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Chroniques d'Irydaë
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 Les deux facettes d'une même pièce

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Les deux facettes d'une même pièce  EmptyVen 29 Sep - 6:51

C'est une neige tenace, qui ne lâche rien. Zora lutte pour chaque pas, pour chaque mouvement qu'elle fait. Tout, dans ce paysage glacial, cherche à éprouver la volonté de vivre de ceux qui sont assez courageux - ou fous, c'est selon - pour l'arpenter en cette période sombre de l'année. Pourtant s'arrêter, c'est mourir. La disciple de Möchlog en est consciente. Et c'est cette horrible réalité qui l'oblige à puiser dans les maigres forces qu'il lui reste encore pour avancer.

Les bras repliés contre son corps, la morsure du froid s'insinuant entre les déchirures qui maculent ses vêtements, elle sait pourtant qu'elle doit rapidement trouver un abri. Et de quoi faire un feu. À manger, également. La liste des impératifs est si longue qu'elle se surprend à rire nerveusement. Mais elle reste confiante: Möchlog veille sur elle. Et la foi ardente qu'elle lui voue saura palier au froid glacial qui entend la dévorer.

Malgré tout elle n'est pas aussi sereine que d'ordinaire. Sa situation est réellement critique. Et de mémoire, c'est bien la première fois qu'elle est confrontée à un tel danger. Ce qui est plutôt ironique et qu'elle ne manque pas de noter, c'est qu'elle donnerait cher pour se trouver à nouveau dans les tréfonds de cette mine. Là où la chaleur est certes étouffante mais également réconfortante. Mais cette option s'est envolée dès le moment où elle a décidé de faire sauter une vingtaine de daënar. Regrette-t-elle? Pas le moins du monde!

La rouquine tombe une première fois à genoux. Elle se force difficilement à se relever malgré le besoin irrépressible de dormir qui s'empare d'elle. Et si elle fermait les yeux? Un seul instant. Une seule petite minute. Juste pour se reposer un peu avant de reprendre sa progression. L'idée est tellement séduisante qu'elle commence à l'envisager sérieusement. Mais sa raison lui commande de ne pas céder à cette douce étreinte. Alors elle continue, âme perdue parmi les ombres du Khoral.

Mais elle chute une seconde fois sur le sol de Khurmag. De tout son long, cette fois. Sa respiration haletante projette des gerbes de fumée qui glissent entre ses cheveux rigidifiés par la température glaciale. Ses dents s'entrechoquent au rythme de ses tremblements tandis que la neige amplifie l'engourdissement de son corps à moitié enfoui dans ce tapis d'un blanc immaculé.
"Allez..." s'implore-t-elle. "Lève-toi ma grande!"
L'adepte tente de joindre à la parole et s'aide de ses bras pour se redresser à moitié avant de retomber sur un sol duquel elle n'arrive plus à s'arracher. Son esprit reste combatif. Mais son écrin de chair, lui, ne souhaite plus répondre à ses ordres. Ce qui est étrange, c'est qu'elle n'a plus vraiment froid. En réalité elle se sent plutôt bien dans ce cercueil glacé qui l'entoure. Et cette simple impression suffit à faire naître en elle dont elle ne s'était jamais sentie tributaire...
"Ne m'abandonne pas maintenant... S'il-te-plaît..."
Son regard ambré se pose sur le ciel caché par la grisaille, espérant que la Chouette la déchirera pour venir à son secours. Mais il n'y a pas le moindre bruit évoquant des battements d'ailes. Uniquement le hurlement d'un vent qui semble voué à ne jamais disparaître. La rouquine lâche une larme de désespoir qui se cristallise presque immédiatement sur sa joue.

~~~~~~~~~~

Le temps est bien relatif. Un instant de plaisir semble bien éphémère comparé à l'éternité d'un instant de souffrance. Depuis combien de temps est-elle allongée là? Une minute? Une heure? Davantage encore? Est-ce vraiment important?

Le bouclier qu'elle a dressé autours d'elle perd en intensité. En réalité la carapace dorée n'est plus que l'ombre de ce qu'elle était, semblable à une flamme qu'on ne peut plus attiser et ainsi condamnée à disparaître dans les ténèbres. Et c'est souvent dans les instants où l'espoir n'est plus suffisant que l'on cesse de réfléchir à l'avenir pour se tourner vers le passé.

Elle ne se souvient plus des gens qu'elle a purifiés. Leurs visages, leurs noms, leur nombre... Ils ne lui évoquent rien si ce n'est la satisfaction d'avoir pu les soustraire à leurs corps souillés pour mieux leur permettre de renaître. La satisfaction d'avoir pu contenter l'Architecte auquel elle a voué sa vie. Et qu'elle continuera à servir pour peu qu'Il le lui permette.

L'ironie de la chose, c'est que ses premiers souvenirs se résument à une agonie dans la neige. Comme c'est le cas maintenant. La boucle serait-elle bouclée? Möchlog a-t-Il décidé que les multiples plaies de son corps, héritages des aracnobions et de cette proximité avec la fausse déesse Technologie, constituent un crime à son encontre qu'elle se doit à présent de payer? Elle est certaine qu'Il ne s'est pas détourné d'elle. Mais s'Il l'a fait, c'est peut-être parce qu'elle l'a trahi la première après tout...

Pourtant ses doutes sont balayées lorsqu'elle aperçoit une ombre posée sur l'une des branches tordues d'un arbre proche. Zora plisse les yeux et découvre une chouette qui l'observe, tête penchée sur le côté. Puis un rire de soulagement quitte ses lèvres et l'espoir l'étreint à nouveau avec une puissance capable d'abattre la plus solide des montagnes de la région.
"Je savais que tu ne me laisserais pas tomber..."
N'est-ce pas la manifestation de la volonté de Möchlog de la voir vivre? L'expression de son désir qu'elle puisse continuer de le servir avec dévouement? Une reconnaissance de l'oeuvre accomplie en son nom? Cet instant d'ataraxie est cependant atténué lorsque son bouclier cède et que le froid la submerge à nouveau. Elle ne se départi cependant pas du sourire qui s'est installé sur ses lèvres.

Et même si ses paupières se ferment inexorablement tandis qu'elle s'abandonne entièrement à la confiance qu'elle voue à son Architecte, Zora a le temps de distinguer, au loin, des silhouettes qui s'approchent de sa position. De quoi accentuer encore son sourire tandis qu'elle bascule vers les ténèbres de l'inconscience...

Althéa Ley Ka'Ori
Althéa Ley Ka'Ori
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Les deux facettes d'une même pièce  EmptySam 30 Sep - 5:18
Irys : 507592
Profession : Guérisseuse du Troisième Cercle
My'trän +3 ~ Suhury (femme)
Masse informe au loin, dont la rougeur ne lui était pas étrangère. Beaucoup de teintes sombres, qui juraient avec la blancheur de la neige alentour. Trois couleurs dominaient, rivalisant de vivacité et teintant la scène d’irréalité. Le noir profond de ses vêtements, l’écarlate de sa chevelure et le diaphane de sa peau. Ils se découpaient si nettement qu’Althéa les crut entièrement dissociés. Mais l’ensemble était cohérent, formait un corps et une personne bien présente sur sa rétine autant que dans sa mémoire proche. Elle l’avait côtoyée quelques heures seulement, mais dans des circonstances qui rapprochaient même les plus grands antagonistes. Cela rendait son apparence inoubliable en soi. Aussi, lorsqu’elle reconnut son identité, la guérisseuse se fraya un chemin parmi les quelques Khurmis qui s’approchaient de la dépouille de Zora. Une chouette hulula tristement sa solitude, et on entendit une faible voix soupirer :

« Je savais que tu ne me laisserais pas tomber...
- Tu surestimes mon sens de la loyauté… ironisa-t-elle. »

On ordonna une halte et on fit le camp prématurément. Pendant ce temps, Althéa prit en charge Zora, avec les mains obéissantes de son frère, et s’affaira à l’envelopper dans plusieurs couches de couvertures destinées à préserver le peu de chaleur vitale qu’il lui restait. Ils la déposèrent sur une paillasse temporaire pour l’isoler un minimum de la neige, et la guérisseuse s’occupa de la frictionner sans douceur mais avec une efficacité irréprochable. Par la même, elle lui transmettait via le don de Möchlog l’énergie vitale qu’elle avait à disposition. Malgré tous ses efforts, elle ne parvint à l’arracher à son inconscience, ou du moins pas de façon durable. Il eût été pertinent de la faire manger et boire pour aider un tant soit peu son corps à se régénérer, mais celui-ci semblait résolu à croire que le sommeil était le meilleur moyen de survivre. Elle ne le contredit pas, mais n’en fut pas moins soulagée lorsqu’elle put l’emmener à l’abri de la tente nouvellement montée, accompagnée par les murmures critiques qui s’élevaient çà et là.

***

« Althéa… tu sais que le clan n’est pas vraiment ravi de recueillir cette Zo’
- Qu’est-ce qu’ils peuvent bien lui reprocher ? Elle a dormi toute la journée, et n’a pas sorti un mot de travers. Elle n’a même pas levé le petit doigt !
- Tu as dit toi-même qu’elle a volontairement tué une brochette de Daënars… Les éclaireurs commencent à penser que Selph est mort par sa faute.
- Qui donc ?
- Selph.
- Ah oui, Selph, fit-elle vaguement. Non, il n’est pas mort de ses mains, c’est absurde. C’est… la … mine. C’est la mine qui l’a tué. »

Leryan haussa les épaules comme pour s’avouer vaincu. Il n’était pas du genre insistant, et s’il pouvait éviter une confrontation avec sa farouche cadette, alors tout le monde s’en porterait mieux. Mais la rouquine ne montrait que peu de signes de rétablissement prochain, et il serait probablement nécessaire à la tribu de reporter d’une journée supplémentaire leur périple. C’était un sacrifice pour lequel Althéa les avait remerciés, non sans avoir maintenu qu’ils étaient libres de la laisser derrière si l’attente leur déplaisait. Ils avaient unanimement refusé, puisque l’entraide était une valeur prédominante chez les tribus nomades telles que celles-ci.

Zora avait été installée dans leur large tente, et calmait sa fièvre sous un entassement de couvertures qu’Althéa lui avait cédées à regret. Elle s’était de surcroît appliquée au mieux pour insuffler un peu de vie dans ce corps inerte maintenant que les conditions le permettaient. Un foyer sans flammes se consumait au centre de la tente, allumé par l’unique adepte de Süns que comptait le clan d’illusionnistes. Tous les soirs, elle se rendait dans chacune des tentes pour y créer un réchaud artificiel. C’était un maigre réconfort lorsque le vent sifflait si fort en dehors, mais ajouté aux nombreuses fourrures dont ils se couvraient, cela sauvegardait leur vie pendant plus de temps que l’on ne donne à une étrangère, Zora à tout hasard.

Cette dernière avait repris de ses couleurs toutefois. Althéa avait encouragé la guérison de nombre de ses plaies, mais c’était surtout le dégel qu’elle avait dû opérer. Lorsqu’elle avait été soulevée de son tombeau de glace, plus rien ne semblait flexible dans son corps. Chaque membre avait adopté une rigidité digne d’un cadavre vieux de plusieurs jours. Elle reposait à présent d’une façon qui suggérait que ses muscles s’étaient détendus. La tâche n’avait rien d’inhabituel pour une guérisseuse ayant grandi auprès des Khurmis, avec pour cinquième grand frère le Khoral, comme sixième le grand froid permanent qui régnait dans sa contrée. Il s’en était fallu peu cependant, Möchlog devait prêter grande importance à cette névrosée pour lui permettre de défier sa mort avec un tel acharnement. Pour le peu qu’elle savait d’elle, une vie sécurisante n’était guère à son goût.

« Je vais annoncer aux autres qu’elle semble se remettre petit à petit.
- Tu peux. Rappelle-leur qu’elle n’est pour rien dans la mort de Selph, ajouta-t-elle d’une voix neutre, mais le regard pensif. »

Leryan quitta l’atmosphère apaisante de la tente pour défier avec vaillance le hurlement du Khoral. Et sa sœur se contenta de regarder avec fixité les braises. Les bords rougeâtres s’affolaient parfois sous la caresse d’un courant d’air, cerclés pourtant d’un noir de suie des plus passifs. Tout était fait de contraste en ces terres. Une respiration plus longue attira son attention, et elle pria pour que ce ne fût qu’un délire de son esprit ou un mauvais tour d’une bourrasque furtive. Mais Zora prenait bel et bien vie, et sa respiration se fit irrégulière. Sa sauveteuse improvisée n’avait aucune envie d’entamer la conversation, qui s’avérerait forcément nécessaire une fois qu’elle aurait ouvert les yeux et qu’elle se demanderait dans quel pays elle pouvait bien se situer. Il lui restait encore à déterminer ce qu’elle pensait de Zora et de ses agissements.

Néanmoins, elle prit à son tour une inspiration pour rassembler son courage, et elle se leva, sans dissimuler son mécontentement. Ses jambes s’étaient réchauffées contre les couvertures, et elles criaient à présent de la froidure soudaine qui les assaillait. Elle s’affaira à réduire en poudre deux plantes, parmi les rares qui subsistaient de son attirail après la journée qui avait précédé. Puis elle glissa le résidu obtenu dans un gobelet d’eau chaude, laquelle avait servi à leur faire du thé quelques minutes auparavant et reposait toujours sur le foyer depuis. Sa voix était calme lorsqu’elle prit la parole, peu certaine toutefois que son interlocutrice fût suffisamment consciente pour l’entendre.

« As-tu vu Möchlog de plus près ? Est-ce qu’une presque-mort nous rapproche de lui ? »

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Les deux facettes d'une même pièce  EmptySam 30 Sep - 9:39

Elle oscille entre la vie et la mort, le conscient et l'inconscient, la lumière et les ténèbres... Zora ressent des émotions qu'elle n'est pas en état de comprendre. Ou même de considérer. Elle se laisse guider sur une route dont elle ne saisit pas les contours sans opposer la moindre résistance, sans la plus infime des volontés. Elle est, tout simplement. Quelque part dans les limbes qui servent de frontière entre son existence et la suivante, entre le délire et le rêve.

La rouquine émerge de temps à autre de cet abîme réconfortant, le temps de quelques secondes. Assez pour remarquer une première fois que la chaleur a remplacé le froid ou encore que l'espace infini du ciel s'est mué en une prison de toile. Mais elle l'oublie aussitôt lorsqu'elle retourne se lover dans les profondeurs de l'inconscience. Là où elle n'a aucune prise sur le monde qui l'entoure. Où sur ceux qu'elle visite au gré de cet étrange voyage introspectif.

~~~~~

Elle est face à une marée de silhouettes difformes et immobiles. Une peur irrépressible se manifeste de longues secondes tandis qu'elle contemple les regards laiteux résolument dardés sur elle. Le vent ou peut-être la fraîcheur de la pluie qui l'assaille lui arrachent des vagues de frissons. Tout comme le silence pesant qui règne sur cette assemblée aussi disciplinée que servile.

La rouquine remarque qu'elle est installée sur un trône constitué de ce qu'elle prend d'abord pour de la roche brillante. Après un rapide examen elle se rend compte qu'il ne s'agit pas de pierre mais plutôt d'un assemblage de métaux de diverses formes: des roues dentelées, des tubes en tout genre et même d'armes comme celles des hérétiques. De dégoût, elle se relève prestement. Et l'océan de chair face à elle en fait de même, comme s'il s'agissait d'un seul et unique corps.

De nouveaux frissons l'assaillent. De plaisir, cette fois-ci. Les morts lui répondent. Elle tourne alors le regard sur sa droite et découvre des flammes majestueuses qui engloutissent de leur appétit sans fin des structures bien étranges. Certaines s'effondrent d'ailleurs dans le brasier avant de s'y noyer. Daënastre? Si elle se fie aux formes des bâtiments et à ce qu'elle perçoit de leur composition, elle ne voit pas d'autres explications rationnelles.

Elle contemple un instant ce spectacle réjouissant avant de considérer ce qui se situe sur sa gauche. Un second trône s'y trouve. Et, installée avec grâce sur ce dernier, une personne familière la contemple avec un sourire qui pourrait bien être amical. Peut-être même vecteur de confiance.
"Althéa?"
Le sourire figé de l'intéressée est la seule réponse qu'elle obtient en retour. Zora fronce les sourcils et s'avance d'un pas décidé vers la noiraude: comment ose-t-elle partager cet instant de gloire avec elle? Que fait-elle sur un trône? sa présence seule est une insulte. Une insulte qu'elle se doit de corriger pour que sa victoire soit totale.

Mais un puissant bruissement d'ailes l'interrompt et attire son regard en direction des cieux. Une majestueuse chouette déchire les nuages avant de venir se poser avec une puissance tranquille entre les deux jeunes femmes. Les jambes de la rouquine se mettent à trembler lorsqu'elle comprend qu'il s'agit de l'Architecte. Möchlog en personne vient assister à ce triomphe.

Il déploie à nouveau ses puissantes ailes pour... les envelopper, elle et Althéa. Il les réunit toutes deux dans cette étreinte rassurante. Et la rouquine comprend. Comment pourrait-elle faire autrement que d'abdiquer devant cette manifestation de la volonté divine de la Chouette? Sa colère s'envole immédiatement. Ses doutes également. Oui, il doit en être ainsi. Et il en sera ainsi!

~~~~~

Zora ouvre les yeux avec difficulté. La première constatation qui s'impose à elle c'est que sa gorge nouée lui fait affreusement mal. Elle tente de bouger mais un poids conséquent l'en empêche. À moins que ce soit l'absence de forces suffisantes pour arriver à pousser ce qui doit être des couvertures empilées en couches successives sur elle.

Elle n'a plus froid. Et le vent, bien que soufflant avec rage à l'extérieur de cette tente, ne l'inquiète plus autrement que par son sifflement incessant. La my'träne ferme une nouvelle fois les yeux comme pour calmer les vertiges qui la submergent. Et lorsqu'une voix familière caresse ses oreilles elle tourne la tête en direction de son origine.
"As-tu vu Möchlog de plus près? Est-ce qu’une presque-mort nous rapproche de lui?"
Elle lui répond par un vague sourire et un faible mouvement affirmatif de la tête. Et lorsqu'elle tente d'étayer ces signes par des mots, elle ne peut que tousser sèchement. Ce n'est que lorsque la quinte se calme qu'elle arrive à formuler quelques mots d'une voix d'abord enrouée puis de plus en plus claire.
"Je... Je l'ai vu, Althéa! Möchlog!"
Elle précise le nom de leur Architecte alors que l'information est pourtant évidente. Mais alors qu'elle devrait se réjouir de cette chance et espérer que la jalousie s'exprime dans l'attitude ou sur le visage de la noiraude, Zora n'a qu'une seule envie: lui raconter. Ses pensées se bousculent toutefois à un tel rythme que les mots ne parviennent plus à franchir le seuil de ses lèvres gercées.
"Il... Il... Nous devons..." balbutie-t-elle avant de se forcer au calme. "Il nous a désignées! Toi et moi! Nous devons détruire la déesse Technologie. Notre rencontre n'était pas un hasard. Il a voulu que nos routes se rejoignent! Je le sais à présent. Dans le fond je l'ai toujours su... Toi aussi n'est-ce pas?"
Elle pose à nouveau son regard sur Althéa quand bien même sa vision n'est guère affinée. Les signes étaient là. Ils se sont manifestés depuis leur rencontre jusqu'à maintenant. La venue de la noiraude à sa rencontre, leur collaboration forcée dans la mine ou encore le fait qu'elle l'ait secourue du Khoral... Tout semble limpide à présent. Elle n'a tout simplement pas été capable de les considérer pour ce qu'ils étaient. Ce manque de jugeote lui arrache d'ailleurs un soupire désabusé.
"Il veut que nous purifions Daënastre de l'hérésie!" répète-t-elle avec conviction. "Nous devons y aller. Maintenant. Il faut éradiquer le mal à sa source! Prépare tes affaires! Nous partons!"
Elle tente d'ailleurs de se lever avant de retomber comme une masse sur cet agréable tapis de fourrure. Et c'est un cri de rage qui jaillit finalement de sa gorge lorsqu'elle remarque qu'elle devra probablement encore un peu faire attendre l'Architecte...

Althéa Ley Ka'Ori
Althéa Ley Ka'Ori
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Les deux facettes d'une même pièce  EmptyDim 1 Oct - 20:17
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Zora. Elle lui parut si fébrile et si fragile à la fois qu’elle peina à la reconnaitre. S’était-elle fourvoyée ? Avait-elle recueilli une rousse semblable mais de caractère plus docile ? Où était la psychopathe sanguinaire qu’elle avait dépeint dans le compte-rendu de Carl Rowlett dans l’espoir d’effrayer au mieux les Daënars ? Elle remercia Möchlog de lui avoir rendu Zora avant qu’elle ne puisse démentir ses propos ; il n’aurait plus manqué qu’un pardon sur la place publique pour avoir sciemment décimé autant de mineurs, et sa stratégie aurait été tournée en dérision dans la seconde.
L’alitée lui accorda même l’honneur d’un sourire confus, dénué de toute agressivité, qui s’imprima sur les paupières d’Althéa de façon irréversible. Même la pire des criminelles savait adopter un air affable. Möchlog était responsable d’un tel miracle.

« Je suis d’accord pour dire que la Technologie est une véritable abjection, m’enfin l’éradiquer me semble être une tâche complexe… »

Zora ne l’écoutait pas - ne l’entendait pas ? Ses yeux étaient vitreux et on y devinait le flou de la convalescence.
Son récit la toucha, toutefois. Une pointe de scepticisme était présente dans son cœur, mais peut-être n’était-elle due qu’à la jalousie, à la tristesse que Möchlog ne lui ait pas encore rendu visite malgré ses années de fidélité. Mais Zora plaçait tant de ferveur derrière ses mots qu’elle ne parvint à lui en vouloir. Au contraire, la chouette avait été sage de lui rendre visite ; elle semblait lui avoir offert un certain sens du relationnel, aussi fragile fût-il. L’architecte avait ajusté sa foi, de charybde en scylla, métamorphosant son espoir de tuer tous les hérétiques sans exception en une aspiration relativement plus pacifique, à savoir réduire à néant la Technologie. On ne parlait donc plus d’exterminer des hérétiques, mais plutôt d’anéantir l’incarnation de l’Hérésie. Elle qui craignait que sa patiente ne lui saute à la gorge en se réveillant, elle se retrouvait embarquée dans la quête d’un absolu !

Son cri de rage la fit sursauter car elle était trop absorbée par ses pensées pour se rendre compte de la frustration d’autrui. Instinctivement, elle lui envoya une vague d’apaisement pour calmer ses ondes négatives. Elle le regretta, car si employer son don la réjouissait, elle craignait toutefois que sa patiente ne le prenne comme une marque de faiblesse. Elle soupira devant ce dilemme sans fin. Une voix pressante et malaisante quelque part dans son esprit lui affirmait qu’elle aurait dû la laisser périr dans la neige, mais sa croyance en ces entités suprêmes que sont la Destinée et la Volonté des dieux la confortait dans ses choix. Mais comment diable Möchlog espérait-t-il lier ces deux âmes concurrentes ? Sur quels points s’accordaient-elles, si ce n’est sur la haine commune qu’elle vouait pour la Technologie, ainsi que leur fidélité à la chouette et à l’acceptation de ses décisions ?

Somme toute, c’était peut-être sur ces principes fondateurs que Möchlog croyait en cette alliance, et c’était là l’unique raison de leur réunion. Il se moquait éperdument que leurs caractères ne concordent pas, pourvu que son objectif fut atteint. Elles étaient les actrices de ses desseins, et devaient une fois de plus témoigner de leur foi inconditionnelle.
Aussi pure que lui parut cette mission, elle ne pouvait se résoudre aussi aisément à prendre pour partenaire d’aventure une personne comme Zora. Peu de choses savaient inspirer sa peur, mais une meurtrière avérée en faisait partie.
Lorsqu’Althéa repris la parole, sa voix vacillait entre confiance à toute épreuve et ironie persistante.

« Ne t’a-t-il pas donné davantage d’informations ? Je ne suis pas prête à me lancer dans une telle quête sans parler méthode. Sans mentir, tu as la diplomatie d’un arcnobion. Peut-être que te mettre tout le continent à dos est un style de vie, mais je préférerais servir l’Architecte en incluant plus de raison que tu n’en as fait preuve… était-ce hier seulement ? »

Althéa prit un air pensif, et se rendit compte que la discussion paraissait presque civilisée. Zora, où te caches-tu ?
Comme pour reposer les bases de leur relation conflictuelle, elle ajouta avec une pointe de nervosité presque imperceptible :

« Ah, et tu devrais éviter de sourire, ça m’angoisse. C’est le genre de choses que je t’imagine faire uniquement seule face à ton miroir pour voir ce que ça fait d’être avenante. »

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Les deux facettes d'une même pièce  EmptyLun 2 Oct - 16:58

Zora ne s'attendait pas vraiment à un tel scepticisme. Il est vrai qu'éradiquer Technologie ne sera pas une chose aisée. La faute aux hérétiques qui l'ont nourrie pendant des siècles, lui permettant de s'installer sur des terres d'abord lointaines. La rouquine ne peut qu'imaginer les formes qu'elle prendra en son fief, Daënastre. La tâche sera compliquée, c'est certain. Mais elle reste nécessaire. Absolument nécessaire.

Pourtant la jeune femme comprend la réaction de sa comparse. Si les rôles étaient échangés, elle aurait également de la peine à croire à une entreprise si titanesque. Mais elle serait davantage encore jalouse que Möchlog ait choisi de parler à la noiraude plutôt qu'à elle. Est-ce le cas pour Althéa? Est-ce que son hésitation est altérée par une quelconque forme d'envie? Elle se plaît à le croire...

Mais puisqu'elle se trouve dans la position qui l'arrange le plus, Zora entend bien convaincre sa rivale de la suivre dans cette merveilleuse aventure vouée à la purification de l'hérésie. Si cela ne tenait qu'à elle, elle irait seule. Mais la rouquine est certaine que la Chouette souhaite que la noiraude l'accompagne. Alors, elle l'accompagnera. Même si elle doit la tirer de force jusqu'aux rivages qui lèchent l'autre côté de la mer. Et tant pis si ça déplaît à l'une comme à l'autre...
"C'est n'est pas parce qu'une tâche est complexe qu'elle est impossible..."
Elle hausse les épaules comme pour lui signifier que les difficultés qui les attendent ne sont qu'une forme de détail. Puis elle tente à nouveau de s'extirper de son écrin de couvertures, y parvenant légèrement mais le regrettant aussitôt lorsque le froid mordant lui arrache des frissons et fait remonter en elle de désagréables souvenirs. À défaut elle se contente de rester docilement dans ce semblant de lit. Pourquoi ne pas rester si confortablement installée, finalement? D'autant plus s'il faut convaincre Althéa pendant de longues minutes...

L'adepte de Möchlog garde le silence pendant de longues secondes tandis qu'elle invoque sa magie pour soulager la douleur de sa gorge et sonder son corps. La noiraude a fait du bon travail. Toute personne sensée estimerait avoir une dette envers elle. Mais Zora, elle, sait ce qu'il en est: c'est à Möchlog que reviennent les louanges. C'est lui qui l'a sauvée à travers Althéa. Les remerciements vont à l'artisan, non à l'outil qu'il emploie...

Pendant, donc, qu'elle s'emploie à faire l'état des lieux de son corps, Zora écoute sa rivale parler. Même si elle aimerait pouvoir lui donner tort, elle reste malgré tout consciente que la noiraude soulève certaines vérités. L'entreprise dans laquelle elle se lanceront mérite un minimum de préparation. C'est un véritable saut dans l'inconnu qui les attend, après tout.

Elle note au passage que les événements de la mine se sont déroulés la veille. Tout ceci lui semble si lointain à présent. Si... dérisoire en comparaison du futur que Möchlog leur a réservé. Il ne s'agissait, dans le fond, que d'une répétition générale. Elle n'était pourtant guère concluante. Les doutes quant à l'efficacité d'une collaboration efficace sont partagés. Pourtant il faudra bien faire avec.
"Tu sais je suis capable de faire des concessions!" souffle-t-elle à sa comparse. "Je n'aime pas perdre du temps en de vaines paroles, c'est vrai. J'ai toujours préféré l'action à la réflexion. Mais je ne suis pas une bête sanguinaire incapable de voir ou de comprendre le monde qui l'entoure. Ou encore soumise à ses seuls instincts!"
Pourtant elle sait que l'image qu'elle donne d'elle va dans ce sens. D'ordinaire elle s'en soucie. Notamment parce qu'elle opère sur un continent qu'elle connaît. Pourquoi faire preuve de retenue sur son propre territoire? Mais à Daënastre, en revanche... L'inconnu incite à la prudence. Et Zora sait qu'elle ne pourra pas agir là-bas comme elle le fait ici. Pas sans perdre l'opportunité de mener à terme la mission que Möchlog leur a confiée.
"Mais toi, tu es capable de faire preuve de diplomatie Althéa. Je l'ai bien vu dans la mine! Et c'est sûrement qu'une des raisons pour lesquelles Möchlog nous a réunies!" reprend-t-elle, persuadée du bien fondé d'une telle collaboration. "Nous nous complétons! Ma faiblesse est ta force et ma force est ta faiblesse. Nous sommes les deux facettes d'une même pièce. Et ensemble nous parviendrons à éradiquer Technologie! Nous n'avons qu'à suivre le chemin que notre Architecte a tracé pour nous..."
Ce n'est pas si compliqué, dans le fond. La foi et le courage sont les deux seuls ingrédients indispensables à leur réussite. Pour le reste, les choses viendront naturellement. Il n'y a qu'à se laisser guider au gré des opportunités qui se présenteront immanquablement à elles. Zora ignore la remarque sur son sourire. Ce n'est qu'une pique supplémentaire. Et elle n'a pas grand intérêt en ce moment. L'heure est à la révélation, pas à la chamaillerie. Tout amusant que cela puisse être...
"Mais je dois te dire... Möchlog m'a fait voir autre chose. Des morts. Beaucoup de morts. Et parmi eux, il y avait les membres de ta tribu..." souffle-t-elle. "C'est logique, dans le fond! Nous sommes les élues de la Chouette. Mais les tiens ont été contaminés par Technologie en passant du temps dans ou aux abords de cette mine. Ils doivent... J'ai bien peur qu'ils doivent être purifiés! Pour leur bien de leurs âmes et la gloire de notre dieu!"
Elle ne ment pas. Ou, du moins, pas réellement. Ce qui est intéressant avec les rêves prophétiques, c'est qu'ils doivent être interprétés. Et Zora est certaine que seule Althéa se trouvait à ses côtés. Ce qui pourrait signifier, par exemple, que son clan est appelé à trépasser. Il y aura des sacrifices à faire, c'est certain. Zora y consent aisément dans la mesure où elle ne se soucie de personne. Est-ce le cas d'Althéa?
"T'en sens-tu capable?" s'inquiète-t-elle. "Si tu le souhaites, je peux m'en charger pour toi! Un peu de poison suffira à les purifier sans douleur excessive. Et lorsqu'ils ne seront plus, l'oubli t'empêchera de ressentir une trop grande tristesse..."
Voilà qui pourrait la rassurer quelque peu. Les yeux mi-clos, tête posée contre l'oreiller improvisé qui la supporte, Zora guette la réaction de la noiraude...

Althéa Ley Ka'Ori
Althéa Ley Ka'Ori
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Les deux facettes d'une même pièce  EmptyMar 3 Oct - 0:30
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Althéa avait la mine sombre, comme mise en valeur par la lumière déclinante du soir. Elle buvait les paroles de Zora avec parcimonie, divisée entre son désir ardent que Möchlog l’ait bel et bien choisie d’une part - quand bien même ce fût par le truchement de Zora – et le souhait que ce poids ne repose pas sur ses épaules. Pour éradiquer une hérésie vieille de plusieurs siècles, il faudrait peut-être une vie, plusieurs générations. Elle ne comptait guère avoir de descendance, leur sort lui importait peu ! Mais sacrifier sa vie au nom d’une mission d’origine douteuse, c’était une autre paire de manches…

Mais non, elle se trompait ; il s’agissait bien là de sacrifier sa vie au nom de Möchlog, et elle rectifia bientôt sa pensée en ce sens. Quel objectif plus sublime que celui-ci ? Sa méfiance envers Zora en tant qu’individu, en revanche, ne saurait s’évaporer si facilement. Il lui faudrait des heures, des jours, des semaines, peut-être n’y parviendrait-elle jamais, pour accepter Zora dans tout ce qu’elle avait de plus destructeur et de plus cruel. Si elle ne doutait pas de sa parole, elle était en droit de remettre en question son savoir-vivre.

« Il est difficile de croire que tu n’es pas - ou plus - une bête sanguinaire, Zo’. Après tout, tu as massacré trente Daënars sous mes yeux… Trente et un officieusement. Et je doute que Möchlog en personne t’ait dicté tes actes. »

La suite de sa tirade avait cette ferveur persuasive qui sait si bien toucher le cœur des croyants. Son attribution des rôles avait un sens, quand bien même elle aurait adopté un point de vue parfaitement objectif. Zora était l’enveloppe charnelle, Althéa la volonté spirituelle ; la rouquine tenait l’arme qui se substituerait à la parole de la noiraude ; la violence s’alliait à la diplomatie. Quelle meilleure symbiose pour mener une quête de telle envergure ? Möchlog n’avait-il pas ainsi insufflé la vie à un individu transcendant, rendu supérieur par les qualités de chacune de ses composantes ?

« Les deux faces d’une même pièce, murmura-t-elle sans but aucun. Cela implique que nous pouvons nous tourner le dos sans trembler ; sans que la crainte de mourir ne soit omniprésente. Je suis prête à te donner le bénéfice du doute, et à ne guère me retourner contre toi si tu protèges mes arrières. En revanche tu comprendras que j’attende une preuve avant de te faire entièrement confiance. Il est toujours plus facile de paraitre docile lorsqu’on est convalescente… »

La tournure des évènements la rendit morose. Pire, on pouvait deviner la détresse dans son regard noisette, qui rencontrait l’ambre virulent de son interlocutrice. La froidure de sa révélation s’exprimait autant dans le sens de ses mots que dans la forme qu’ils prenaient. Elle écouta sans l’interrompre, et demeura figée bien après qu’elle eut relaté son rêve prémonitoire. Etait-ce ainsi que Möchlog testait sa foi ? En la rendant aussi criminelle que sa nouvelle alliée ?

Elle inspira pour prendre la parole par deux fois, indécise, mais aucun mot ne jaillit de ses lèvres.

Voilà le pacte qui les fédérait. Pour marquer leur alliance, à l’image de deux enfants qui mêleraient leur sang, chacune donnerait de sa personne pour sceller leur accord. Althéa se devait de devenir meurtrière, et Zora de privilégier la parole. L’occasion devait être symbolique, et la suggestion de Zora correspondait parfaitement. Et pourtant elle ne sut tout à fait s’y résoudre. Pour l’instant.

« Je sais faire mon propre poison, merci… finit-elle par déclarer sèchement. »

Althéa se détourna de Zora pour rassembler quelques victuailles, qu’elle plaça près de l’alitée. Son éloquence teintée d’ironie l’avait quittée, l’heure n’était plus à la fierté d’être inclue dans les plans de Möchlog, mais plutôt à la triste réflexion. Elle savait de façon évidente ce qu’il lui fallait faire, mais elle espérait quelque part ne jamais franchir le pas, que la nuit couvre la scène et la dissimule de la réalité, l’efface entièrement du fil du temps. Bien après que Zora ait à nouveau fermé les yeux, Althéa demeura assise sur sa couche, emmitouflée dans les couvertures qui luttaient tant bien que mal contre le froid mordant. Peu importe son choix, les conséquences marqueraient un tournant dans sa misérable vie.

***

« Réveille-toi, nous devons partir. Tu vas devoir marcher, je n’ai pas la force de te porter. »

Sans compter le fait qu’elle faisait près de quatre pouces de plus qu’elle. Cela, elle préférait ne pas le mentionner. Elle laça plutôt le haut de ses bottes pour prévenir la neige de s’y infiltrer, et se couvrit de sa cape la plus chaude. Ses yeux étaient cernés ; l’observateur avisé associerait sans difficulté à la maladresse de ses mouvements précipités son manque cruel de sommeil. Ses iris, plus que tout, ne recelait plus d’aucune trace d’émotion. On comptait davantage de plumes dans ses cheveux que de raison. Elle s’était adressée à Möchlog tout au long de la nuit, et avait réalisé ce bijou d’apparat en son honneur. Il ne fallait pas être clairvoyant pour deviner son trouble, ainsi que l’intensité de sa nuit.

Althéa s’apprêta à sortir, puis revint sur ses pas pour cueillir un tissu qu’elle plaqua sur sa bouche. Chez elle, c’était là le signe d’une puanteur pestilentielle, d’un air irrespirable ou de la vue d’un cadavre.

Des sacs de voyages étaient apprêtés à l’extérieur et Althéa se dirigea vers eux sans attendre. Elle prit soin de regarder au ciel, ou droit devant, mais jamais à terre (ou à neige ?). Elle inspirait par la bouche uniquement, par peur que le mouchoir ne soit pas suffisant à couvrir l’odeur de putréfaction. Ses yeux devinrent humides, autant par le blizzard qui les giflait et la fatigue qui l’assaillait que pour la peine qui déchirait son cœur pourtant si froid. Au sol, des dizaines de corps reposaient, comme déposés là dans des pauses improbables par un enfant imprudent. Les Mahere s’étaient effondrés à terre un à un, et ne se relèveraient jamais. Leurs mains étaient pour la plupart portées à leurs cous. Leurs visages violacés avaient des allures de peaux battus au bâton, le sang giclait dans le blanc de leurs yeux grands ouverts, choqués par l’apparition soudaine de la mort.

« Belladone, ciguë et strychnine, fit-elle d’une voix rauque. Je l’ai fait pour Möchlog uniquement, pas pour toi. »

Althéa jeta un œil en arrière pour vérifier que Zora la suivait, et le regretta instantanément. Ses yeux parcoururent la scène dont elle avait su se rendre aveugle jusqu’alors. Elle s’effondra à terre et vomit ses tripes. Ou plutôt sa bile, étant donné qu’elle n’avait rien avalé depuis la veille. Là, elle entama une prière pour l’Architecte qu’elle murmura entre ses dents plus qu’elle ne scanda à voix haute.

Ne pleure pas les morts, leurs âmes Lui reviennent,
Ne pleure pas des corps, efface ta peine.
Quête réconfort dans la destinée souveraine,
Prône son essor, ta fortune est certaine.


Dernière édition par Althéa Ley Ka'Ori le Mar 3 Oct - 17:43, édité 1 fois

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Les deux facettes d'une même pièce  EmptyMar 3 Oct - 9:22

Elle est extirpée d'un rêve particulièrement agréable. Et s'il n'était pas aussi captivant que la vision offerte par Möchlog le jour même ou la nuit précédente, Zora n'est pas pour autant ravie d'en avoir été arrachée. Elle plisse les yeux pour se protéger de la lueur vacillante du feu avant de se passer une main sur le visage. Pourtant l'air grave sur le visage d'Althéa lui fait oublier rapidement sa mauvaise humeur. Et si elle ne saurait dire exactement ce que la noiraude lui a dit, la rouquine pressent que ce n'est pas par caprice ou plaisir qu'elle l'a ainsi tirée de ses songes.

La jeune femme se redresse sur son tapis de couvertures et frisonne à nouveau en se rappelant que le Khoral est là, tapis derrière le tissu de la tente. Son sifflement persiste encore et toujours, menaçant. La perspective de devoir quitter cet abris douillet ne l'enchante guère. Pourtant elle fait l'effort de s'extirper de son écrin réconfortant pour affronter les problèmes qui, semblent-ils, se pressent au portillon. Une attaque d'un clan rival? Une mise à mort décidée par les membres de celui-ci? Que se passe-t-il exactement?

Zora, dans le doute, se relève après ce qui lui semble avoir été une éternité. Ses jambes protestent d'ailleurs avec véhémence contre ce mauvais traitement soudain. Signe qu'elle n'a pas encore totalement récupéré. Mais elle tient debout, c'est déjà ça. La disciple de la Chouette, yeux encore à moitiés clos, tente de décortiquer les informations transmises par ses sens. Pourtant s'il y a un danger, il ne semble pas immédiat. Et nul bruit de bataille ne vient infirmer cette constatation...
"Je peux savoir..." commence-t-elle en observant Althéa revenir chercher un morceau de tissu puis quitter la tente. "... ce qu'il se passe?"
La fin de sa phrase se perd dans le vent et arrache un soupire résigné à la demoiselle qui récupère à son tour ses affaires avant de quitter la chaleur réconfortante de la tente. Et ce qu'il restait de la brume de son rêve disparaît lorsque l'alliance du vent et de la neige vient gifler ses joues. Tu parles d'un réveil agréable...

Pourtant Zora oublie tout de ce désagrément lorsque sa vision s'affine et qu'elle découvre des rangées de corps alignés dans la poudreuse. Le spectacle est si merveilleux - et inattendu - que la rouquine entrouvre les lèvres de surprise, incapable de réagir. Elle ne pensait pas la noiraude capable de faire une telle chose. L'instant est grandiose. Elle regrette juste de ne pas avoir pu assister à ces trépas, de savourer les derniers instants de ce qui fut autrefois un clan.
"Et après c'est moi l'animal enragé..." s'amuse-t-elle.
Sa remarque se perd à nouveau dans le vent alors qu'Althéa s'éloigne. Elle lui emboîte finalement le pas, délaissant avec peine le spectacle morbide qu'Althéa lui a réservé. Et lorsque cette dernière partage avec elle la teneur exacte du poison qu'elle a utilisé pour se délester de ses attaches sociales, la rouquine se contente d'acquiescer. Bon choix!

La seule chose qui inquiète Zora, ce n'est pas vraiment l'endroit qu'elles viennent de quitter mais plutôt celui où elles se dirigent. Pourtant elle décide de faire confiance à sa comparse maintenant que cette dernière a prouvé qu'elle était digne d'une telle considération. Et qu'une collaboration est belle et bien possible!

Toujours est-il que la rouquine a de la peine à suivre la cadence infernale de sa camarade qui commence à la distancer. Et lorsque l'intéressée se retourne pour vérifier que la convalescente est bien sur ses traces - quelle charmante attention! - Zora obtient  un répit bienvenue. Malheureusement c'est au détriment de la noiraude qui tombe à genoux et régurgite le contenu de son estomac. Charmant...

Pourtant elle ne lâche pas la remarque moqueuse qui lutte pour franchir ses lèvres. En réalité elle se découvre plutôt un sentiment qui lui déplaît: une forme de compassion. La rouquine s'en étonne un instant avant de se rappeler que si des liens commencent à se créer, c'est parce que Möchlog souhaite qu'il en soit ainsi. Pourquoi lutter contre sa volonté quand il est si aisé de si plier?
"Ça va aller, Althéa..." lui souffle-t-elle en s'agenouillant à ses côtés. "Les sacrifices exigés par Möchlog ne le sont jamais en vain! Et tu seras bientôt récompensée par l'Oubli. On vit bien mieux lorsque l'on n'a pas à se soucier d'êtres chers, tu verras..."
Elle la gratifie au passage d'une petite tape dans le dos qui se veut réconfortante. Zora n'était pas totalement sûre que Möchlog lui indiquait vouloir la mort des proches d'Althéa. Mais dans le doute... Et puis l'important, dans le fond, c'est que la noiraude y croit. Ne serait-ce que pour la soulager un peu...

Guère encline à faire preuve d'un altruisme qui ne lui sied guère, la rouquine ne tarde pas à poursuivre sa route dans la direction prise par sa comparse quelques instants plus tôt. Cette dernière ne tardera pas à la rattraper...

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Les deux facettes d'une même pièce  EmptyMar 3 Oct - 18:23
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La chouette blanche hulule sur la mélodie du vent. Son chant austère prend des airs d’hymne à la mort et à la vie, qui n’est au final qu’une discontinuité de la première, comme la lumière du jour ne fait qu’assaillir temporairement les ténèbres inexorables de la nuit. Quel plus bel animal pour l’Architecte Möchlog que ce somptueux animal nocturne ? Il représente la pénombre autant que le trépas, le froid du crépuscule autant que la blancheur de la vie.

Mais son cri funèbre est discourtoisement interrompu par une activité soudaine en deçà de son perchoir. La mort n’a pas encore vaincu, la victoire va à son antagoniste. La lueur tenue, mais pourtant vivace, lutte encore pour éclaircir un tant soit peu le voile sombre de l’obscurité. Elle retarde l’inévitable car c’est là son unique vocation ; survivre. L’animal intrigué observe en silence les êtres se mouvoir en contrebas, animés par un miracle certain de son homologue supérieur. Ou celui de son confrère, le griffon d’ivoire. L’illusion se dissipe peu à peu. La chouette se retire, motivée par la déception ou par le bruit qui l’indispose. A deux reprises, elle aurait pu constater la mort, celle de Zora, celle des Mahere. Par deux fois elle fut trompée.

« Leryan ? appelle une voix inquisitrice.
- Je ne sais pas, répond celui-ci à la question implicite. Althéa est à l’évidence ce que l’illusion est à la réalité ; elle s’y dérobe sans hésiter. »

Elle avait bien exposé ses raisons toutefois, à l’aube, et après une nuit à réfléchir à un stratagème pour se soustraire à son dilemme. Elle craignait pour leur sécurité, avait-elle affirmé, mais doutait qu’aucun d’entre eux, parmi le clan Mahere, ne fût capable tant en courage qu’en compétence d’exterminer le danger à la source. La plupart était des individus emplis de compassion, soucieux de leurs familles et peu disposés au meurtre. Elle s’occuperait donc de l’éloigner de sa faction, et leurs illusions lui permettraient une échappatoire. Elle avait insisté pour être témoin de l’illusion également, sans quoi elle n’aurait su jouer les émotions avec autant de brio.

La guérisseuse avait donc dissimulé une bonne part de vérité, puisqu’elle escomptait ainsi obtenir la confiance de Zora, et non pas l’éliminer. Il est certaines choses qu’il vaut mieux garder pour soi, notamment lorsqu’on est pressé par le temps et que l’on craint une opposition de son interlocuteur. Son idée n’avait émergé qu’en même temps que le soleil, et sa mise en place avait été tant hâtive que stressante.

« Quoi qu’il en soit, Khugatsaa nous a protégés de la fanatique ! ajoute-t-il avec un optimisme qui correspond davantage à son éternelle jovialité. Puisse-t-il protéger Althéa également. Ah, et Loha, très belle illusion, le filet de salive sur ta joue !
- Ah ça ? C’est de la vraie ! »


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