement l’occasion de s’énerver. En effet, il y avait peu de chose qui la rendait hors d’elle, à part : les my’trans, les criminelles, et ceux qui utilisent de l’huile végétale plutôt qu’animale pour lubrifier les moyeux d’armure assistée ; les imbéciles…

L’aimant à ennuis qu’était Myträ ne s’attira pas plus de problèmes. Elle était sagement assise sur le pas de la porte en attendant que Wawi et Ataneqi sortent. La militaire pourrait alors constater les conséquences de son impulsivité sur son porte-monnaie - l’argent du contribuable – et présenter ses excuses.

Aux nunas les excuses… Pas à ce peigne-cul de my’träns. Rien que de penser à ses irys dans le fond de poches aussi malhonnêtes, Myträ avait envie de vomir.



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Et merci d’avoir choisi notre agence de voyage EmptySam 26 Mai - 5:13
      Tuwawi était un peu perdue. Pas parce que les arguments de Myträ étaient d’une finesse et d’une complexité rare, mais plutôt parce qu’ils se basaient sur un sentiment ; la haine, qui était totalement inconnu de sa société. Certes, on pourrait arguer qu’il y avait les Khashans, mais il y avait un sentiment plus proche de celui de garde-chasse qui doit contrôler la population de prédateurs nuisibles, envers ces semi-hommes.
     Si elle avait voulu argumenter, elle aurait pu commencer par dire qu’il ne s’était pas montré insultant mais au contraire fort prévenant, en s’enquérant des préférences en matière d’arsenal de la Daënare. Celle-ci avait de plus parlé de massacrer tout Mÿ’tran qui passerait à portée, ce qui faisait du vendeur la première cible toute désignée. Et enfin, bien qu’il fut un Zagashien, et donc qu’il aurait pu faire chauffer tellement le fer de l’épée que Myträ aurait perdu l’usage de ses mains pour plusieurs jours, il n’en avait rien fait, et ce alors qu’il était parfaitement au courant que les Nunaqortoqut étaient sinon de son côté au moins en rien opposé à ce qu’il se défende.
     Tuwawi donna donc la somme convenue à sa mère, qui était partie sur une discussion à base de prix du métal, de techniques pour aiguiser les lames et de si on devait préférer un sabre droit à un sabre courbé, puis partit rejoindre celle qui venait de quitter le magasin – pour son plus grand bien.
     Elle s’assit à ses côtés. La petite avait un esprit très pragmatique, comme tous les Nunaqortoqut, aussi on ne peut nier qu’elle était là en grande partie pour la surveiller. Mais elle était aussi une jeune personne sensible et qui avait une certaine affection pour cette orientale, qui était un mystère à ses yeux. Droite, fière, altière, mais aussi amusante presque malgré elle, avec ses mimiques et ses réactions emplies de candeur. L’enfant était déjà en partie une Aildoraine, avec ce que ça signifiait de cynisme et de méfiance, et les mœurs de son pays étaient trop éloignées de la dualité dans la personnalité de cette étrangère, qui parvenait à faire cohabiter un certain laconisme qui s’autorisait des bouffées de douceur puérile, avec une grande colère incompréhensible pour Tuwawi, qui n’était pas au fait des siècles de guerres d’une impensable violence qui avait secoué la psyché de la société daënare et mÿ’tranne. En bref, elle ne s’expliquait pas son comportement, mais était trop curieuse pour en rester là.
     Et c’est donc naturellement avec l’insousciance de la jeunesse qu’elle posa sa question.
     « Dis Mymy, pourquoi les gens des villes et les gens de magie se détestent ? »

     Pendant qu’une question existentielle était posée, au comptoir des Nunaqortoqut, on se baignait en s’éclaboussant et en riant gaiement. Car oui, Toklo et Sakari étaient dans la même bassine remplie d’eau chaude, afin d’économiser du temps et du charbon. Ça ne leur posait aucun problème, car ils avaient batifolé dans la neige ensemble, et s’étaient livrés à de furieuses batailles de polochons dans leur prime jeunesse, batailles dans les champs de bataille étaient sous les igloos, huttes et tentes, où il faisait trop chaud dans ces espaces confinés pour qu’on s’embarrasse de vêtements.
     Ne supportant pas l’alcool, pour n’en avoir jamais bu, les deux compères avaient payé une tournée à leurs compagnons de vendetta et fui la taverne avant qu’on ne leur proposât un jeu à boire.
     Ils discutèrent de leur vie ici et là-bas, au nord comme au sud des montagnes qui séparait Nurnakaq et Akkqunataq. L’augmentation réconfortante du nombre d’erchs, les us des orientaux en matière de cuisine, ce que devenait telle ou telle personnalité de la famille, ou la puissance d’un grand mage au combat. Puis ils dérivèrent sur Myträ, et le ton se fit plus sérieux.
     « Puis bon, tu en penses quoi, d’elle ?
     – C’est une enfant. Elle est un chef dans son armée, et ça ce voit. Sa tenue. Souvent, les chefs étrangers ont des décorations, et se tiennent plus droits, sont plus sobres. »
     Précision totalement gratuite, car Sakari le savait pertinemment.
« Elle doit être un bon exemple. Une icône pour ses troupes. On doit avoir envie de la suivre.
     – Mais c’est une gamine ?
     – Oui. Une enfant qui ignore beaucoup de choses. Je veux dire, même par rapport à nous, qui avons à peu près son âge, et qui ne connaissons que peu de choses de l’extérieur.
     – Mouais. Moi un peu plus que toi, quand-même, à force.
     –Tu sais comme moi ce qu’est le savoir. Qu’il n’augmente jamais. Dès que tu apprends quelque chose, tu peux en oublier une, ou bien tu transformes tes anciens savoirs jusqu’à ce qu’ils perdent leur nature propre. Ignorer, c’est en fait mal exploiter ce qu’on sait déjà, ou bien qu’on refuse d’admettre qu’on sait. Le savoir est fixe, mais il évolue. Je le vois à la façon dont tu parles, dont tu marches, dont tu combats. Tant de choses que tu as oublié.
     – Ouais, Toklo, et c’est pas fini. C’est pas fini, hé hé. Mais bon, hein, hé, oh, Mes traits, là.
     – Ça ce prononce pas Mi-train plutôt ?
     – Ou Mettre ras ? Enfin. De toi à moi, tu penses qu’elle est apte ? J’ai confiance en mon jugement, et si elle est encore là, c’est qu’elle l’est, mais c’est ton avis que je veux.
     – Hé bien…
     – Ton avis. Pas ta permission. »
     Toklo haussa les épaules. Comme s’il pouvait ignorer qu’elle en ferait à sa tête peu importe ce qu’il allait dire.
     – Il n’y a que toi qui peut lui apprendre, c’est évident. Ce ne sera pas facile, vu ce que tu me racontes sur les guerriers orientaux.
     – Oui, ces militaires —
     – Ces milles lits ternes ?
     – Non, mi-li-tai-reuh. Des guerriers, mais qui seraient payés, comme des mercenaires, mais en plus fidèles, et qui servent à défendre les cités contre les ennemis extérieurs. Ils se battent pour l’or, pour défendre les leurs et parce qu’ils aiment le pays et la culture qui est la leur. Et du coup, ils sont un peu à part des autres, tu vois.
     – Pas trop, non.
     – Ouais, j’ai pas tout compris non plus quand on m’a expliqué. Je disais donc que les militaires des villes sont souvent peu tolérants. On verra ce qu’elle va penser de nous. »
     Toklo acquiesca. Sakari se plongea un peu plus dans la bassine, ne laissant dépasser que son visage.
     « J’aimerais beaucoup qu’elle soit mon alliée… voire mon amie.
     – Hein ?
     – Rien, rien. »


Dernière édition par Sakari Naasoqineq le Jeu 31 Mai - 23:17, édité 1 fois

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Et merci d’avoir choisi notre agence de voyage EmptyMer 30 Mai - 20:09
Myträ attendait sagement que les nunas sortent, assise sur le porche, les jambes enlacés entre ses bras. Par habitude, elle attrapa un morceau de glace et le serra fort contre sa paume. Les gamins d’Hinaus jouaient souvent à ce jeu consistant à prendre un bout de glace et le serrer jusqu’à ce qu’il fonde entièrement. Le premier à lâcher sous la morsure du froid avait bien évidemment perdu. Les picotements sur sa peau et bientôt l’eau glacial qui courait sur son poignet lui offrait une distraction bienvenue, lui faisant oublier sa colère. Pourtant, elle était toujours présente, comme un venin glacé, lorsque Wawi prit place à ses côtés. D’un moulinet du poignet, elle jeta son glaçon d’un air rageur. Elle n’avait pas besoin d’une chaperonne qui venait s’assurer qu’elle ne faisait pas d’autres bêtises. Ce genre d’attention avait tendance à l’agacer. Ainsi Myträ n’était-elle pas dans les meilleures dispositions pour écouter la question.

« Dis Mymy, pourquoi les gens des villes et les gens de magie se détestent ? »

La daënare lui aurait bien répondu d’un ton acerbe qu’elle ferait mieux d’aller à l’école plutôt que de chasser le caribou, ainsi apprendrait-elle quelques notions d’histoire élémentaires, mais un simple coup d’œil sur le visage de la gamine l’en dissuada. La jeune fille ne méritait absolument pas sa mauvaise humeur. Cependant, la réponse allait être longue et ils avaient donc tout le temps du monde.

- Tu veux faire une partie ? Demanda-t-elle en éludant temporairement la question.

Sans attendre de réponse, elle chercha deux bouts de glace de taille équivalente et en donna un à Wawi. La daënare montra ensuite l’exemple en serrant son poing nu autour de l’eau solide.

- La première qui lâche a perdu, expliqua-t-elle.

Ce n’était pas le jeu le plus intelligent qui existe mais c’était le seul que Myträ connaissait. Pas besoin de réfléchir. C’était une épreuve basée sur la résistance et la volonté. Un jeu absolument parfait pour la blonde qui ne brillait pas par sa jugeote mais par sa détermination.

- La réponse à ta question dépend à qui tu l’as posé, dit la blonde. Un mineur qui ne connait des my’trans que ce que lui a dit son professeur en cours d’histoire te dira que nos ancêtres ont été persécutés par les my’trans. Ils refusaient l’esclavage des Architectes alors ils ont été traqués jusqu’à ce qu’ils s’enfuient sur une terre hostile pour préparer leur vengeance. Vengeance qui arrivera lorsque nous les éradiquerons tous jusqu’au dernier. Un savant te dirait que ce sont des sauvages qui préfèrent vénérer des dieux pour résoudre leurs problèmes plutôt que d’utiliser leur ingéniosité. Un militaire te dira qu’ils représentent une menace pour notre société et qu’il faut les supprimer avant qu’ils ne le fassent. C’est une question de survie sur le long terme. Une fille avec des cicatrices sur le visage te dira qu’on ne peut pas leur faire confiance, que leur croyance occulte toute moralité. A quoi bon remettre ses actes en question quand on est certain d’agir selon la volonté d’un être supérieur qui ne récompense que la dévotion ? Moi, je suis d’accord avec tous ces points de vue… sans exception.

Le glaçon avait presque entièrement fondu et baignait maintenant dans un liquide glacé. Myträ finit par le lâcher par lassitude, car la douleur n’était pas encore assez forte pour ébrécher sa volonté. Et puis, un nouveau jeu est toujours plus amusant lorsqu’on gagne pour la première fois.

- J’ai perdu.

Finalement, la militaire se redressa du haut de son mètre soixante-dix et étira ses lombaires endolories à force de rester assise par terre. Bien que le vendeur my’trän ait accaparé toute son attention durant ces dernières minutes, elle n’oubliait pas son inquiétude pour Sakari et Toklo. Ils étaient partis depuis longtemps et elle se demandait toujours si leur absence était normale ou non. Si Wawi s’inquiétait elle aussi, ça ne se voyait pas. La daënare engagea donc le sujet, tout en essayant de pas montrer que la situation la rendait très mal à l’aise. Des étrangers qui se mettaient dans les ennuis à cause d’elle, ce n’était vraiment pas sa tasse de thé.

- Tu es sûre que ça va pour Sakari et ton père ? Demanda la blonde.

Elle tentait de deviner sans conviction qui était Toklo dans la famille. Au pire, Wawi pourrait la corriger.

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Et merci d’avoir choisi notre agence de voyage EmptyJeu 31 Mai - 23:15
     Tuwawi ne fit aucun effort pour masquer son désarroi. L’orientale avait utilisé plein de mots compliqués et de notions qu’elle était incapable de comprendre. D’autant plus que cette dernière était concentrée sur son glaçon, et n’avait pas fait l’effort de parler lentement. Voici donc ce qu’elle avait entendu et compris :
     « La réponse à ta question dépend à qui tu l’as posé, Un enfant qui ne connaît des mites rances que ce que lui a dit son professeur en course distraite te dira que nos ancêtres ont été percés et coupés par les mitres. Ils refusaient l’esclavage des arches de sectes alors ils ont été traqués jusqu’à ce qu’ils s’enfuient sur une terre hostile pour préparer leur vengeance. Vengeance qui arrivera lorsque nous les éradiquerons tous jusqu’au dernier. Un savant te dirait que ce sont des sceaux vagues qui préfèrent vénérer des yeux pour résoudre leurs problèmes plutôt que d’utiliser leur ingéniosité. Un moule de terre te dira qu’ils représentent une menace pour notre société et qu’il faut les supprimer avant qu’ils ne le fassent. C’est une question de survie sur le long terme. Une fille avec des cicatrices sur le visage te dira qu’on ne peut pas leur faire confiance, que leur croyance occulte toute moralité. A quoi bon remettre ses actes en question quand on est certain d’agir selon la volonté d’un être supérieur qui ne récompense que les dés de vision ? Moi, je suis d’accord avec tous ces points de vue… sans exception. »
     Autant dire que c’était totalement dénué de sens. Sans parler du fait que tout ce que son vocabulaire limité lui avait permis de saisir lui paraissait pour le moins étrange. Elle se dit qu’elle demanderai des éclaircissements à Sakari.
     « Ah, euh… Oui, si tu le dis… »
     Myträ lâcha le glaçon. Tuwawi avait déjà fait de telles choses, mais chez eux le jeu consistait plus en tailler un bout de glace jusqu’à ce qu’il soit assez pointu pour qu’on puisse le lancer sur le cadavre d’un Khashan et qu’il reste planté. C’était un autre type d’enfance. Elle faisait virevolter le glaçon dans ses doigts avec une technique que n’aurait pas reniée un manieur de couteau à cran d’arrêt. Ça permettait à ses doigts de ne pas être trop mordus par le froid. Quand sa compagnonne de jeu lâcha le sien, Tuwawi envoya le projectile improvisé sur un rat de passage, qui le prit en pleine poire et s’enfuit en couinant.
     Elle le regardait détaler en souriant, quand son expression de joie innocente se gela d’un coup sec. Elle sembla manquer de s’étouffer un instant, eut les yeux gros comme des assiettes et la main qui avait lancé le pic de glace fut parcourue d’un tremblement léger, comme un frisson.
      « Ouh là là. Alors. Non. Il… n’est… non. »
     C’était ça où elle allait lancer des invectives dans son patois. Il était très perceptible que cette idée la dégoûtait profondément, car Myträ avait prononcé une injure de la plus haute gravité sans s’en rendre compte.
     Tuwawi réussit à reprendre son calme. Après tout, elle avait bien été incapable de comprendre quelque chose qui semblait très important pour l’orientale, et aborder le sujet avait été un peu malencontreux, vu son ton. Il serait dès lors bien malséant de lui en vouloir d’avoir commis la même erreur.

     En effet, Tuwawi et Ataneqi étaient membres de la famille Kissipoq, ce qui signifiait qu’elles avaient un lien de parenté très lointain avec la fille cadette de Ningapok Tukilangit, alors que Sakari, de la famille Naasoqineq, avait un lien de parenté avec le fils aîné du héros du clan commun. Elles étaient donc dans une histoire généalogique qui remontait à l’aube des temps, et était parcourue de héros de toute sorte.
     Toklo Pikkorippoq était un cas à part. La famille Pikkorippoq était une autre famille très prestigieuse, mais d’un autre clan. Toklo lui-même n’était qu’à demi Nunaqortoqut. En effet, il naquit lors d’une invasion khashane dont l’endiguement avait échoué. Sa mère, Aipalovik Pikkorippoq, une femme d’une très haute dignité, ayant passé la cinquantaine, était restée dans un village, pour aider les malades, les femmes enceintes et les vieillards.
     Quand le chef de guerre et fils d’Aipalovik revint voir sa mère et sa femme qui devait accoucher, il ne trouva que des cadavres, et une bande de khashan qui avaient fait subir les derniers outrages aux survivantes. La femme du chef mourut de ses blessures. Dès que leurs corps furent horriblement mutilés, attachés nus et écorchés à des pierres en plein blizzard, puis leurs têtes plantées sur des piques, et le deuil des morts fait, une autre tragédie frappa cette famille.
     Aipalovik était trop vieille pour avoir d’enfant, selon toute logique, mais il n’empêche qu’elle réussit, dans l’extrême douleur, à donner naissance à Toklo. Il était l’enfant de l’ignominie d’un semi-homme, d’une vieille inutile qui avait presque perdu la raison, d’un guerrier sanguinaire et ivre de vengeance, sentiment honni parmi tous dans la société nunaqortoq.
     Le fruit de l’immondice, de la décrépitude et de la folie.
     Ce n’était pas pour rien que Toklo était devenu un des plus grands combattants que les Nunaqortoqut avaient connu ; il avait hérité de la malédiction sanguinaire qui était dans ses gènes et sa famille, et son manque d’orthodoxie martiale – car personne d’autre que lui ne combattait avec une hache – ne faisait rien pour l’infirmer.
     Son frère avait refusé de pratiquer l’exposition du nouveau-né, mais comme le pouvoir du chef n’est que nominal, ils furent tout deux bannis. La tante de Sakari les recueillit. Un matin, sans prévenir, le grand-frère prit un couteau, ses seuls vêtements et marcha vers l’ouest, pour aller se tuer par l’exil, et peut-être un dernier combat contre le peuple de ceux qui avaient détruit sa vie et sa famille. Dernière offense faite à son propre honneur et à la tribu qui l’avait hébergée, car les corps devaient être soigneusement récupérés et recyclés, dans cet univers de disette matérielle, sans parler du caractère mystique de l’appropriation des corps des défunts, par les vivants, et donc de leur intégration dans la grande chaîne des âges. Toklo n’avait désormais plus de famille, autant du point de vue physique que métaphysique.

     Pendant que Tuwawi frôlait la crise cardiaque, l’intéressé était en train de faire des blagounettes.
     « Ce sont deux amis qui se promènent dans Illoqarfik. Ils voient passer un eunuque et une belle jeune femme. Le premier dit : « Ah, ce doit être sa femme. – Mais non, idiot, les eunuques ne peuvent pas avoir de femme. – C’est donc sa fille. » Répond l’autre. »
     Et Sakari de s’esclaffer bruyamment. Toklo esquissa à peine un sourire, de toutes façon rendu invisible par son foulard.
     « Bon, on déconne, on déconne, mais on traînasse, aussi. »
     « Ouais. On les rejoint au magasin d’escalade, ils seront sans doute là, tu connais Ataneqi, on a le temps de voir les montagnes pousser avant qu’elle choisisse le moindre mousqueton. »

     Effectivement, il fallut ensuite acheter du matériel adapté à Myträ pour qu’elle puisse passer par les terrifiantes et abusivement escarpées montagnes au nord d’Aildor.
     Ataneqi sortit du magasin et tendit la monnaie de l’achat à l’orientale.
     « Bon, maintenant, on va acheter… Vous allez bien toutes les deux ? »
     Entre sa fille qui donnait l’impression d’avoir vu un esprit maléfique et Myträ qui faisait la tête, il semblait que l’intrusion de sa voix calme et volontaire était plus que bienvenue. Elle les emmena jusqu’à une autre échoppe non loin, tenue cette fois-ci par un fier Aildorain, pur produit local, et noir comme du charbon, qui s’affairait à repriser un piolet. Quand il entendit la cloche de la porte tinter, il cessa ses occupations et accueillit les nouveaux arrivés avec bonhomie.
     « Ah, quelle joie, Ataneqi ! C’est ta fille, non ? Bonjour ma grande ! Ta mère m’a parlé de toi, tu sais ? »
     Ça papota un peu, puis le vendeur s’aperçut de la présence d’une autre personne.
     « Bonjour madame, c’est pour vous le matériel ? Très bien ! Venez avec moi, je vous en prie. Ah, pour votre taille, je n’ai plus que des baudriers couleur jaune, ça ira ?
     – Maman, je peux en avoir un moi aussi ?
     – Mm, ce sera un jaune aussi.
     – Oh chouette, on sera assorties Mymy ! »
     Elle la regarda avec des paillettes plein les yeux.

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Et merci d’avoir choisi notre agence de voyage EmptyMar 5 Juin - 18:53
Après un bref examen de son expression incrédule, la blonde devait se rendre à l’évidence que Wawi n’avait pas compris un traitre mot de ce qu’elle venait de lui expliquer. Pour la daënare, la faute revenait évidemment à la barrière de la langue, et non aux notions trop complexes pour la Nuna. Une barrière qu’elle comptait bien abattre au plus vite. Mais pas tout de suite car Wawi semblait troublée. De toute évidence, Myträ n’était pas tombée juste en supposant que Toklo était le père de Wawi. Bien que la petite semble gênée, elle ne lui disait toujours pas qui il était. Myträ réessaierait donc plus tard avec une autre hypothèse. Au hasard…

Après une attente interminable, Ataneqi sortait enfin de l'armurerie. Cette femme adorait visiblement faire les boutiques, tandis que Myträ n’avait qu’une envie c’était de précipiter son propre crâne contre une arête de glace pour écourter cette journée passée à faire des emplettes. Supporter un autre my'trän était définitivement au-dessus de ses forces. C’est pourquoi elle se montra très succincte devant la mère Nuna qui leur demandait s’ils allaient bien. La blonde haussa les épaules autant pour elle que pour Wawi. La petite semblait avoir croisé un spectre, mais la daënare ne comprenait pas pourquoi. C'est gens du nord sont vraiment étranges.

La matriarche les emmena dans une autre boutique ; d’alpinisme cette fois. Encore une fois Ataneqi connaissait tout le monde, et il fallut bien quelques minutes au marchand pour s’apercevoir de la présence de la daënare. Et pour cause, celle-ci était à demi-cachée derrière Wawi et observait le vendeur d’un air peu avenant, essayant de deviner quelle était son élégance. Non pas qu’elle s’apprêtait à lui sauter à la gorge mais il fallait qu’elle se prépare à de nouveaux propos qu’elle jugerait encore offensants.

C’est donc à contrecœur qu’elle suivit le vendeur pour trouver un baudrier à sa taille. Myträ n’était pas une experte en escalade mais elle avait toutefois les rudiments et connaissait bien le matériel. Elle entreprit donc de prérégler les sangles de cuisse de son baudrier jaune, afin de ne pas avoir à le faire dans la neige à moins vingt degrés. Malgré son sérieux obstiné, la blonde se dérida un instant alors que Wawi insistait pour avoir le même harnais qu’elle. Elle lui décocha donc un mince sourire.

- Je pensais que tu en aurais pris un violet, fit-elle remarquer. Mais le jaune te va bien mieux effectivement.

Ce n’est pas vrai que pour Wawi d’ailleurs. Tout le monde serait bien mieux en jaune...

Mais passons. Myträ était plutôt en train d’aider la jeune Nuna à enfiler son propre baudrier. Le sourire aux lèvres, elle avait enfin oublié sa mésaventure avec le my’trän.

- Wawi, l’interpella-t-elle d’un ton neutre. Tu voudras bien m’apprendre ta langue pendant le voyage ?

La daënare et la nuna auront sans doute beaucoup de temps libre durant les longues heures de marche sur l’inlandsis de Marnaka, autant les passer à apprendre quelque chose d’utile. Mais surtout, la daënare voulait se rapprocher de Wawi. Elle ne l’avouerait jamais, mais elle commençait déjà à apprécier cette petite source de jovialité intarissable et sa maturité parfois surprenante. C’était une bouffée de fraicheur dans un univers qui était hostile à Myträ ; une terre désertique, une ville corrompue, des inconnus patibulaires, et même des my’träns. La blonde avait l’impression d’être agressée de tout part, faisant jaillir son mauvais caractère comme les épines d’un hérisson apeuré. Pour l’instant, Wawi était sans doute la seule personne avec laquelle Myträ n’était pas sur la défensive.

Par la suite, elle paya le matériel qu’elle venait d’acheter par l’entremise d’Ataneqi. Le contenu de sa bourse commençait à se tarir mais au moins n’avait-elle pas eu à payer un extra pour prix de sa grossièreté cette fois-ci.

D’ailleurs, la jeune femme se rendait seulement compte qu’on n’avait pas répondu à sa question. Où sont passé Sakari et Toklo ? Et surtout, qu’est-ce qu’ils pouvaient bien fabriquer ? De toute évidence, Myträ était la seule à s’en inquiéter. Ce qui ne la rassurait en aucune façon.

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Et merci d’avoir choisi notre agence de voyage EmptyMer 6 Juin - 22:41
     Voir sa fille jouer avec un soldat fanatique et d’une grande compétence martiale n’allait pas vraiment pour rassurer Ataneqi. Les paroles du vendeur d’armes résonnaient dans sa tête. C’est vrai, qu’à un moment, il faudrait lui dire. Si elle le faisait maintenant, enfin, dès que Sakari et Toklo seraient arrivés, il y aurait tout le temps du voyage pour la faire à l’idée, mais elle était encore trop engoncée dans son infrastructure mentale pour supporter la découverte. À l’inverse, si elle était mise devant le fait accompli, sur place, après y avoir été introduite pendant de longues semaines, le choc de la trahison que ça représenterait devrait être amoindri.
     À vrai dire, elle était complètement perdue face à ce problème. Sakari était plus jeune, de plus de dix ans, mais son expérience des étrangers devait lui donner la réponse à la question. Même si, connaissant le personnage, elle répondrait sûrement par un haussement d’épaule et un « On verra bien. » fort peu rassurant.
     Au moins, la demande de Myträ l’avait un peu tranquillisée. Il est vrai qu’apprendre la langue est toujours un moyen de s’ouvrir. En plus, le parlé des Nunaqortoqut était plus un patois, il ne lui faudrait donc pas longtemps pour le parler. Un peu plus pour le comprendre, avec l’accent, ceci dit.
     Naturellement, Tuwawi acquiesça avec enthousiasme.

     Pendant que Tuwawi et Myträ se vêtaient en parlant de leurs couleurs préférées, et qu’Ataneqi s’inquiétait, nos deux compères entraient dans la rue en continuant sur leur lancée d’histoires drôles.
     « C’est un fou qui repeint son plafond. Et là, un autre fou arrive, et il lui dit : Hé, accroche-toi au pinceau, je retire l’échelle. »
     Ils attendirent à la sortie du magasin, en continuant à se fendre la poire. Enfin, Sakari riait à pleine dent, alors que Toklo, qui avait les meilleures blagues, avait tout au plus un début de rictus, ce qui, pour qui savait lire ses expressions faciales, signifiait qu’il était au comble de l’hilarité.
     Les trois femmes sortirent de la boutique. Sakari jaugea son apprentie du regard. Elle était visiblement contente de son équipement.
     « Bien, te voilà fin prête. Ah, tiens, c’est chou, vous êtes assorties, toutes les deux. »
     Tuwawi souriait comme à son anniversaire. Elle prit la main de Myträ et opina de la tête vigoureusement.
     « Bon, maintenant, c’est l’arc ?
     – Non. J’aurais dû lui faire acheter un arc, oui, et un couteau, mais justement, là va commencer la première leçon.
     – Bien, tu fais ça selon la tradition. »
     Regards entendus.
     – Mon train ? L’épée, s’il te plaît. »
     Son ton était devenu subitement très sérieux, mais elle maintenait son sourire amical. Tuwawi lui tendit l’épée que Myträ avait choisie. Après quelques moulinets, Sakari reprit la parole.
     « On commence l’apprentissage. Je ne sais pas ce qu’on t’a appris sur les armes. Je vais t’apprendre autre chose, en tout cas, cela est certain. Pour nous, les Nunaqortoqut, une arme, ce n’est pas qu’un outil. C’est une extension de soi, un symbole aussi. Il faut respecter son œil, car sans lui tu ne vois pas le danger. Il faut respecter ses mains, sinon elles te font défaut quand tu escalades une paroi. Il faut respecter son esprit, sinon il s’embrouille et devient inepte. Un combattant est plus fort quand il voit, agit et pense avec clarté et force. N’es-tu pas d’accord ? Il en est de même pour ses armes. Il faut les connaître, les maîtriser autant que tu maîtrises et connais tes propres doigts, pour qu’ils ne te fassent jamais défaut. Ça ne veut pas dire qu’elles sont indestructibles, au contraire. Ton épée d’acier est aussi fragile que ta chair, car elle doit être entretenue avec autant de soin. C’est là toute la différence entre le bon et l’excellent combattant.
     Intéressant choix d’arme. Très polyvalent. Plus longue qu’un poignard, plus maniable qu’une épée longue, elle ne paye pas de mine, mais peut être très efficace entre de bonnes mains. Tu auras deux armes en plus, avec nous : un arc et un couteau. Les Nunaqortoqut préfèrent porter la lance courte à l’épée, mais dans le fond, c’est pareil, ou presque. Chacune de ces armes veulent dire quelque chose ; elles ont un sens.
     Le couteau est l’arme-outil. Il permet de survivre et de tuer. Il contient le pouvoir de la création et de la destruction. C’est une grande responsabilité, que de porter un couteau. C’est pour cela que nous en faisons le symbole de ceux qui passent à l’âge adulte, et peuvent endosser ces responsabilités. Le couteau doit être fabriqué soi-même, car il nous accompagne tout au long de sa vie. On le fabrique comme on fabriquerait ses membres, ses os, son esprit durant l’enfance. Dès que la lame est finie, le temps où la personne était en croissance s’achève.
     L’épée, ou pour nous la lance courte, est une arme taillée exclusivement pour la guerre, et inefficace à la chasse ou pour l’artisanat. Elle ne sert qu’un seul but : se défendre, et défendre ses proches. Là où le couteau n’est que personnel, l’épée est avant tout pour la collectivité ; celui qui la porte met son arme au service des autres.
     L’arc, enfin, sert à la chasse comme à la guerre. Il permet de se nourrir. Il a ceci de particulier que même un idiot peut utiliser un couteau ou une épée pour se défendre, alors que l’arc demande une maîtrise du geste. Être soldat, c’est une nécessité, être chasseur, c’est un métier, ou un art, comme vous diriez, vous les orientaux. Nous, on dirait une voie.
     Tu auras donc compris que toutes tes armes devront être fabriquées par toi seule. Quand tu sauras faire cela, même si plus jamais tu n’utilises un arc, sauf peut-être pour le plaisir de chasser ou pour le sport, tu auras acquis une façon d’être, qui sera celle de tes armes. Tu adapteras ces voies à tes autres armes, puis à tes armures, puis à tes armées. Il n’y a en effet pas de différence, dans le fond, entre combattre un seul ennemi et mille guerriers qui en combattent mille autres. Si tu peux terrasser dix personnes, alors mille personnes sous tes ordres en terrasseront dix mille.
 »

     Sakari lui rendit son épée, en la tenant par la lame, ce qui était aisé, vu que sa tenue avait une cotte de maille sur la partie intérieure.
      « Il est temps d’y aller. En chemin, nous croiserons des forêts et des montagnes. Je peux te fournir l’acier de la lame de ton couteau, et moi, Toklo et Ataneqi pourront t’apprendre à forger, mais tu devras trouver la poignée, et le fabriquer. Il en sera de même pour ton arc. Je peux te montrer les bons arbres, mais ce sera à toi de les couper. »

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Et merci d’avoir choisi notre agence de voyage EmptyJeu 7 Juin - 19:35
Du coin de l’œil, Myträ remarqua qu’Ataneqi la regardait d’un air inquiet. Aïe ! La militaire n’avait visiblement pas fait bonne impression devant la matriarche. Et cette dernière n’appréciait guère que la daënare rode autour de sa progéniture. Comment lui en vouloir ? Myträ n’était pas la fréquentation rêvée pour une mère soucieuse de l’éducation de son enfant. Elle était impulsive, xénophobe, violente et avait un talent particulier pour se plonger dans les ennuis, entrainant tout son entourage avec elle.

Myträ était ravie que Wawi réponde positivement à sa demande. Elles allaient bien s’amuser à apprendre le patois nuna. C’était certain. Ensuite, lorsque le matériel fut payé et que Ataneqi eut fini de baratiner le marchand, les trois femmes sortirent enfin du magasin pour découvrir Sakari et Toklo qui les attendaient dehors. Leur aventure avait dû bien se passer car ils étaient d’humeur légère.

La main dans celle de Wawi, Myträ regardait Sakari avec incrédulité. C’est « chou » ? Ce n’était pas un adjectif qu’on associait souvent avec la militaire, mais en présence d’une enfant, sans doute était-elle plus douce que de coutume. L’instinct maternel peut-être ? Ce n’est pas parce qu’on est une brute assoiffée de sang qu’on en est forcément dépourvu. Myträ ne fit donc aucun commentaire mais se renfrogna légèrement afin de paraitre moins « chou ». C’est qu’elle avait une réputation à tenir. Elle représentait les Forces Expérimentales de l’U.N.E à l’étranger et il ne fallait donc pas qu’elle ressemble à une poupée frivole.

Le long discours qui suivit fut absorbé sans un mot par la daënare. Il y’avait beaucoup à dire bien sûr, mais elle ne prenait pas souvent la parole pour exprimer son opinion. Ce qu’elle retenait de ce que Sakari venait de lui dire, c’est que son peuple portait une attention particulière à la maintenance de leurs armes… C’était plus joliment dit par Sakari, mais c’est ainsi que la pragmatique daënare le comprenait. Les militaires étaient eux-mêmes habitués à faire très attention à la maintenance de leur matériel, notamment parce que les armes daënares étaient bien plus complexes et capricieuses que les épées et les arcs.

Là où Sakari et Myträ différaient, c’était la relation qu’elles entretenaient avec leur arme. Effectivement, pour la blonde son arme n’était qu’un outil, rien de plus. Si son épée était émoussée, elle allait l’aiguiser. Si elle était fissurée, elle la changeait. Elle n’avait aucune idée de combien d’épées elle avait ainsi consommé et s'en moquait cordialement. Ce n’était pas une extension de son bras, juste un bout de ferraille aiguisé qui lui permettait d’ouvrir la chair de ses ennemis. La véritable tueuse, c’était elle et non ses armes. Il n’y a rien de mystique là-dedans.

Cependant, Sakari avait bien cerné la plupart des daënars. Au point que c’en était remarquable. Effectivement, ses semblables les plus pieux parlaient d’art de la guerre. Myträ trouvait cette notion bien sordide. En effet, il n’y a aucune beauté artistique à répandre les tripes de son adversaire sur ses genoux et l’écouter appeler sa mère tandis que la vie s’échappe de son corps. Ceux qui parlent d’art sont soit des recrues en quête de gloire qui n’ont jamais vu un champ de bataille, soit des monstres sans âmes. Pour Myträ, il s’agit simplement d'un métier, rien d’autre. C’était une vision des choses essentielle pour elle et qui ne risquait pas de changer, car c’était ce qui lui permettait de garder un semblant d’humanité. C’est ce qui l’empêchait de ressentir cet agréable frisson lorsqu’on transperce son adversaire. C’est ce qui l’empêchait d’éprouver de la pitié lorsque son regard bleu croise celui d’un homme vaincu qui supplie pour sa vie. Sa vision professionnelle de la guerre était plus qu’une opinion, c’était une nécessité.

N’allez pas croire que la Daënare rejetait en bloc les paroles de Sakari. Elle respectait les nunas et leur vision bien particulière de l’arme. Elle avait même hâte d’apprendre le forgeage. Ce devait être comme la cuisine ; ça nous parait meilleur lorsqu’on le fait soi-même. Et puis, il vrai que le glaive n’était pas idéal pour la chasse, mais Myträ n’y connaissait pas grand-chose de toute manière. Elle était formée pour tuer des humains, pas des bêtes. Elle s’en remettait totalement aux nunas pour lui apprendre. D’ailleurs, Sakari acheva son discours sur une note qui l’intéressait d’autant plus. La nuna allait lui apprendre des tactiques de son peuple. Les tactiques militaires étaient sans doute la discipline qui passionnait le plus la petite blonde. Le reste n’étant qu’une nécessité.

La blonde attrapa le glaive sans un mot et le glissa dans le fourreau de sa ceinture. Elle laissa planer un battement avant de répondre quoique ce soit, faisant dériver son regard océan sur Toklo. Il se plissa légèrement en dévisageant le nuna tandis qu’une étincelle d’intérêt passa dans le fond de son œil saphir. Il avait l’air fort… Myträ avait hâte de le voir à l’action. Son intérêt se mua en une once de défi alors qu’un coin de lèvre tuméfié se leva légèrement, mais elle retourna bien vite à son interlocutrice pour lui donner son avis quant au joyeux programme annoncé.

- Ce sera intéressant de construire mes propres armes, consentit-elle à lâcher. Par contre, je dois t’informer que je n’ai jamais bandé un arc de ma vie. Les fusils daënars sont plus puissants, plus rapides et plus précis. Je n’en ai donc jamais vu la nécessité.

Myträ ne se souciait pas de savoir si elle avait vexé Sakari. Ce n’était pas un jugement de valeur de sa part. C’était simplement la pure vérité. Un fusil était supérieur à un arc. Mais ce n’était pas pour autant qu’elle méprisait l'arme. La blonde construira un arc et apprendra à tirer avec.

- Mais je ferai comme tu voudras, précisa-t-elle. C’est toi qui commande.

Ces derniers mots étaient lâchés sans aucune amertume. Ils étaient même accompagnés d’une main tendue à l’adresse de Sakari, la remerciant encore une fois de son enseignement. Une fois l’échange terminé, Myträ rangea ses affaires dans son sac et avança à la suite de Sakari. En passant devant Toklo, elle lui glissa de nouveau un regard énigmatique avant de reporter son attention sur ses pieds. Un léger sourire d’exaltation éclaira alors le visage ivoire de la jeune femme.

Ce voyage s’annonçait sous les meilleurs auspices…

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Et merci d’avoir choisi notre agence de voyage EmptyVen 15 Juin - 19:48
     La remarque sur l’arc et le fusil fit sourire Sakari.
     « Oui, c’est vrai. Je n’utilise moi-même que rarement l’arc, depuis que j’ai des fusils. Toutefois, il est impossible d’en fabriquer avec ce qu’on trouve à Marnaka, et je ne peux donc rien t’apprendre avec un fusil. Quand tu sauras fabriquer un arc, l’utiliser et considérer le combat à distance comme on le considère, il te suffira d’adapter ce savoir à tes armes orientales, comme je l’ai fait. »
     Sur ce, et voyant que son apprentie était prête au départ, elle s’entretint quelques instants dans son patois avec Ataneqi. Il fut question des conditions de départ, du fait que tous étaient prêts et qu’il était temps.
     « On a une certaine distance à couvrir avant que la nuit tombe. On marche vite. C’est là ta première leçon : se déplacer. Ça paraît anodin, et il me semble que dans vos armées on fait de longues marches, mais les bases doivent être revues sans cesse. »
     Sur ce, les cinq partirent vers le nord.

     Il y avait tout le pays d’Aildor à traverser. Ce n’était pas le plus risqué, mais on pouvait toujours trouver quelques parias s’étant reconvertis dans le banditisme, des milices en maraude attachées à quelques industriel qui exploitait ces terres, et un vaste panel de mauvaises rencontres.
     Les Nunaqortoqut marchaient en file indienne et en groupe. IL y avait d’abord, bien entendu, Toklo et Sakari, qui ouvraient la marche et donnaient le rythme de marche. Venaient ensuite Myträ et Tuwawi, qui s’étaient naturellement rapprochées pour papoter, et Ataneqi qui fermait la marche et assurait l’arrière-garde.
     Sakari cherchait toujours à accéder aux positions d’éminence, marchait souvent un peu en avant et ralentissait régulièrement le rythme pour observer les environs. Toklo, lui, essayait toujours de passer par des chemins faciles, et utilisait sa science du terrain pour déterminer le chemin le plus simple. Il y avait peu de routes praticables, indifféremment de la saison, et un vent glacé soufflait, obligeant les expéditionnaires à rester à l’abri de bosquets et de buttes diverses, pour ne pas perdre des forces en luttant contre le froid.
     Tuwawi avait une bonne foulée, et marchait toujours dans les pas de Toklo. Elle dédiait son attention à Myträ et lui expliquait quelques trucs linguistiques, notamment pour ce qui était de la prononciation. Il s’agissait moins de lui faire prononcer proprement, ce qui demandait déjà beaucoup de travail, que de lui faire entendre les mots et différencier les nuances de sons, pour l’habituer. Elle débordait encore plus que d’ordinaire d’enthousiasme, car c’était pour elle comme avoir un très jeune enfant à charge, à qui elle devait apprendre à parler comme il fallait. Les manières sérieuses et militaires de Myträ ne prenaient pas du tout sur elle, principalement parce qu’elle n’en comprenait pas la signification, et interprétait cela comme de la simple timidité attendrissante.
     Entre deux petits exercices de prononciations, Tuwawi lâcha une remarque apparemment anodine :
     « Profite-bien, parce que là, t’as encore rien à apprendre de Sakari, c’est facile, là, d’avancer. C’est plus tard que ça devient très difficile. On aura sans doute pas trop le temps pendant la traversée des montagnes. »
     Sakari avait prévu de faire une escale par une forêt qui s’étendait contre les montagnes, le labyrinthe de pierres hérissées et tranchantes comme des rasoirs, ou nichaient des abominations volantes. Un arrêt qui serait bienvenu, le temps de fabriquer l’armement de Myträ, et de décider si on passait par les montagnes, ou ce qui était presque pire selon la période de l’année ; les grottes souterraines.

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Et merci d’avoir choisi notre agence de voyage EmptyMar 19 Juin - 20:12
Une vicieuse motte de neige s’agrippa au pied de Myträ et voilà que la blonde perdait une nouvelle fois l’équilibre pour finir le visage dans la neige. Relevée par une Wawi hilare, elle époussetait la neige qui collait à sa fourrure puis recommençait quelques dizaines de mètres plus loin. Oui, Myträ était habituée à la marche à pied. N’importe quel soldat digne de ce nom est capable de marcher toute la journée avec son paquetage sur le dos. Dans la neige, c’était une autre histoire. Et même si elle s’efforçait de suivre la trace de Sakari et Toklo, elle avait beaucoup de mal à trouver son équilibre sur le sol meuble parsemé de congères. De plus, ses yeux commençaient à lui faire mal à force d’être constamment ébloui. Myträ s’était donc trouvé un bout d’écorce fendu dont elle se servait comme masque afin de soulager ses yeux ronds d’orientale. Un accessoire qui faisait beaucoup rire la petite Nuna.

Lassée de ses moqueries, la daënare plongea soudainement sur Wawi et lui agrippa la taille pour l’emmener avec elle dans la poudreuse, obligeant le groupe à s’arrêter tandis que les deux jeunes filles batifolaient à grand renfort de rires flutés. La difficulté de la marche n’érodait pas l’humeur de la militaire. Elle était habituée à souffrir dans les Forces Expérimentales. Cependant, il faut bien avouer que cette fois sa discipline légendaire n’était pas au rendez-vous. Dans ce désert blanc, difficile d’imaginer qu’il puisse exister un autre ennemi que la nature. Aussi, les bandits n’étaient pas vraiment une source de préoccupation pour la daënare et elle se laissa donc aller au badinage.

La militaire prit brièvement le dessus sur l’adolescente et put jouir d’une courte pause, rythmée par les épais moutons de vapeur qui s'échappaient de ses lèvres rosées. Leur lutte les avait conduit sur le haut d’une arête enneigée d’où on pouvait voir le reste de la route à parcourir. La forêt était toute proche et hérissait les flancs d’une haute montagne. A mi-chemin, des pointes rocheuses semblaient surgir de la glace, comme les griffes noires d’un gigantesque monstre tentant de s’échapper de sa prison blanche. C’était des nunataks ; des cimes de montagnes assez hautes pour percer le bouclier de glace et rendues effilées par l’érosion, semblable à des dagues plantées dans l’inlandsis.

Un paysage magnifique qui coupait le souffle à la daënare. Malheureusement, elle prenait cette virée en Marnaka de moins en moins au sérieux. Ce qu’elle pensait être un entrainement éprouvant dans des conditions abominables se changeait plutôt en un agréable séjour chez l’habitant. Aucun danger à l’horizon si ce n’est le climat. Et même si Wawi l’avait prévenu que ça risquait de se compliquer ensuite, Myträ n’y croyait guère.

Comme elle allait déchanter !

* * *

Allongé sur un escarpement rocheux, Arrluk suivait la joyeuse troupe se diriger vers sa position.Ses yeux gris et bridés s’arrêtèrent un instant sur les deux gamines qui se battaient dans la neige, puis sur le reste de la troupe qui ne semblait pas être des touristes. De toute manière, il n’y en avait pas beaucoup dans la région, mais les caravanes qui sortaient d’Aildor étaient souvent riches en Irys après avoir vendu leurs marchandises dans la ville. Si ce n’était pas le cas, Arrluk voyait le profit en toute chose et pas seulement dans l’or.

Un autre homme s’allongea près de lui et se mit à scruter à son tour les voyageurs. Son visage allongé à la manière d’une hermine, il se lécha fébrilement les babines gercées ; sa mâchoire tremblotante sous l’effet de l’excitation.

- Des femmes, constata-t-il. Et seulement un homme.

Son camarade ricana. Les femmes n’avaient pas forcément plus de valeur en tant qu’esclave qu’un homme fort capable de travailler dur, mais elles apportaient un divertissement appréciable jusqu’à ce qu’elles soient vendu. Et puis, elles étaient plus faciles à capturer bien sûr.

- Je prends la gamine ! S’exclama un petit homme frêle et vouté.

Ses compagnons lui lancèrent un coup d’œil inquisiteur mais n’étaient pas surpris. Inoke avait toujours eu des goûts contre-natures. On soupçonnait même que c’était pour cette raison qu’il avait été chassé de sa tribu et s’était retrouvé dans le groupe. En effet, Arrluk réunissait des parias et des exilés qui détroussaient ceux qui voyageaient sur ces terres. Des bandits de grand chemin, rien de plus.

Les brigands se mirent donc en position en se cachant derrière les pitons rocheux pour préparer leur embuscade. Les voyageurs étaient obligés de passer par les nunataks s’ils voulaient rejoindre la forêt et la montagne. Les contourner leur imposerait un trop grand détour.

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Et merci d’avoir choisi notre agence de voyage EmptyMar 19 Juin - 23:20
     L’amitié naissante entre Tuwawi et Myträ était accueillie de façon très diverse par les autres membres de l’expédition.
     Ataneqi, la principale concernée, avant même sa fille, d’ailleurs, car les liens familiaux étaient tels pour les Nunaqortoqut que les aînés avaient une emprise très forte sur leurs cadets, était assez partagée. D’une part, voir que sa fille se faisait une nouvelle amie lui plaisait grandement, mais celle-ci était une étrangère, une militaire et avait engagé Sakari pour parfaire son talent guerrier. Il allait donc de soi qu’elle désapprouvait un peu, du haut de ses quarante ans révolus, ces actes enfantins, alors qu’on était en terrain hostile. Elle n’osa cependant pas intervenir, car tout ce qui pouvait amadouer cette étrangère qui avait fait étalage de son fanatisme serait bienvenu.
     Sakari trouvait ces jeux dans la neige mignons au possible, et appréciait particulièrement de voir Tuwawi, qui comptait beaucoup pour elle, être heureuse. Elle devait être celle qui ignorait le moins ce qu’était une armée orientale, mais était aussi étonnamment celle qui s’accommodait le plus de ce comportement inusuel.
     Toklo, de ce qu’on pouvait en déchiffrer, s’en moquait comme d’une guigne. Il était concentré sur autre chose, comme par exemple, éviter que des bandits ne profitent du manque criant de discrétion du groupe pour attaquer.

     Justement, avant de s’engouffrer dans le col entre deux épines rocheuses qui formaient les contreforts du Dédale, Toklo pris Sakari à parti un instant.
     « C’est l’endroit parfait pour une embuscade.
     – Hein ? Ah. Oui. En effet. Il y en a eu une quand vous êtes passé par là, à l’aller ?
     – Deux. Ceux qui nous prenaient en embuscade… ont été pris en embuscade. On en a profité pour fuir.
     – Ah, c’est pas banal, ça. »
     En fait, ça l’était, dans cette région de Marnaka.
     « Du coup, tu proposes quoi ?
     – Ton apprentie a eu la partie facile, en terrain plat.
     – Huhu. Compris. »

     Tuwawi avait formé une boule de neige à l’aérodynamisme particulièrement réussi, et alors qu’elle levait le bras pour la lancer dans le dos de Myträ, une main surgie de derrière fit exploser la boule dans les mains de l’adolescente, qui en fut consternée.
     « Sakaaaa ! C’est pas gentil. !
     – T’auras tout le temps pour ça plus tard, va. Myträ, viens voir ici. Tu t’y connais un peu… en combat en altitude ? »
     Son air faussement innocent fut accompagné d’un éclat d’enthousiasme de la part de Tuwawi, qui avait déjà oublié pour le coup de la boule de neige. Sakari répondit à sa mimique par un sourire gêné, et un regard en direction de la mère, qui acquiesça dans son patois.
     « Bah, il faut bien que vos baudriers servent. »

     Il y avait bien des tribus autres que les Nunaqortoqut, dans Marnaka, avec leurs patoirs, leurs cultures et leurs religiosités particulières. Généralement, à mesure qu’on s’approchait d’Aildor, leurs mœurs étaient de plus en plus corrompues. Celles qui vivaient au sud du Dédale n’avaient presque plus rien de commun avec les Nunaqortoqut, et ces déchets humains à la moralité dépravée comme ceux qui allaient attaquer les cinq compagnons le prouvaient. C’est en grande partie parce qu’ils pouvaient voir les ravages des pirates du sud et de leur culture urbaine que le peuple de Sakari ne tenait pas à importer trop de biens et d’us venant de ce territoire.
     Le pire des cadeaux empoisonnés d’Aildor, l’alcool, face auquel les populations indigènes d’Als’Kholyn n’avaient aucune défense biologique, pouvait anéantir des familles, corrompre des chefs et réduire de fiers êtres à l’état d’épaves détestables.
     Avec l’alcool et le commerce de biens qui détruisaient les économies locales, venaient le brigandage, l’avarice, l’avidité et tous les méfaits que peuvent causer des sociétés modernes à des peuples qui ne disposaient pas de l’épaisseur historique requise pour appréhender ces problèmes nombreux et complexes, qui avaient façonné les pays modernes, et face auxquels ils avaient eu des siècles pour créer des systèmes sociaux adaptés.
     La modernité était perçue plus comme une malédiction que comme une opportunité, et il ne fallait pas y voir là qu’un héritage des cousins éloignés des Marnakains ; les Mÿ’trans. Ce n’est pas pour rien que Sakari refusait que son aventure étrangère ait la moindre conséquence sur le mode de vie des siens. À la rigueur, elle pouvait faire appel à certains des siens pour des contrats de mercenariat et de commerce, mais à aucun prix des influences extérieures ne devaient arriver durablement jusqu’à son pays natal. Les chefs de clan le savaient bien, de part les rapports réguliers qu’elle leur envoyait. Les Nunaqortoqut étaient disposés à donner et à recevoir, mais uniquement dans de très petites quantités. Le changement était une règle universelle, et nul ne pouvait s’y opposer, mais on pouvait freiner l’importation de coutumes, d’armes, de savoirs et de biens manufacturés suffisamment pour que la société qui recevait ces biens eût le temps pour s’y adapter sans heurts.
      Cette exceptionnelle acuité n’était permise que par les voyages de Sakari, qui avait vu la dépravation et la grandeur des étrangers, et ce sous de nombreux visages. Des bouges côtiers de Cerka aux rues de lumière d’Ünellia, de la grandeur artistique aux atrocités d’États poussant des milliers de jeunes gens à la mort par-delà l’océan, de la sagesse théosophique des Occidentaux au fanatisme le plus incompréhensible. Dans l’ensemble, elle manquait encore de la maturation intellectuelle pour apprécier les civilisations étrangères à leur juste valeur, mais plus elle en découvrait, plus son impression initiale, que son monde de naissance et son monde d’adoption ne devaient en rien se mêler, se confirmait.

     « Bien, toutes les deux, je vais vous expliquer. Vous voyez ces nunataks ? La prudence exige que nous les escaladions, pour voir s’il n’y a aucun risque à passer en-dessous. Il peut y avoir des brigands, des bêtes sauvages, ou des éboulements possibles. Toklo et Ataneqi resteront en bas, pendant que nous trois allons escalader celui de gauche. C’est le seul qui me semble praticable. Tuwawi, je sais ce que tu vaux en escalade, mais tu es trop légère. Tu passeras donc en dernier, moi en première et Mi-train, tu seras au milieu. »
     Sakari noua une corde longue de trois mètres aux baudriers assortis de jaune, et s’en fit un en corde. Il avait l’avantage de ne rien coûter, mais l’inconvénient d’être dispendieux en corde, et il fallait donc éviter d’en faire pour plus d’une personne. Elle fixa un crochet à l’extrémité, et distribua des piolets d’artisanat nunaqortoqut ; deux par personne. Après avoir brièvement expliqué comment on se servait de tout ça, elle conseilla à Myträ de faire tout comme ses deux compagnonnes.
     Ce n’était pas à proprement parler de l’escalade, car la paroi n’était à aucun moment verticale, mais elle était tellement pentue et accidentée qu’il fallait à de nombreuses reprises se mettre à quatre pattes et utiliser les piolets pour progresser, ou sauter de petits escarpements un par un, la grimpeuse de tête s’assurant que tout le monde arrivait sans encombre et empêchant le groupe de tomber. Sakari devait aussi éviter les terrains friables, et passer par des endroits où le vent ne trahirait pas leur présence en portant le bruit de leur ascension.

     Il fallut deux bonnes heures à la petite escouade pour atteindre le léger plateau qui formait le sommet. Il était très irrégulier, et offrait donc de nombreux couverts, et niches d’ennemis potentiels. La progression avait été ardue, d’autant plus qu’elle succédait à une marche de plusieurs heures sans réel arrêt. Ses effets commençaient à se faire sentir. D’autant plus que la neige et le vent glacial n’avaient pas vraiment cessé.
     En bas, Ataneqi et Toklo avaient simulés une halte à l’entrée du défilé. Après tout, on était proche de l’heure de midi. Ataneqi avait profité d’une averse qui diminuait les lignes de vue pour arranger des faux en neige parés de vêtements de rechange, averse dont avaient profité également les trois femmes pour partir. C’était là un réflexe de base. Tromper l’ennemi sur son nombre était aussi constitutif à la guérilla que lacer ses chaussures l’est à la marche.
     Toklo, de son côté, était parti faire une petite reconnaissance du terrain. Il avait pu constater que du haut du nunatak de gauche, on avait accès à une vaste pente, plutôt douce, avec de nombreux escarpements qui fournissaient autant d’endroits propices à des couverts. Si on voulait placer des tireurs embusqués dans ce défilé, on ne choisirait pas un autre endroit.

     Parvenus au sommet, Sakari, Tuwawi et Myträ purent observer le flanc de la montagne. En effet, ils y virent quelques ennemis, équipés d’armes à feu médiocres. Ils étaient répartis sur plusieurs couverts, en groupes de un, et à différentes altitudes, et le soleil dans le dos. C’était un mouvement intelligent, pour qui ne s’attendait pas à être attaqué par derrière.
     « Mon trait. Apprends déjà ceci. Leur tactique est très bonne. Ils se divisent pour truquer leur nombre. Une caravane penserait qu’ils occupent tout le flanc de la montagne avec plusieurs escouades, alors qu’ils sont très peu nombreux. Ils veulent créer la panique. La panique est le pire ennemi, en bataille. Ils utilisent le terrain savamment. La neige aveuglera ceux en bas, qui ne pourront les voir et estimer leur nombre. Ils pourront ensuite descendre la pente, la dévaler, sans se casser la margoulette sur les cailloux, car il y en a peu. Ils sont aussi à l’abri du vent. Pense-y : Quand tu es en embuscade, tu dois pouvoir tenir longtemps immobile sans être repéré et sans que l’immobilité ne te ronge.
     Mais notre technique est meilleure. On a aussi truqué notre nombre, on a fait croire qu’on attendait la fin de la neige. Souviens-toi : toujours prévoir une arrière-garde. Et ne jamais renier les techniques et armes anciennes, car elles sont plus vieilles que les modernes, et ont donc été efficaces plus longtemps dans l’Histoire. Ce n’est sûrement pas pour rien. Tuwawi ? Tue le bossu.
 »
     Elle désigna Inoke du doigt, qui était le plus en hauteur. Tuwawi hocha de ta tête, sortit son arc, inspira longuement, se mit en position, et arma, puis décocha la flèche, qui se planta dans le haut du dos de l’ennemi, avec un petit bruit étouffé par le sifflement du vent sur la crête. Au même moment, Sakari alluma une résine spéciale, qui produisait une grande quantité de fumée, et s’en servit pour alerter Toklo et Ataneqi. Ceux-ci surgirent en contrebas, attirant aussitôt les tirs ennemis. Cependant, eux comme leurs ennemis étaient trop bien à couvert pour se faire le moindre mal, car tout deux avaient prévu l’arrivée d’un adversaire.
     L’objectif de Toklo et d’Ataneqi était cependant de se borner à attirer l’attention. Tuwawi allait continuer à couvrir la descente de Sakari et de Myträ depuis les hauteurs, pendant que les deux guerrières allaient nettoyer le versant. Pour l’occasion, Sakari lui avait donné son Vulcain et un couteau de rechange.

     On pouvait déjà apprendre quelque chose de cela. À aucun moment, les Nunaqortoqut n’avaient fait grand usage de la parole, dans cette attaque, ni même à des communications élaborées, mais tous semblaient connaître leur rôle à la perfection, alors que les ennemis manquaient cruellement d’adaptabilité. Ils avaient dû se rendre compte que moins de la moitié des ennemis étaient sur place, et qu’ils savaient qu’on les attendait. Leur formation en groupes de uns isolés empêchait cependant de distribuer un plan pour s’adapter à ces nouvelles conditions. Les agresseurs se contentaient d’observer un plan pré-établi pour un seul type de situation.
     Les Nunaqortoqut, en revanche, avaient tiré parti de la force de l’ennemi, à savoir son positionnement, pour en faire leur principale faiblesse : ils allaient attaquer les bandits un à un, sans qu’ils puissent réagir en groupe, ou même adapter leur plan. Ils avaient eux aussi établi une marche à suivre pré-établie, et qui permettait donc de se passer de communications, ce qui était très pratique quand on faisait de la guérilla sur un territoire vaste, à la topographie complexe et avec peu de moyens, mais cette marche à suivre était bien plus complexe, et pouvait s’adapter aisément.
     En bref, les Nunaqortoqut avaient montré leur expérience dans le début de cette petite escarmouche, en transformant les qualités ennemies en défauts et en faisant était de leur supériorité tactique. Après tout, ils avaient affiné leur science en faisant la guerre, et pas en détroussant des passants.[/color]

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Et merci d’avoir choisi notre agence de voyage EmptyMer 20 Juin - 20:58
Le combat en altitude ? La seule chose que la Capitaine savait à ce sujet était qu’il valait mieux éviter ce milieu pour combattre. "Ceux qui sont le plus en hauteur ont l’avantage" C’était à peu près tout ce qu’elle avait retenu. Elle était donc très friande de ce que Sakari pouvait lui apprendre.

- Pas vraiment, non, répondit-elle en reprenant son air sérieux de Capitaine daënare. Comme du combat dans la neige d’ailleurs. Je comprends pourquoi vous avez choisi de manier des armes d'hast. Je m’enlise complètement, je serais bien incapable de passer outre la portée d’une lance avec mon glaive.

La jeune femme ronchonnait en réalisant que la portée de son arme était capitale dans ce milieu où chaque pas était un exploit. Heureusement, la majeure partie du pays n’était pas composée de neige mais aussi de glace bien ferme. Myträ râlait seulement car elle avait dû se frayer un chemin dans les congères quelques minutes plus tôt.

Sakari proposa alors une nouvelle activité sportive : l’escalade. La proposition ne fut assortie d’aucune protestation de la part de la daënare qui se retrouva attachée à Wawi et Sakari. Une fois bien harnachée, les trois femmes s’attaquèrent à une pente douce du nunatak. Myträ s’appliquait à choisir judicieusement les points d’appuis où enfoncer ses piolets. Même si elle venait d’une région montagneuse, elle n’était pas vraiment rompue à l’escalade. Elle était donc plus lente que Wawi et Sakari, mais au moins ne tombait-elle pas.

Une fois arrivée en haut, le paysage s’ouvrait sous ses yeux. On distinguait des points noirs qui piquetaient le nunatak d'en face. Myträ ne comprit pas immédiatement ce qu’elle voyait, pensant d’abord avoir à faire à des animaux, mais le constat de Sakari la détrompait. Des ennemis. La Capitaine se ratatina aussitôt pour ne pas être aperçue et coula un regard alarmé à la Nuna qui aurait probablement adoptée le même ton si elle avait découvert des champignons pour la soupe.

La stratégie des bandits étaient plutôt exotique pour la Capitaine. La discrétion et les embuscades n’étaient pas le fort de l’armée Daënare et elle n’avait donc que des connaissances théoriques sur le sujet. Elle écoutait attentivement l’analyse de Sakari sans émettre la moindre remarque, n’ayant pas les compétences pour lui donner la réplique. Par contre, elle comprenait très bien pourquoi Sakari voulait abattre le chef avant même le début des combats. Désorganiser des bandits indisciplinés était évidemment une tactique efficace.

Myträ leva silencieusement son pouce à l’adresse de Wawi pour la féliciter de son tir réussi. Elle descendit ensuite avec Sakari qui lui confia son fusil et un couteau. La nuna venait de faire une heureuse car la Capitaine se sentait parfaitement à l’aise avec l’arme. Elle était plutôt sophistiquée et on ne s’attendait pas à voir une telle merveille en possession de la nuna. La jeune femme était décidément pleine de ressource.

Les deux guerrières n’avaient pas encore été remarquées par les bandits qui s’acharnaient sur Toklo et Ataneqi. Comme il aurait été dommage de se priver de l’effet de surprise, Myträ passa son fusil en bandoulière et dégaina le couteau en se rapprochant discrètement d’un bandit à couvert derrière un gros rocher. Malheureusement, il n’entendit pas la daënare qui arrivait dans son dos et lui ouvrit proprement la gorge en lui rejetant encore une fois la tête en arrière pour accélérer sa mort. Elle relâcha alors le corps sans vie dans la neige qu’il venait de souiller et s’installa à sa place.

De la même manière, Sakari exécuta un autre bandit, mais ce fut les dernières victimes gratuites qui leurs fut offertes. En effet, les ennemis avaient fini par voir les femmes qui avaient infiltrées leurs positions. C’était donc le bon moment pour dégainer le Vulcain. Myträ posa alors un genou à terre et visa. Le tir était facile. Sa cible restait à couvert la plupart du temps, ne décochant que sporadiquement des flèches vers Toklo ou Wawi.

Myträ pressa alors la gâchette et se fut comme un coup de tonnerre qui s’abattait sur la lande glacée, sonnant le glas du malfrat qui s’écroula comme foudroyé. Elle en repéra un autre qui voulut lui décocher une flèche mais le fusil était plus rapide. Une balle se logea diligemment dans son crâne avant que la corde ne soit tendue.

La blonde profita de son avantage pour consulter Sakari du regard. De son côté, elle ne comptait pas repartir au corps à corps, préférant couvrir sa partenaire. Manier ce petit bijou était beaucoup trop efficace pour avoir envie de repasser au couteau.

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