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Chroniques d'Irydaë
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 [Terminé] Quand l'incertitude et l'inquiétude se mélangent

Invité
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[Terminé] Quand l'incertitude et l'inquiétude se mélangent  EmptySam 3 Fév - 13:24
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- «  Spook ? »

Une voix féminine, connue par quelques habitants vient de résonner à plusieurs reprises. Celle de la protectrice, inquiète pour sa petite boule de poil, qu’elle ne parvient pas à retrouver. Passant le seuil de la porte de sa demeure familiale, la jeune femme chercher dans les lieux insolites ou son fidèle compagnon aime généralement dormir profondément et lourdement. Elle soulève des tas de vêtements, les chaises, ouvre les placards sous les meubles, va même jusqu’à regarder sous les tapis, les lits, les draps, partout ou un petit être en pleine croissance apprécierait pour s’endormir. Rien. Sortant de la demeure, elle croisa sa mère, un panier dans les bras pleins de délicieux fruits et légumes. Léonie avait semble-t-il oublié de récupérer la commande, obligeant l’ancienne à se déplacer elle-même. Aucun reproche cependant dans la voix maternelle, qui avait bien reçu que sa plus jeune progéniture était inquiète :

- « Il a encore décidé de faire une promenade tout seul ? Mh ? Je vois. Tu as regardé au niveau du marché de la ville ? C’est un ventre sur patte avant tout, ne l’oublie pas ma petite. »
- « Raaaah, il mange toujours n’importe quoi, il va finir par être malade » grommela la protectrice en tournant les talons

Elle laissa sa mère devant la porte de la demeure, celle-ci secouant doucement la tête, visiblement amusée par le comportement encore enfantin de la protectrice, sa fille. Même si Léonie avait grandi très vite, qu’elle était à présent une jeune femme respectée et respectable, elle n’en restait pas moi très petite fille, d’autant plus lorsqu’il s’agissait de son unique réel point d’attache affectif, Spook. Léonie, elle, ne semblait pas réellement prendre conscience de son excessivité et de sa surprotection vis-à-vis de l’animal. Tout le monde connaissait Spook, pour sa capacité à faire des bêtises et son imagination surdéveloppée pour se mettre dans des situations périlleuses. L’animal n’avait donc pas pu passer inaperçu, ce n’était pas possible. Quittant la route menant aux habitations dont faisait partie celle familiale, la jeune femme remonta doucement le sentier, surveillant le sol, les bâtisses, les potentiels lieux où la boule de poil aurait pu se coincer, sans rien y trouver. La déception dans le fond de ses prunelles bleues était parfaitement visible, si bien que c’est un habitant de la ville qui finit par l’interpeller alors qu’elle était dans ses pensées :

- «  Tout va bien protectrice ? Si vous cherchez Spook, il est passé il y a une dizaine de minutes, il suivait un enfant qui mangeait des sucreries, il me semble. »

Roulant des yeux, la my’tränne le gratifia d’un sourire en unique remerciement avant de l’abandonner sans rien formuler de plus, pressant le pas vers la petite place menant à la fontaine et où elle savait que les enfants avaient l’habitude de jouer. Elle retrouva là-bas, une petite troupe d’enfants en cercle, semblant aviser quelque chose, qu’à cette distance, elle était incapable d’identifier. S’approchant doucement, elle déposa une main sur l’épaule d’un gamin qui sursaute, visiblement surpris pivota légèrement vers elle, dévoilant ainsi son sujet d’observation. Spook, allongé sur le côté, la langue dehors, hyperventillant, jetant un regard suppliant à celle qu’il venait de reconnaître. Les yeux de la my’tränne s’écarquillèrent se gorgèrent presque immédiatement d’une eau dont elle n’avait absolument pas l’habitude avant qu’un hurlement horrifié ne s’échappe de ses lèvres.

- «  SPOOK !! »

Elle se précipita immédiatement à terre, genoux sur le sol sec, sans la moindre présence d’humidité. Prenant l’animal dans ses bras, elle le serra aussi fortement qu’elle le pouvait. Murmurant des mots rassurants à l’égard de son petit compagnon qui couina presque aussitôt de douleur. Son ventre était particulièrement dur. « Ooooh Spook, je te promets que ça va aller ». Se tournant vers les enfants, l’animal entre les mains, elle demanda avec une violence bien trop importante pour la situation :

- «  Qu’est-ce que vous avez fait ?! Qu’est-ce qu’il a mangé ?! RÉPONDEZ ! Vite »

Les enfants avaient reculé d’un pas, les yeux ronds comme des billes, visiblement effrayées par la colère soudaine de la protectrice qu’il n’avait jamais vu se comporter ainsi. Les larmes avaient pris possession des petits yeux, les mains avaient fini par trembler et des sanglots importants avaient fini par se faire entendre et voir sur les visages des gamins. Agaçant davantage la jeune femme qui n’était animée qu’uniquement d’une inquiète profonde et sincère pour sa petite chose, si précieuse à ses yeux.

- «  Des sucreries, madame, j’sais pas trop comment ça se nomme, mais c’est bon… Il a piqué le paquet alors… C’était amusant. On pensait pas que…enfin… Pardon…. »

Pardon, le mot se répéter dans sa tête, encore et encore en boucle, avec une violence inimaginable pour la protectrice. Est-ce qu’on pouvait vraiment s’excuser de causer la mort ou presque d’un animal, est-ce que c’était pardonnable et est-ce qu’elle pouvait se pardonner, elle, de n’avoir pas surveillé suffisamment sa boule à bêtise ? Et maintenant, maintenant qu’est-ce qu’elle pouvait bien faire ? Cherchant de ses yeux embrumés une aide quelconque, quelque chose à faire, elle crut reconnaître son frère un peu plus loin et se précipita à sa rencontre, le visage aussi pâle que la mort elle-même.

- «  HERALD » hurla-t-elle la gorge animée par les sanglots « J’ai besoin d’aide, c’est Spook, je… je ne sais pas… Hérald…. »

Peu importe ce qu’il pouvait faire là, peu importe la raison, de son retour, il était son frère, son sang, il ne pouvait pas lui refuser cette aide, il ne pouvait pas refuser de sauver Spook.  Une fois face à lui, la jeune femme comprit qu’elle avait de nouveau fait erreur, que ce n’était pas son frère aîné, qu’il n’allait certainement pas pouvoir l’aider, qu’elle allait perdre Spook et elle donna l’impression de vriller, de manquer de tomber sous le choc, de ne pas supporter tout ça… Comme-ci soudainement, toutes les émotions qu’elle n’exprimait jamais allaient finir par ressortir exploser et alors qu’elle montrait la petite bête qu’elle portait dans ses bras, comme une mère pourrait porter son enfant, elle supplia du regard son interlocuteur, cherchant à se raccrocher à la moindre branche possible. Il était sa dernière chance.

- «  S’il vous plaît…. Je…aidez-moi… Aidez-le… Je vous en prie…. »


Dernière édition par Léonie Morret le Lun 19 Fév - 19:57, édité 2 fois

Flavien Teleri
Flavien Teleri
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[Terminé] Quand l'incertitude et l'inquiétude se mélangent  EmptySam 3 Fév - 19:35
Irys : 887826
Profession : Soigneur itinérant - Guérisseur
My'trän +2 ~ Chimères
Il avait recompté ses quelques Irys une énième fois avant de se présenter devant l'arboriculteur grisonnant qui menait son petit commerce d'une main d'expert. L'homme avait souri en le voyant approcher, un sourire sincère autant que commercial, sublimé par les pattes d'oie qui creusaient le contour de ses yeux plissés d'amusement. S'il existait sur cette terre une personnification de la convivialité des habitants de Busad, elle devait se trouver sous ses yeux.

- Flavien !, S'exclama l'homme qui rit doucement en avisant l'Aitah perché sur l'épaule de son maître, humant l'air avec intérêt, Et Selmac, bonjour ! La même chose que d'habitude, j'imagine ?
- Oui.
- Tu as de la chance, il m'en reste vraiment peu ! La récolte a été fructueuse, mais elles sont victimes de leur succès. Je ne vais pas m'en plaindre !, L'homme fut secoué d'un petit rire que Flavien gratifia d'une grimace à des lieux de ressembler à un sourire, Si tu veux, je peux te mettre le restant de côté pour la prochaine fois.
- Ce n'est pas nécessaire.
- Tu es sûr ? J'ai bien peur que ce soit les dernières pommes de la saison.
- Vraiment.
- Hum, c'est vrai que tu n'es pas d'ici... J'imagine que tu reprendras bientôt la route. C'est dommage... Tu sais, Myrtille se porte à merveille depuis qu'elle a mis bas ! Une vraie tornade !
- Content de l'apprendre. Répondit le soigneur, sincère pour la première fois depuis le début de la conversation, Faites quand même attention à ne plus la surmener autant.

Myrtille était la jument du fils de l'homme (un trentenaire qui reprenait les affaires de son père bien plus doué que lui, et dont il n'avait jamais pris la peine de retenir le nom). Flavien avait assisté Myrtille lors de sa mise-bas, rendue particulièrement difficile par l'état de santé de l'animal qui travaillait aux champs, prêtait main forte à la famille pour transporter les denrées et était d'une force d'esprit telle que ses propriétaires en oubliaient presque qu'elle avait besoin de repos et d'attentions particulières. L'absence d'eau fraiche dans l'abreuvoir de l'animal avait rendu le soigneur furieux et si le poulain de Myrtille n'avait pas choisi ce moment précis pour pointer le bout de ses naseaux, Flavien aurait eu à répondre de son vitriol. A la place, il avait assuré la survie de l'animal, s'évitant pas mal d'ennuis.

- Ne t'en fais pas, il a retenu la leçon. Assura le vieil homme en secouant la tête comme seul un père repensant aux erreurs de son fils était capable de le faire, Les petits-enfants ont décidé d'appeler le poulain Cassis, tu le savais ?
- Ce nom lui va comme un gant. Commenta doucement le soigneur alors que l'homme lui tendait sa commande en échange de quelques Idrys. Le poulain était d'un noir d'ébène, rappelant effectivement la peau de ces fruits. Il inclina la tête en acceptant les vivres. Merci.
- A bientôt !

Le soigneur inclina une nouvelle fois la tête et s'éloigna de l'homme sans lui rendre son salut. Une fois de dos à la petite échoppe, il soupira lourdement, perdant instantanément le léger sourire dont il s'était paré à mesure que la conversation avançait. La même chose que d'habitude. Flavien serra son sac de vivres dans ses mains et fronça les sourcils, regardant d'un air mauvais les plus délicieuses pommes qui lui ait été donné de goûter. Il était définitivement resté trop longtemps à Busad. Il commençait à y prendre de petites habitudes, ce qui était loin de lui plaire. Dès qu'il en aura appris plus sur le phénomène qui affectait la faune locale, il serait grandement temps de prendre ses distances.

Maugréant dans sa barbe, il attrapa une pomme dans le sachet et croqua dans le fruit sucré à pleines dents. D'un pas rapide, il s'engagea dans les rues de Busad, se dirigeant vers l'une des entrées de la ville. Il avait prévu d'observer les populations d'Alkhach sauvages qui peuplaient les plaines, cherchant à découvrir si ces créatures, communes sur tout le territoire, évitaient clairement certaines zones.

Son petit en-cas lui fit penser qu'il allait devoir repartir chasser très bientôt, ou ses familiers n'allaient pas tarder à prendre les choses en main d'eux-mêmes. Par principe, Flavien n'achetait jamais de viande dont il ignorait l'origine. Tout disciple d'Orshin qu'il était, il comprenait l'utilité de la chasse et ne rechignait pas à manger de la viande, même s'il appréciait tout autant les plats d'origine végétale. Il considérait la chasse comme naturelle, une ode à Orshin qui avait été de façonné ses enfants tels qu'ils l'étaient : prédateurs et proies, luttant pour leur survie à grands renforts de force ou d'intelligence. Il n'en était pas de même pour l'élevage, qu'il ne pouvait s'empêcher de voir d'un mauvais œil. Quelle vie pouvait bien avoir un animal réduit à la captivité, né et élevé dans l'optique d'être abattu ? Quels désirs pouvaient bien avoir ces créatures, qui attendaient la mort, la sentant planer au-dessus d'eux à mesure que les mois passaient et qu'elles grandissaient ?

Flavien croqua une nouvelle fois dans son fruit, histoire de détourner son attention de ces pensées morbides. Aquila ne s'était pas encore entièrement remise de sa rencontre avec le Chuluun rendu fou : elle avait besoin de viande rouge pour reprendre des forces. La traque lui ferait énormément de bien. Quand à Hua... Il n'en mettrait pas sa main au feu, mais il était pratiquement sûr de l'avoir vu zyeuter avec beaucoup trop d'insistance la vieille femme qui toussait, attablée non loin d'eux hier soir. Il préférait ne pas tenter le Diable : une partie de chasse était à prévoir dans la journée pour rassasier les carnivores qui l'accompagnaient. Selmac, lui, se contentera de quelques baies et de céréales, bien qu'il accepte toujours avec joie les morceaux de viande que voulaient bien lui partager ses compagnons.

Le soigneur marchait tranquillement dans les rues de Busad. L'air chaud se trouvait adoucit en ces lieux, en grande partie grâce à la présence d'une fontaine distribuant une eau claire qui faisait la joie de quelques enfants qui jouaient insouciamment sur la grande place. S'il avait eu le temps de flâner, il se serait certainement posé près du point d'eau quelques minutes. Malheureusement la fontaine était assaillie par un groupe d'enfants et le soigneur n'avait absolument pas la patience nécessaire pour supporter les nombreuses questions qui lui seraient posées s'il décidait de se poser sur un banc avec ses familiers. Il admirait la curiosité des petits d'Hommes, si semblable à la sienne, mais cette ressemblance dans le caractère ne le rendait pas forcément plus apte à interagir avec des créatures confondant souvent curiosité et impatience.

Passant sa route, Flavien manqua de faire tomber ses vivres lorsque, de l'autre côté de la place, une My’tränne croisa son regard et se mit à hurler quelque chose qu'il ne comprit pas bien. Elle courut jusqu'à lui tandis qu'il resta planté là sans savoir comment réagir. Aquila, qui avait dressé les oreilles en entendant les cris, ne semblait pas particulièrement sur la défensive, ce qui rassura légèrement l'homme. Quoi que cette femme lui veuille, furibonde et les yeux embués de larmes, sa colère n'avait pas l'air d'inquiéter la Nokhoi à ses pieds.

La femme s'arrêta devant lui et Flavien reconnu l'une des protectrices de Busad, la jeune femme fatiguée qui l'avait conduit dans les quartiers du Primo-Gharyn il y a seulement quelques jours de cela. Celle-ci même qui l'avait accosté, furieuse, avant de se confondre en excuses. Tout comme aujourd'hui, elle l'avait appelé Hérald. Ça commençait à devenir une habitude avec elle, de le prendre pour un autre !

Flavien fronça les sourcils, prêt à répliquer sèchement à la jeune femme qu'il n'était toujours que le même nomade qu'elle avait déjà sermonné la première fois et qu'il ne tenait pas particulièrement à réentendre le même discours. Un coup d'œil au visage de Léonie lui suffit à se raviser et il n'eut qu'à entendre ses paroles pour que son agacement se transforme en crainte. Elle disait avoir besoin d'aide, et vu la pâleur de son visage et ses yeux embués de larmes, Flavien se doutait que la situation était grave.

Ses yeux se posèrent sur l'animal que la protectrice portait dans ses bras. La jeune femme suppliante le serrait doucement contre elle, sa fureur ne l'empêchant pas de faire extrêmement attention au petit animal qui l'accompagnait. Le jeune Aitah couinait de douleur. Sa respiration était forcée, rapide mais peu profonde, comme s'il n'arrivait pas à inspirer profondément et que le peu d'oxygène qu'il réussissait à faire entrer dans ses poumons le faisait souffrir plus qu'autre chose.

Sans répondre, la première réaction du soigneur fut d'avancer les mains vers l'Aitah pour le prendre et l'examiner de plus près. La réaction de la protectrice l'obligea à revoir ses bases. Il leva les yeux vers elle, lui indiquant d'un petit signe du menton qu'elle pouvait déposer l'animal dans ses bras.

- Laissez-moi l'examiner. Je ne peux pas l'aider si vous le gardez.

Une fois l'Aitah placé entre ses bras, Flavien se redressa de toute sa hauteur. Il était investi d'une mission et ce petit animal avait besoin de soins, et rapidement. Il repéra assez vite un banc de pierre à l'ombre. Il avait été pris d'assaut par un jeune couple d'adolescents qui contemplaient les nuages en rêvassant. Parfait. En quelques grandes foulées, il rejoint le couple somnolant. Les deux jeunes gens sursautèrent lorsque le ciel bleu fut remplacé dans leur champ de vision par un visage fermé, marqué d'une impressionnante cicatrice.

- Oust, j'ai besoin de place !

Le ton était sans appel et Flavien ne perdit pas de temps pour déposer l'Aitah sur la pierre, profitant du fait que l'adolescente s'éloigna du banc en sursautant, suivie de son ami. Le couple resta un moment à graviter près de lui mais il était bien trop focalisé sur sa tâche pour les écouter protester ou s'excuser. Tout ce qui comptait, c'était qu'une fois son auscultation terminée, ils n'étaient plus là pour l'empêcher de travailler.

- Comment s'appelle-t-il ? Demanda Flavien sans se retourner. Il pouvait clairement sentir la présence anxieuse de Léonie à ses côtés.

Selmac avait quitté sa place de choix sur son épaule pour s'asseoir près de son compagnon Aitah. Les oreilles basses, il reniflait tristement en inspectant son camarade. Aquila avait posé sa large tête sur le banc de pierre, fixant le petit animal de ses yeux jaunes en gémissant. Même Hua, habituellement la première à commenter n'importe quelle situation restait silencieuse.

L'homme attendit la réponse de la My’tränne, hochant la tête lorsqu'elle lui répondit.

- Spook... Qu'est-ce qui t'es arrivé ?

Ses doigts passèrent sur le flanc de l'animal qui se tordit de douleur. Flavien serra les dents et s'excusa, apaisant la douleur de l'animal autant que possible. Une légère lumière bleue émanait du bout de ses doigts, mais sans connaitre la raison d'une telle réaction il ne pouvait qu'empêcher Spook d'avoir mal. Il avait besoin de plus d'informations s'il voulait faire plus que de l'empêcher de quitter cette terre en souffrance.

- Son ventre est gonflé et il a du mal à respirer. Il a mangé quelque-chose dont il n'avait pas l'habitude ?, Demanda-t-il à Léonie doucement, ajoutant, non sans urgence, J'ai besoin de savoir de quoi il s'agit exactement.

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[Terminé] Quand l'incertitude et l'inquiétude se mélangent  EmptyDim 4 Fév - 18:09
L’homme qui lui fait face, celui qui pourrait être Hérald tant il lui ressemble physique tente de prendre Spook. Léonie a un geste de recul simple, mais pourtant bien visible, faire confiance à un autre individu qu’elle-même lui semble impossible, inimaginable, difficilement douloureux. La jeune femme prend pourtant rapidement conscience que si elle ne le fait pas, c’est Spook qui aura les répercussions directes de ce choix. Elle ne peut pas l’aider, elle n’est pas en capacité de l’aider cette fois-ci, elle doit déléguer. C’est dur. Après avoir sentie une larme dévaler le long de sa joue et s’écraser dans le pelage tout doux de son animal, la my’tränne avait fini par lui tendre tout en douceur, en délicatesse, avec la crainte de lui faire mal de le briser. Dans les bras de cet autre, Spook ne bouge pas, immobile, le ventre qui se gonfle et se dégonfle à un rythme irrégulier dans un mouvement non identique entre la cage thoracique et le ventre en lui-même. Le cœur de Léonie se pince, se soulève dans sa poitrine. Elle n’a pas le choix autre que de faire confiance, elle le sait, mais semble avoir beaucoup plus de mal à l’accepter. Son regard alterne entre les gestes, les autres animaux présents et Spook. Surtout Spook. Flavien l’entraîne plus loin, sur un banc expulse sans délicatesse un couple. Comme une mère souhaitant protéger son petit, Léonie l’encourage ou du moins, lance un regard noir aux deux jeunes amoureux qui se prélassent. Ils n’approcheront plus, c’était certain. D’ailleurs juste au cas où, elle le précisa oralement avec une voix particulièrement sévère :

- «  Allez voir ailleurs si nous y sommes, nous n’avons pas besoin de gamins dans le coin »

Jamais elle n’aurait parlé de la sorte à des individus, d’autant plus à des jeunes adultes. La jeune femme était stressée particulièrement, beaucoup trop, et la culpabilité qui commençait à prendre possession de son esprit bien trop important pour lui offrir la moindre once de gentillesse ou de courtoisie. Le petit être était à présent sur le banc, l’homme un genou au sol, l’autre petit Aitah pour le rassurer et les autres animaux non loin. Peut-être qu’ils pouvaient communiquer entre eux ? Parler ? Lui dire qu’elle était là, qu’elle ne l’abandonnerait pas ? L’homme dont elle se souvenait à peine avait fini par lui poser des questions, le prénom, la raison, l’alimentation, trop d’éléments dont elle ignorait la réponse ou presque, offrant un visage d’autant plus pâle chez la propriétaire. Elle était responsable, elle n’avait pas su le protéger comme elle lui avait promis. Constatation atroce pour Léonie qui se voyait déjà le perdre définitivement. L’animal ne semblait pas en mesure de répondre aux questions, même mentalement.

- «  C’est Spook… ou Spookie... » répondit-elle la voix tremblante « Je ne sais pas…. Des bonbons, des sucreries, je crois… C’est ce que les enfants ont dit »

C’était tout, l’unique information qu’elle avait. Le reste elle l’ignorait, elle ne comprenait pas, plus jamais elle ne l’abandonnerait, plus jamais elle ne le laisserait seul, c’était une évidence. Surveillant le moindre geste effectué par Flavien. L’esprit de la my’tränne tournait très rapidement, il devait savoir ce qu’il avait mangé, elle l’ignorait. Léonie pouvait en revanche le déduire et soudainement, ses yeux s’écarquillèrent, il y avait une mode chez les enfants en ce moment, une plante sucrée que les mômes mélangeaient avec d’autres sucreries.

- «  Je sais ! » dit-elle brusquement «  'Les chomuls' » tenta-t-elle de prononcer avec difficultés «  C’est des plantes que les enfants trouvent dans le coin, les épines sont toxiques mais la chair est tendre et sucrée, ils mélangent ça avec d’autres sucreries. Ca ne peut être que ça ! Il y en a partout en ce moment…. »

L’information offerte, Léonie n’espérait plus qu’une chose, voir un miracle se produire. Comme-ci le fait de donner un nom problème allait forcément engendrer une amélioration magique soudaine, comme-ci rien ne s’était jamais passé. La propriétaire elle, devenait de plus en plus blanche au fur à mesure que l’état de l’animal se dégradait ou au contraire ne s’améliorait pas. Prenant une légère inspiration la jeune femme sentit ses mains trembler. Jamais elle ne laissait autant voir une émotion, jamais elle ne s’était inquiétée ou mise dans un état si complexe pour un être humain. Spook était particulier à ses yeux. Bien trop.

- « Vous allez le sauver n’est-ce pas ?! Vous devez le sauver »

Parce qu’il était hors de questions que ce soit autre chose, hors de question qu’elle puisse le perdre ; hors de question de ressentir plus de culpabilité ou de tristesse. Son ventre se contractait, se mélangeait douloureusement dans son ventre, alors qu’elle tentait autant que possible de conserver son émotion, son inquiétude, son angoisse. La jeune femme déposa une main sur le pelage de l’Aitah qui ne lui appartenait pas, simplement pour trouver un peu de réconfort, pour trouver un peu de force, pour éviter de voir ses larmes dégouliner le long de ses joues, pour conserver une certaine prestance. Comment quelqu’un qui possédait tellement de créatures ne pourrait-il pas parvenir à sauver son Spook. Son petit compagnon, sa petite source de bonne humeur, l’unique, la seule. Déplaçant petit à petit sa main du pelage du premier Aitah pour se retrouver sur celle de son animal, la jeune femme câlina dans une tendresse et délicatesse extrême la tête de Spook, déposant un bisou entre ses oreilles, lui murmurant qu’elle était là et qu’il était entre de bonnes mains, de très bonnes mains. Parce que c’était son seul et unique espoir, Léonie faisait le choix de s’y accrocher avec une force importante.

- « J’ai confiance en vous » dit-elle sans être réellement certaine que ce soit le cas.


Informations : :

Flavien Teleri
Flavien Teleri
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[Terminé] Quand l'incertitude et l'inquiétude se mélangent  EmptyDim 4 Fév - 20:56
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My'trän +2 ~ Chimères
Flavien ne put s'empêcher de grogner lorsque la protectrice fraichement sortie de son état de choc lui expliqua que son compagnon avait dû ingérer des bonbons aux chomuls, stupidement offert par des enfants.

Ces plantes opportunistes poussaient comme de la mauvaise herbe et faisaient le bonheur des gastronomes qui appréciaient les propriétés sucrées de leurs tiges. Lui-même en avait déjà consommé à plusieurs reprises, appréciant la fraicheur de cette plante qui se conservait relativement bien. En revanche (et ce malgré ses yeux peinés inspirant une pitié sans nom), il ne lui serait jamais venu à l'esprit d'en proposer à Selmac. Les Aitah étaient réputés pour être d'incroyables ventres à pattes, mais cela ne les empêchaient pas d'avoir une consistance assez délicate. Comme tout animal, l'Aitah ne parvenait pas à digérer tout ce qui lui était présenté. La chomul faisait partie de ces choses.

Spook n'en aurait d'ailleurs pas ingéré une si grande quantité si ses sens n'avaient pas été trompés. L'odeur de la plante avait dû être dissimulée par celle des nombreux sucres contenus dans ces fameuses friandises, n'alertant pas l'Aitah du danger avant qu'il soit trop tard. Ces animaux avaient beau se rendre souvent malade en mangeant n'importe quoi, ils comprenaient en général vite leur erreur et la sensation de leurs boyaux se tordant suffisait souvent à les empêcher de recommencer. A voir l'état du jeune Aitah, la fougue de la jeunesse et le désir de braver les interdits l'avait incité à gober les sucreries d'un coup d'un seul.

Le soigneur serra les dents. S'il y avait bien une chose capable de rendre malade un Aitah, c'était d'ingérer de la chomul. Cette information, couplée au fait que Spook avait certainement gobé tout rond un ou plusieurs bonbons durs, n'était pas exactement ce qu'il espérait entendre. Jurant mentalement, il posa sa main sur le ventre de l'animal, repérant la zone gonflée sous ses doigts.

A ses côtés, la My'tränne l’implorait -le commandait- de sauver sa petite boule de poils. Elle avait l'air d'avoir besoin de réassurance, caressant la tête de Selmac venu lui offrir le soutien que son maître ne saurait lui apporter. L'Aitah ferma paresseusement les yeux sous la caresse tremblante de la jeune femme, appuyant sa tête contre la paume de sa main brièvement.

Flavien de son côté était particulièrement démuni face à la détresse de la protectrice. Tout novice de Möchlog qu'il était, il n'avait jamais vraiment réussi à faire sien l'empathie et l'énergie positive qui entouraient les pratiquants des arts du soin. Prendre en considération la douleur d'un patient était une chose, mais rassurer un proche était un tout autre exercice.

- Il respire. C'est bon signe. La toxine n'avait pas causé de dommages trop importants si Spook respirait encore aussi vite. Il peut s'en sortir. Je ferais mon possible, c'est tout ce que je peux vous promettre.

Flavien avait beau être très maladroit avec ses mots, ils transpiraient la sincérité et la conviction. Déterminé pour certains, bornés pour d'autres, le soigneur était le genre de personne qui ne voyait pas l'intérêt de se battre pour une cause perdue d'avance mais qui se raccrochait au moindre petit espoir avec une ferveur presque admirable. Spook allait mal. Il allait extrêmement mal, mais il pouvait encore être sauvé. La présence qu'il ressentait à la porte de son esprit, terrifiée mais déterminée, en était la preuve formelle.

Léonie, qui s'était agenouillée près de lui pour embrasser la tête de Spook en lui murmurant de douces réassurances, leva les yeux sur lui. Elle lui glissa avoir confiance en lui. Un frisson parcouru l'échine de l'homme, comme si ces paroles seules avaient le pouvoir de le mettre mal à l'aise. "Je te fais confiance, Flavien !" Etrange.

Plutôt que de commenter sur ce fait, il ferma les yeux et invita l'esprit du petit animal blessé à entrer en contact avec lui, à prendre place parmi ses pensées. L'étrange exercice, périlleux de base, était d'autant plus dangereux que la créature souffrait grandement. Il allait devoir accepter cette vulnérabilité s'il voulait en apprendre plus sur les faits du jeune Aitah. En être conscient ne l'empêcha pas de serrer les poings lorsqu'un poids énorme s'installa sur son estomac, coupant un instant sa respiration qu'il se força à reprendre le plus doucement possible. Faire la part des choses entre son état physique et celui d'une créature en souffrance n'était pas toujours simple, et ça l'était encore moins lorsqu'il n'y était pas préparé.

- Spook. Tu as mangé des bonbons ?, Souffla-t-il entre ses dents. Par respect pour Léonie mais aussi parce que cela lui permettait de ne pas se perdre dans la douleur mentale que lui infligeait la connexion, il murmurait sa partie de la conversation. Ainsi, il gardait une partie de lui éveillé plutôt que perdue dans sa propre tête, Combien tu en as pris ? Décris-les-moi s'il te plait.

L'Aitah lui décrit une faim intense, une envie de voir le monde, des rires d'enfants, la chaleur de leur attention et de petites mains collantes se perdant dans son pelage. L'odeur des bonbons, l'amusement des petits d'Hommes, et des douceurs rondes comme des billes, brillantes et appétissantes. Spook peinait à répondre à ses questions, une litanie de "Léonie" et de "Pardon" trottant dans sa tête, parasitant son explication autant que le mal qui lui tordait l'estomac.

- Non. Non, non, non. Coupa-t-il rapidement l'animal qui se perdait en excuses. C'est une bêtise, oui mais... elle... elle n'est pas fâchée.

Le soigneur pencha la tête vers Léonie, qu'il savait toujours à ses côtés.

- Continuez de lui parler, ne vous occupez pas de moi. Indiqua-t-il à Léonie, Votre voix le rassure. Il est plus concentré en vous sachant près de lui... Très bien, Spook. Dis-moi ce que tu as fait ensuite.

Flavien attendit patiemment que l'animal lui explique ce qu'il avait fait des friandises. Il n'avait pas énormément de temps, mais il ne pouvait pas non plus presser la pauvre créature au risque de la braquer. Le jeune Aitah avoua avoir gobé deux friandises en une seule bouchée, par peur d'être grondé par les enfants et qu'ils ne récupèrent leurs bonbons avant qu'il ne puisse y goûter. Il n'en avait pas pris une de plus, heureux de les entendre rire, savourant d'être le centre d'attention. Il avait effectué quelques cabrioles pour les faire rire, encore et encore, avant qu'un mal sans nom ne l'empêche de continuer à amuser la galerie. Le poison commençait à se répandre dans son système à mesure que les bonbons se dissolvaient.

L'homme soupira de soulagement. Il pouvait travailler avec ça.

- Tu as bien fais. Ça aurait été plus grave si tu les avais mordus. Ça va aller, on va arranger ça.

Il mit fin à la connexion, la gorge serrée. Plusieurs solutions s'offraient à lui et aucune n'allait plaire à la jeune femme. Ils allaient pourtant devoir agir vite. Ouvrant les yeux, il croisa le regard de la My'tränne agenouillée près de lui. Il fouilla un instant dans ses affaires et en extirpa un couteau, le présentant à la jeune femme. Il grimaça en réalisant qu'elle ne savait visiblement pas où il voulait en venir. Il devait être en train de l'effrayer plus qu'autre chose.

- Non, on ne va pas-, Commença-t-il avant de secouer vivement la tête et d'attraper une pomme achetée dans la matinée, Tenez, épluchez-la et coupez-en une fine lamelle. Il va falloir lui donner à manger.

Résumant ses soins superficiels (tout ce qu'il pouvait faire pour le moment, c'était de soulager légèrement la pression comprimant le ventre de Spook) pendant que Léonie passait à l'action, il expliqua son plan à la jeune femme.

- La chomul est une plante extrêmement nocive pour beaucoup d'animaux. Les Aitah en font partie. Spook en a ingéré une grande quantité, mais il a avalé les bonbons tout ronds plutôt que de les croquer. C'est une bonne chose. Précisa Flavien, On devoir le faire vomir pour éviter que la toxine ne se propage. Pour ça, il faut lui donner un peu à manger. Vous allez devoir vous en charger, il n'acceptera pas de nourriture de ma part après ce qui lui est arrivé.

Si Léonie réussissait à faire manger le petit animal et qu'il appliquait les bonnes pressions en réponse sur le ventre de la créature, ils réussiraient sans doute à forcer Spook à recracher les bonbons qui lui causaient tant de mal.


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[Terminé] Quand l'incertitude et l'inquiétude se mélangent  EmptyLun 5 Fév - 10:53
Faire son possible, le savoir respirer. C’était tout, tout ce qu’il lui offrait pour se raccrocher et tout ce qu’elle pouvait déjà percevoir sans forcément avoir l’information. Croisant le regard de son interlocuteur, la my’tränne n’avait guère d’autres espoirs que de le voir réaliser un miracle, ne pouvait imaginer un quotidien dans la petite boule d’énergie vivante que représentait Spook. La main toujours sur sa fourrure, câlinant avec une douceur extrême l’animal, elle tâchait de ne pas lui transmettre sa peur, ses craintes, d’être forte pour ne pas inquiéter davantage le petit être en souffrance. Chose plus simple à dire qu’à faire. De multitudes d’informations circulaient dans l’esprit de la protectrice, en plus de ses émotions et de la douloureuse culpabilité qui malmenait son cœur. Son regard d’un bleu ciel n’avait de cesse de faire des vas et vient entre l’animal et le ‘soigneur’ dont elle n’était même pas certaine qu’il l’était vraiment et pourtant, l’homme semblait savoir dans quelle direction aller et quoi faire –pour le plus grand soulagement de la jeune femme-. La question de confiance était toute relative, surtout prononcée par Léonie qui était bien connue pour avoir un besoin de contrôle sur tout et ne pas bien accepter de ne plus avoir la main. Autant dire que là, tout de suite, rien n’allait plus pour la protectrice qui se retrouvait à devoir fonder ses espoirs dans un être inconnu –ou presque-, ressemblant en son frère en qui elle n’avait jamais eu réellement confiance. Prenant une longue inspiration, elle sentit ses muscles se contracter un à un, alors qu’une nouvelle vague d’angoisse venait animer son bas ventre. Léonie ne devait rien faire transparaître, si bien qu’elle s’était surprise à lui offrir des paroles réconfortantes, qu’elle ne pensait pas forcément et réellement, mais elle était certaine que le tout aurait un impact positif, du moins, elle l’espérait.

Alors que son souffle chaud effleurait l’oreille de Spook, ne cessant de lui murmurer des mots tendres, qu’elle espérait réconfortants, évoquant des souvenirs qu’elle avait avec lui et son envie de devoir encore le disputer lorsqu’il ferait des bêtises. Qui pourrait bien l’inquiéter, autre que lui ? Qui pourrait animer ses soirées lorsqu’elle refusait de se reposer en cherchant des informations dans des notes empruntées ici et là. Repassant une main délicate sur ce poil qu’elle connaissait à présent par cœur, les yeux brillants d’une inquiétude sincère, mais aussi particulièrement nouvelle. Ses yeux s’écarquillèrent alors que Flavien semblait entamer une conversation avec Spook, un vent d’envie aussi certainement, sans pour autant qu’elle n’exprime clairement cette pointe minuscule de jalousie. Léonie opinait doucement aux propos, s’imaginant des réponses qu’elle ne pouvait pas percevoir avant de rester sans réaction lorsqu’elle comprit que Spook s’inquiétait de l’avoir mise en colère.


- « Oh non, non… Spook, je ne suis pas fâchée, pas du tout… Si tu m’abandonnes en revanche, oui.. J’ai juste besoin de toi, tu sais. »

Délicatement, toujours, elle était revenue déposer ses lèvres sur la petite tête, murmurant qu’elle était là, qu’elle serait toujours là. C’était peut-être la première fois que Léonie ressentait une douleur face à la mort, en tant que protectrice il lui était déjà arrivé d’avoir dû tuer, pas par choix, mais par obligation et elle n’en avait absolument rien ressentis. Ni douleur ni culpabilité, c’était son métier, son choix. En revanche, tenir à quelque chose, même un animal, c’était tout nouveau, tout neuf et terriblement déstabilisant pour celle qui se gonflait toujours plus pour paraître imposante et très professionnelle. Le soupir de soulagement ne passa pas inaperçu pour la protectrice, qui instinctivement s’était surprise à faire de même. Sans comprendre réellement les différentes paroles, ou l’étendue de la conversation, des éléments en possession à présent dans la tête du soigneur. Léonie ne douta plus une seule seconde du déroulement positif de la situation –bon, il restait toujours un doute évidemment-. L’homme avait finalement sorti une pomme et un couteau, sans que la protectrice ne puisse saisir entièrement le rapport entre le fruit, le couteau et Spook. Quoiqu’une idée peu agréable lui traversa l’esprit, entraînant inévitablement deux billes bleues bien rondes. S’il tentait quoi que ce soit avec ce couteau et Spook, elle lui sauterait dessus pour l’en empêcher, hors de question qu’on ouvre son animal en pleine rue. Flavien la rassura presque immédiatement, améliorant quelque peu la pâleur de la jeune femme, dont la mine déconfite se transforma en un soulagement profond. OUF. L’information intégrée, la my’tränne attrapa la pomme pour l’éplucher rapidement, plus de peau, plus de queue, plus de pépins, tout avait été fait avec soin. D’un geste qu’elle essayait de conserver rapide, elle découpa de fines lamelles, autant que la pomme pouvait le lui permettre, consciente qu’elle allait devoir négocier avec force pour que le petit être accepte de manger dans son état. Léonie espérait qu’il n’en fasse pas à sa tête, qu’il accepte simplement en partageant la substance avec sa compagnie. Ceci étant fait, elle montra les lamelles pour s’assurer que tout était à la bonne taille, exactement comme le visualisait son interlocuteur et réajusterait au besoin.

- « D’accord… » souffla-t-elle sans grande conviction, peu convaincue par ses propres compétences à convaincre l’être généralement très têtu. « Spook, tu feras la tête plus tard… S’il te plaît.. Mange…. »

Elle se décala pour être face au museau de l’Aitah, simplement pour que son regard puisse croiser le sien, passant une main délicate sur sa tête, jusqu’à passer ses doigts sous la mâchoire de l’animal, émettant une légère pression pour le faire ouvrir. Elle y glissa une pomme, l’aida à la mastication en accompagnant la tentative de Spook de léger mouvement de ses doigts. Malgré des réticences flagrantes, il avait avalé, certainement pour faire plaisir à Léonie qui le suppliait du regard. La deuxième trancha sembla être plus difficile, la volonté de l’animal s’amenuisant quelque peu, la troisième encore davantage, mais suffit visiblement à Flavier pour effectuer les gestes au même moment et provoquer une grimace de Spook, qui de petits coups de langue démontraient un début de nausée. Une fois deux fois et il s’était finalement redressé sur ses petites pattes, tenant à peine debout pour régurgiter une galette de mélanges de plantes et oh miracle des deux bonbons bien ronds à peine diminué de taille. Léonie en tomba sur les fesses de soulagement, il avait réussi à faire ressortir ce qui malmenait Spook. L’Aitah n’était pas pour autant en pleine forme et après avoir effectué ce qu’on attendait de lui, se laissa retomber sur le côté, visiblement épuisé. Comme pour obtenir une confirmation orale, la jeune femme avisa les différentes créatures accompagnant le soigneur, mais aussi lui-même, les yeux brillants d’une volonté et d’un soulagement parfaitement visible.

Instinctivement, elle avait passé ses doigts sur la tête de la petite créature, le câlinant, l’invitant aussi à venir se blottir contre elle si elle s’en sentait capable, sinon elle attendrait l’autorisation de Flavien pour le prendre et le câliner. Consciente de ne pas avoir suffisamment de connaissance dans le domaine du soin pour prendre ce genre de décision.

- « Merci… » se contenta-t-elle de formuler satisfaite et soulagée « Je crois que je vous dois beaucoup… Beaucoup plus que ce que vous pouvez imaginer » souligna-t-elle davantage « Combien de temps doit-il rester au repos ? Vous restez encore dans le coin n’est-ce pas ? » elle se pinça la lèvre formulant une demande qu’elle n’aurait jamais cru faire avant « Je… je vais devoir travailler, aujourd’hui…après.… Pourriez-vous le garder avec vous ? Je n’ai pas confiance en grand monde et… enfin.. »

Elle était gênée pour deux raisons, la première était que malgré son envie grandissante de conserver Spook avec elle, cela n’allait pas être possible. Premièrement parce qu’il serait sous une chaleur important en extérieur et que cela ne serait pas favorable à l’animal pour se réserver, deuxièmement, elle aurait pris le risque qu’il soit blessé davantage en cas de confrontation. La seconde était plus réaliste, plus terre à terre, elle demandait à un inconnu de prendre soin de son Aitah, alors qu’elle ne le connaissait pas, le temps qu’elle puisse effectuer ses tâches… Qui de plus compétent que celui qui devait certainement de lui sauver la vie ?


Note ::

Flavien Teleri
Flavien Teleri
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[Terminé] Quand l'incertitude et l'inquiétude se mélangent  EmptyLun 5 Fév - 22:53
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Au grand soulagement du soigneur, l'Aitah affaibli avait encore la force d'avaler de son propre accord ce que la protectrice lui présentait. S'il avait dû prendre le relai pour forcer l'animal à manger, il l'aurait fait sans grande peine. La fin justifiait souvent les moyens, et la maxime n'en était que plus vraie dans son domaine. Malgré tout, il était satisfait de la tournure des évènements. Si Spook acceptait de se plier à la demande de celle dont le regard le drapait d'une immense douceur, il n'avait de son côté aucune excuse.

D'un geste habile, il entreprit de masser le ventre de l'Aitah qu'il sentit se tendre sous la pression qu'il exerçait sur son corps endoloris. Les griffes de l'animal se plantaient par intermittence dans son avant-bras, accrochant réflexivement sa peau à chaque fois qu'il faisait rouler ses doigts sur un point sensible. Un mal nécessaire qui fit heureusement assez rapidement effet. Spook se contorsionna pour échapper à son emprise et se redresser, frêle et fiévreux, pour rendre l'essentiel du contenu de son estomac malmené.

En avisant les friandises à l'origine de tous les maux du jeune Aitah rouler sur le sol poussiéreux, Flavien hocha imperceptiblement la tête. Le pire était derrière eux maintenant. Spook semblait lui aussi en être conscient car il se laissa glisser sur le banc, roulant sur le côté pour ne plus comprimer son ventre de quelque façon que ce soit. Flavien attendit qu'il trouve la position qui lui convenait pour passer sa main sur le ventre de la petite créature, priant Möchlog de lui accorder le pouvoir de dénouer l'estomac de Spook, au moins assez pour que sa respiration retrouve une certaine régularité.

Un ronronnement semblable à celui d'un moteur s'éleva à sa droite, alors que Léonie caressait précautionneusement la tête de son brave compagnon qui respirait enfin profondément. Selmac se hissa sur le banc à côté de son semblable, se blottissant contre le jeune Aitah et entreprenant de toiletter consciencieusement ce pauvre Spook. Flavien le laissa volontiers faire. Les Aitah avaient pour habitude de prendre soin des leurs et visiblement Selmac comptait bien prendre le relai dans les soins, offrant à la petite boule de poils une attention toute particulière.

Lorsque la voix de Léonie s'éleva une nouvelle fois, Flavien quitta des yeux le petit animal pour accorder toute son attention à la jeune femme. Il baissa rapidement le regard lorsqu'elle le remercia avec insistance, ne sachant que répondre à ce genre de déclaration. Personne ne lui devait rien, et, en échange, il ne devait rien à personne. C'était là toute l'idée de tirer un trait sur sa sédentarité pour courir Irydaë. Il n'était pas intervenu dans le but d'être remercié, encore moins pour que la protectrice lui soi redevable.

Heureusement pour lui, la jeune femme repris bien vite la conversation. Elle lui demanda combien de temps Spook mettrait à s'en remettre, avant de perdre pied et de lui glisser maladroitement qu'elle n'allait pas pouvoir le garder avec elle mais qu'elle espérait qu'il le prenne sous son aile le temps que son travail soi bouclé. Flavien la regarda, aussi interdit que pris de court. Il cligna des yeux lentement. Commençons par le commencement.

- S'il était un peu plus âgé, j'aurais répondu qu'il va avoir besoin d'une bonne journée de repos et de passer quelques jours sous surveillance et à la diète. Marmonna-t-il en détournant les yeux pour observer Spook qui récupérait doucement, Mais il est encore très jeune. Avec une demi-journée de repos et un régime adapté, il sera à nouveau en pleine forme d'ici dem...
" Tu crois qu'elle se mettra en colère si je les croque ? Juste un petit morceau. La langue, ça m'ira très bien. Ils m'agacent à piailler. "

La pensée intrusive le fit buter sur ses mots et il écarquilla les yeux, occultant complètement Léonie pour observer Hua qui s'extirpait de la poche de son manteau pour se blottir contre Selmac en baillant, révélant aux yeux de tous les incroyables rangées de dents qui ornaient sa mâchoire. Quelque-chose avait dû la déranger. Pourtant sa Tairakh n'était pas connue pour son sommeil léger.

"Tiens. Il va mieux." Commenta-t-elle en posant son regard sur Spook "Bah, il n'a que la peau sur les os de toute façon."
"On ne mange pas mes patients, Hua." Sermonna le soigneur.
"Ouais, ouais, je sais, j'ai entendu les trente premières fois tu sais." Râla la Tairakh qui se grattait derrière l'oreille "Mais eux, c'est pas des patients."

Flavien suivit le regard de la petite carnivore et repéra très vite... des enfants. Au nombre de trois, ils avaient tout l'air de se cacher derrière un tronc d'arbre à quelques mètres d'eux, lançant des regards furtifs dans leur direction et murmurant entre eux. Ah. C'était donc ça qui avait réveillé la Tairakh.

"Bon, j'ai le droit de les manger alors ?"
"Non. Je vais aller leur parler. J'ai deux mots à leur dire."
"Outch. Tu crois pas que c'est moins cruel de me laisser m'occuper d'eux ?"
"Ha. Ha."
Répliqua l'homme sans humour. "Ma réponse est toujours non."

Sur ces belles pensées, le soigneur se redressa, épousseta son pantalon poussiéreux et accrocha le regard d'un des gamins qui les observaient. Il fronça les sourcils et, sans quitter le jeune garçon des yeux, s'adressa à Léonie qui avait dû suivre son échange silencieux avec son familier miniature.

- Pardon, je reviens. Excusez-moi juste un instant.

Quelques foulées lui suffirent à rejoindre le groupe d'enfants tétanisés. Il fallait dire que la fureur se lisait clairement sur ses traits. Déjà qu'il n'avait pas l'air particulièrement chaleureux lorsqu'il était de bonne humeur, autant dire que la colère le rendait encore plus impressionnant. Surtout pour des enfants.

- A qui sont ces bonbons ? Demanda-t-il sans préambule, sachant parfaitement d'où provenait l'air coupable des trois amis.

Devant le silence général, Flavien plissa les yeux, les lèvres pincées.

- Ce que vous avez fait est très grave, vous le savez au moins ? Il aurait pu mourir !

Il n'en fallut pas plus au plus pâle de la troupe pour se mettre à sangloter. Oups.

- J-j... Je voulais pas lui faire de mal ! C'est promis ! Je savais pas qu'il allait... Je pensais pas que...! Je voulais pa-a-as !
- Eeeuh..., Se dépatouilla le soigneur qui se faisait violence pour ne pas fuir devant les pleurs, Calme-toi, ça va. Il va... bien. Mieux. Mais ce que tu as fait est extrêmement dangereux. Ce que vous avez fait est extrêmement dangereux. Les Aitahs n'ont pas le droit d'avaler ces bonbons, d'accord ? Ils les rendent très malade.

Evidemment, il eut droit à un concert de "Je suis désolé !" et de "On recommencera pas, promis juré !".

- C'est pas à moi qu'il va falloir présenter des excuses, mais à votre... protectrice. Répliqua-t-il en butant sur le titre. Et à Spook.

Les trois enfants hochèrent la tête avant de filer tout droit rejoindre Léonie, Spook, ainsi que ses familiers, restés tenir compagnie à la My'tränne et son compagnon. Flavien s'appuya contre l'arbre dont il venait de les déloger et les observa à distance, se promettant de rejoindre Léonie au départ du dernier gamin. Il n'était pas la victime dans cette histoire, elle avait le droit de s'expliquer avec les principaux responsables.

Les enfants s'éloignant enfin, Flavien s'approcha du petit groupe. Les bras croisés, il jaugea un moment Léonie puis s'intéressa à Spook, qui s'était à priori endormi.

- Je ne vais pas passer ma journée sur cette place, mais... Admettons que je puisse garder un œil sur lui aujourd'hui. Il s'interdit de fermer les yeux en réalisant qu'il aurait tout aussi bien pu donner son accord clair, net et précis, sa décision prise à l'instant même où il parlait de supposition, Vous... auriez besoin que je le garde avec moi jusqu'à quelle heure ?

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[Terminé] Quand l'incertitude et l'inquiétude se mélangent  EmptyJeu 8 Fév - 19:11

Les yeux de Léonie détaillaient avec tendresse son petit compagnon qui semblait se porter beaucoup mieux que précédemment –chose pas forcément complexe, il fallait bien l’admettre-. Ses doigts ne se détachaient plus de sa fourrure, offrant des caresses délicates, un réconfort autant pour l’animal, pour que pour elle-même. La protectrice n’écoutait qu’à peine la première réponse offerte par Flavien, toute son attention étant entièrement accaparée par Spook. L’animal essayait de se rapprocher de sa maîtresse, jusqu’à terminer dans ses bras, contre sa poitrine ou il déposa la tête satisfaite qu’elle ne soit pas en colère. Léonie avait eu une véritable, angoisse passée qui laissait sa place pour ne dévoiler qu’une fatigue intense et bien réelle. L’homme prétendait qu’il serait en pleine forme d’ici le lendemain, que tout allait rentrer dans l’ordre, puis sembla avoir une conversation avec lui-même. Flavien avait cette apparence un peu particulière, qui troublait sincèrement la my’tränne. Premièrement, il avait un physique très similaire à celui de son frère, avec qui elle ne s’entendait pas et avec qui elle avait pour habitude d’être en conflit ouvert et bien réel. Deuxièmement, il avait cette faculté à s’absenter, à être présent face à son interlocuteur et à ne pas être vraiment là en même temps. Comme là, il était en train de lui parler, de lui expliquer des choses importantes rassurantes, puis soudain POUF Flavien n’était plus là, enfin plus mentalement.

Un léger sourire sur les lèvres, un peu amusé par ce comportement qu’elle trouvait un peu enfantin, mais aussi qu’elle ne s’expliquait pas vraiment –Léonie ne connaissant pas clairement le don d’Orshin-. L’homme avait fini par s’éloigner la laissant seule avec son Aitah et celui de Flavien. Tout en maintenant Spook contre elle et en avisant d’un mauvais œil la rangée de dents tranchantes de l’autre créature, elle tendit une main rassurante vers l’Aitah de l’homme. La jeune femme qui n’était à la base pas très animale, avait appris à l’aide de son petit compagnon à apprécier les différentes espèces, avec une préférence pour les Aitahs, évidemment. Une petite caresse sur la tête, un petit sourire et elle s’était remise à câliner Spook avec plus d’intensité, sa petite bestiole émettant des bruits ressemblant un peu à des ronronnements étranges.


- «  Je n’ai pas envie de te laisser toi.. » lui murmure-t-elle à l’oreille, tiraillée entre sa passion pour son métier et celle pour son ami à quatre pattes. « Promis, je ne te laisse qu’entre ses mains, mais tu es sage, tu te reposes… »

Léonie eut à peine le temps de terminer sa phrase, qu’une petite troupe de trois humains miniatures venaient de débarquer, polluant son champ de vision. Fronçant les sourcils, la my’tränne avait écouté silencieusement les sanglots, les excuses, les promesses, serrant davantage ses mains autour de la silhouette de Spook. Ses lèvres s’étaient entrouvertes, prête à passer un nouveau savon d’une manière non délicate au marmot, quand elle avait senti les dents de Spook s’enfoncer dans sa chair. Comme une mise en garde, comme une demande non formulée de ne pas s’emporter. Son regard s’était porté immédiatement vers le petit être, lui donnant raison dans un silence presque inquiétant pour elle.

- « Bien, pour vous faire pardonner vous n’avez cas aider madame Delahotte. Elle doit recevoir une livraison de tissus, je suis certaine qu’elle sera ravie d’avoir des petites mains pour lui rendre service. Mais surtout, vous ne donnez plus jamais rien à Spook. »

Les enfants avaient évidemment voulu offrir une caresse à Spook et Léonie avait fini par céder même s’il était parfaitement visible sur les traits de son visage, qu’elle n’était pas très emballée par le geste. Le petit groupe avait fini par disparaître de la vision des deux humains, mais également des créatures. Flavien en profita pour accepter la demande de la jeune femme, s’offrant en réaction un large sourire bien rayonnant. Léonie était soulagée, heureusement de savoir Spook en bonne compagnie, en cas de complication, elle était certaine que le voyageur serait en mesure de prendre soin de son animal. La protectrice ne put néanmoins dissimuler une légère grimace, l’aspect temporal n’était pas quelque chose qu’elle prenait général en compte… Il faut dire qu’elle n’avait pas d’horaire, elle quittait tard, ne dormait parfois pas… Là ça voulait dire pour la première fois de sa vie, se restreindre à rentrer à une heure précise. C’était à la fois frustrant et étrange, sans pour autant que ce soit réellement désagréable.

- «  Eh bien…Jusqu’au repas du soir ? En échange de ce service, je vous offre le repas ! Nous n’avons cas nous retrouver au dos de la fourchette lorsque l'astre se couche ? » elle n’avait pas vraiment réfléchi à ce que cela signifiait «  A moins que vous ne préfériez que je vous fasse visiter la ville demain, partagé nos traditions ? »

La jeune femme était un peu gênée par sa proposition, sans pour autant trouver une autre idée pour réellement le remercier. Prendre le temps de comprendre une manière de penser de cet être si particulier. Affichant un petit sourire, elle s’approcha de Flavien, tout en lui tendant Spook qui avait fini par s’endormir, laissant entendre un ronflement régulier.

- «  Je vous promets de ne pas être en retard…. Je ne sais vraiment pas comment vous remercier… Je sais que… » qu’il allait dire que ce n’était pas la peine blablabla «  Sans vous, je crois que Spook ne serait plus là…. Et je ne m’y connais pas suffisamment moi… » une idée émergea dans son esprit « OOH. Accepteriez-vous ce soir de m’enseigner quelque chose pour le soigner en cas d’accident ? Je ne vais pas toujours avoir quelqu’un pour m’aider… Et… Je ne pourrai me pardonner si… enfin. » Son regard croisa celui de la carnivore «  N’avez-vous jamais peur qu’elle croque votre Aitah ? »

La question était dénuée de jugement, c’était une simple question, juste avant qu’elle ne disparaisse. Après avoir terminé cette conversation et obtenu l’accord de Flavien, Léonie avait déposé une main sur l’épaule du jeune homme avant de prendre la route vers la haute tour de Busad.

Flavien Teleri
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[Terminé] Quand l'incertitude et l'inquiétude se mélangent  EmptyVen 9 Fév - 13:30
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Sa question, qui se voulait nonchalante, fut accueillie par un large sourire de la part de Léonie. Sans aucune confirmation de sa part, elle en était arrivée à la conclusion qu'il acceptait de prendre en charge le petit animal jusqu'à son retour. Et, aussi irritant que ce soit, elle avait raison. Flavien savait pertinemment qu'il ne serait pas en mesure de laisser ce jeune Aitah sans surveillance avant qu'il ne soit complètement remis sur pattes. La petite boule de poils avait beau ronronner de contentement, blottie contre sa protectrice, elle n'en restait pas moins affaiblie. Il n'allait pas prendre le risque qu'une complication survienne et que la petite créature se retrouve seule et démunie.

Léonie grimaçait désormais, gênée. Et pour cause : elle n'avait pas l'air d'avoir réfléchi à sa demande jusqu'au bout, aussi surprise par la tournure des évènements que lui-même l'était.

Flavien considéra un moment la proposition de la My'tränne. S'occuper de Spook jusqu'à l'heure du diner ne l'empêcherait pas de se rendre sur les plateaux pour observer les troupeaux d'Alkhachs qui y vivaient. Selmac se ferait un devoir de rester près de lui pour veiller attentivement sur son cadet, lui laissant toute la liberté de s'adonner à l'observation de la faune locale. Aquila et Hua pourraient se mettre en chasse de leur côté et les retrouver avant la tombée de la nuit. Rien ne l'empêchait d'accepter la proposition de la Protectrice, sauf peut-être sa réticence à partager plus de temps que strictement nécessaire en sa compagnie.

Rien à voir avec Léonie en tant que personne, le soigneur n'avait simplement pas pour nature de nouer des relations. Ou plutôt avait-il oublié l'art de faire la conversation, au fur et à mesure des années passées sur les routes ? Flavien n'était pas très loquace au meilleur de sa forme, mais il se considérait comme un compagnon de route plutôt facile à vivre. Il lui arrivait de croiser du monde au courant de ses errances. Il avait même eut l'occasion de faire un bout de chemin avec quelques personnes rencontrées en chassant un gibier commun, voire d'intégrer un groupe de voyageurs si cela lui permettait de traverser une région plus aisément. Flavien était parfaitement capable de voyager accompagné ou de travailler en équipe -tant qu'il avait un objectif clair en vue, très peu d'interactions de prévues et le besoin minime de s'exprimer, il n'avait aucun mal à s'acclimater à autrui. Là résidait justement l'essence du problème.

Dès lors qu'il se lançait dans une conversation sans but précis, il finissait presque toujours par vexer son interlocuteur. Donc, à moins que la coutume à Busad soit de dîner dans un silence religieux, le soigneur n'omettait pas l'hypothèse que la My'tränne ne lui fausse compagnie avant la fin du repas. En soi, ça ne le dérangeait pas outre mesure. Le souci était que si elle partait avant la fin, il n'aurait sans doute pas de quoi payer l'addition, vu le peu d'Irys qui lui restait à ce jour. Mais si tout se passait bien, il mangerait à l'œil ce soir. Il connaissait l'établissement de vue, mais n'y avait encore jamais mis les pieds.

- Un repas ne serait pas de refus. Céda-t-il avec un sourire poli qui n'avait rien de naturel.

Il ne donna pas suite à l'offre de la Protectrice de découvrir Busad en sa compagnie mais pris note de sa proposition tandis qu'il installait Spook dans le creux de ses bras. Les oreilles de l'Aitah frémirent, chatouillées le tissu de son manteau, mais il resta plongé dans le sommeil, se laissant couler dans les bras de son gardien d'un jour. Il se dérida légèrement en observant le petit animal.

Léonie lui promis d'être ponctuelle et Flavien espérait pouvoir en faire de même (des années passées à flâner sur les chemins avait quelque peu transformé son rapport au temps). Elle le remercia à nouveau d'avoir sauvé la vie de son compagnon cornu, mais alors qu'il s'apprêtait à rejeter ses mercis, Flavien distingua une lueur dans les yeux de la Protectrice et préféra tenir sa langue.

Quelle ne fut pas sa surprise lorsque Léonie lui demanda de la former à porter secours à Spook au cas où le jeune Aitah mettrait à nouveau sa vie en péril (ce qui risquait fort d'arriver, les Aitahs n'étant pas connus pour être des exemples d'ingéniosité). Le soigneur fut tellement surpris qu'il en oublia de faire la tête. La nature incongrue de sa question impulsive et son commentaire distrait lorsqu'elle porta son attention sur la petite Tairakh qui trônait sur son épaule le fit sourire.

- Hua ne fera jamais de mal à ceux qui comptent pour moi. Dit-il tranquillement en dégageant l'une de ses mains pour gratter le cou de la minuscule carnivore qui lui servait de garde du corps à ses heures perdues. Pas vrai ?

La Tairakh émis un étrange gloussement et sauta de son épaule pour atterrir devant Selmac. L'Aitah cligna des yeux en regardant la carnivore venir doucement appuyer sa tête contre son poitrail. Une autre série de clignements interrogatifs et Selmac appuya enfin son museau dans la fourrure du petit prédateur, entreprenant de faire sa toilette pour elle. Hua ferma paresseusement les yeux et bâilla de contentement, exposant au monde sa dentition impressionnante.

- Elle est plus douce qu'il n'y parait. Commenta-t-il, posant sa main libre sur la tête d'Aquila qui observait le manège des deux autres créatures sans broncher. Selmac n'a rien à craindre d'eux, pas plus que j'ai être sur mes gardes en leur présence.

Il observa un moment ses compagnons de route, puis reporta son attention sur Léonie. Mine de rien, son envie d'en apprendre plus sur les Aitahs et sur les soins que l'on pouvait administrer à ces créatures fragiles lui réchauffait le cœur. Il ne pouvait que l'encourager dans cette voie, même s'il était loin d'être pédagogue.

- Je vous montrerai comment lui venir en aide en cas d'accident. Lancé sur un terrain connu, il était de bien meilleure humeur. Etre capable de soigner une plaie simple est utile, mais je peux aussi vous apprendre à reconnaitre les maux les plus courants chez les Aitahs et la manière de les traiter. Si vous le souhaitez.

Une fois mis d'accord sur leur arrangement, la Protectrice pris congé, serrant doucement son épaule dans sa main. Léonie fut happée par la foule et Flavien réalisa en la voyant disparaitre qu'il venait essentiellement de bloquer sa soirée pour la passer en compagnie d'une parfaite inconnue pour laquelle il avait accepté de garder un Aitah.

Comment il en était arrivé là en espérant simplement pister l'Alkhach ce matin, il ne le savait pas très bien.

= = = = = = = = = = = =

Le soleil disparaissait à l'horizon lorsqu'il s'engagea dans la rue d'un quartier très fréquenté de Busad, repérant la devanture de La Fourchette en contrebas. Il savait que l'établissement se situait quelque part dans cette partie de la cité et avait demandé son chemin à un groupe de jeunes gens qui semblaient être d'assez bons vivants pour avoir réponse à sa question.

Aquila trottinait joyeusement à ses côtés, le ventre tendu de son diner bien mérité. La Nokhoi avait déniché un Alkhach souffrant et s'était fait une joie de partager sa prise avec Hua et Selmac, qui s'était lui-même fait un devoir d'offrir un petit bout de viande à Spook. Le jeune Aitah avait accepté la nourriture de son compagnon, ce qui était à la fois bon signe et à la fois le témoignage que l'estomac de cette bestiole le dirigeait autant, voire plus, que son cerveau.

Flavien avait laissé ses carnivores chasser, passant l'après-midi à observer les troupeaux d'herbivores à la recherche d'un individu présentant un comportement dérogeant à la règle de son espèce. Ses recherches n'avaient pas été très concluantes, d'autant qu'il avait été distrait par Spook qui avait fini par se réveillé, un peu déboussolé de ne pas trouver Léonie auprès de lui. Selmac s'était chargé de le rassurer et l'homme avait fini son après-midi en surveillant presque autant les deux Aitahs que les Alkhachs qui l'intéressaient à la base.

Spook avait repris du poil de la bête, invitant Selmac à jouer mais se fatiguant plus vite qu'il ne l'aurait dû. Rien d'inquiétant, voire même d'étonnant, après ce qui lui était arrivé.

Le soigneur passa son après-midi à l'extérieur des murs de Busad sans rien observer d'anormal. Lorsque le soleil se mit à diminuer, son rendez-vous du soir lui revint en tête et une idée lui traversa l'esprit. Il réfléchit un instant avant de soupirer lourdement et de prendre le chemin de la place du marché, se dirigeant vers La Fourchette une bonne heure plus tard, sa besace un peu plus lourde. Ses derniers Irys avaient été dépensés en matériel médical classique et en remèdes à base de plantes qui pouvaient aussi bien être utilisé pour l'Homme que pour les Aitahs. S'il devait former la My'tränne à soigner son compagnon à quatre pattes, il voulait faire en sorte que ses explications soient le plus claires possibles.

Il se consola sur l'état de ses finances en se disant que si jamais le dîner tournait au vinaigre, il pourrait toujours avoir l'utilité de cet achat non planifié plus tard.

Le soleil se couchait lentement lorsqu'il arriva à destination : il était en avance. Plutôt que de rester planté là à attendre, il s'installa en tailleurs contre un arbre en faisant attention à ne pas déranger Hua qui dormait dans la poche de son manteau. Aquila tourna trois fois sur elle-même avant de s'installer à ses côtés, tandis que Selmac et Spook libérèrent ses épaules pour explorer le carré de verdure. Flavien les observa faire, amusé par le sérieux de Selmac qui scannait la zone à la recherche de plants de chomuls dont il fallait absolument protéger le plus jeune.

Les deux Aitahs s'éloignaient un peu trop à son goût, aussi farfouilla-t-il un moment dans sa besace pour en tirer une longue plume noire avec laquelle il lui arrivait d'écrire. Son état était pitoyable, et pour cause, il avait trouvé une utilité toute particulière à l'objet sensé retranscrire ses pensées. Il sifflota, sachant pertinemment que Selmac allait se tourner vers lui. Avec un petit sourire, il agita la plume devant lui, capturant l'attention du petit être cornu qui se précipita vers l'objet en compagnie de son cadet. Toutes griffes dehors, Selmac s'arque bouquait pour tenter d'attraper la plume avec laquelle il dessinait dans l'air devant lui. Spook ne manqua pas l'occasion de se joindre à la partie. Ses réflexes étaient plutôt bons, même s'il mettait un peu trop de temps à se décider. Une bonne nuit de sommeil, un repas léger, et d'ici demain soir toute cette histoire ne serait qu'un mauvais souvenir.

A ses côtés, Aquila soupira lourdement, se tassant sur le sol. Elle avait l'habitude de ce petit manège et se préparait en conséquence, se faisant la plus petite possible pour éviter de servir de tremplin de fortune à l'un des Aitahs.

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[Terminé] Quand l'incertitude et l'inquiétude se mélangent  EmptySam 10 Fév - 13:01

Flavien avait finalement accepté l’invitation et même la demande, pour le plus grand plaisir de Léonie qui s’imaginait déjà devenir une experte en premier secours pour Aitah. La jeune femme n’avait pas surenchéri à la démonstration d’affection de la dent tranchante, ne jugeant pas forcément l’argument valable. Après tout, en élevage, ne dorlotons pas les poules, les moutons et les vaches avant de venir zigouiller le tout ? La protectrice était restée silencieuse, ne préférant pas jeter un froid entre eux, froid qui commençait seulement à s’améliorer. Elle décrocha un nouveau sourire en direction de son interlocuteur, coula un nouveau regard à Spook se retenant de ne pas lui refaire une caresse par crainte de le réveiller. Puis disparue dans la foule, sans réellement se retourner par crainte de changer d’idée.

~ ~

La journée avait été longue, plus que ce que Léonie avait pu imaginer. Il y avait eu beaucoup d’affaires à résoudre, beaucoup de conflits entre citoyens et pas mal d’entraînement aussi. Plusieurs fois la protectrice avait semblé ailleurs, inquiète pour sa petite boule de poil. Ses collègues n’avaient évidemment pas perdu de temps pour la taquiner un peu, elle qui généralement était si impliquées. L’entraînement terminé, la my’tränne avait fini par occuper le rôle de la surveillance de la tour, mission qu’elle n’appréciait guère, plus qu’il s’agissait de rester tout en bas à stopper les passages des visiteurs ou à en autoriser certain à rentrer. Son collègue faisait la conversation généralement seule, n’obtenant que très rare une réponse de la protectrice.

- « Tu sais Léonie, si mes histoires ne t’intéressent pas il suffit de me le dire. Je ne vais pas m’en offusquer, je sais bien que tu n’es pas très famille toi. Ta deux passions dans la vie Zaël et ta boule de poil. »
- « Désolée… Je t’écoute, tu sais, vraiment. C’est juste que Spook n’était pas en forme ce matin alors…
Comment ça Zaël ? Ce n’est pas une passion, c’est notre primo-Gharyn. Je ne suis pas passionnée par cet homme, mais par sa fonction, c’est bien différent. Si tu veux progresser, il faut bien être qualifié.
»
- « TAlors c’est ça ton rêve ? Monter en grade ? Tu ne penses pas que pour une femme comme toi, il devrait être tout autre.»
- « Qu’est-ce que tu peux être indélicat parfois. » Dit-elle plus sèchement « On verra bien de toute façon, j’ai le temps de voir venir les rides avant d’obtenir une promotion. »

L’homme eut un petit ricanement, donnant raison à Léonie. Rien que pour devenir protecteur, puis protecteur confirmé, il fallait laisser les années s’écouler sans compter. Alors obtenir plus, comme elle pouvait en rêver, elle allait soit devoir effectuer des actions non négligeables, soit faire preuve d’une patience hors norme. Après plusieurs heures de nouveau de silence à vérifier l’identité de ceux souhaitant monter dans la tour, l’homme reprit la parole s’autorisant une petite question, dont la surprise allait le laisser bien plus que perplexe :

- « TTu peux me remplacer ce soir ? Je voudrais profiter de mes enfants »
- « Non pas ce soir je suis attendue au dos de la fourchette »

L’homme resta sans voix, c’était la première fois que Léonie refusait du travail supplémentaire, d’autant plus pour un rendez-vous dans une auberge pour visiblement un repas. Il n’osa guère faire preuve de davantage de curiosité, jugeant à juste titre qu’il se ferait certainement remettre à sa place sans la moindre délicatesse. La journée s’écoula lentement, la protectrice changeant de post en fin d’après-midi pour surveiller les appartements du Gharyn. Ainsi occupé à trier, ranger, mais aussi surveiller du coin de l’œil que Zaël n’est pas réellement envie de soudainement sortir, la jeune femme ne remarqua pas que l’astre commençait à perdre de son éclat. C’est suite à une parole prononcée par un petit groupe passant, signifiant à quel point la journée avait été longue et qu’il était grand temps de rentrer qu’elle comprit qu’elle allait être en retard.

- « Non, non, non » grommela-t-elle

Abandonnant son poste dans une rapidité déconcertante, elle ne s’autorisa qu’un petit geste de la main aux autres protecteurs arrivants. Pas le temps de se changer, de faire preuve d’un quelconque effort –qu’elle n’avait de toute façon, jamais fait de sa vie-, Léonie arriva en courant sur le lieu de rendez-vous. Son regard ne s’arrêta guère immédiatement sur la silhouette de Flavien, plus par inattention que par réel manque d’intérêt. Elle eut même l’illusion de penser être la première et de ne pas avoir à présenter d’excuse vis-à-vis de ce léger retard. Après plusieurs minutes, elle finit par remarquer l’homme, enfin surtout Spook qui semblait aller beaucoup mieux. Le petit être étant tellement concentré à jouer qu’il ne remarqua pas sa maîtresse, pour son plus grand plaisir, qui dans un regard attendrit, hésita à briser le silence et l’animation en cours en dévoilant sa présence. Après plusieurs minutes, elle se racla quelque peu la gorge, s’approchant définitivement du groupe :

- « Bonsoir… Je suis navrée pour la petite attente… » elle se pencha, mettant un genou à terre pour récupérer Spook qui abandonna immédiatement son occupation pour venir se nicher dans ses bras « Salut toi… Tu as été sage j’espère. » Puis relevant les yeux vers Flavien et ses compagnons « Salut vous ! On y va ? Je ne sais pas vous, mais moi j’ai un peu faim ! »

La jeune femme semblait d’une humeur beaucoup plus calme et positive que précédemment, pas de geste vif ou trop rapidement, pas de regard froid. Juste un bien être profond de retrouver son animal visiblement en bonne santé. Décrochant un nouveau sourire, elle fit un petit signe de tête pour inviter le groupe à entrer. Passant le seuil de la porte, une serveuse n’avait pas tardé à faire son apparition avisant la petite troupe :

- « Pour combien ? »
- « Une table dans un coin, loin du reste de vos clients si possible » débuta-t-elle « Nous sommes deux humains, mais nous avons quatre petits compagnons avec nous… Si vous pouviez ramener de l’eau pour eau dans un petit récipient ? »
- « Évidemment, évidemment » répondit la dame en accompagnant la troupe dans un recoin calme et isolé « Ça vous convient ? »
- « C’est parfait. »

La serveuse avait disparu, laissant le duo s’installer tout comme les petites boules de poils. Spook était naturellement monté sur les genoux de Léonie, s’installant en boule pour commencer à dormir dans un ronflement bruyant. Une fois assise et visiblement plus ou moins à l’aise, elle hésita à reprendra la parole, à faire la conversation…

- « Vous avez passé une bonne journée ? Spook n’a pas été trop dérangeant ? »

Flavien Teleri
Flavien Teleri
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[Terminé] Quand l'incertitude et l'inquiétude se mélangent  EmptySam 10 Fév - 19:45
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Spook remarqua sa maîtresse avant Flavien, ses oreilles remuant à l'entente de la voix familière. L'homme était trop occupé à essayer de prédire les prochaines actions des deux Aitahs pour prêter attention à ce qui se passait autour de lui. Aussi gentils qu'ils soient, les Aitahs n'étaient pas franchement connus pour leur délicatesse et s'il voulait éviter que les griffes de Selmac ne lui déchirent le dos de la main par inadvertance, il fallait mieux rester concentré.

Déposant la plume à côté de lui lorsque Léonie s'approcha pour récupérer son compagnon à quatre pattes, Flavien se fit violence pour ne pas lever les yeux au ciel lorsque Selmac sauta toutes griffes dehors sur la plume inerte. Il leva le nez pour observer Léonie s'entretenir avec Spook avant de les saluer, ses familiers et lui, avec un sourire et un calme déconcertant. Le nomade se tassa un peu plus contre l'arbre sur lequel il prenait appuis, la bonne humeur de la Protectrice le prenant de court. Il n'avait pas franchement l'habitude qu'on se montre aussi amical avec lui, service rendu ou non. En général les gens restaient polis mais sur leurs gardes en sa présence -quand ils ne le fusillaient pas tout simplement du regard après une remarque désintéressée de sa part. Un comportement distant tout à fait acceptable, qui n'était pas sans rappeler celui des disciples de Möchlog parmi lesquels il avait grandi.

Une fois Spook bien installé dans ses bras, Léonie invita le petit groupe à la suivre. Flavien opina, ramassant ses affaires et emboitant le pas à la Protectrice, Selmac et Aquila sur les talons. Vraiment, Busad était un lieu étrange. Et ses habitants l'étaient encore plus.

Une fois arrivés à destination, et pour son plus grand bonheur, la My'tränne demanda à ce qu'ils soient dirigés vers une table à l'écart de la clientèle. Elle commanda au passage une écuelle d'eau pour leurs compagnons, ce qui lui valut un petit hochement de tête qui voulait sans doute dire "Merci !" de la part du soigneur.

Le Dos de la Fourchette était une auberge décorée en toute simplicité, chaleureuse sans être étouffante, où la pierre et le bois se mariaient avec goût. Il devait être bon de faire une pause dans son quotidien en s'accoudant au bar de cet établissement, bien qu'après un rapide coup d'œil aux clients de l'établissement, Flavien eut l'air d'être le seul à porter des habits de voyage aussi simples. L'implantation dans les beaux quartiers de Busad avait dû en faire un lieu de passage obligatoire pour tout dignitaire de passage dans la ville et expliquait en partie le fait qu'elle était fréquentée par davantage de notables et de riches marchands que de petites gens.

Un coup d'œil aux nombreux prix décernés à l'auberge suffisait à comprendre que la cuisine était certainement très réputée. Il aurait dû se renseigner sur l'auberge avant d'accepter l'invitation. Pas étonnant que le groupe de jeunes Busadiens l'avait regardé d'un œil critique en lui indiquant le chemin. Il avait pensé que leur étonnement trouvait sa source auprès de son cortège de familiers, pas dans le fait qu'un homme aussi pauvrement habillé aurait peut-être dû réserver sa table dans une auberge moins chic.

Mal à l'aise à l'idée d'être noyé dans le bruit de conversations mondaines, Flavien remercia mentalement Léonie pour avoir suggéré une place dans un coin tranquille et s'installa de manière à tourner le dos à l'ensemble de la clientèle. Etre tourné face au mur lui donnerait peut-être l'illusion de ne pas être en présence d'autant de monde. Selmac sauta sur le rebord d'une fenêtre et se roula en boule sur la pierre fraiche. Aquila se glissa entre le mur et les pieds de la table et se coucha de tout son long à ses pieds, quand Hua, elle dormait toujours.

Une fois installé, Flavien passa un moment à détailler la composition de la table. Une petite bougie brûlait dans un bougeoir en ferraille, la lumière de la flamme se réfléchissant sur les couverts qu'il espérait vraiment ne pas être en argent. Un mouvement dans sa périphérie attira son attention et il vit passer un serveur portant un plateau sur lequel trônait une assiette où se mariaient viande en sauce et légumes, le tout arrangé avec goût. Un plat devait surement coûter un bras !

Léonie le sauva de ses tourments intérieurs en lui demandant s'il avait passé une bonne journée et si son compagnon ne l'avait pas trop dérangé. Se forçant à arracher son regard d'un serveur qui entreprenait de flamber un dessert pour le plus grand bonheur d'un couple installé à leur droite, Flavien secoua la tête.

- Pas du tout, il ne m'a pas dérangé. Spook a dormi jusqu'en début d'après-midi. A son réveil il a mangé léger, bu suffisamment d'eau pour se réhydrater, et puis Selmac lui a proposé de jouer un peu avec lui. Le soigneur jeta un coup d'œil à son Aitah qui somnolait. Il ne l'a pas lâché d'une semelle, un vrai papa poule. J'ai pu m'occuper sans trop de souci.

Croisant à nouveau le regard de Léonie, il se creusa la tête pour raconter sa journée.

- J'ai observé les Alkhachs près des rocheuses. Vu qu'ils sont aussi répandus dans la région que sensibles, s'il y a quoi que ce soit qui menace la faune ils devraient normalement tout faire pour éviter l'endroit... J'ai déjà recueilli quelques données, mais j'aimerais m'assurer que rien ne m'a échappé avant de faire le point avec vous et Zaël pour prévoir une intervention. Hum... Et vous ?

Il n'était pas doué pour faire la conversation mais vu la nature du sujet, il préférait embrayer et ne pas alimenter davantage cette conversation qui le conduisait sur un terrain très glissant. La mission dont il était investi était en quelque sorte supervisée par le Gharyn, et dire que leur relation avait mal commencée aurait été un euphémisme. Les choses avaient été mises à plat depuis lors, mais Flavien se rappelait encore très bien la fureur de Léonie lorsqu'il osa implicitement remettre en question la gouvernance du jeune Gharyn.

La serveuse qui les avait installés les sauva d'un silence gêné en apportant une écuelle qu'elle déposa d'un geste expert devant Aquila, ainsi que la carte de l'établissement.

- Messieurs, dames, voici. S'excusa-t-elle en leur tendant à chacun un exemplaire de la carte. Vous souhaitez boire quelque-chose ?

Flavien opta pour suivre Léonie dans son choix de boisson, remercia à demi-mots la serveuse qui s'éclipsait pour partir en quête de leur commande, et se plongea corps et âme dans la lecture de la carte. Il lut celle-ci une première fois, puis une seconde, et cligna des yeux. Il était loin d'être illettré, mais il avait clairement l'impression d'avoir loupé quelques leçons à l'école, son cerveau refusant simplement de lui traduire les lettres qui se jouaient de lui sous ses yeux. Flavien fronça les sourcils, fusillant sa carte du regard. Pourquoi voudrait-il commander un "Sentier de mousses" en dessert ? De plus, les prix qui pouvaient être correctes pour une bourse moyenne lui semblaient exorbitants. Il n'avait vraiment absolument rien à faire ici.

Agacé, il leva le nez histoire de chercher l'inspiration dans le mur qui se trouvait derrière la tête de Léonie. Le hasard voulu qu'il croise le regard de la My'tränne à cet instant et qu'il se retrouve à la regarder d'un air étrange. Amer et perdu à la fois. Se rendant bien compte qu'elle n'avait pas écrit la carte, il grimaça et passa une main dans ses cheveux, détournant le regard.

Flavien déposa sa carte à plat devant lui et observa une nouvelle fois le menu qui l'offensait par sa simple existence. Réalisant combien son agacement était stupide, il se surprit à rire doucement en accrochant du regard le nom d'un plat. Abandonnant le combat, il reporta son attention sur la Protectrice qui se posait sans doute bien des questions sur son interlocuteur.

- Excusez-moi, c'est juste que... Je vais avoir besoin de vos talents de guide plus tôt que prévu. Il baissa les yeux pour inspecter sa carte, J'ai bien peur de ne pas savoir si commander une "Potage de Légumes d'Antan et sa Transparence de Fleurs et d'Aromatiques" vaille le coup. Si les fleurs et les aromatiques sont transparents, ça redevient un simple potage, non ?

Il fit glisser son index le long de la carte, s'arrêtant sur une autre appellation étrange.

- Et ici... "Origami d'Encornet et sa Dariole de Crayons Verts". Il s'agissait simplement d'une fricassée d'encornets, accompagnée d'une timbale de fromage et de poireaux-crayons moulinés, mais Flavien l'ignorait, Si on met de côté les mots de liaisons et les adjectifs, j'ai compris trois mots. Et je suis curieux de savoir comment on réussit à faire des origamis à partir de crayons et d'encornets... mais certainement pas assez pour me risquer à passer commande.

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[Terminé] Quand l'incertitude et l'inquiétude se mélangent  EmptySam 10 Fév - 23:29
- «  C’est une bonne chose » souffla Léonie en déposant une main sur la tête de Spook, grattant un peu entre ses oreilles « C’est la première fois qu’il se retrouve avec d’autres individus de son espèce… Je l’ai trouvé il n’y a pas si longtemps que ça… Personne ne pensait qu’il survivrait de ses blessures. »


La my’tränne fut quelque peu gênée, elle ne parlait que très rarement de cette affaire, il s’agissait après tout d’un événement de l’ordre du privé. La protectrice n’était pas connue pour avoir une vie intime très palpitante et hormis ce petit compagnon à poil récent, elle n’était que très rarement accompagnée. La solitude était quelque chose qui lui convenait. Cela lui permettait de se concentrer pleinement sur sa carrière et la protection du Primo-Gharyn. La jeune femme s’était contentée d’opiner quelque peu pensive, il avait cette faculté à remettre sur le tapis des sujets pas forcement agréable. Haussant rapidement les épaules, d’un mouvement un peu nonchalant, elle prit néanmoins le temps de lui répondre.

- « Vous êtes d’une aide précieuse, je n’en doute pas une seconde. Il est vrai que nous n’avons pas réellement de personnes connaissant comme sa poche les habitudes de la faune… Un comportement changeant est souvent remarqué quand il est trop tard… Comment connaissez-vous tout ça ? Vous ne me paraissez pas bien vieux, je vous donne certainement le même âge que Hérald, soit la trentaine, peut-être trente-cinq maximum. Cela fait encore jeune pour connaître entièrement toute la population animale de my’trä. » elle laissa les mains de son autre main libre jouer sur le bois de la table «  De mon côté, une journée étrangement calme, j’étais affectée à la protection de la tour et la surveillance du Primo-Gharyn. Rien de bien complexe en soit, même un peu ennuyeux pour être complètement honnête. »

La protectrice lui avait de nouveau décroché un sourire, tout en se laissant retomber complètement contre le dossier de son siège. Depuis combien de temps n’avait-elle pas pris un moment pour elle, échanger, discuter sincèrement autour d’un bon repas ? Pour être honnête, elle n’en avait elle-même pas le moindre souvenir. Léonie avait poursuivi les caresses, tout en douceur, légèrement amusée par le ronflement de plus en plus bruyant de Spook, qui lui, ne semblait pas du tout perturbé par l’endroit. La serveuse n’avait pas tardé à faire son apparition, laissant les cartes et attendant la commande des boissons. La my’tränne fronça quelque peu les sourcils, si elle avait le nom de cet établissement s’était pour sa réputation, elle n’y avait jamais vraiment mis les pieds en tant que cliente. Prenant une légère inspiration, elle s’autorisa néanmoins un apéro qui lui semblait convenir à la situation.

- «  Un lagon bleu sera très bien pour commencer… Pour le reste, je pense que de l’eau sera suffisant. » Le regard quelque peu insistant de la jeune serveuse sembla la perturber, si bien qu’elle se sentit obligée d’ajouter «  Ça sera tout, merci. »

Flavien était parti sur la même boisson, chose qui provoqua un regard quelque peu appuyé de Léonie sur la silhouette masculine. Généralement, s’était-elle qui copiait sans le moindre scrupule la commande des autres et non l’inverse. La situation lui décrocha un nouveau sourire, visiblement amusé par la situation. La my’tränne semblait enfin parvenir à se détendre, chose plutôt rare. Elle n’en restait pas moins attentive à son environnement, d’autant plus sur son interlocuteur principale dont la ressemblance frappante avec son frère semblait réellement l’interpeller et la gêner. Croisant le regard du sauveur de son petit compagnon, la jeune femme sembla perdre quelque peu son sourire. N’était-il pas satisfait d’être là, ne passait-il pas un bon moment ? L’endroit ne lui convenait pas ? Elle n’était pas certaine de déchiffrer convenablement l’expression du jeune homme, quoiqu’il lui semblait évident qu’il n’était pas pleinement heureux. Peu de temps après lui avoir lancé ce regard si froid, l’homme s’était mis à rire, déstabilisant davantage Léonie qui n’avait pas l’habitude de ce genre de situation. Il avait fini par reprendre la parole, expliquant qu’il était un peu perdu dans le nom des plats. La protectrice s’était spontanément mise à rire, non pas pour se moquer, mais par soulagement, ce n’était pas elle le problème ou son comportement, simplement la carte.

- « Vous êtes un étrange spécimen » murmura-t-elle en plongeant à son tour son attention sur le menu « Je vais vous dire un secret… Je n’ai pas la moindre idée du contenu des plats… Je ne pensais pas que l’établissement était si… enfin… J’avais bien compris qu’il était réputé, mais je dois bien admettre que je n’imaginais pas que réputé signifiait changer le sens des mots pour en faire autre chose d’incompréhensible… Si vous voulez mon avis, c’est artistique mh, mh… »

Léonie avait voulu offrir un regard ainsi qu’un sourire complice, mais elle ignorait si son interlocuteur le percevrait de la sorte. Haussant doucement les épaules, elle décida de poursuivre dans son explication, tout en offrant une vision d’elle quelque peu différente que le matin même.

- «  Vous savez ce qu’il faut faire dans ces moments-là ? Faire croire qu’on est de grand connaisseur du domaine et faire confiance à nos créateurs. Ainsi pour moi ce sera… » elle laissa son doigt courir la carte, fermant les yeux, s’arrêta, puis lu à voix haute « Festival des mers et duo sucré salé sur son lit orangé » elle cligna des yeux quelques secondes perplexes « C’est amusant n’est-ce pas ? Il paraît que c’est bon de conserver un effet de surprise perpétuel dans sa vie, de ne pas toujours avoir le contrôle… Et vous alors, qu’est-ce que vous allez prendre ? Le goût du risque, ou préférez-vous que l’on demande à la gentille serveuse ? »

Selon le choix,  Léonie appellerait la serveuse pour lui demander des explications, prétextant évidemment qu’elle n’était pas très douée dans la compréhension des mots, mais plutôt dans la protection. Sinon, elle attendrait que Flavien ait fait son choix pour faire signe à la jeune femme et commander. Tout était évidemment aux frais de la my’tränne qui se sentait toujours autant redevable vis-à-vis de son interlocuteur. Ceci étant fait, elle avisa la jeune femme s’éloigner pour se reconcentrer pleinement sur Flavien.

- « Comment trouvez-vous la région ? j’ai bien compris que vous n’aviez pas dans l’idée de rester longtemps… Mais…  enfin, je m’égare. » Elle secoua légèrement sa chevelure « Dites-moi, vous avez du beaucoup voyager, avez-vous une région préférée ? Pourquoi Orshin, si ce n’est pas trop indiscret ? La suite logique de votre famille ou un choix propre ? »

Si Léonie n’était généralement pas curieuse, avec Flavien c’était tout le contraire et elle s’en sentit particulièrement gênée, la ressemblance frappante avec son aîné  la troublait de plus en plus, si bien qu’elle ressentait un besoin intense de faire une distinction et donc d’obtenir des éléments qui soulignerait les différences entre les deux hommes. Pour l’heure il n’y en avait pas tant que ça, ce qui troublait davantage le malaise de la jeune femme.

- «  Je suis désolée si mes questions vous gênent… C’est que… avec votre ressemblance à mon frère, j’ai comme la désagréable impression de l’avoir face à moi, alors que vous devez certainement être différents l’un et l’autre. »

La serveuse était venue déposer les deux lagons bleus devant eux, précisant que la suite n’allait pas tarder à arriver. Léonie attrapa son verre, dont le liquide d’un bleu aussi clair que ses yeux semblaient très bien porter son nom. Un cocktail sans alcool ou avec une pointe très légère à peine perceptible au goût.

- «  À vos talents de soigneur. »

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[Terminé] Quand l'incertitude et l'inquiétude se mélangent  EmptyDim 11 Fév - 15:12
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My'trän +2 ~ Chimères
Ainsi, dénaturer les mots faisait partie d'une démarche artistique de la personne en charge de l'établissement. Nul doute que faire se mêler cuisine et poésie devait ravir de bonheur les différents habitués de la haute gastronomie qui réservaient leur place au Dos de la Fourchette. Ce genre de client ne considérait plus le fait de se nourrir comme une nécessité, mais bien comme un plaisir. Comme s'il était nécessaire de titiller leur fibre artistique pour qu'ils acceptent de s'abaisser, tel le commun des mortels, à manger.

Flavien se demanda distraitement ce qu'un barde aurait à dire sur toute cette affaire. Eux qui maniaient les mots tels une arme ou un bouclier devaient certainement regarder d'un œil critique ce genre de bouillie de mots. Il considéra la question un moment et secoua légèrement la tête. De quelles illusions se berçait-il ? Il devait déjà exister plusieurs odes à la gloire de cette auberge. Les bardes des cités n'avaient rien à voir avec ceux qui parcourraient les routes pour informer les populations des derniers évènements. Il ne les écoutait de toute façon pas non plus, alors à quoi bon ?

Léonie lui proposa de faire confiance aux Architectes pour guider leur main sur le papier et illustra son propos en fermant les yeux, glissant un doigt le long de sa carte avant de s'arrêter et de lire, perplexe, l'intitulé de son menu. Lui aussi n'avait ni queue ni tête et l'étonnement de la My'tränne lui arracha un petit sourire en coin. Elle se remit bien vite de ses émotions et son visage se fendit d'un sourire. En se laissant guider par les Créateurs, elle leur cédait une part du contrôle qu'elle avait sur sa vie.

Le goût du risque, selon elle.

Effectivement, elle pouvait aussi bien avoir commandé une purée de carottes ou bien même de potiron, ou encore un coulis d'agrumes ou de mangues. Sachant qu'il ne raffolait pas particulièrement des oranges, ce choix de plat l'intriguait tout particulièrement.

La curiosité du soigneur piquée à vif, il secoua la tête lorsque Léonie lui demanda s'il voulait l'aide de la serveuse, souriant légèrement cette fois.

- Ne la dérangez pas pour ça.

Il repéra la section végétarienne du menu et ferma les yeux, effectuant quelques allers-retours sur ce qu'il espérait être la partie de la carte dédié aux menus qui ne contenaient aucune viande animale. Après avoir compté jusqu'à dix, il se risqua à lancer un œil critique au plat que les Architectes avaient choisis pour lui.

- Petits sablés fleuris, Champignons demi-deuil et leur sauce suprême, accompagnés d'une Litanie de Céréales et de Légumineuses, Déchiffra-t-il, ...Intéressant.

Léonie fit signe à la serveuse qu'ils étaient prêts à passer commande. Elle nota avec soin les choix de ses clients et fit preuve d'un professionnalisme impressionnant en souriant poliment lorsque Flavien posa son doigt sur l'intitulé qui l'intéressait et marmonna simplement "Les champignons". S'éclipsant avec un sourire courtois et récupérant les cartes au passage, elle les laissa à nouveau seuls sans la possibilité cette fois de s’attarder sur le menu le temps que leur plat arrive.

Léonie prit les devants, reprenant la parole avant que le silence ne s'installe. La Protectrice le noya sous une vague de questions et Flavien écarquilla les yeux, visiblement étonné. Quoiqu'à le voir se tasser dans son siège, il avait l'air plus effrayé qu'autre chose. Il s'était bien sûr préparé à ce que la jeune femme ouvre le dialogue, mais certainement pas à ce qu'elle lui pose des questions d'ordre personnelles. Il n'avait rien à cacher, mais son enthousiasme le déconcertait quelques peu. Flavien espérait qu'elle ne s'attente pas à ce qu'il la bombarde de questions à son tour.

En réponse à son silence, Léonie s'excusa et expliqua qu'elle était perturbée par son apparence si proche de celle de son frère. Vu comment la Protectrice en parlait, elle ne le portait pas dans son cœur.

L'arrivée de la serveuse empêcha le nomade de lever un sourcil et de demander comment la jeune femme comptait garantir l'entente entre tous les peuples si elle ne parvenait pas à instaurer la paix au sein même de sa fratrie. A la place, il cligna des yeux et observa le verre décoré d'une rondelle de citron vert qui venait d'être posé devant ses yeux. De la glace pilée baignait dans un cocktail à la couleur bleu clair. Il n'avait jamais eu l'occasion de commander ce type de boisson farfelue, se contentant d'eau, voire d'un verre de cidre lorsqu'il s'autorisait un peu d'alcool. Il n'était pas du genre à enchainer les pintes, pour la simple et bonne raison que ses familiers et lui partageaient une connexion mentale bien plus forte que ce qu'un simple maître pouvait éprouver pour son animal de compagnie. D'une certainement manière, son état général influençait les réactions de ses compagnons. Sachant cela, il préférait éviter de mettre quelqu'un en danger en perdant pied.

Attrapant le verre d'une main, il le leva en direction de Léonie pour trinquer, sans forcément l'approcher pour qu'ils se touchent. Il inclina la tête.

- A Spook. C'est lui qui a fait l'essentiel du travail.

Flavien porta le cocktail à ses lèvres et prit une petite gorgée histoire de prendre la température de l'eau. Sans mauvais jeu de mot.

La boisson était rafraichissante et définitivement la bienvenue après une journée passée sous le soleil de Busad. Déposant le verre devant lui, il attrapa la petite touillette colorée qui trônait au milieu de la glace et se mit à remuer le liquide d'un air songeur. Il ignorait comment parler de son passé allait apporter quoi que ce soit à leur travail d'équipe, mais si Léonie pensait que ça pouvait l'aider à oublier un peu son frère, il ne pouvait qu'accéder à sa requête. D'une part car il n'appréciait pas franchement d'être apostrophé à chaque fois que sa route croisait celle de Léonie. D'autre part car il ne savait que trop bien combien il était difficile de ne pas laisser une ombre du passé dicter sa conduite.

- Les montagnes surplombant Dyen... Elles respirent la tranquillité. Offrit-il lentement. Il est vrai que le lieu du repos éternel des Dragonniers et de leurs montures était particulièrement paisible. Les Dragons sauvages qui survolaient l'endroit respectaient le sommeil de leurs frères et sœurs endormis. C'est un lieu gorgé de Magie. Nislegiin est de loin la plus belle région dans laquelle j'ai eu la chance de me rendre.

Il y a de ça quelques années, il avait tenté sa chance à Dyen pour espérer en apprendre plus sur la propriétaire du vieux journal qui ne quittait jamais sa personne. Sa quête n'avait pas aboutie mais il avait eu la chance de croiser la route d'un éleveur de Dragons chevronné qui avait accepté de partager avec lui quelques perles de son savoir. Après l'avoir longuement sermonné pour l'imprudence dont il avait fait preuve en s'approchant de ses compagnons ailés sans once d'expertise, bien sûr.

- Je n'y suis pas resté très longtemps, mais j'espère pouvoir y retourner prochainement. Parcourir les Kharaal Gazar me donne l'occasion de passer du temps avec Aki, Expliqua-t-il en désignant d'un geste la Nokhoi qui se reposait, Mais je veux continuer à explorer tout Irydaë. Il y a tant de Créatures que nous ne connaissons qu'à travers les rumeurs qui circulent à leur sujet...

Flavien souriait, rêveur, se rappelant sans doute de sa rencontre fortuite avec la monture de l'éleveur attentionné. Il avait eu l'occasion de contempler de très près la dentition d'un Dragon des Forêts ce jour-là. Il secoua la tête pour descendre de son petit nuage et revenir au présent. Que lui avait-elle demandé, déjà ?

- Je crois que si j'ai choisi de suivre la voie d'Orshin, c'est parce que j'ai toujours été intrigué par la faune. Même en pratiquant les soins, j'ai toujours préféré traiter les maux des familiers des mages de passage à Valvonta, plutôt que les leurs.

Il grimaça, conscient que son explication n'avait que peu de sens pour Léonie. Plutôt que de la laisser le questionner davantage et risquer d'appuyer par inadvertance là où ça fait mal, il reprit la parole.

- Mes parents vouent un amour sans faille à Möchlog et j'ai suivi leur exemple quelques années durant. En Suhury comme dans de nombreuses régions, on ne se pose pas vraiment la question de savoir de quel Architecte son enfant est le plus proche avant de lui enseigner ses préceptes. Servir Möchlog n'est pas un choix. Ce n'est pas non plus un devoir. Il en va simplement ainsi. L'odre des choses, pareille à la vie et à la mort. Rien de plus, rien de moins.

Évoquer son hameau semblait le drainer d'une partie de son énergie. Il soupira.

- Et puis..., Il s'arrêta un instant, le visage de la jeune femme qui avait motivé son départ dansant derrière ses prunelles, Je suis parti. J'ai voyagé à travers My'trä et Nislegiin et je ne me suis pas arrêté depuis.

Son voyage, qu'il avait débuté dans le but d'honorer la mémoire d'une parfaite inconnue, l'avait mené à découvrir sa véritable vocation. Il ne regrettera jamais son statut de nomade, préférant largement l'errance à l'attachement à une région dont les principes et la morale finiraient indéniablement par colorer les siens.

- Vous n'avez jamais pensé à quitter les Kharaal Gazar ?, Questionna-t-il, A voyager ? A découvrir ce monde que vous souhaitez si profondément unifier ?

Il prit une nouvelle gorgée de Lagon Bleu, observant silencieusement la My'tränne. Il était curieux d'entendre sa réponse.

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[Terminé] Quand l'incertitude et l'inquiétude se mélangent  EmptyDim 11 Fév - 19:10
- «  À Spook et vous en ce cas » réajusta-t-elle avant de tremper ses lèvres dans le mélange


Léonie savoura le mélange, sans pour autant déceler la très légère goutte d’alcool ajouté à l’intérieur. Le tout était un mélange de fruits et le bleu devait être amené soit via une plante spécifique, soit un petit jeu minutieux de fruits de deux couleurs différentes, offrant à la fin ce visuel bleuté. Redéposant son verre sur le bois, elle écouta la première réponse. N’osant qu’à peine fermer les yeux pour imaginer pleinement les propos. Dans son imagination, Dyen était une ville fantastique, grande, ou chaque habitation était suffisamment large pour pouvoir abriter un dragon. Léonie n’avait jamais eu la chance d’en voir et son esprit aussi imaginatif soit il ne lui permettait pas d’entrevoir à quel point l’animal pouvait être majestueux. La protectrice se pinça les lèvres, un peu envieuse certainement, de ne jamais avoir eu l’occasion de voyager, le regrettait-elle pour autant ? Absolument pas.

- « Ne pourrait-elle pas vous suivre là-bas ? » questionna sincèrement la mye’tränne, conscient qu’elle ne se séparerait de Spook pour rien au monde.

L’homme semblait être un grand passionné, élément qui n’échappa pas à la protectrice qui reconnaissait dans ses descriptions la même admiration qu’elle pouvait avoir lorsqu’elle parlait de son travail, ou même de sa ville. Difficile de ne pas être ce que toute notre âme nous insuffle. Cette comparaison mentale faite, la jeune femme ne put que potentiellement mieux comprendre le comportement distrait de son interlocuteur. Attrapant son verre du bout des doigts, elle avala une nouvelle gorgée, moyen qu’elle avait trouvé pour éviter de l’assaillir avec une autre montagne de questions. Ses prunelles s’écarquillèrent néanmoins quelque peu de surprises. Möchlog, voilà qui expliquait bien des choses, notamment ce comportement un peu froid, distant. Léonie étouffa un petit rire, se trouvait particulièrement ridicule de ne pas y avoir songé avant. Tout chez lui respirait cette éducation particulière, de sa façon de s’exprimer à sa manière de se comporter. Au fur à mesure des explications, la protectrice eut l’impression de voir son interlocuteur s’éteindre, comme-ci les souvenirs n’étaient pas agréables à raconter. Avait-elle avec sa curiosité déplacée atteint un point sensible qu’il aurait mieux fallu éviter. Elle se promit de ne pas fouiller davantage son passé, soucieuse de respecter l’intimité de son interlocuteur.

- « Un croyant en Möchlog, cela ne m’étonne pas… Sans vouloir vous offenser, vous en avez tous les traits de caractère… Je note qu’il ne serait nullement bon de débattre avec vous de l’intérêt de la mort ou de la vie. » Elle termina sa phrase dans un sourire signe que ce n’était aucunement un reproche, bien au contraire « Un voyageur donc, à la double spécificité, Möchlog et Orshin, intéressant. »

La question qu’il formula surprit la jeune femme, qui resta un instant sans réponse. Elle attrapa son verre, offrit un nouveau sourire à la serveuse qui venait de déposer un apéro offert par la maison. Des petits popcorns salés, simples et efficaces, chose plutôt rare dans l’établissement. Cette petite pause, avait permis à Léonie de réfléchir à la formulation de sa phrase.

- « Non, jamais. Petite peut-être un peu, comme tout enfant, je suppose, je rêvais de liberté et de grand espace… Et puis, j’ai rapidement ressenti le besoin de rendre ce qu’on m’a offert. » Elle afficha un sourire, sincère «  Je n’ai plus envie de voir le peuple my’trä souffrir, je voudrais être un acteur de ce changement, décider et non pas simplement subir les choix des autres. » Elle s’exprimait mal, mais en réalité, Léonie ne supportait pas d’être impuissante face à une situation, elle avait ce besoin d’aider permanent «  Je ne souhaite pas profondément unifier Irydaë » souffle-t-elle «  Je souhaite simplement que chacun accepte les autres, que chaque personne puisse vivre sans nuire aux autres, c’est tout… Simple, mais un peu utopique visiblement. »

Léonie se sentit rapidement gênée par ses paroles, elle était vue comme une femme carriériste qui ne vivait que pour avoir une promotion, plus de pouvoir. Il était évident qu’elle ne rechignerait pas avoir plus de responsabilité, que s’était sans doute un objectif qu’elle n’admettrait pas, mais il y avait surtout cette autre part importante, sa sensibilité, sa bienveillance, son envie d’aider simplement. Continuant de câliner Spook, sans même s’en apercevoir elle reprit la parole :

- «  Mes points d’attache sont ici de toute façon, jusqu’à maintenant je n’ai aucune raison de partir. La région me convient, mon métier aussi… Je ne peux pas dire que je ne vais jamais ressentir la même envie que vous, découvrir le reste, mais pour l’heure j’ai un certain équilibre, c’est rassurant et plaisant. Et puis, Busad est une ville active, il y a beaucoup de voyageurs comme vous, une journée n’est par conséquent, jamais identique, vous voyez… »

La serveuse venait de faire son apparition, déposant les plats choisis devant chaque personne. Léonie découvrit donc un poisson du coin dans son assiette parfaitement mis en valeur par différents agrumes à la coloration orangée. Le plat donnait envie et même si l’assiette ne débordait pas vis-à-vis des quantités, elle restait très agréable à l’œil. Le ventre de la protectrice grogna quelque peu, pour l’amusement de l’employée qui venait d’ailleurs de poser aussi une petite écuelle d’eau fraîche.

- «  Bonne continuation de repas, si vous avez besoin de quoi que ce soit, n’hésitez pas. »

Elle laissa sur la table la carafe d’eau plate, avant de laisser ce qui lui semblait être un couple profiter des plats. Léonie jeta un œil à l’assiette servie devant Flavien, guettant sa réaction, espérant secrètement qu’il ne serait pas déçu par le goût ou la présentation.

- «  Alors, première impression ? » questionna-t-elle « Je me dois de vous souhaiter un bon appétit en tout cas. »

Récupérant fourchette et couteau, la mye’tränne débuta le décorticage de son poisson, tout en délicatesse. Sa curiosité semblait avoir disparu tout comme son envie de discuter, peu à peu son caractère plutôt solitaire, fermée, reprenait le dessus malgré sa volonté à être de bonne compagnie. Pensive, elle ne se rendit pas compte qu’elle était restée silencieuse longtemps, si bien que quand elle revint sur l’instant présent, ses joues s’empourprèrent légèrement :

- « Excusez-moi… J’étais dans mes pensées… Je n’ai même pas l’excuse de communiquer avec Spook » tenta-t-elle de plaisanter « Alors, est-ce que c’est bon ? Savez-vous déjà ce que vous allez faire demain ? Si je puis me permettre… Il y a une source d’eau chaude à l’est de la ville, dans la forêt ressemblant d’extérieur à un marécage, si on ignore les insectes… C’est très agréable, elle est basée sur un ancien volcan. Si vous aimez la faune c’est un endroit parfait, mais faites attention cependant, ce n’est pas sans risque là bas »

Flavien Teleri
Flavien Teleri
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[Terminé] Quand l'incertitude et l'inquiétude se mélangent  EmptyLun 12 Fév - 23:47
Irys : 887826
Profession : Soigneur itinérant - Guérisseur
My'trän +2 ~ Chimères
Quel enfant d'Irydaë n'avait pas au moins une fois rêvé de sillonner les routes les plus périlleuses, gravir des montagnes escarpées ou braver le danger d'un sommet enneigé pour se lancer à la poursuite de leurs Créateurs ? Quel petit d'Homme n'avait pas rêvé être l'un des rares privilégiés à s'entretenir avec l'une de ces Entités dont la présence en toute chose ne rendaient pas leurs apparitions moins fugaces ? Parcourir le vaste monde et tracer sa route sans que rien ni personne ne se dresse sur sa route ?

Tous les enfants devaient apprendre à dompter cette soif d'aventure en grandissant. ça n'avait pourtant pas été le cas pour Flavien. Non content d'avoir passé son enfance sans avoir le moindre rêve, le moindre désir de rébellion ou simplement de se différencier de la masse, il avait attendu d'être adulte pour réveiller son cœur d'enfant.

Léonie, pour sa part, avait rejoint une cause et non des moindres : celle de servir les siens et plus encore, la population entière d'Irydaë. Pour une petite fille qui s'était vite assagie, elle était une jeune femme qui n'avait pas fini de rêver. Elle avait l'air de comprendre qu'unifier les peuples d'Irydaë était une belle utopie, pourtant elle avait l'air de penser qu'il était possible que tout à chacun apprenne à accepter son voisin tel qu'il était, sans forcément se lier d'amitié avec lui, mais sans pour autant chercher à le nuire. Une entente cordiale mais distanciée sur tout l'ensemble du continent ravirait la Protectrice qui, malgré le fait qu'elle soit convaincue que la simplicité de son affaire, avait l'air de se rendre compte de l'improbabilité d'un tel dénouement pour leur Terre.

Malgré tout, elle campait sur ses positions, persuadée du bien-fondé de sa démarche. Elle avait raison sur un point : tout serait bien moins compliqué s'il n'était pas monnaie courante pour les uns et les autres de se tirer dans les pattes pour asseoir un quelconque statut.

- Vous prêchez un converti. Marmonna-t-il contre le bord de son verre.

Pas sûr que son détachement blasé soit tout à fait ce qu'elle espérait de la part des populations d'Irydaë, mais il ne pouvait guère offrir plus à la My'tränne. Les affaires d'Etat ne l’intéressaient guère. Tant qu'on ne lui ôtait pas la liberté de voyager, il était satisfait.

Il hocha machinalement la tête en l'écoutant parler. On aurait pu croire qu'il n'en avait pas grand-chose à faire d'en apprendre plus sur les raisons qui la poussaient à avoir choisi la protection de Busad comme corps de métier, mais c'était partiellement faux. S'il est vrai que Flavien ne savait pour l'instant pas quoi faire de ces données, il accordait une attention polie à Léonie. Il n'était que trop conscient de la froideur que pouvait avoir son visage au repos, aussi préférait-il hocher régulièrement la tête quand on s'adressait à lui. Mieux valait-il sembler désintéressé mais présent que complètement absent.

La serveuse arriva avec leurs plats, coupant court à la conversation par son apparition. Elle déposa leurs assiettes respectives devant eux et leur souhaita un excellent appétit avant de s'éclipser avec un petit sourire attendri que Flavien ne calcula pas, trop occupé à observer son assiette d'un air perplexe. Vu la présentation des aliments, il n'y aurait guère qu'au goût qu'il pourrait espérer reconnaitre la nature des ingrédients. Un composant de son assiette en particulier le dérangeait et il ne se priva pas pour le foudroyer du regard. Les petits sablés fleuris. Evidemment que la Chomul allait refaire son apparition.

Léonie lui demanda ce qu'il pensait de son assiette, le forçant à arrêter de foudroyer les pauvres fleurs du regard pour lever les yeux sur la Protectrice, ses sourcils se dénouant au passage. Il baissa à nouveau les yeux pour inspecter son plat d'un air interdit, avant de répondre, platement.

- C'est... ça sent bon.

Il jurait que c'était une réponse, même si le timbre de sa voix indiquait plutôt une question, aussi se hâta-t-il de rajouter "Bon appétit". Il ne savait franchement pas quoi dire sur le contenu de son assiette. C'était présenté d'une telle manière que le soigneur était persuadé que si les aliments avaient simplement été disposés normalement dans son assiette, Léonie aurait eu à payer la moitié du prix. Honnêtement, ce qu'il supposait être un milles-feuilles de différentes lamelles de champignons avait dû mettre bien plus de temps à préparer que l'ensemble de ses aliments n'avaient pris pour cuire.

Flavien attrapa ses couverts et piqua soigneusement dans les champignons, qu'il sauça un peu avant de goûter. Pour lui qui avait l'habitude de manger le plus simplement possible, le mélange de nombreuses saveurs et les pointes subtiles d'épices eurent vite fait de menacer de le submerger. Il se montra moins courageux à la bouchée suivante, goûtant une petite part de galette aux céréales, qu'il mâcha lentement. Paré, cette fois, à la présence d'épices et d'aromatiques, il savoura davantage la préparation. Tout était question de juste mesure.

La fraicheur des ingrédients était indéniable, et même s'il boudait les fleurs de Chomul, repoussées de ses biscuits aux amandes pour finir baignant dans la sauce, le nomade mangeait avec appétit. Évidemment, ça ne valait pas un beau morceau de viande rôti à la broche sur un feu de bois, mais il supposait que ce genre de plats était conçu pour un autre type de palet. Selmac n'avait pas entièrement l'air de cet avis, vu qu'il fixait avec attention l'assiette de Flavien sans oser s'approcher. Il était peut-être très indiscipliné, s'il y avait bien une chose qu'il respectait, c'était le repas de son maître. L'Aitah savait qu'il arrivait parfois à son protecteur de ne pas manger à sa faim, aussi se faisait-il un devoir de le laisser tranquille pendant les repas. Il grignotait assez à longueur de journée, de toute façon.

Léonie se racla la gorge, attirant son attention. Elle avait l'air gênée par le silence qui s'était installé et Flavien secoua la tête en l'entendant s'excuser. Ce n'était vraiment pas nécessaire. Il répondit par un vague "Mhm-hm" lorsqu'elle lui demanda si le plat était à son goût et considéra un moment sa question avant de hausser les épaules. Il ne savait pas exactement ce qu'il allait faire demain. Étudier la faune, très certainement. Il avait un rapport très prochain à faire, après tout.

La My'tränne le considéra un moment avant de glisser qu'il existait une source d'eau chaude sur les terres d'un ancien volcan, à l'Est de la ville. Un lieu parfait pour se détendre et observer la faune locale sans être dérangé par les allées et venues des voyageurs de passage à Busad qui n'allaient certainement pas s'embêter à tenir compagnie à une flopée de moustiques et autres moucherons que pouvaient bien attirer le point d'eau. De plus, le terrain était parfait pour Aquila, qui avait encore besoin d'un peu de repos après sa dernière mésaventure. L'eau de la source lui ferait le plus grand bien.

Les yeux du nomade qui ignorait tout de cet endroit merveilleux, s'agrandirent. Alors qu'il faisait déjà des plans sur la comète de son côté, réfléchissant à quel était le meilleur moment de la journée pour observer la faune, la Protectrice parlait de danger. L'endroit était risqué. Sans bien réfléchir à ce qu'il disait, Flavien haussa les sourcils et laissa son enthousiasme à l'idée d'explorer un nouveau coin de Paradis prendre le dessus.

- Accompagnez-moi, dans ce cas, Il cligna des yeux. Tiens. Depuis combien de temps n'avait-il pas proposé de son plein gré à quelqu'un de se joindre à lui ?, Si on doit partir en mission ensemble, autant qu'on apprenne à travailler ensemble. Si vous n'avez pas envie de me noyer dans la source chaude d'ici la fin de la journée, alors j'aurais peut-être une chance de ne pas finir jeté en pâture aux Chuluuns.

Tout portait à croire que la sympathie de Spook à l'égard de sa maîtresse l'incitait en retour à se montrer plus spontané avec elle. Ça, ou l'ouverture d'esprit et la retenue de Léonie la rendait bien plus tolérable que les trois-quarts des personnes avec lesquelles il s'entretenait. Sans doute était-ce un savant mélange de tout ça.

Quelle que soit la réponse de la Protectrice, il n'allait pas la laisser se dépatouiller toute seule après une demande aussi saugrenue. Une fois sa réponse donnée il lui signifia son accord, puis c'est avec la délicatesse d'un raz-de-marée que Flavien changea de sujet. Maintenant que leurs assiettes étaient presque terminées, ils avaient des plats à noter.

- Personnellement, j'ai trouvé mes champignons à la crème très bons. Dit-il lentement, Je me serais passé des fleurs, mais le reste de l'accompagnement était bien trouvé. Même si je déplore l'absence de chants liturgiques de la part de ma galette de blé. Litanie de Céréales et de Légumineuses. Franchement, quelle idée ! Et votre poisson à l'orange, ça donne quoi ?

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[Terminé] Quand l'incertitude et l'inquiétude se mélangent  EmptyMar 13 Fév - 18:00

La froideur qu’elle semblait percevoir chez Flavien sembla décontenancer quelque peu la protectrice, qui devait déjà se faire violence pour ne pas se renfermer complètement comme elle en avait l’habitude. Ses lèvres s’étaient entrouvertes, puis refermées, alors qu’elle cherchait à comprendre l’expression du visage de son interlocuteur, ou simplement sa façon globale de se comporter. La jeune femme avait beau avoir entendu parler du légendaire comportement des croyants en Möchlog, elle n’en restait pas moins particulièrement surprise –et pas forcément dans le bon sens-. Son interlocuteur n’avait semble-t-il pas réellement apprécié ou tout du moins trouvé l’intérêt de cette obsession pour la paix, n’avait-il pas suffisamment fréquenté Zaël pour comprendre à quel point la passion et l’insouciance du dirigeant pouvaient être contagieuse.  Prenant une légère inspiration, la my’tränne s’était contentée d’opiner lentement à sa phrase sur le fait qu’il était déjà converti avant de plonger ses deux perles azurs dans sa boisson de la même couleur. Le silence. Encore. Sans qu’il ne soit particulièrement lourd, juste intrigant. Difficile de communiquer avec une personne qu’on ne connaît pas, d’autant plus quand cet individu vous fait penser à un autre que vous n’appréciez guère. Léonie se pinça la lèvre inférieure, avalant une longue gorgée de son lagon bleu avant d’aviser la serveuse qui venait avec les plats.

Moment parfaitement choisit pour relancer un semblant de conversation et la protectrice ne se gêna pas pour tenter une parole un peu maladroite et surtout banale, questionnant sur l’aspect du plat. Flavien ne semblait guère plus emballé que par le sujet de la conversation précédent, pour le plus grand malheur de Léonie. Ne l’avait-elle pas invité pour passer un bon moment et surtout le remercier et voilà qu’elle ne voyait face à elle qu’un homme passablement agacé et irrité par l’endroit, la nourriture et la conversation. S’attendait-elle très certainement à le voir se lever et partir sans en mesure véritablement le motif. Il daigna néanmoins lui répondre, provoquant un léger soupir de soulagement chez celle qui vouer sa vie à la protection de la ville. Léonie avait néanmoins écarquillé les yeux, surprise par la faculté qu’il avait de faire un semblant de compliment à un plat, tout en ayant sur le visage, la mine fermée, presque déprimante. La protectrice se surprit à penser qu’il était le genre d’homme à dire je t’aime, tout en démontrant une envie de se suicider prononcée. Sa pensée la fit sourire, presque rire et dut-elle forcer une quinte de toux pour éviter de démontrer quoi que ce soit. C’était plus nerveux qu’autre chose, rares étaient les personnes pouvant se vanter de l’avoir déstabilisé ou mis mal à l’aise. Les objectifs les plus complexes étaient les meilleurs et les plus satisfaisants à atteindre, aussi, n’abandonna-t-elle nullement le but qu’elle s’était fixé, lui faire passer un bon moment. Il lui souhaita un bon appétit, phrase qu’elle rendit plus par réflexe que par politesse, ajoutant un sourire un peu éteint, préoccupé par cette sensation de le voir s’ennuyer en sa compagnie.

Avisant enfin son assiette, la détaillant un long moment, la my’tränne ne put s’empêcher une légère grimace. Pas la moindre trace de poissons, du moins, pas sous la forme qu’il devrait avoir, des petits cubes carrés  trônaient sur un lit de mélange rappé de ce qui semblait être des fruits orangés. Un savoureux éclat visuel et mélange chaud froid. L’odeur était sucrée, alors qu’elle s’attendait à manger un plat à tendance plutôt salé, n’aurait pas dû se douter du mélanger avec l’intitulé. Humant davantage le plat, elle ne fut guère surprise de voir une petite tête s’installer entre son assiette et elle. Spook semblait à présent parfaitement éveillé, humectant avec envie le plat de sa maîtresse, fronçant les sourcils, elle fit quelque bruit de langue qui signifiait clairement non.


- «  Je crois que tu m’as déjà suffisamment fait peur pour la journée, on va laisser ton ventre se reposer un peu… N’est-ce pas ? » demanda-t-elle en direction de Flavien.

Boudeur, Spook était descendu des jambes de sa protectrice, s’installant sur le sol de façon à tourner le dos à la fois au voyageur et à la my’tränne. Malgré la journée, le petit animal ne semble guère enclin à faire preuve de plus de vigilance. Enfin seule face à son assiette, Léonie, après une petite hésitation finit par attraper ses couverts de façon à déguster son plat, si les premières bouchées ne furent pas forcement bien reçu, la faute à son palais qui n’était absolument pas habitué à ce genre de saveur, le reste fut semble-t-il apprécié. La conversation s’était poursuivie un peu hésitante, jusqu’au silence troublé de la my’tränne qui ne s’était d’aucune façon attendue à recevoir une invitation de Flavien. Partager une journée avec lui, à la source d’eau chaude ? Elle haussa un sourcil, avant de relever le visage vers son interlocuteur. Son second sourcil avait fini par se hisser aussi haut que le premier sans que le moindre son de réponse ne s’extirpe de ses lèvres. Après un silence de plusieurs minutes où, juste au cas où, Léonie avait vérifié d’un regard à droite et à gauche si elle était bien la destinataire de cette proposition, elle avait fini par reprendre la parole :

- «  Eh bien… c’est d’accord. »

Les rôles avaient dû s’échanger quelque peu, si auparavant s’était bien elle qui menait la conversation et démontrait un certain plaisir à partager ce moment. Dans cette dernière réponse ce ne fut pas le cas, pas de sourire, pas de pétillements rien, juste une gêne palpable. La protectrice ne comprenait pas, tout chez lui, lui donnait la sensation qu’il ne passait pas un bon moment et finalement, dans un certain entrain il souhaitait qu’elle l’accompagne dans les sources ? Non vraiment, Léonie n’en restait pas moins particulièrement dubitative. Constatant son propre changement de comportement, elle tenta de se dépatouiller comme elle le pouvait.

- «  Je vous promets d’essayer de ne pas vous noyer… Cependant, j’espère que l’inverse sera également à noter. »

Une nouvelle fois, malgré la volonté de redonner un peu d’aplomb à la conversation, sa voix était plate, sans émotion et aucun sourire n’avait réussi à percer sa motivation. Terminant son plat dont elle avait trouvé la quantité plutôt légère finalement, elle n’adressa qu’un dernier regard à Flavien lorsqu’il avait une nouvelle fois –et à sa grande surprise- prit de nouveau la parole.

- «  Vous n’êtes pas trop objectif vis-à-vis des fleurs, je vous soupçonne d’avoir votre avis légèrement influencé par les événements de la journée » le taquina-t-elle naturellement sans forcément en prendre conscience « Quant à l’absence de chant, rien ne vous empêchez pas de le faire vous-même » continua-t-elle dans le même ordre d’idée.

En revanche, pour savoir si elle avait apprécié ou non l’ensemble il lui fit un petit instant de réflexion. Difficile de lui souffler que le plat était horrible, plus qu’elle avait absolument tout mangé –Léonie déteste le gâchis-. La my’tränne haussa lentement les épaules, ce n’était pas un lieu qu’elle fréquenterait à outrance, elle était plutôt simple et semblait conserver cette préférence :

- «  La prochaine fois, si prochaine fois il y a, j’essayerai de choisir par moi-même mon plat » un demi-sourire gêné et une suite « C’est particulier comme endroit… Je dois bien confesser avoir une préférence pour plus de simplicité. »

Derrière elle, la serveuse semblait se faire rouspéter discrètement par le patron qui la trouvait un peu trop lente. À peine Léonie terminait son verre, qu’une autre jeune femme venait récupérer les assiettes, les couverts et les verres vident. Tendant à chacun d’eux les cartes pour les desserts.

- « Si je puis vous conseiller, la suggestion de la maison de ce soir est notre voyage haut en couleur, c’est un mélange de fruits des différentes régions saupoudré par des feuilles d’or. Nous n’en avons eu que des bons retours. »

La jolie jeune femme décrocha un large sourire, dévoilant des dents blanches parfaitement alignées. Croisant les mains dans son dos, elle attendit sagement d’obtenir les commandes du couple.

- « Eh bien… Je vais vous faire confiance… »

Un regard vers Flavien, elle avait attendu d’obtenir son envie pour terminer le repas, avant de disparaître tout en ayant au préalable évidemment récupéré les cartes. Avisant son interlocuteur, Léonie se demandait si la suite serait tout aussi particulière que les plats. Prenant une légère inspiration, elle tenta de poursuivre la conversation, optant pour un brin d’honnêteté.

- «  Si vous n’avez pas réellement envie que je vous accompagne lors de votre sortie, je peux comprendre, vous savez… » dit-elle avec un sourire « Mais, si c’est votre souhait réel, outre une quelconque politesse, je serais ravie de vous accompagner. » Elle laissa un silence, léger « Ne voyagez-vous que seul ou êtes-vous de temps à autre accompagné ? Autre que par vos amis à poil, j’entends, évidemment. »

N’avait-elle qu’à peine eu le temps de formuler la question, que déjà les desserts faisaient une apparition surprise. Une nouvelle serveuse, encore, tout aussi rapide et précise que les deux autres.

- « Bonne continuation » dit-elle simplement en offrant un clin d’œil au couple tout en déposant en douceur les deux assiettes.

Flavien Teleri
Flavien Teleri
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[Terminé] Quand l'incertitude et l'inquiétude se mélangent  EmptyMer 14 Fév - 0:10
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Profession : Soigneur itinérant - Guérisseur
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Flavien haussa un sourcil lorsque la jeune femme lui proposa de prendre les choses en main et de pousser la chansonnette. Le chant liturgique était bien le seul qu'il avait eu l'occasion de pratiquer, priant quotidiennement Möchlog de lui accorder son savoir lorsqu'il se formait très sérieusement à son art... Mais il y avait une bonne raison à ce qu'il préfère à la vie de barde celle de chasseur. Notamment le silence.

Léonie avait l'air contrariée par le squelette de poisson qui trônait au centre de son assiette, marmonnant qu'elle préférait un plat simple plutôt que l'œuvre d'art qu'elle avait pris soin de désosser soigneusement, n'en laissant aucune miette. S'il y avait au moins une chose sur laquelle Léonie et lui pouvaient s'entendre, c'était le fait que la simplicité d'une cuisine faisait aussi tout son charme.

Pour le coup, il avait plutôt eut l'impression que le chef cuisinier avait subitement eut la folle envie d'utiliser tout son assortiment d'épices dans le même plat, tel un peintre pris de folie qui lançait sur sa toile toutes sortes de couleur et appelait ça un chef-d’œuvre.

Ils n'eurent pas l'occasion de plancher sur la question très subjective des goûts et des couleurs qu'une toute autre serveuse s'occupa de débarrasser assiettes, verres et couverts avec une rapidité qui forçait le respect. Balançant sa lourde charge sur un plateau tenu d'une seule main, elle leur tendit à chacun la carte des desserts avec un sourire avenant. Ses yeux restaient pourtant totalement neutres, aucunement plissés : signe très probable qu'elle n'était pas aussi heureuse de les servir qu'elle prétendait l'être. Flavien en connaissait un rayon sur ce type de sourire : il avait l'habitude de les offrir à bien du monde.

Elle leur conseilla la salade de fruits et resta figée devant eux, attendant qu'ils se décident. Rapidement. Son large sourire dévoilant ses dents était assez intimident.

Flavien ouvrit nerveusement sa carte tandis que Léonie optait pour la suggestion du Chef. De son côté, le soigneur s'en passerait bien. Vu le concentré d'agrumes en tout genre qui s'étaient battus plus tôt dans l'assiette de la Protectrice (une véritable farandole à n'en pas douter), il préférait éviter de se retrouver avec un composé d'oranges dans son dessert. Son regard accrocha à un titre d'apparence inoffensif. Tarte à la pomme revisitée. Il ne pouvait pas mal tomber avec ceci, pas vrai ?

- Une tarte aux pommes, merci.

Acquiesçant, la jeune femme récupéra les cartes d'une main d'experte tout en déclarant qu'ils venaient de faire un "Très bon choix, messieurs, dames". Aussi vite qu'elle était apparue, elle avait déjà disparue dans les cuisines.

Flavien cligna lentement des yeux en la regardant partir. Il n'avait pas l'habitude de se presser, alors voir la jeune-femme pratiquement sprinter jusqu'aux cuisines tout en feignant une démarche tranquille et assurée était un peu déconcertant. Alors qu'il s'interrogeait sur l'origine de toute cette agitation, son regard s'était arrêté sur la porte donnant accès à la cuisine, l'atelier du maître. Il ne reporta son attention sur Léonie que lorsque celle-ci s'adressa à nouveau à lui, glissant qu'elle comprenait parfaitement s'il préférait découvrir les sources chaudes seul plutôt qu'accompagné.

La Protectrice lui assura avec un sourire qu'il n'avait pas besoin de se montrer poli et qu'elle comprenait tout à fait qu'il puisse ne pas vouloir l'avoir dans les pattes.

- Si ça me dérangeait, je ne vous l'aurais pas proposé. Répondit-il simplement, réfrénant l'envie de hausser les épaules pour accompagner sa réponse tellement évidente.

Il était bien le dernier à réfléchir prudemment aux sentiments des autres lorsqu'il faisait quelque-chose. On pouvait appeler ça de l'égoïsme, lui préférait dire qu'il ne voyait pas l'intérêt de faire une série de calculs savants pour tenter de deviner ce qu'il pouvait bien se passer dans la tête d'autrui avant de parler. Autant miser sur la simplicité, ça évitait bien des ennuis. Aussi bien derrière les fourneaux que dans la vie de tous les jours. Pourquoi tout le monde cherchait tout le temps à se compliquer la vie ?

Un silence s'installa entre eux et Flavien se demanda si, à nouveau, sa réponse entrait dans la catégorie de celles qui refroidissait ses interlocuteurs. Avant qu'il ne se hasarde à lui demander si c'était le genre de réponse qu'elle souhaitait entendre, Léonie reprit la parole pour lui demander cette fois s'il voyageait tout le temps seul ou s'il avait l'habitude de faire de la route en compagnie d'autres nomades qu'il aurait pu croiser en chemin.

La fin de sa phrase fut mangée par l'arrivée d'une énième serveuse aux dents toutes aussi blanches, qui déposa devant eux leurs desserts. Elle leur souhaitait une bonne dégustation, leur offrant un petit clin d'oeil que Flavien trouva plutôt étrange (ce genre de mimiques étaient assez difficiles pour le pauvre homme à interpréter), mais bien moins étrange que ce qui se dressait fièrement dans son assiette. Il lança un coup d'oeil à Léonie pour s'assurer qu'il n'était pas victime des farces d'un illusionniste et interpella la serveuse sur le point de s'en aller.

- J'avais commandé la tarte aux pommes ?

Cette fois-ci, c'était bien une question de sa part. Le soigneur n'était plus très sûr de ce qu'il avançait. Entre les lits, les liturgies et les farandoles, les tartes elles aussi avaient dû changer de définition.

- C'est bien cela monsieur. Sourit la serveuse doucement, Notre tarte aux pommes revisitée. Vous n'aimez pas la vanille ? Je peux renvoyer l'assiette en cuisine si vous souhaitez un autre parfum de glace.
- Ah... Non. C'est bon.

L'employée hocha joyeusement la tête, laissant le duo face à ses desserts. La dégustation pouvait commencer, mais Flavien était trop absorbé par son assiette pour seulement saisir la cuillère qui lui avait été apporté. Finalement, il leva les yeux vers Léonie et attrapa son couvert.

- Eh bien... Bon appétit !

L'homme n'attaqua pas son dessert pour autant. La My'tränne était en train de lui poser une question lorsque leurs desserts avaient fait leur apparition, et vu ce qui l'attendait dans son assiette, autant prendre le temps d'y répondre avant de se pencher sur la question de ce qui pouvait bien se passer dans la tête du cuisinier des lieux. Lui arrivait-il de voyager accompagné ? Bien évidemment. Même s'il occupait plus le rôle de l'accompagnant solitaire que du boute-en-train de service. Mais il était sûr que la Protectrice n'avait pas besoin de lui pour comprendre ce détail.

- Il m'arrive de voyager avec d'autres nomades, ou bien de faire un brin de route avec d'autres voyageurs rencontrés par hasard, s'ils voyagent dans la même direction et s'ils se montrent discrets. Je voyage seul, le plus souvent. C'est beaucoup moins contraignant comme ça. Je n'ai aucune destination précise la plupart du temps. Je me laisse guider par mes pas et de toute manière, comme vous le dites, je ne suis jamais vraiment seul.

Flavien jeta un coup d'œil aux familiers qui lui emboitaient le pas où qu'il aille (à l'exception d'Aquila que la nature empêchait de voyager sur les terres trop humides ou froides, au risque d'en tomber gravement malade). Il avait la chance de les avoir auprès de lui, mais même si les Créateurs décidaient un jour de les rappeler à eux, il ne serait jamais vraiment seul. Son visage, assombrit en pensant à la disparition de ses compagnons, s'éclaira légèrement.

Presque sans s'en rendre compte, il partagea sa pensée à la Protectrice.

- Du plus petit insecte au plus grand des dragons, tous ont été façonnés par Orshin. Il ne s'agit pas simplement de contrôler les bêtes, de les plier à sa volonté sans regard pour leurs propres désirs, ni même de dompter les plus terrifiantes pour montrer l'étendue des pouvoirs que l'amour d'Orshin peut accorder à ses disciples. Flavien avait une sainte horreur des individus qui se disaient répondre à l'appel d'Orshin sans pour autant respecter les créatures qu'ils invoquaient, Quelle que soit la région où je me trouve, je ressens la faune qui l'habite, comme une présence dormante et permanente dans mon esprit.

En agitant les mains devant lui, il repéra sa cuillère qu'il n'avait toujours pas lâchée, même au milieu de ses explications. Un peu étonné, il mit un temps à se rappeler qu'on leur avait apporté le dessert il y a quelques minutes déjà. Cette réflexion faite, il baissa les yeux sur son dessert. La boule de glace à la vanille qui le sublimait avait déjà à moitié fondu sous la chaleur de la fameuse tarte aux pommes revisitée.

Flavien fronça le nez. Il leva la tête, croisant le regard de Léonie (avait-elle déjà attaqué son assiette pendant qu'il parlait ?).

- Je suis désolé, mais... On est d'accord que c'est un sandwich ?

Sous une boule de glace à demi fondue trônait deux triangles faits de génoise, caramélisées, entre lesquelles avait été déposée de la compote de pommes chaude et quelques lamelles de ce même fruit. Le tout allégrement saupoudré de cannelle.

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[Terminé] Quand l'incertitude et l'inquiétude se mélangent  EmptyMer 14 Fév - 11:29

Si quelque chose semblait soudainement d’une évidence frappante, s’était bien l’incapacité de Léonie à comprendre le comportement et les réactions de son interlocuteur. Si les paroles allaient dans un sens, il ne fallait pas douter que l’expression de son visage ou de ses gestes allaient montrer le contraire. La jeune femme avait laissé un soupir discret s’exfiltrer de ses lèvres, sans réellement en déterminer l’origine. Léonie n’était pas agacée ni énervée par un quelconque comportement, simplement très légèrement dépassé par les événements. Le silence, encore, la protectrice détaillant son interlocuteur avec minutie. C’était la première fois qu’elle tentait de faire autre chose que son travail, premières fois qu’elle tentait d’être avenant et sociable et surtout premières fois qu’elle communiquait avec un croyant à la fois de Möchlog et d’Orshin. C’était déstabilisant cette faculté qu’il semblait avoir, de souffler le chaud et le froid dans une même phrase. La my’tränne fut néanmoins satisfaite de savoir que l’homme était sincère, que la demande n’avait rien d’une quelconque source de politesse. Affichant un nouveau sourire, la garante de la sécurité de la ville s’était servi un verre d’eau, proposant le liquide à son interlocuteur avant de lui servir un verre ou non en fonction de la réponse.

Relançant la conversation, elle n’avait pas tardé à être de nouveau stoppée dans son nouvel élan. Une autre serveuse à la dentition aussi parfaite que les deux autres venait de faire son apparition, délicieuses petites choses sucrées sur les bras. D’un geste habile dénotant d’une compétence d’agilité et d’équilibre que Léonie n’avait certainement pas, le service fut effectué sans aucune casse, les deux assiettes se retrouvant devant chaque destinataire –sans la moindre erreur-. La protectrice avait murmuré un merci, clignant des yeux un instant devant la beauté de son dessert, l’assiette était creuse, contenant une multitude de fruits découpés dans des formes extravagantes, le tout attirant l’œil par la présence de petite feuille d’or, très fine, délicate. Pour le coup, « le voyage haut en couleur » était entièrement respecté et l’intitulé parfaitement représentatif de ce qu’elle pouvait contempler. La salive lui montait déjà à la bouche, certaine que cette fois-ci, elle ne serait pas déçue. Relevant le regard vers sa compagnie de la soirée elle fut surprise de le voir interpeller la serveuse, demandant s’il s’agissait bien de sa commande. Poussant la bouteille d’eau qui lui obstruait la vue, elle cligna de nouveau des yeux. Perplexe par la commande de son interlocuteur. Si ça, s’était une tarte aux pommes, elle, elle était Gharyn.

Devant la réponse de la principale intéressée, Léonie comprit toute la subtilité de l’intitulé « revisité ». Il aurait pu simplement dire, inspiration tarte aux pommes, rien de plus, rien de moins. Naturellement elle avait haussé les épaules, un sourire amusé par la réaction de Flavien qui semblait être quelque peu dépité. Acceptant de conserver son assiette, elle avisa la serveuse s’éloigner et s’engouffre dans la cuisine. Une nouvelle fois, Léonie dut simuler une légère quinte de toux pour ne pas succomber à fou rire. Heureusement que le voyageur reprenait la parole pour poursuivre la conversation, sans quoi sa tentative de retenue aurait été un échec lamentable. Se concentrant donc sur le discours et sa formulation la protectrice ne put s’empêcher de relever un sourcil. Cela faisait beaucoup de « si » quand même, s’ils sont discrets, s’ils font dans la même direction, si, si, si,si… De nouveau elle manqua de rire, comprenant que l’homme n’appréciait vraiment pas, ou très peu la compagnie, un solitaire dans l’âme. Un sourire un peu plus présent sur ses lèvres, un peu plus étirée aussi elle se contenta d’opiner la tête, afin de montrer qu’elle entendait et qu’elle comprenait plus ou moins l’envie. Agréablement surprise par ses dernières paroles, elle sembla découvrir la sensibilité de celui qui lui faisait face, notant même une certaine forme d’amour, de passion pour son architecte, mais aussi pour l’environnement. Un instant, la jeune femme trouva le moment beau, agréable, oubliant presque la capacité de son interlocuteur à la déstabiliser tant il semblait fermer, sombre et peu avenant ou trop brut de décoffrage. Elle était en face d’un homme sincère, amoureux et fidèle à un architecte, comme elle.

Détaillant les gestes pleins de vies de Flavien, le sourire de Léonie s’était agrandi, comme-ci elle prenait soudainement conscience qu’elle n’avait pas réfléchie de la bonne manière avec lui. Ce n’était pas simplement un homme froid, non, il était tout bonnement comme elle. Pas habitué à être de bonne compagnie, ou de compagnie tout court d’ailleurs. Attrapant sa cuillère, elle s’apprêtait finalement à déguster –enfin- son assiette, quand particulièrement perturbé, il la questionna sur l’apparence de son dessert. Déposant de nouveau sa cuillère, Léonie se mordit avec force l’intérieur de la joue tout en détaillant la source de cette perturbation. La jeune femme eut beau se faire violence pour retenir son rire, il finit par lui échapper, la forçant à abandonner ce combat perdu d’avance. Son rire était généralement contagieux, naturel, non forcé, il montait légèrement dans les aigus, plutôt discrets, seul les tables non loin devait l’entendre, ou presque. Les larmes lui montèrent aux yeux dans le fou rire était important, il fallait bien admettre que la tête de Flavien et son dépit de ne pas reconnaître sa tarte aux pommes était unique. Cherchant à le taquiner, elle se calme un petit peu, prenant la parole d’une voix légèrement tremblante à cause de son rire :

- « Pas du tout… Je vois là une tarte aux pommes, ne la faites-vous pas ainsi ? » quémanda-t-elle les yeux légèrement plissés « De notre côté on rajoute même un peu de feuilles d’or, des pommes des différentes régions et même de la poire. La recette basique de la tarte aux pommes. » Elle hausse les épaules, essayant de conserver une mine sérieuse.

Avisant la mine de Flavien et en fonction de son aspect de perplexité, elle s’était remise à rire de bon cœur. La main sur le ventre, dont les douleurs commençaient à être présentes à cause de la contraction de ses muscles, elle finit par se calmer légèrement hoquetant encore un peu d’amusement. Spook intrigué par l’animation soudaine de la table avait fait demi-tour, montant sur les genoux de sa maîtresse pour aviser la source de cette réaction soudaine. Reniflant l’air en mettant les deux pattes sur la table, il était redescendu en comprenant que cela provenait de l’autre assiette. Ni une ni deux, il était déjà sur les genoux de Flavien, sans aucune gêne, aucun malaise, s’autorisa une léchouille sur sa joue avant de planter sa truffe juste au-dessus de l’assiette étrange. Respirant doucement, il aspira quelque peu la poudre de cannelle provoquant quelque éternuement. Par chance, il eut le réflexe de s’écarte un peu de l’assiette, sans quoi Flavien n’aurait même jamais eu la chance de la goûter.  Les actions de son animal firent sourire Léonie, qui hésita soit à s’excuser du comportement trop spontané, soit à rire encore. Spook lui semblait vexer encore et était redescendu pour s’installer non loin des compagnons de Flavien. C’est toujours mieux de bouder à plusieurs.

- «  Qui sait, ça va peut-être, être trèèèès bon » tenta de relativiser la jeune femme «  Un sandwich de pomme caramel avec un soupçon de glaces… » elle manqua de nouveau de rire « Vous me dites si c’est bon, d’accord, sinon… On peut toujours échanger nos assiettes si vous voulez. »

De son côté, Léonie commença la dégustation de son dessert, laissant sa cuillère récupérer quelque fruit, portant le tout à ses lèvres et là… Ce fut une véritable grimace qu’elle ne put retenir. Le tout était particulière amère, pas désagréable, mais amère et elle n’avait nullement l’habitude. Il y avait un arrière-goût qu’elle n’identifier pas. Cette salade de fruits n’était pas une simple salade de fruits, une expérience avait dû se jouer sans qu’on daigne l’informer. Une nouvelle grimace sur le visage, elle tenta d’avaler le tout sans trop paraître surprise :

- «  C’est…particulier. Je crois qu’il y a du fromage dedans… » supposa-t-elle en écartant une boule blanche, naturellement elle piqua d’ailleurs la boule blanche pour la place dans sa cuillère la tendant à Flavien «  Vous pouvez goûter et me dire si c’est bien du fromage ? Qui met du fromage dans une salade de fruits…. »

Flavien Teleri
Flavien Teleri
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[Terminé] Quand l'incertitude et l'inquiétude se mélangent  EmptyJeu 15 Fév - 1:00
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Léonie fit une drôle de tête à sa question, qu'il estimait pourtant pertinente. Elle aussi avait l'air étonnée, mais pas de la même manière que lui l'était en contemplant l'assiette avec une perplexité mêlée d'effroi (l'idée d'ingérer autant de cannelle d'un seul coup le rendait un brin nerveux). L'étonnement de la My'tränne était mêlé de sentiments bien plus légers, et Flavien ne tarda pas à le découvrir lorsque celle-ci fut prise d'un fou-rire incontrôlé, qui eut l'air de la surprendre autant que lui. Il écarquilla légèrement les yeux, ce qui ne fut pas pour arranger le cas de la jeune femme qui eut le malheur de croiser son regard et de faire une rechute flagrante, des larmes perlant au coin de ses yeux.

Léonie ne riait pas à gorge déployée mais l'exercice secouait son corps de tremblements discrets, à peine de légers soubresauts qu'elle peinait à contrôler. C'était une simple expression de joie réelle et pas une tentative de faire d'eux, le centre d'attention.

Le son clair intrigua Aquila dont les oreilles remuèrent en réponse. La Nokhoi ouvrit doucement les yeux pour observer paresseusement Léonie. Intriguée, elle pencha la tête sur le côté, comme pour questionner la nature de l'effusion. Ayant plus ou moins grandi aux côtés de Flavien, elle n'avait pas souvent eut l'occasion d'être confrontée à une situation où le nomade parvenait à soustraire un rire à quelqu'un. Elle se rassura légèrement dans le fait que l'homme semblait tout aussi étonné qu'elle.

Reprenant son calme, la My'tränne prit un air très sérieux. Elle avança sans aucune once d'hésitation dans la voix que cette manière de présenter ce type de dessert lui était tout à fait courante, lui demandant de quelle manière farfelue il aurait bien pu vouloir qu'elle soit présentée.

- Eh bien... De la pâte feuilletée, des quartiers de pommes, du sucre, des œufs, de la crème ? Vous savez. Une tarte.

Apparemment il avait tout faux sur la question. La tarte aux pommes nécessitait tellement plus que cela. Les pommes ne pouvaient pas simplement venir du même verger, bien évidemment que non, elles devaient provenir des quatre coins de la terre et, de préférence, ne pas avoir la même saveur. L'ajout de poires et de feuilles d'or dans la recette saugrenue de Léonie lui permis de réaliser qu'elle était en train de faire de l'humour, lui présentant cette horreur culinaire comme un grand classique de Busad.

Un sourire amusé fleurit sur les lèvres du soigneur à qui un petit rire échappa. Le ridicule de la situation et la bonne humeur de la Protectrice avaient eu raison de son air stoïque, pourtant tellement ancré dans ses habitudes. Par pur réflexe il baissa la tête, sa main fermée allant se nicher entre ses sourcils, son coude posé sur la table. Il pouffa silencieusement de rire, secouant légèrement la tête comme pour nier le fait qu'il s'esclaffait lui aussi. Il n'avait pas honte de rire, mais les vieilles habitudes avaient la peau dure, même pour un voyageur sans attache. Rire ainsi ne faisait jamais bonne figure pour un guérisseur digne de ce nom.

- Par les Créateurs. Soupira-t-il, un mince sourire toujours présent sur ses lèvres, Rappelez-moi de ne jamais mettre les pieds dans une boulangerie de votre belle Cité, si tel est le cas.

Léonie se joignit à lui pour ricaner de plus belle, pour le plus grand bonheur de quelques clients intrigués par la scène. Leurs rire ne manqua pas d'arracher un sourire bienheureux à une petite dame attablée non loin d'eux. Elle avait beau ne pas les connaitre, elle était heureuse de voir qu'ils commençaient finalement à s'ouvrir l'un à l'autre.

Une fois que nos deux adultes responsables et respectables réussirent à retrouver un semblant de calme, Spook fit son entrée. Déterminé à inspecter lui aussi le contenu de l'assiette qui faisait tant débat ce soir, il s'installa sur les genoux de Flavien comme si la place lui était déjà réservée. L'Aitah renifla soigneusement le met si joliment présenté, faisant l'erreur de s'approcher d'un peu trop près. La cannelle lui emplit le museau et le pauvre petit félin éternua, surpris.

Flavien ne savait pas s'il devait être heureux ou déçu qu'il ait eu le réflexe de s'éloigner de l'assiette, préservant l'intégrité de son dessert. Caressant tranquillement la tête de l'animal outré, il chercha à l'apaiser. Evidemment, l'Aitah vexé ne l'entendit pas de cette oreille et sauta à terre pour rejoindre Selmac qui avait lui-même rejoint Aquila. Le plus âgé des Aitahs se décala légèrement pour faire de la place à son cadet qui n'hésita pas une seconde à se coller contre le ventre de la Nokhoi léthargique. Il protesta brièvement lorsque Selmac entreprit de lui lécher le bout du museau pour le débarrasser des résidus de cannelle, mais fini par accepter la toilette si gracieusement offerte.

Léonie lui offrit une belle leçon de positivité en avançant que si l'aspect était étrange, le goût était peut-être resté authentique, lui. Souriante, elle l'invita à goûter et à la tenir au courant de ce qu'il découvrait, caché entre ces deux tranches de... génoise ? De pain ? Pourquoi était-ce si compliqué de réaliser une simple pâte à tarte ?

Oh et après tout. Il devait bien à avoir une raison qui faisait de cet établissement le lieu de prédilection des hauts placés de ce monde. Flavien peina à découper une part de la génoise et à récupérer quelques morceaux de pommes perdues dans la confiture, mais il réussit tout de même à obtenir une belle cuillère. Le plat n'avait pas été si terrible, avec un peu de chance il en sera de même pour le dessert.

Il prit une cuillère toute entière et mâcha lentement. Une fois, deux fois. Ah. Le sucrier avait dû tomber dans la compote, et celui de secours dans la génoise sèche. Il était certain qu'une louche de cette préparation serait capable d'attaquer une dent jusqu'à la racine. Lui qui adorait les tartes aux pommes pour leur côté acidulé, sucré sans être écœurant, il était servi. Finalement la glace vanille ne servait pas à adoucir la légère acidité de la pomme, mais bien à atténuer le goût d'une compote déjà bien trop sucrée. Flavien ne savait pas quoi faire de sa bouchée, hésitant à avaler tout rond et à faire comme si de rien était.

L'optimiste Léonie était bien silencieuse de son côté, et le nomade comprit bien vite pourquoi en voyant une grimace se dessiner sur son visage. Elle déglutit avec courage, rapportant que son expérience avait été pour le moins particulière. Si lui avait eu le malheur d'avoir droit à beaucoup trop de sucre pour un seul et même plat, elle avait apparemment été encore plus mal lotie en tombant sur du... fromage ? Qu'est-ce qui n'allait pas dans ces cuisines ?

Flavien attrapa du bout des doigts l'étrange boule blanche que Léonie lui tendait, soucieuse. Il fallait bien que quelqu'un s'inquiète du surmenage qui devait être en train de rentre fou le cuisinier des lieux. Flavien examina un instant l'aliment offert comme il aurait pu le faire avec un insecte étrange. Finalement, vu qu'il y était bien obligé avant de parler, il déglutit. L'action lui arracha un frisson.

- A n'en pas douter. Un acte très courant dans les Kharaal Gazar, voyez-vous. Tout comme le fait de verser du sirop de pêche dans la salade pour complémenter le vinaigre, que vous devez bien connaitre.

Son expression des plus neutres au repos lui permettant des remarques acerbes bien surprenantes, elle se prêtait tout autant à un humour très pince-sans-rire. Cherchant à se débarrasser de l'horrible goût sucré, il croqua dans la pièce à conviction. Mâchant lentement, il fit l'effort de ne pas avaler la boule toute ronde en réalisant qu'elle avait un goût très amère, heureusement pallié par la douceur exagérée de la génoise qu'il venait de goûter.

- C'est bien du fromage. Je pense. Dit-il prudemment. Pour être honnête, je n'en suis pas certain. J'ai perdu une bonne partie de mes capacités gustatives avec mon propre dessert. Tenez, c'est très efficace.

Il déposa une portion de compote sur la cuillère de Léonie et la lui rendit, attendant qu'elle souffre elle aussi de la même affliction que lui. Si la Protectrice mâchait suffisamment bien, elle pourrait découvrir la légère pointe de sucre, se mariant au sucre, sublimé par le sucre. Un plat qui vous mettait la larme à l'œil. Certains diraient que c'était l'émotion. Flavien tablerait plutôt sur le surdosage.

Voilà qui était contrariant. Ni Flavien avec son sandwich aux pommes bien trop sucrés, ni Léonie avec sa salade de fruit amère au fromage ne pouvaient se résoudre à manger ce qu'ils avaient commandés. Pourtant, il était hors de question qu'ils quittent cette table en laissant derrière eux tant de bons ingrédients si injustement malmenés. Se forcer à manger n'était pas la solution, alors que pouvaient-ils bien faire...

- Ah. Je sais.

Flavien, qui inspectait minutieusement les deux assiettes, réalisa une petite chose.

- J'ai une idée. Souffla-t-il.

Léonie à peine mise au courant du détail de son entreprise, il héla une serveuse de passage.

- Messieurs, dames. Est-ce que le dessert vous plait ?
- Un couteau, s'il vous plait. Demanda poliment Flavien qui esquiva soigneusement la question.
- Un... couteau ?
- Oui., Affirma-t-il, convaincu, Et deux cuillères à soupe. Et une petite assiette. S'il-vous plait.
- Très bien. Articula lentement la jeune femme qui n'était pas payée pour contrarier la clientèle, Un instant, je vous apporte ça... Madame, vous désiriez quelque-chose ? Une boisson chaude peut-être ?

Une fois les envies de chacun pris en note, la serveuse prit congé, les laissant seuls quelques instants. Le nomade eut alors toute l'occasion de s'expliquer auprès de Léonie.

- Puisque le cuisinier semble déterminé à faire de nouvelles expériences, nous allons en tenter une de notre côté. Expliqua-t-il d'un air étrangement déterminé. La nourriture, c'était sacré, et voir de si bons produits bafoués le contrariait légèrement, Je ne pense pas qu'on puisse faire pire, de toute manière. Qu'en dites-vous ?

De toute manière, vue comme l'affaire se présentait, ils avaient tout intérêt à mettre la main à la pâte pour rectifier le tir.

Flavien n'eut pas à attendre bien longtemps pour récupérer, comme promis, deux belles cuillères à soupe, un couteau et une petite assiette. Le tout lui fut remis avec un sourire éclatant que Flavien ne calculait déjà plus. Ses précieux outils obtenus, il remonta les manches et se mit à l'œuvre, investit d'une mission primordiale. Commençant par séparer la génoise sèche de la compote bien trop sucrée en raclant ses dernières. Avec l'accord de Léonie, il piqua les nombreuses boulettes de fromage de la salade de la Protectrice avant de les étaler à l'aide du couteau sur de petits toasts recréés à partir de la génoise craquante. Ses tartines de fromage étaient placées avec soin sur l'assiette dûment apportée. Avec un peu de chance, l'arrière-goût prononcé du fromage trouverait un maître dans la sècheresse sucrée du biscuit. Les deux saveurs pouvaient très bien se marier tant qu'elles n'étaient pas trop prononcées.

- Le tout, c'est de regrouper les saveurs plutôt que de les assembler de façon aléatoire.

Le nomade débarrassa ensuite les fruits de leurs jus amer, versant le liquide dans son verre vidé pour l'occasion.

Ses machinations, bien que lentes et calculées, attiraient bien des regards curieux. Heureusement qu'ils étaient installés dans un coin reculé du restaurant. Certains l’observaient simplement par dépit, préférant inspecter les faits et gestes d'un inconnu plutôt que d'approfondir la conversation avec leur partenaire de travail, d'autres par réelle curiosité. D'autres encore avaient cru comprendre qu'il souhaitait tout simplement partager son dessert avec sa compagne, trouvant la démarche tout à fait normal jusqu'à ce qu'il commence à découper minutieusement ses génoises. Qu'est-ce qu'il pouvait bien trafiquer ?

On l'oubliait un peu trop souvent mais même avec des familiers prêts à l'épauler pour le suivre où qu'il aille, Flavien avait dû apprendre à ruser pour survivre sur les routes d'Irydaë. Sa curiosité naturelle était un terrible facteur d'ennuis. Heureusement, rien qu'une ingéniosité grandissante ne pouvait palier. Cette même ingéniosité avec laquelle il se sortait des pires situations, il tentait ce soir de l'appliquer au casse-tête qu'était leur dessert.

Les morceaux de pommes de sa compote allèrent rejoindre les fruits dans la coupelle de Léonie, sucrant allégrement le mélange trop amère. Finalement, il déposa la boule de glace au-dessus des fruits fraichement mélangés. Ceci fait, il rassembla un peu sa compote de pommes sur sa propre assiette, histoire qu'elle présente un peu mieux. Au bout du compte ils obtenaient donc des toasts au fromage (pour lesquels il supposait que les saveurs avaient toutes les chances de s'accorder), une salade de fruits frais, à priori plus sucrée qu'amère et agrémentée d'une glace, ainsi qu'une simple compote de pomme, certes trop sucrée, mais bien moins écœurante maintenant qu'elle était débarrassée de toutes ses frasques.

- Et... voilà !

Affichant un air satisfait en voyant le résultat (qui, il fallait l'avouer, avait déjà plus l'air de choses connues qu'il aurait pu manger), il présenta sobrement ses créations à Léonie.

- Votre avis ?, Demanda-t-il tranquillement, Attention tout de même, vous allez passer de la cuisine d'un chef renommé à celle de quelqu'un qui n'a jamais pris un cours de cuisine de sa vie.

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[Terminé] Quand l'incertitude et l'inquiétude se mélangent  EmptyJeu 15 Fév - 12:51

Si Léonie éprouvait une foi inébranlable, en particulier vis-à-vis de son architecte, elle ne croyait en revanche que peu au miracle. Chaque action avait forcément une conséquence, chaque conséquence avait forcément une origine. Logique imparable pour celle qui avait choisi de faire le bien, de protéger le peuple en son entier au péril de sa vie privée, de ses passions, ou de toutes autres occupations qui pourraient lui insuffler un peu de réconfort. Pourtant, dans cette minute si particulière ou elle crut percevoir un début de sourire sur les lèvres de son interlocuteur, ou elle perçut un petit pouffement de rire faisant légèrement mouvoir ses épaules et où il tenta de camoufler cet amusement en positionnant ses doigts sur un sourcil, son bras face à son visage. La my’tränne se mit à croire que les miracles existaient, vraiment. N’en avait-elle après tout pas la preuve juste devant elle ? Offrant un large sourire, sincère, dévoilant un début de blancheur de ses dents, elle se sentit étrangement bien. Soulagée. Flavien passait un bon moment, elle n’était pas une si mauvaise compagne de soirée. L’information aussi futile soit-elle fut un véritable réconfort pour celle qui ne s’adonnait jamais à ce genre d’instant, celle qui avait tant voulu remercier cet homme qui lui avait permis d’éviter le pire. La perte de Spook.

Le rire commun perdura quelques minutes encore, prolongé par la plaisanterie de Flavien vis-à-vis des boulangeries. L’homme c’était tenté à la taquinerie, chanceux d’avoir un plutôt bon public face à lui. Léonie n’avait pas cessé de sourire, l’amusement était réel, sincère, d’autant plus quand son fidèle ami à poil s’était décidé à se joindre lui aussi, à la partie. Le comportement de l’animal, tira un nouveau sourire –ou prolongea plutôt le sourire de sa maîtresse-, vexé, il avait fini par rejoindre la petite troupe tout en ignorant la caresse réconfortante de Flavien. Une toilette gratuite, une présence chaude autour de lui et de ses deux compagnons, Spook en oublia rapidement sa contrariété, émettant un drôle de roucoulement, satisfait. Si l’instant fut beau, agréable, elle tira un petit pincement dans le cœur de la my’tränne, prenant conscience un peu malgré elle, du sentiment de solitude que devait ressentir son fidèle compagnon. Inquiète, elle espérait parvenir néanmoins à le rendre heureux ? Le regard de Léonie avait dû se teinter de tristesse, son sourire avait laissé place à une mine plus fermée, plus songeuse, plus soucieuse. Ne souhaitant pas retomber dans l’ambiance précédente de la soirée, la jeune femme avait relancé la conversation, tentant de convaincre à sa façon son interlocuteur que le goût pouvait être au rendez-vous. Après tout, ne disait-on pas régulièrement qu’il ne fallait pas se fier aux apparences ?

La dégustation fut pleine de surprise, d’un côté, comme de l’autre visiblement. Si Léonie se battait une nouvelle fois avec un mélange sucré salé des plus amers. Le voyageur lui, semblait faire face à un goût dont le sucre était omniprésent. Les deux avaient montré involontairement de jolies grimaces. Plaçant un bon de fromage dans sa cuillère elle la tendit en direction de Flavien, afin d’avoir la confirmation ou non de sa supposition. Par tous les architectes pourquoi fallait-il toujours inventer de nouvelles recettes toute plus extravagantes les unes que les autres ? Du fromage ! Dans de la salade de fruits ! Il avait récupéra la petite boule blanche, la portant à ses lèvres, mastiquant juste à offrir la confirmation tant attendue. C’était bien ce qu’elle avait dit, du fromage. Brbrbr. Un frison parcouru légèrement le dos de la my’tränne, incrédule vis-à-vis de ce mélange de saveur pour le moins surprenant. Dire que des voyageurs venaient parfois de loin, juste pour avoir le plaisir de manger ici… Le goût du risque devait être fort, ou l’ennui bien trop présent dans le quotidien de ses personnes. C’était tout du moins ce qu’en avait conclu la protectrice. De la compote sur sa cuillère, suspendue dans les airs par la main de l’adorateur de Möchlog et d’Orshin, Léonie l’avait simplement récupéré avant de porter le tout à sa bouche. Mastiquant doucement, évitant d’avaler tout d’un coup par crainte d’avoir une mauvaise surprise. Le goût sucré omniprésent était à son sens, moins désagréable que l’amertume qu’elle avait découverte dans sa commande. Déglutissant finalement, elle fut soulagée de ne plus avoir le goût du mélange fruit/fromage dans la bouche.


- «  C’est vrai que c’est sucré » dit-elle simplement en haussant les épaules « Je crois que je préfère quand même ça, à mes fruits fromages frais à la sauce provocatrice de grimace »

Avisant longuement son assiette, la my’tränne laissa un soupir s’échapper de ses lèvres, impossible pour elle de gâcher de la nourriture. Fallait-il qu’elle se force à avaler tout ça sans rien dire. Cuillère comme arme, en main, elle plongea de nouveau l’arrondi du couvert dans la salade, se préparant mentalement à subir les picotements dans ses avant-bras et dans son dos, à cause de l’amertume. Flavien attira une nouvelle fois son attention, lui évitant de justesse la bouchée fatidique. Reposant le tout, dans son assiette, elle l’avisa, perplexe. Un peu inquiète aussi de ce qu’il venait de lui passer par la tête. La serveuse à la dentition parfaite et blanche venait de faire son apparition, se retrouvant rapidement gênée par la demande particulière du client. Un couteau, une assiette, deux cuillères… Léonie haussa un sourcil, intriguée par tout ceci. La jeune femme sembla tout aussi troublée de la protectrice, mais s’inquiéta néanmoins de savoir si elle voulait quelque chose à boire.

- «  Un chocolat chaud, s’il vous plaît, mais un vrai, simple… Sans rien de plus ou d’original… Merci… Ramenez-en deux. Vraiment, un vrai, tout simple. » Répéta-t-elle en second plan pour insister suffisamment pour être comprise.

Elle avait opiné, avait disparu dans les cuisines afin de rapporter rapidement le tout, revenant un peu plus tard pour les deux boissons chaudes. Léonie était restée silencieuse pour le reste, ne comprenant pas forcément ou voulait en venir son interlocuteur. Elle avait été un peu surprise, pas mal à l’aise, mais gênée par les regards qui s’étaient posés sur le duo à cause de la demande particulière. Flavien avait fini par lui expliquer son idée et n’eut comme seule réponse que ce petit sourire, discret, un peu forcé. Si Léonie était une femme en apparence pleine de force, de détermination, de sécurité dans son travail, dans sa vie intime, privée, elle était plutôt discrète et moins « grande bouche », appréciait moins que l’attention se tourne sur elle. L’homme sembla effectuer une opération très minutieuse dans son dessert, séparant la Viennoise, son un regard bienveillant et curieux de la my’tränne. Qu’est-ce qu’il allait faire ? Flavien avait récupéré les boulettes de fromage de sa salade pour en faire des tartines. Par la suite, il débarrassa le jus de sa salade dans son verre et instinctivement Léonie eut cette envie de lui dire de ne pas boire, le pauvre risquerait une quinte de toux sévère. L’homme n’en fit rien, se concentrant davantage sur sa création. Les regards curieux se déposèrent davantage sur le couple d’un soir, provoquant de légères rougeurs sur les joues de la jeune femme, qui n’osait qu’à peine laisser vagabonder son regard sur les environs.

Flavien, lui, semblait bien trop concentré pour visualiser quoi que ce soit, effectuant son montage et ses mélanges, toujours sous le regard bienveillant de la my’tränne. Les morceaux de pommes et de compote furent mélangés à la salade de fruits et la boule de glace termina l’œuvre en s’écoulant doucement sur le tout. Perplexe, Léonie offrit un sourire quand il redressa enfin le visage vers elle. Sans même s’en apercevoir, Flavien avait piqué la curiosité et une forme d’admiration de la jeune femme. Il fallait un brin de courage pour oser modifier un plat dans un restaurant renommé, ou d’inconscience. Pour l’heure, elle était tout simplement incapable de savoir si Flavien pencher plus pour l’un ou pour l’autre. Détaillant les œuvres, Léonie ne sut quoi répondre sur le moment. Força-t-elle dans un premier temps un large sourire, un peu crispé avant de se détendre en distinguant la satisfaction au fond de ses yeux.


- « Mhhh, je vais donc devoir donner une note à vos œuvres mon cher Flavien… Vos créations ont-elles un nom, ou devrais-je me contenter que de chiffre pour nommer le tout ? » demanda-t-elle tout aussi taquine, reprenant son envie de jeu « Pour celle-ci » dit-elle en montrant la salade de fruit, compote glace « L’aspect visuel pourrait être un peu amélioré quoi que la couleur de la glace se rependant petit à petit sur les fruits fait ressortir les différentes couleurs. Mh, je vois, la compote est cassée sous les fruits, entre les fruits mêmes… Intéressant, intéressant, mh, mh. » imitant la voix d’un juge, elle se prenait au jeu, abandonnant peu à peu ses barrières d’une timidité nouvelle, qu’elle se découvrait elle-même «  Voyons le goût à présent, mh. »

Elle rajoutait volontairement une multitude de « mh » façon de s’exprimer qu’elle avait relevés chez les gens importants – ou qui voulait se donner de l’importance-. Piquant un petit mélange de tout de sa cuillère, elle fit mine de déguster, comme on aurait pu déguster un bon vin, remuant le tout dans sa bouche, fit les petits bruits brillants qu’elle détestait en mâchant, puis avala, fronçant légèrement les sourcils, donnant ainsi l’illusion que rien n’était convenable.

- «  Mh, mh, je vois » dit-elle avec ce même jeu d’acteur –absolument nullissime qu’on se le dise- « Passons à la suite. » Elle attrapa une petite tartine croqua un minuscule bout, refit le même manège avant d’ajouter « Mh, mh, je vois. Je vais délibérer avec moi-même pendant une ou deux secondes. »

Elle fit silence, tâchant d’avoir un visage inexpressif, pas de sourire, pas de pétillant dans le regard, rien, elle s’appliquait à endosser son rôle –toujours de façon très moyenne en avisant bien et en faisant un peu preuve de déduction il était simple de remarquer qu’elle allait finir par rire-. Après les deux trois secondes écoulées, elle prit une légère inspiration puis reprit la parole :

- «  Bien, il faut l’admettre c’est plutôt bon, bien meilleur que la première chose étrange qu’on a servie… Je vous octroie donc le droit de partager en ma compagnie le tout et d’avoir l’obligeance de recuisiner, vous avez un vrai talent. Je vous décerne donc le premier prix de la fin de dîner parfaitement réussie » un peu prise aux dépourvues par son jeu et son enthousiasme nouveau elle ajouta «  Il faudra absolument remettre ça. »

Prenant soudainement conscience de la fin de sa phrase, elle s’empourpra, un peu confuse. Laissa son regard se concentrer sur la nouvelle recette, surtout de fuir une possible mauvaise réaction de Flavien. Elle culpabilisa mentalement, d’abord vis-à-vis de son métier, ensuite de prendre du plaisir dans quelque chose qu’elle avait toujours délaissé refusé et là ? Là elle envisageait de recommencer ? Hors de question, ça devait forcément être la journée qui voulait ça, les émotions trop fortes, sa peur de perdre Spook. Elle n’avait de toute façon pas de temps pour apprendre à se sociabiliser. Prenant une légère inspiration, elle attrapa la seconde cuillère, la tendant à son interlocuteur, avec un petit sourire.

- «  Allez-y, il faut vraiment goûter sans craindre, c’est vraiment plus agréable niveau goût que ce qu’on a reçu. » Souffla-t-elle « Le chef renommé peut aller se rhabiller. » Conclut-elle en attendant son accord afin d’éventuellement partager l’ensemble.

Flavien Teleri
Flavien Teleri
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[Terminé] Quand l'incertitude et l'inquiétude se mélangent  EmptyVen 16 Fév - 1:11
Irys : 887826
Profession : Soigneur itinérant - Guérisseur
My'trän +2 ~ Chimères
Non contente de ne pas le foudroyer du regard pour avoir défiguré les œuvres d'un maître dans son domaine, ce sous le regard inquisiteur de clients intrigués, Léonie le surpris agréablement en lui adressant un sourire. Revêtant une mine boudeuse qui se voulait préoccupée, la jeune femme passait en revue les trois assiettes qui se dressaient à présent entre eux. Elle fit l'inventaire de ses créations, critiquant leur présentation d'une voix pincée, un air suffisant affiché sur son visage. Un coup d'œil à ses manières exagérées et aux regards en coin qu'elle lui lançait suffirent heureusement au soigneur pour comprendre que la jeune femme se moquait simplement de ces critiques gastronomiques ayant sans doute contribué à la popularité de cette auberge.

Flavien observa curieusement le manège de la Protectrice, ne s'attendant pas à ce qu'elle réagisse de la sorte. Cette étincelle de spontanéité et le petit brin de folie qu'elle s'autorisait à nourrir en s'amusant au nez et à la barbe des codes de ce monde à part qu'était celui des plus riches, le fit sourire. Sa manière exagérée de méditer sur la composition d'un plat et ses mastications exacerbées qui n'avaient absolument rien de digne amusait grandement le nomade, il fallait bien l'admettre.

Bien qu'il ne lui offrait qu'un vague sourire à peine perceptible, sa posture était clairement détendue à présent. Sans être avachi dans sa chaise, il s'autorisait à occuper plus d'espace qu'il ne l'avait fait pendant le repas. Gardant un coude appuyé sur la table, il supportait son menton d'une main et écoutait la My'tränne parler de la texture des aliments, du mariage des saveurs et de la complémentarité des couleurs avec un semblant d'intérêt. Elle parlait du sujet comme lui aurait pu le faire, utilisant des mots simples et très terre à terre, mais l'air important qu'elle se donnait en examinant les plats était tellement sur joué qu'elle aurait tout aussi bien pu passer pour une jeune femme de la Haute cherchant à impressionner un de ses contemporains par son altruisme tout en n'ayant aucune notion de ce qu'elle abordait.

Croquant un petit morceau d'une tartine improvisée, elle mâcha lentement en hochant plusieurs fois la tête. Finalement, elle lui expliqua qu'il était temps pour elle de rassembler ses pensées pour lui donner son verdict sur ses expérimentations culinaires. L'observant d'un air qui se voulait dur, Léonie laissa planer le suspense quelques secondes.

Si Flavien ne s'inquiétait absolument pas du résultat (après tout, Léonie n'avait pas fait la grimace une seule fois), la charmante vieille dame qui s'était pris d'affection pour ces deux jeunes gens était suspendue aux lèvres de la My'tränne. Il ne savait pas pourquoi, mais il était sûr qu'elle serait dévastée d'entendre la Protectrice dénigrer ses savants mélanges. Très rapidement, son visage se fendant d'un sourire, Léonie lui accorda sa bénédiction, l'invitant à partager équitablement ces nouveaux mets.

Le nomade ne se fit pas prier, attrapant une tartine de fromage qu'il goba d'un seul coup. Mâchant tranquillement, il écarquilla les yeux au commentaire de la My'tränne. Avec un peu de chance, sa réaction allait passer pour l'étonnement né du mélange habile de saveurs, bien qu'en réalité il s’agisse surtout d'une réelle surprise vis à vis de la proposition de la jeune femme. Mal à l'aise, il inclina la tête, remerciant la Protectrice pour son compliment dont il ne savait pas trop quoi faire. Elle souhaitait remettre ça.

Ce qui n'était qu'une proposition lancée en l'air par Léonie, résonnait bien trop profondément avec le nomade.

En quittant Valvonta il ne s'était fait qu'une seule promesse : celle de ne plus se lier d'amitié avec qui que ce soit et de parcourir les terres d'Irydaë le plus librement possible, jusqu'au jour fatidique de sa mort, ne laissant derrière lui aucun regret, aucune colère, aucune tristesse. Qu'on révère les Architectes ou qu'on les renie au profit de la technologie, on pourrait l'oublier tout aussi facilement que lui oubliait ceux qui n'étaient plus de ce monde.

Partager un repas au cours d'une mission ou en gage de remerciement était une chose, mais décider de dîner à nouveau ensemble simplement pour le plaisir de converser en était une autre. Il avait déjà trop de points de repère dans cette ville, il parvenait à repérer dans les rues les visages familiers des commerçants avec lesquels il échangeait régulièrement... Et pourtant, quelque-chose en lui interdisait de refuser net la proposition de Léonie. Il était tellement rare qu'il rencontre des personnes capables des plus simples aspirations tout en conservant ce respect distant dû à chacun. Elle avait beau protéger cette Cité, elle n'avait pas une seule fois essayé de le convaincre qu'elle était sans faille. Son dévouement était immense et pourtant son raisonnement et le respect de ce qu'il pouvait représenter de son côté n'avaient pas l'air d'en être affectés.

Coincé entre le marteau et l'enclume, un coup d'œil à la My'tränne qui avait recommencé à parler entre temps suffit à lui faire prendre sa décision. Rouge de gêne, elle  l'incitait à goûter sa compote de pommes.

Flavien inspira longuement. Se dire qu'avoir des amis, des personnes sur qui il était possible de compter, n'était pas une nécessité était remarquablement facile lorsqu'on passait sa vie sur les routes. La solitude nécessaire en devenait presque voulue, jusqu'à ce qu'on goûtait à nouveau à la mondanité d'une conversation plaisante. Soit. Il aurait tout le temps de regretter son choix plus tard. Il quitterait bientôt Busad de toute façon. Une fois toute cette sordide affaire réglée, il plierait bagage et n'aurait qu'à veiller à éviter le secteur quelques années durant. Il avait bien réussi à ne plus mettre les pieds à Valvonta depuis son départ, il pouvait bien en faire de même pour Busad. Lorsqu'il ne se souviendrait plus de la raison qui le poussait à éviter la Capitale, il y remettrait les pieds.

Récupérant le couver tendue par la Protectrice, il attrapa une petite cuillère de compote pour vérifier si son goût était plus plaisant maintenant qu'elle n'était plus contenue dans des génoises. La cannelle s'était mélangée à la compote, rendant la confection un peu plus acceptable à son goût. Par habitude, il marmonna son approbation, avant de se racler la gorge et de reprendre, cette fois pour l'ensemble de la tablée.

- C'est meilleur. On arrivera peut-être à terminer nos assiettes sans glisser les restes à Selmac, L'Aitah redressa la tête à cette déclaration, faisant sourire son maître qui leva les yeux sur Léonie, Vous savez, j'ai peut-être déjà beaucoup voyagé dans ma vie... mais ce repas est un voyage gastronomique autant que spirituel.

Dans la foulée, il attrapa une autre tartine de fromage. Profitant que son regard soit porté sur l'assiette, il répondit à la dernière question de la My'tränne.

- Je n'aurais pas accès à ce genre de matière première en dehors de cette auberge... Mais si une viande à la broche vous convient, je ne vois pas d'inconvénient à vous faire partager ma cuisine. Dit-il lentement, J'espère juste que l'occasion qui s'y prêtera sera plus légère qu'aujourd'hui.

S'il pouvait éviter de revoir Spook aussi gravement blessé (voire blessé tout court), il s'estimait heureux.

La fin du repas se termina sans accroche. A eux deux, ils finirent les trois assiettes revisitées en échangeant quelques mots sobres avant l'arrivée de la serveuse qui débarrassa les assiettes dès qu'elles furent vides. L'employée, plus jeune que les autres, n'avait pas dû suivre toute l'affaire car elle s'arrêta devant eux, assiettes vides en mains, un grand sourire sur les lèvres.

- Vos desserts vous ont plu ?

Flavien lança un regard en coin à Léonie et lui laissa le loisir de s'exprimer, prétextant ne pas être celui à qui il fallait s'adresser. Ce fut donc une serveuse un peu perplexe qui les quitta, très rapidement remplacée devant eux par la serveuse de la dernière fois. Les bras chargés d'un beau plateau de bois, elle déposa doucement deux tasses de chocolats chauds fumants devant eux. Comme l'avait demandé Léonie, rien d'extravagant ne semblait avoir été ajouté à la boisson et l'odeur du cacao était tout bonnement divine.

- Mes excuses pour l'attente. L'Or liquide des Cabosses, dans sa version Epurée, comme vous l'avez demandé. Bonne continuation à vous. Ajouta-t-elle avant de s'éclipser rapidement.

Le grognement de Flavien fut noyé par le bruit de ses pas alors qu'elle s'éloignait vers une table voisine. Le nomade passa une main sur son visage fatigué. Heureusement que Léonie n'avait pas commandé de l'eau, parce qu'il aurait très certainement eut besoin d'un moment de silence pour se remettre de ses émotions si elle la leur avait présenté comme un pichet du "Nectar de la Vie".

Attrapant sa tasse, il souffla longuement sur le liquide brûlant. Son regard se perdit sur la fenêtre, lui renvoyant sa propre réflexion. L'opacité de la nuit l'empêchait de bien voir la rue à l'extérieur.

- Il se fait tard. Commenta-t-il entre deux souffles sur son chocolat brûlant, Nous ne devrions plus trop tarder si vous voulez encore que je vous enseigne quelques techniques pour garder Spook en bonne santé.

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