La paix à tout prix [Terminé]

Mais quelle folie est-ce là ?! Un vent de terreur et de violence souffle sur la ville, rendant complètement paranoïaque les habitants de la cité. A peine le soleil déclinant, Allys vit portes et volets se fermer à double tours. Les habitants avaient des mines moroses, certains perdus et tristes, d'autres semblaient nerveux et inquiets. Que se passait-il ici ?

La jeune femme comprit soudain l'horreur de la situation alors que la nuit tombait. Au détour d'une ruelle, elle entendu de grands fracas, ainsi que des voix aux tons haineux. Ne suivant que son instinct, elle se précipita vers le bruit. Elle ne tarda pas à découvrir la raison des peurs irrationnelles des habitants... Certains, eux, étaient fous de rage.

Elle aperçut une petite dizaine de personnes, occupées à tenter de démolir les portes des habitations ou de saccager tout ce qui leur passait sous la main. Mais son regard s'attarda sur une scène en particulier. De l'une des maisons pillées, un homme tirait par les cheveux une femme, la traînant à même le sol pour la jeter dans la rue, vers quelques habitants aux regards sinistres. La jeune femme pleurait, les suppliants de la laisser tranquille.

« Tu ne mérites pas de pitié sale sorcière ! »
« Elle mérite la mort... elle va payer, comme les autres ! »
« On veut pas de toi ici, crève ! »

Allys occulta tout le reste. Elle n'entendit même pas les autres habitants rejoindre le groupe pour apostropher la pauvre dame, elle avait le regard rivé sur l'ordure qui l'avait traitée de la sorte. Ses pas suivirent et, sans qu'elle ne s'en soit rendue compte, elle était déjà sur lui.

« Lâchez-la. »

L'homme leva les yeux vers Allys, surprit de se faire interrompre dans son mouvement. Il se tourna vers elle avec un sourire mauvais et insolent.

« Mêle-toi de tes affaires l'albinos. »
« Vous ne devriez pas me provoquer ainsi. Lâchez-là, je ne vous le redemanderai pas une troisième fois... »

Le ton était dangereux. Allys n'était plus qu'une boule de nerf prête à exploser. Ce qu'ils voulaient faire de cette femme... Lui causer du mal, vouloir sa mort... qu'elle soit my'tran ou non, c'était intolérable. Les daënars n'étaient-ils donc que des brutes sans âme ? Il était hors de questions que la jeune femme... voir jeune fille tant ses traits semblaient poupins, subissent les mêmes tourments que la mécanicienne.

« Et sinon quoi hein ? »
« Passe ton chemins sinon on va s'occuper de toi aussi... »

Le coup partit tout seul.

Elle venait d'envoyer l'homme au sol après lui avoir assené un coup de poing au visage de sa main de métal. Le choc brutal de la force qu'elle y mit et le matériau combinés avait fait un sacré bon mélange. Sonné, le nez en sang, il était pour le moment hors d'état de nuire.

Ce n'était pas le cas des autres, qui ne tarderaient pas à fondre sur la jeune fille au sol. Allys était seule, eux, bien plus. Et elle ne voulait pas les combattre à l'épée. Seulement qu'ils laissent cette pauvre femme tranquille. Qu'ils partent.

Elle s'interposa entre le groupe et la my'tran, comme un bouclier.

« Partez. Ces gens ne vous ont rien fait. Allez-vous en avant de subir les conséquences d'une colère qui n'a pas lieu d'être. »

Autant raisonner avec un mogoï, elle aurait plus de succès. C'est dire à quel point elle avait de l'influence sur ces gens. Ils s'avancèrent dangereusement d'elle. Perdant son sang-froid, elle rugit.

« Vous êtes stupides ! Vous croyez vraiment que de piller, saccager, blesser et tuer des gens va vous apporter de la paix ? Du réconfort ? Ou de la justice ? Bande de culs d'erch ! Tout ce que vous faites là ne sert à rien ! Vous voulez vous venger ? Ils vont vous rendre la pareille et ça n'aura plus de fin ! Vous voulez vous défouler ? Faites-le sur quelqu'un à votre mesure ! Par sur des gamines apeurées ! Mais allez-y, continuez donc, vous êtes plus forts en groupe n'est-ce pas ? Seuls vous pleurez dans les jupons de vos mères. Vous êtes lâches.

Je vous attend. Si vous voulez vous acharner sur des my'trans vous allez me passer sur le corps ! Mais moi je vous rendrais les coups et ça jusqu'au bout. »

Que ce soit de ses mots ou de ses poings, seule, elle n'y parviendrait pas c'était certain.

"...♪ Good god it's the changing of the seasons ♪..."

C'était une chanson que j'avais entendu quelque part, mais impossible de savoir où... Rah rien que ça, ça réussissais à me mettre en rogne... Je veux dire une simple chanson ne devait pas être si compliquée à identifier non ?
Je marchais tranquillement dans les rues de la ville peu absorbé par l'agitation qui semblait gagner la ville. Après tout si trois connards avaient décidé de claquer leurs volets, je n'allais pas monter jusqu'à chez eux pour les engueuler. J'étais certes un connard, mais il m'arrivait parfois d'avoir envie de simplement passer dans une rue sans chercher à tuer quelqu'un.
Et alors que je marchais, cherchant désespérément à retrouver les paroles, j'entendis des cris, et le bruit d'une porte qu'un défonce.
Ah tout ça, ça me rappelait l'armée. Les raids nocturnes où nous défoncions des protes pour entraîner les habitants dehors, tout ça pour les exécuter à l’aube. Enfin, c'était un temps révolu depuis longtemps ! Et puis je me voyais mal enfoncer la porte d'un honnête citoyen.

"...♪ I feel so raped so follow me now♪..."

Ah oui voilà c'était ça la suite ! Mais bon je n'avais que deux phrases... Je sortis une cigarette, l’allumant avec distraction avant de continuer dans la rue le nez en l'air. Il faisait encore relativement bon ici, je sentais juste une petite brise qui venait faire voleter ma queue-de-cheval, et faisant onduler les mèches blondes des deux côtés de mon crâne.
C'était le genre de temps pendant lequel on devait manger joyeusement, cuisant de la viande au feu de bois. Mais non au lieu de ça les habitants de cette foutue ville semblaient tous déterminés à faire la gueule.

"♪...Just fake it...♪"

Alors même que la suite me revenais, je me heurtais au dos de quelqu'un, écrasant au passage ma cigarette sur son dos. J'étais déjà suffisamment énervé pour ne pas avoir envie de retenir mes insultes habituelles si bien que c'est avec un naturel déconcertant pour le commun des morte que je lançais.

-Dit donc pauvre connard ! Ça te dirais de pas rester au milieu de la rue comme un putain de lampadaire !

C'était déjà assez frustrant de perdre une clope comme ça, et voilà que l'homme en question se retournais vers moi, avec un air passablement énervé. Ce dernier se faisant me dévoiler une scène que j'avais souvent vue, étant moi-même à la place de cet homme.
Une femme quelque peu mal en point était au sol, entouré de personnes qui ne semblaient pas lui vouloir que du bien. Avant même que l'homme ai pu ouvrir la bouche, je lançais sur un ton plein d'ironie, affichant mon sourire le plus méprisant.

-Oh un petit règlement de comptes en famille ! Il vous faut être si nombreux pour une femme seule, à croire que toutes vos paires de couilles elle les a sur elle !

Je m’apprêtais presque à partir, laissant ces joyeusetés à des gens bien plus stupides que moi quand je remarquais quelque chose qui frappa mon regard

-Écoute mon petit gars, je te conseille de...

Je lui expédiais un direct dans la glotte le faisant s’effondrer au sol en gargouillant quelque chose d'inaudible, je détestais être interrompu

-Silence ducon

Le petit détails devint rapidement plus grand, un des hommes était à terre, le nez en sang, mais là encore, ce n'était pas ce truc qui m'avait interpellé, mais plutôt la jeune femme qui se tenait devant lui. Cette chevelure, ce petit air rebelle... Je le connaissais, le connaissais si bien que mon cœur fit un bond : c'était Allys
Ok ! Je serais parti dans beaucoup d'autre occasions, mais la laisser avec ces mecs était hors de questions. Aussi douée ma furie était-elle, elle ne risquait pas de se débrouiller toute seule.
Je ne dis pas un mot, m'approchant d'un des homme avant de lui mettre un coup de genou phénoménal dans les parties génital, sa voix partis dans les aiguë accompagné de mon petit rire moqueur.

-C'est amusant à quel point on se retrouve dans des situations pas possible hein ?

Je lui fis un petit clin d’œil avant de me tourner faces aux hommes devant moi. J'étais plutôt tenté à l'idée de sortir mon pistolet et d'en refroidir quelques-uns. Mais j'avais comme dans l'idée que ça attirerais la garde.
Le seul souci venait d'autre chose: mêmes à deux nous ne pourrions pas "convaincre" ces messieurs de se calmer. Oh on pouvait essayer de les calmer mais je n'étais pas un très bon orateur

Et une nouvelle journée commençait en Vereist. J'allais bientôt repartir mais pour le moment, j'étais encore au calme dans la chambre que j'avais loué dans la capitale. Il me fallait du calme, et du repos après l'expédition de Klumpen. Je ne m'en étais toujours pas remise. Toute cette violence, toutes ces anomalies. Et le Gouvernement qui fermait les yeux... Je me demandais vraiment à quoi ils pensaient ceux-là. Rien qu'au fric visiblement.

La nuit tombait doucement sur la nuit et pour ma dernière soirée, je voulais sortir. J'étouffais dans cette taverne. Malgré la qualité de leurs services, je préférai partir me balader. Il faisait frais et je me surpris à boutonner ma cape. Je marchais dans les ruelles pendant dix minutes, flanant de boutiques en boutiques lorsque j'entendis des cris. Que se passait-il encore ? On ne pouvait pas être tranquille dix minutes dans ce pays ?! Je ne m'attardai pas et continuai ma route. Au bout d'un certain moment et grâce à mon légendaire sens de l'orientation, je m'aperçus vite qu'au lieu de fuir les problèmes, j'étais allée pile dans la gueule du mogoï. Tout autour de moi, je voyais de la violence mais c'était surtout un attroupement d'hommes écumant de haine qui m'interpella.

Je ne pouvais pas voir ce qu'il se passait, j'étais trop petite face à ces géants du nord même si ma taille était tout à fait respectable. Je ne comprenais pas le pourquoi du comment et j'allais m'en aller lorsque j'entendis que c'était une pauvre femme My'trän qui se trouvait au centre du cercle. Ces hommes s'en prenait à une femme seule et sans défense ! Quelle bande de lâches ! Je bouillais de rage. Ca m'a toujours énervée de voir des femmes qui n'avaient rien demandé à personne se faire battre ou se retrouver dans une situation peu favorable à cause de l'idiotie de certains hommes. Même si les my'trans nous avait fait du mal, nous leur en avions fait aussi mais là n'était pas la cause de ma colère. J'étais surtout en rage à cause du traitement de cette femme. Personne ne devait se retrouver un jour acculé de la sorte. J'avais déjà fait les frais de cette situation et je m'étais jurée d'aider les personnes se retrouvant un comme cela.

A force de coups de coude, je parvins enfin là où je voulais être : au centre du cercle. Je m'aperçus que je n'étais pas la seule à voir la stupidité de la situation. Deux autres personnes s'étaient placées devant la femme, faisant de leur corps un bouclier. Et le bouclier semblait à la fois solide et compétant vu l'homme en sang qui se trouvait par terre. Je n'eus pas de pitié pour lui : il l'avait surement cherché. Avec stupeur, je m'aperçus que Hex était là aussi. Je n'aurais pas aimé me battre contre lui. Tout le monde savait que contre un soldat de fer, personne ne faisait vraiment le poids. Je ne connaissais pas la femme qui l'accompagnait mais son air déterminé m'indiqua qu'elle était prête à tout pour sauver la my'trän. Je souris à celle-ci et l'aida à se relever. La pauvre, elle semblait encore plus jeune vu de près. Ca raviva la flamme contenue dans mon coeur. S'en prendre à une adolescente... Les gens s'abaissaient bien bas.

Je me tournai vers les hommes et leur lançai, plein de fougue :


Je fus coupée par un homme barbu qui semblait plus se servir de ses mains que de sa tête :


L'idiotie semblait être un trait de caractère principal chez cet homme. Je soupirai, déçue et assourdie par tant de bêtises venant d'un daënar. La guerre avait certes marquée les esprits mais les deux camps avait souffert.


Je ne suis pas sûre que les provoquer fut une bonne idée mais les paroles étaient lâchées. Je ne sortis pas mon poignard, pour ne pas envenimer la situation mais je sentais la tension alimenter mon corps. J'étais sur le qui-vive, prête à bondir mais il fallait d'abord faire sortir cette pauvre fille. J'espérai qu'on n'en viendrait pas au main car nous n'étions que trois. Et encore, je n'étais pas du tout une guerrière, misant tout sur mon poignard apparent pour ne pas me faire embêter dans la rue.

Ma convalescence avait duré un bon mois. Pour me faire oublié, j’étais allée dans une cité où je n’avais pas encore mis les pieds : Ankar. Encore un endroit gelé. Le temps m’avait paru long, très long. Forcément puisque je n’avais rien à faire. Enfin, rien concernant mes activités régulières de voleuse.  Du coup, même si je suis de retour en ville juste pour régler mes comptes, je ne peux m’empêcher de passer par les toits et regarder si je n’ai pas éventuellement une petite opportunité. Mais rien n’est ouvert. Je sens un malaise s’insinuer en moi, cette situation m’en rappelle une autre qui s’est déroulé plus dans le sud il y a quelques mois. Rien n’est encore en feu, pas de foule dans les rues. Pour l’instant du moins. Je sais que je ne devrais pas me diriger vers l’altercation que je perçois non loin de là. Cependant, la curiosité est trop forte : la folie meurtrière se serait-elle propagée jusqu’au Nord ? À ses habitants si respectueux des règles en apparence ? Peut-être qu’ils lâcheraient un peu la bribe au voleur au passage ?! Enfin, pas vraiment intéressant si on ne peut pas sortir de nuit sans risque de se faire tuer arbitrairement.

Je regarde la situation en contrebas sans que personne ne prête attention à moi. Un groupe d’une dizaine de personne fait face à un autre plus petit n’en contenant que quatre dont trois femmes et un homme. Et je reconnais l’une d’entre elle à sa tignasse blanche et ses propos de défenseuse de la justice. Le même type d’argument qu’elle avait opposé pour ne pas jeter un type à l’égout sauf que là, ça semble plus approprié. Surtout que son interlocuteur donne de l’eau à son moulin avec ses inepties. Même moi je m’en rends compte, c’est pour dire ! Cependant le type est au-delà de la raison, il n’écoute plus que sa rage. Il ne ferait pas parti de ce groupe autrement.

« Qu’est-ce qu’une jeunette comme toi y connais ! Laisser cette femme libre pour reproduire leur espèce maudite est aussi un crime. Ses enfants seront ces guerriers qui viendront nous tuer »

Je vois certains hocher la tête frénétiquement. Je suppose que d’autres donnent leur approbation mais comme contrairement au balourd de tête ils ne crient pas, je ne les perçois pas. Par contre, je le vois très bien s’approcher de mon apprenti de quelques jours. Ça ne me plaît pas, pas plus que leur raisonnement débile qui risque à force de nous plonger dans un chaos dangereux et peu bénéfique. Pour le calmer, je lui lance un couteau dans le pied avec un risque raisonnable qui se plante dans sa tête vide. Faudra que July s’en accommode, je ne suis pas du type à parlementer. Alors que les regards se tournent vers ma position et que le barbu cri tout en tentant de libérer son pied, je les apostrophe.

« J’en ai d’autres en réserves si vous voulez continuer à jouer ! »

Peut-être qu’ils commenceront enfin à réfléchir ! Ou du moins que leurs tripes seront suffisamment secouées pour qu’ils se décident à battre en retraite.

Aussi inattendu que ce soit, la situation évolua lorsque l'ingénieure entendu l'un des agresseurs couiner comme un chat dont on écrasait la queue. Ce qui n'était pas tout à fait différent... Le regard d'Allys suivit le mouvement. Une tignasse blonde, un sourire espiègle et ton ton enjoué. Il ne pouvait s'agir que d'Hex. Aussitôt le visage de la jeune femme s'illumina. Les choses tournaient en faveur de la my'tranne finalement. Même si les arguments que ces deux-là avanceraient risquaient de se révéler un peu trop physiques.

C'est alors qu'une seconde personne se joignit à la mécanicienne. Une petite femme à la chevelure aussi argentée que la femme du désert se mit à jouer des coudes pour se placer au centre du cercle. La jeune femme se dirigea aussitôt vers la victime, l'expression bouleversée. Allys la laissa passer, agréablement surprise de voir que tout le monde n'était pas à jeter sur ce continent de malheur. La jeune my'tranne se redressa sur ses jambes tremblantes mais plus assurées à présent.

« M... Merci. »

Ce n'était qu'un bafouillement, mais son regard transpirait tant l'espoir et la reconnaissance qu'elle semblait s'être trouvé des nouveaux dieux à vénérer. En tout cas, pour l'heure, elle ne comptait pas quitter ses boucliers humains.

L'échange qui suivit intéressa bien plus la métisse. L'inconnue s'était indignée à son tour et avait reçue pour réponse une imbécillité affligeante. Ce sur quoi, la belle rebondit avec un langage et un raisonnement qui plaisait à Allys tant il était similaire au sien. A vrai dire, elle eut même un sourire étonné en constatant qu'elles avaient la même façon d'insulter les autres. Mais il disparu rapidement. Ce n'était pas vraiment le moment de s'égarer. L'opposition était loin d'être convaincue par le petit groupe ainsi formé.

« Qu’est-ce qu’une jeunette comme toi y connais ! Laisser cette femme libre pour reproduire leur espèce maudite est aussi un crime. Ses enfants seront ces guerriers qui viendront nous tuer »

C'était d'une débilité sans nom. Allys se passa la main sur le visage en soupirant de lassitude. Elle avait bien envie de répliquer mais pour des cas pareils elle ne devait pas laisser son impulsivité prendre le dessus. Pourtant il fallait bien réagir vite, l'individu s'avançait d'un bon pas vers la défense et il ouvrirait les hostilités en premier si rien ne se passait. A moins que... Non. Sifflant dans les airs, un poignard surgit de nulle part pour venir se planter dans le pied du bonhomme. Il se mit à hurler mais c'est bien vers la nouvelle arrivante que les regards se tournèrent.

« J’en ai d’autres en réserves si vous voulez continuer à jouer ! »

Allys laissa échapper un sourire amusé. Ça c'était de l'entrée soignée. D'autant plus qu'à présent le groupe pouvait rivaliser. Peut être avait-elle le droit finalement d'oser les intimider ? Avec un peu de jugeote, s'il leur en restait, ils prendraient jambes à leur cou. Sortant légèrement son sabre de son étui, elle appuya les paroles de la nouvelle.

«  Croyez-moi, si vous voulez jouer avec nous vous êtes mal engagés. Contrairement à la plupart d'entre vous, nous sommes armés et formés au combat. Vous allez devoir nous écouter si vous ne voulez pas mordre la poussière... Quoi que ça serait regrettable, j'en meurs d'envie. »

« J'en croies pas un mot. Pis même si vous avez la chance de gagner cette fois-ci on reviendra finir le travail. »
« Ouais, exactement, bien dit ! On est trop nombreux de tout manière. »
« On vous laissera pas protéger ces monstres ! Ils méritent la mort ! »

Allys s'avança vers la foule, déterminée a refaire un portrait comme promis.

« Alors vous avez choisi la manière forte ? Très bien, toi là, viens donc me redire le fond de ta pensée en face. »

La blonde avait choisi sa cible mais comme celle-ci n'osait pas s'avancer, préférant la confortable sécurité de la foule, ce fut la jeune femme qui vient à sa rencontre, bousculant sans ménagement les quelques spectateurs qui lui faisaient l'offense de se tenir devant lui. Avec poigne elle l'attrapa par le col avant de le jeter au cœur du cercle. Le pointant de sa lame, elle le toisa avec mépris.

« Si on suit ton raisonnement les étrangers sont des monstres et méritent la mort ? Tu es pour moi un parfait étranger et je n'ai rien en commun ni avec toi ni avec cette jeune fille. Alors dis-moi pourquoi devrais-je t'épargner plus que la My'tranne ? »
« Elle est dangereuse avec sa magie, c'est une créature du diable, moi non ! »
« Abruti, nous avons les mêmes origines, elle n'a de différence que sa culture et ses croyances. Sérieusement, tu pense que c'est en massacrant des humains par la simple explication qu'ils sont différents va régler tes problèmes ? Tu vas juste devenir un putain de monstre. Elle n'a pas un seul instant usé de cette magie dont vous avez si peur. Alors non, elle n'a pas tué des milliers d'entre vous, c'est une gamine. Ses enfants seront des guerriers ? Seulement si vous les poussez à vouloir se protéger de vous ! »

Ça allait très vite partir en couille, et probablement à un niveau rarement atteins… Une bande de civils en colère contre quelques personnes réfléchies. Enfin réfléchies… je me foutais royalement de qui pouvait être la personne derrière moi, mage ou pas mage, mais si Allys avait décidée de la défendre, je comptais bien le faire avec elle.
Mais parmi tout ce qu’ils disaient, un petit détail commençait vraiment à me taper sur le système, depuis le début ils avançaient leurs grand argument de défendre le futur du pays, j’en repoussais un d’un grand coup de botte dans l’estomac, crachant presque mes paroles.

-C’est amusant ça, je ne vois pas le moindre d’entre vous dans l’armée pour défendre notre pays, même pas un milicien, ils sont ou vos grand discours alors ? Vous êtes déjà monté au front peut être ? Vous savez ce que c’est au juste de mettre sa vie en jeu pour Daenastre ?

Je les fixais un par un les yeux remplis du même dégout que quand je regardais des Mytrans en arme. Du dégout mais aussi du dépit, ces idiots ne savaient même pas ce qu’ils faisaient, en fait on aurait surtout dit un conglomérat d’ivrogne qui s’était trouvé une cible à molester.

-Si vous tenez tant que ça à tuer des mages, les bureaux de recrutement sont ouvert tous les jours, là dans ce cas vous pourrez vous faire plaisir pour peu qu’un tier d’entre vous passe la première journée.

Je laissais un petit moment avant de reprendre, frappant dans mes mains avec amusement

-Oh mais je sais ! C’est plus facile de s’en prendre à une gamine innocente plutôt qu’à un mage en combat hein ? On a peur ? C’est mignon…

Un homme s’avança vers nous et eu le bonheur de recevoir une lame dans le pied ce qui ne manqua pas de me faire tourner la tête découvrant une jeune femme perché sur un toit.
Maintenant que le premier sang avait été versé la situation risquait de s’envenimer encore plus rapidement, la foule aimait le sang et je voyais déjà certains d’entre eux grogner.
Je ne fis pas dans la délicatesse d’Allys, tirant ma lame de combat en faisant crisser le métal contre son étuis dans un geste aussi lent que menaçant.

-On ne vous laissera pas protéger ces monstres ! Ils méritent la mort !

Je pris l’homme par gorge le ramenant vers moi sans grande délicatesse, le collant presque à moi.

-Et tu vas faire quoi au juste ? À part mourir bêtement pour une cause à laquelle tu ne crois pas ?

Je lui mis la lame sous la gorge, apercevant déjà ses sphincters se relâcher. C’était prodigieusement frustrant de voir que dans leurs groupes ils faisaient les fiers mais tirés de là un par un ils finissaient par se dégonfler.

-Et qui est censé décider qui est le plus apte à vivre ou à mourir ? Toi peut être ? Nous avons inventé ce qu’on appelle la loi, ça te dit quelque chose ? Et je n’ai pas encore lu qu’avoir des pouvoirs était contre la loi.

Je le repoussais dans la foule les narines agressées par l’odeur d’urine qui se dégageait de lui.

-Vous voyez, vous êtes tous aussi lâche les uns que les autres, je suis sûr que pas un seul d’entre vous n’arriverais à pointer une arme sur un mage réellement dangereux. Dites-moi, ça vous fait plaisir de vous en prendre à elle ? Votre petit égo est-il satisfait ? Ou il vous en faut plus ?

Même si je n’appréciais pas les mytrans, je ne pouvais qu’être d’accord avec Allys, essayer de faire quoi que ce soit contre eux risquait d’avoir des répercussions bien trop négatives. Non mieux valait privilégier la paix plutôt qu’une guerre qui serait aussi violente que stérile.
Les mages n’arriveraient jamais à poser le pied en Daenastre et nous ne pourrions pas tenir Mytra très longtemps.
La seule option viable était de jouer la diplomatie et si possible de les infiltrer par l’intérieur. J’étais arrivé à cette constatation après avoir regardé beaucoup d’archives. Les mages avaient été décimés lors de la précédente guerre, par les canons et les fusils, et notre technologie avait encore évoluée, mais le succès d’une guerre était autant dans les batailles que dans ce qu’on en faisait. Et si les armées de fer écrasaient les forces Mytrannes, il était difficile de maintenir une population dans la soumission quand cette dernière était dotée de pouvoirs magiques.
Si une solution existait c’était l’éradication entière des Mytrans et pour initier un tel procédé, il faudrait bien plus qu’une simple armée…

J’observais donc Allys défendre la jeune femme avec beaucoup plus de conviction que moi, car ma principale conviction, c’était elle avant tout. Inutile de dire que le premier qui la toucherait risquait beaucoup plus qu’un simple petit coup d’épée.
Ma main se porta presque involontairement à l’étui fixé à ma ceinture, recourir aux armes à feu était une limite dangereuse qu’il valait mieux éviter franchir, cela aurait signer le passage à une toute autre altercation, une escalade du conflit qui ne manquerai pas de se terminer dans un grand bain de sang.
La vie d’une seule personne valait-elle vraiment autant ? Difficile à dire surtout quand cette dernière était d’une nation ennemie, mais cela me dépassait quelque peu et mes nouvelles camarades allaient devoir trancher cette question pour moi.

Mon avis était définitif et totalement fixé : les agresseurs de la jeune my'trän qui tremblait à côté de moi avaient réellement aucune once de sagesse en eux. Au lieu de se dissiper comme la brume au soleil, ils restaient plantés devant nous, menaçants et hurlant des idioties à n'en plus finir. J'avais honte pour eux, leurs propos n'étaient pas dignes des daënars. Comment s'étonner ensuite que la paix vacille à ce point et qu'on paraisse si rustres ?

Le débat fut promptement interrompu par une jeune femme que je reconnus avec surprise : Gwen se joignait à la partie. Je n'aurais jamais pensé la retrouver là, décidément aujourd'hui était un jour de réunion. Elle transperça le pied d'un opposant avec son couteau, m'arrachant un regard creux en direction du trou béant de la victime. Après tout, il l'avait cherché. Cela ne calma pourtant aucunement la foule, au contraire, leurs propos se firent plus virulents encore.


Il ne fallait pas qu'elle montre sa peur, ou ils la déchiqueraient. Elle était en sécurité maintenant, je n'avais aucun doute sur le fait que Gwen, Hex et probablement la compagne de celui-ci, allaient tous la défendre. Pourquoi cette jeune fille en particulier ? Je ne connaissais pas l'avis des autres mais en ce qui me concernait, elle me rappelait la jeune moi, innocente et fragile. Au lieu de continuer ma route, je m'étais arrêtée, faisant ce que j'aurais aimé que quelqu'un fasse pour moi dans le passé.

Le groupe d'homme s'était rapproché de nous, refermant l'étau qui nous bloquait. Plus d'issues, plus de fuite possible. La tension s'était encore accrue et c'est en dévisageant les visages en colère et hargneux de nos opposants que je sus que cette conversation ne pouvait se finir qu'en bagarre générale. Avec peu de chances de réussir de notre côté. Je commençais à regretter de m'être engager dans une telle entreprise mais en voyant la my'träne déglutir péniblement et à deux doigts de s'évanouir, ma colère se raviva d'elle-même.


J'avais envie de lui cracher à la figure mais mes crachat n'allaient pas si loin malheureusement. Il l'aurait pourtant bien mérité.


Avec un cri de rage, il s'avança, entrainant avec lui tous ses joyeux camarades. Je sortis précipitamment mon couteau, prête à m'en servir. J'étais loin du niveau de Gwen même si je n'avais pas arrêté de m'entrainer depuis notre précédente rencontre. Je préférais quand même laisser la première vague à mon maître et à Hex, que je savais être un soldat doué. Concernant la jeune fille à la chevelure de neige, j'imaginais qu'elle ne devait pas se débrouiller trop mal non plus. Je reculais, protégeant la my'träne si quelqu'un arrivait à passer la barrière de mes trois acolytes.


Elle était certes dans un état déplorable mais un peu d'aide ne se refusait pas. Surtout quand les adversaires étaient plus nombreux et plus forts. Un homme passa la barrière et fus directement accueilli par mon couteau. Il avait atterrit dans son épaule, pas du tout là où je visais, lui arrachant un grognement de douleur et de surprise. Et oui, les femmes peuvent mordre et blesser. Il s'écrasa au sol, après que je l'ai bousculé en récupérant mon objet, Il ne protesta plus alors que j'étais éclaboussée de son sang. La bagarre faisait rage de tous les côtés.

Bien sûr ma dague n’a pas apaisée les esprits. Je n’y escomptais pas trop, pas avec une petit foule en colère. La bêtise est très contagieuse en ces moments. D’ailleurs les paroles qui me parviennent semblent le confirmer ! L’inconnue aux cheveux blancs à l’air de vouloir les raisonner à sa posture, à ses gestes, mais c’est peine perdu dans ces situations seules les armes pouvaient faire quelque chose.  Même l’homme à l’air d’essayer de parlementer, certes de façon plus agressive...

Tout tombe à l’eau après que July s’en soit mêlée. Ou alors c’est juste le point de tension qui craque de son côté, allez savoir. En tout cas, je suis fière de voir qu’elle lui plante un couteau dans l’épaule. Elle a bien dû poursuivre l’entraînement après notre séparation ! Après ça bien sûr, je suis trop occupée à planter les miens dans la foule en colère pour observer ses faits et gestes. Trois couteaux viennent trouver leur place dans les poitrines ou les gorges de ces gueulards. Pas forcément ceux de la première ligne, j’ai beau être douée je ne fais pas de miracle. Ne pas toucher les amis de July en train de combattre aurait été impossible ! Je garde le dernier pour plus tard, en cas de besoin. Le fait de doubler ma réserve suite au vol avec Sakari se révèle être une très bonne chose ! Une autre est que ces péquenauds ne soient pas armés de couteaux, ou en tout cas ils ne savent pas les lancer,  ou  de pistolet ! Je suis tranquille sur mon perchoir. Je n’ai plus rien à faire que d’observer.

C’est à ce moment là seulement que je remarque qu’un type a les vêtements en feu. Je ne saurais dire quand ça a commencé, et les autres non plus à mon avis, même la victime en question. La scène semble se figer un instant alors qu’il hurle de panique et cristallise l’intention sur lui. Il a beau se rouler par terre, le feu ne s’éteint pas. Une lampe humaine faisant concurence à l'éclairage public.  Il faut quelques secondes ou minutes avant que l’un de ses camarades encore debout réagissent :

« C’est la mage ! Il faut la tuer avant que ça ne se répande ! Vous voyez vous aussi qu’il faut le faire maintenant ! »

Le type dont l’épaule a été trouée plus tôt par les soins de la bijoutière prend en partie les défenseurs de la jeune my’trane, sa voix cassée par la douleur et suppliante, la main sur sa blessure et avec de grosse difficulté pour se maintenir debout. Moi-même du haut de mon perchoir je ne me sens pas concernée par ces inepties. Il aura beau hurler ce qu’il veut, il ne me fera pas croire que tuer la my’trane réglera le conflit présent ! Enfin, je suppose qu’il va être temps de descendre. Ils ne sont plus que trois encore debout et en état. Je sors ma corde mon sac fixe le grappin et me prépare à descendre. Le tout en surveillant les mouvements en-dessous.

Allys pensa un instant que leur groupe improvisé parviendrait à raisonner ces habitants en colère. Un instant. Ça allait partir en eau de boudin dans peu de temps. Pourtant, Hex avait prit la décision de soutenir sa compagne, toujours accompagné de son franc-parlé habituel. La jeune femme savait qu'il n'était pas dans sa nature de prendre la défense d'une mage pourtant il le fit avec un aplomb indéniable.

Seulement... L'agressivité palpable des hommes en face et les réactions tout aussi brutales des défenseurs envenimèrent rapidement les choses. Il y avait des armes sorties, des poignards lancés à la volée et de lourds avertissements et provocations des deux parties. La tension était à son maximum.

C'était sans compter sur la victime elle-même. Poussée par les encouragements de la gentille July, la jeune fille s'était redressée sur ses pieds, gagnant un tant soit peu d'assurance. Ne pas montrer sa peur était chose difficile après les saccages causé dans son quartier, dans les maisons, et les sévices causés à ses proches et la menace de mort qui planait à présent sur sa tête. Mais elle n'était pas seule, aussi étrange que lui paraisse la situation, quatre daënars prenaient sa défense.

« Assez jouer, donnez nous la fille, qu'elle ait la sanction qu'elle mérite.  »
« Il faudra nous passer sur le corps ! »

C'est à cet instant que les choses ont dégénéré. Les habitants se sont rués vers le petit groupe, hurlant de rage. La jeune mage eut le réflexe de se cacher derrière la plus douce de ses sauveurs alors que Allys et les autres se mirent immédiatement sur la défensive. L'ingénieure avait brandit sur sabre en avant et s'était placée aux côtés du soldat. Puisque c'est ce qu'ils avaient choisi, qu'ils viennent donc.

Les agresseurs ne possédaient pas d'armes au sens propre du terme mais ils n'étaient pas non plus sans défenses puisqu'ils s'étaient fabriqué leurs propres armes à grand renforts de barres de métal, quelques couteaux de fortunes et autres éléments tranchants qu'ils avaient pu se procurer pendant leurs saccages précédents. Ils n'hésitèrent pas à se jeter sur Allys et ses comparses dans le but évident de tenter de les tuer. Manque de chance pour eux, il y avait des soldats plus aguerris en face et deux d'entre eux frappaient à mort. Allys, Quant à elle faisait preuve d'adresse mais elle se refusait encore à verser le sang. Faisant preuve de self-contrôle, elle se contentait de repousser ou mettre hors d'état de nuire ceux qui s'approchaient d'elle.

A l'arrière de la mêlée, July interpella la jeune mage, appelant en elle le peu de courage qui lui restait. Pétrifiée, la jeune fille eut un hoquet de stupeur lorsque le plus véhément des hommes tenta d'agresser July mais c'était sans compter son les réflexes de la daënare. Devant l'urgence de la situation, la magicienne se redressa.

« Je vais vous aider. Je vous en prie, n'ayez pas peur de moi... »

Se laissant aller, la jeune fille se concentra afin s’embrasa ses mains d'un feu ardent qu'elle jeta alors dans la foule hostile. Tel un bûché vivant, l'un des habitant se retrouva à brûler des pieds à la tête en une poignée de secondes. Tous les regards se rivèrent alors sur le pauvre homme à moitié carbonisé déjà mais passé la surprise, l'homme à l'épaule trouée tenta à nouveau de cracher son venin.

« C’est la mage ! Il faut la tuer avant que ça ne se répande ! Vous voyez vous aussi qu’il faut le faire maintenant ! »

Allys se tourna vers lui et lui tendit la main. Sûr d'avoir conquis une partie de ses adversaires, il fut fort surprit de se prendre un coup de genoux brutal dans le sternum, suivit d'un second coup qui le mit hors d'état de nuire. Bien loin d'écouter les inepties avancées par l'homme, Allys venait clairement de faire comprendre aux assaillant que le groupe ne se laisserait pas corrompre.

Quelques lâches s'enfuirent à toutes jambes à la vue des premiers décès mais le plus gros de la foule, forts de leur supériorité numérique, avancèrent de manière à resserrer et faire reculer les défenseurs de la jeune mage. Ils espéraient clairement submerger le petit groupe.

Ou les séparer. Allys était dans une impasse. Contrairement à Hex et la lanceuse de couteaux, elle luttait contre ses instincts meurtriers qu'elle savait ne pas maîtriser encore. Quelques hommes le comprirent et profitèrent de cette erreur afin de la tirer à l'écart de ses compagnons. Alors qu'elle était aux prises avec un grand brun à la stature carrée, un autre en profita pour la saisir par derrière et tenter de la maîtriser. En peu de temps, elle se retrouva piégée, dans l'incapacité de se défendre à la fois de face et se libérer de la prise. Dans la panique, elle agita son arme afin de repousser ou au moins tenter de blesser l'un de ses assaillants mais elle senti des mains rugueuses empoigner son cou, la serrant à l'en faire suffoquer. La jeune femme se débattit d'autant plus, parvenant dans sa détresse à blesser celui lui l'étouffait en lui plantant la lame dans sa jambe droite. Il eut un râle de douleur et desserra ses doigts suffisamment pour lui laisser une bouffée d'air. Elle en profita pour balancer son corps en arrière les faisant tout deux tomber... Et enfoncer davantage son arme dans la chair grâce à l'impact au sol.

Par miracle, elle venait de se sortir à moitié d'une situation désastreuse. Et pourtant ce n'était pas terminé. Le second agresseur la saisi par les cheveux, la forçant à se redresser. Et surtout, l'empêchant de récupérer son arme salvatrice.

« Je vais prendre un malin plaisir à te briser la tigresse. »

Fort de sa position, il en profita pour la rouer de coups avec sa matraque improvisée.

C'était un combat de rue vicieux, qui tenait plus d'opération de maintiens de l'ordre qu'aurait apprécié des milices en armures mécaniques. Manque de chance nous n'étions pas très nombreux et à peine mieux équipés que ceux d'en face. Il n'y avait plus grand chose à faire, les choses avaient dépassés le point de non retour. Je serrait donc la lame dans ma main préparant déjà la charge qui allait suivre.
Encore pire que prévue la mage s'en mêla, et j'eus un frissons quand un homme partis en feu, tel une torche humaine en battant des bras.
Ce ne fus que la présence d'Allys qui me retint de dégainer mon arme pour lui tirer une balle dans la tête. La situation était déjà catastrophique et si en plus elle se mettait à leur donner des raisons de la tuer.
En fait pas seulement à eux. J'étais soldat, protéger les gens était une partie intégrante de mon métier, et si auparavant c'était elle la victime, elle était soudainement devenue bien moins faible que ça. Ça et mes réflexes conditionnés me poussaient aussi à m'en prendre à elle et non ces idiots.
Chance pour elle, ils chargèrent avant que j'ai pu résoudre ce dilemme.
Je ne cherchais pas vraiment à faire dans le subtil, accueillant le premier qui passa à ma portée d'un coup latéral de ma lame, lui décollant la tête d'un grand mouvement circulaire qui éclaboussa les suivant.

Nous avions dépassés la simple bataille de rue en fait et je dus esquiver un coup de barre à mine qui vint éclater les pavés à côté de moi.  Ils avaient décidés de ne pas jouer eux non plus.
Ma main se serra autours du manche de l'arme qui décrivit un nouvel arc complexe, tranchant une main qui tenait un pavé, avant de voler trancher un bras qui tomba mollement au sol.
Tout était question de sélection de cible, quelqu'un armé d'un couteau était prioritaire par rapport à quelqu'un avec une barre à mine et ce dernier prenait le pas sur un civil avec rien dans les mains.
L’atmosphère pourtant froide d'habitude se montrait dorénavant étouffante alors que les corps se pressaient les uns contre les autres.
Venait aussi l'odeur du sang et de la sueur accompagnées des bruits habituels de luttes: des cris et des hurlements, parfois accompagnés de jurons colorés.

Mon univers se résumait à trancher, tuer, et passer à l'autre cible, tout en me retenant de sortir mon arme de poing. Quelqu'un d'un peu plus téméraire agrippa mon avant bras et fut récompensé par un poignet tranché net et alors qu'il s'effondrai au sol, il reçut un vicieux coup de botte dans les gencives
Je ne sais pas si ce fut l'instinct ou quelque indice visuel mais quelque chose me fit tourner brusquement la tête, découvrant Allys aux prises avec quelqu'un, ou plutôt quelqu'un tenant la jeune femme par la gorge.

-Je vais prendre un malin plaisir à te briser la tigresse.

Mon sang ne fit qu'un tour alors que la limite que je m'imposait continuellement sauta à cause de cette vision. Abandonnant toute tentative de préserver quelqu'un, je me mis à progresser dans la foule, écartant à grand coup de lame ceux qui se mettaient sur mon chemin, la lame faisait de grands arc de cercle, tranchant des tendons ou des doigts trop baladeurs. La foule était loin d'être calmée pour le moment. Et l'intervention de la mage n'avait qu'aggravée les choses.
Un voile sanglant était tombé devant moi, et en quelques battement de cœur je me retrouvais près du duo, dégainant mon pistolet avant de lui pointer sur le crâne.

-Brise donc ça !

Sans la moindre retenue je lui assénais un violent coup de crosse sur le crâne le faisant tomber à la renverse. Le coup avait été suffisamment violent pour le faire tomber au sol, libérant la jeune femme sa poigne.
Mais alors que je laissais couler mon regard vers elle, un autre s'approcha derrière moi, m’expédiant un coup de poing derrière le crâne, avant de se jeter sur moi.
Son premier cou porta au niveau de l'estomac, manquant presque de me faire hurler. Le second, il le dirigea vers ma tête n'anticipant pas le décalage de cette dernière. Son poing heurta le béton dans un craquement, rapidement suivit d'un coup de pied dans les parties qui l’expédia au sol dans un gargouillement

-Allez approchez bande de bâtard, j'ai largement de quoi m'occuper de vous un par un, par rapport à des mages vous êtes à peine autre chose qu'une nuisance !

Le combat repris de plus belle et sans vraiment m'en rendre compte je pris plus de coup de prévu, et même si ces derniers sonnaient contre mon armure il aurait été optimiste de dire que je m'en sortirais tout seul.

Alors que je me retourne au milieu de ma descente, je remarque qu’il y en a bien plus debout que ce que je pensais. J’ai dû mal jauger les blessures depuis le toit. Ou alors ils font bonnes façades ? En tout cas, l’homme s’en sort bien pour remettre le groupe d’agresseur à sa place. De toute façon, s’en ai fini de leurs attaques insensées, alors que mes pieds touchent le sol les sifflets de la milice retentissent. Ils seront bientôt là ! Il est temps pour moi de prendre la poudre d’escampette, enfin pas avant d’avoir récupéré mes armes... J’en extrait une d’un mort et deux autres au sol sans vraiment m’occuper du groupe hétéroclite. Pas le temps de m’arrêter pour faire la causette. D’ailleurs les citoyens extrémistes l’ont bien compris : ils ont déguerpi laissant derrière morts et blessés. Il y en a bien un ou deux qui sont partis sur une pique bravache mais la plupart ont la tête baissée et le dos courbé.

« Vous devriez partir de là vous aussi, pas sûr que vous ayez envie de discuter pendant des heures avec la milice… Toi aussi July, va avec la fille. Pas la peine de la traumatiser plus. »

Voilà ma petite contribution pour les sortir de la léthargie. Ils feront bien ce qu’ils veulent. Pour ma part, je m’en vais en courant pour m’enfoncer dans une de ces étroites ruelles qui passent entre les maisons collées de la ville. Évidemment, je ne fonce pas du côté des coups de sifflet ni des bruits de voix qui commencent à nous parvenir. Si mon action est aussi légitime que lors du braquage chez Sanaë, je n’ai aucune envie de m’expliquer avec les autorités ou de me faire connaître par les forces de l’ordre.

Bizarrement, je me retrouve vite derrière un des lâches du groupe d’attaquant qui peine à courir. Son regard inquiet lorsqu’il me remarque montre bien qu’il pense que je le poursuis mais je n’ai que faire de lui. C’est fini les toits pour ce soir. Je m’occuperais demain à l’aube de mes affaires et adieu cette ville.

Attrapée vulgairement comme une chose, désarmée et rouée de coups, Allys fini par stopper toute résistance. Elle devint aussi fragile qu'une poupée de chiffon et son regard pourtant si vif semblait désespérément chercher à s'éteindre. Ne pouvant plus rien faire pour se sortir du pétrin dans lequel elle se trouvait, l'ingénieure ferma les yeux, pour ne plus voir le visage de son agresseur. Mais elle ressentait pleinement sa douleur, comme si chaque coup porté avait pour but de réveiller ses vieilles fractures. Il voulait la briser physiquement ? C'est ce qu'elle était déjà... Elle n'était plus qu'un puzzle rapiécé tenant à la seule force de son esprit. Mais sans volonté, elle volerait en éclat bientôt.

A moins que...

« Brise donc ça ! »

Allys rouvrit les yeux, découvrant Hex, le visage déformé par la rage. Avec violence le soldat assomma l'homme qui avait osé touché à la jeune femme. Celle-ci chuta lourdement au sol. Ses mains posées à présent à terre tremblaient tandis qu'elle aspirait enfin de l'air sans contrainte. Ce fut malheureusement insuffisant pour prévenir son amant qu'un autre arrivait. Elle ouvrit la bouche mais aucun son n'en sorti. Les yeux écarquillés, Allys ne pouvait qu'être témoin de la scène. Mais alors qu'elle tentait de se redresser pour vainement lui venir en aide, Hex reprit l'avantage. Et son franc-parlé au passage.

D'autres virent à leur rencontre mais le temps donné par Hex fut salvateur pour Allys, qui parvint finalement à reprendre ses esprits. Malgré qu'elle soit transcendée de douleur, la jeune femme ne tenait pas à mourir ici. Elle récupéra son arme sans douceur de la jambe qui avait momentanément servie de fourreau et accueillit les suivants avec bien moins de douceur et un esprit revanchard particulièrement féroce. Cependant, ils ne faisaient pas le poids à eux deux...

Les choses auraient pu mal tourner si les sifflets de la milice n'avaient pas alors retenti dans la ville. Les habitants ignorèrent royalement leurs victimes pour s'enfuir à toutes jambes.

« Vous devriez partir de là vous aussi, pas sûr que vous ayez envie de discuter pendant des heures avec la milice… Toi aussi July, va avec la fille. Pas la peine de la traumatiser plus. »

L'étrangère aux couteaux avait raison, il ne valait mieux pas rester ici. Même s'ils s'étaient défendus, ils avaient tué, malgré tout et ce qu'il se passait dans la tête des gens dépassait de loin la milice. Ils ne pouvaient rien faire contre une peur collective. C'était incontrôlable et malheureusement il risquait d'y avoir bien d'autres événements de ce genre dans les jours à venir.

Allys hocha la tête et emboîta le pas de la brune. A vrai dire, elle avait utilisé ce prétexte pour fuir autre chose. Ou plutôt quelqu'un. Revoir Hex avait ravivé les souvenirs de leur aventure et son sauvetage héroïque n'avait pas arrangé les choses. Si elle restait, il insisterait pour la soigner et la jeune femme retomberait alors follement amoureuse de lui. Mais la jeune femme n'était pas prête à faire face à ses sentiments, loin de là.

Alors elle s'enfuit.

La pression diminuait lentement, et au bout d'un moment, plus personne ne se tenait devant me laissant un large panorama sur une escouade de la milice qui fonçait vers nous. Enfin vers nous... j'était visiblement l'un des seuls à être encore là, car la mage avait semblait-il pris la fuite avec la jeune femme.
Et voilà que j'étais l'un des derniers avec quelques personnes trop blessées pour s'enfuir.
Oh j'aurai pu rester et leur expliquer calmement, mais les vieux réflexe de soldat qui fuyaient à moitié ivre la police militaire me rattrapèrent et me firent prendre mes jambes à mon cou.
Je me mis donc à courir regrettant de ne pas avoir pu voir Allys plus longtemps. Mais ce regret fut vite oublié quand les sifflets de la milice se rapprochèrent me forçant à courir encore plus vite malgré l'armure me faisant dépasser l'un des meneurs du groupe rival.
Un petit sourire sadique s'afficha sous mon casque alors que d'un élégant croche pied je le fit tomber le laissant en proie et en distraction à la milice, murmurant pour moi même.

-L'important n'est pas de courir vite, simplement de courir plus vite que son voisin.

Je répétais l'opération avec deux civils de plus me ménageant de l'espace pour fuir tranquillement. Mais je tachais de ne pas ralentir l'allure, essayant de gagner le plus vite possible les baraquements dans lesquels j'était censé être. Heureusement la sentinelle me connaissait plutôt bien il suffit donc de lui laisser quelques cigarette pour acheter sa coopération, ainsi le Lieutenant Hekmatyar serait resté bien sagement dans les baraquements en attendant son transport.
Je rentrais épuisé dans ma chambre jetant presque mon casque sur mon lit examinant avec un rictus l'armure qui portait de nouvelles marques, comme quoi cette dernière était plutôt utile malgré ce que pouvait en penser les gens.
Le lit me tendait les bras et je pris le temps d'enlever l’entièreté de ma combinaison avant de m'allonger pour réfléchir.
J'avais plus ou moins sauvée un mage.... Dans la théorie c'était très exactement ce qu'un soldat aurait du faire, mais savoir qu'un soldat de l'UNE avait sauvé un mage, même citoyens de l'UNE avait quelque chose d'étrange. Pas désagréable mais étrange.
En fait je ne m'étais jamais posé la question, détestai-je vraiment ces gens ? Pas vraiment... Je ne faisais que suivre les ordres, et s'ils avaient été privés de leurs pouvoirs cela aurait été pareille. En fait je réalisais soudainement que toutes ces tensions ne rimaient à rien.
Ils étaient certes des sauvages sans culture mais même le plus idiot des sauvages pouvait être élevé à un niveau satisfaisant si quelqu'un de suffisamment patient se penchait sur leurs cas.
Puis tout cela disparut quand le visage d'Allys réapparu dans mon esprit balayant tout pour me faire sourire bêtement, décidément cette fille me rendait fou