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Chroniques d'Irydaë
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 [Terminé] L'enfance n’est donnée qu’à quelques-uns

Flavien Teleri
Flavien Teleri
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[Terminé] L'enfance n’est donnée qu’à quelques-uns EmptySam 17 Mar - 22:27
Irys : 887826
Profession : Soigneur itinérant - Guérisseur
My'trän +2 ~ Chimères
De retour à Vereist après son escale dans les Kharaal Gazars, il était plus décidé que jamais à ne plus mettre les pieds à l'extérieur du continent Daënastre avant d'avoir l'assurance d'avoir régler cette affaire qui le raccrochait, oh si fragilement, à un passé qu'il lui serait beaucoup plus sage d'oublier. Il avait laissé trainer cette responsabilité qu'il s'était imposée à lui-même pendant de trop nombreuses années. Il était temps de mettre un terme à toute cette histoire et de définitivement refermer le livre de son passé.

Pour aller où, pour faire quoi ? Peu importe pour le moment. Les Architectes l'avaient toujours guidé dans le droit chemin jusqu'à présent, du moins le pensait-il sincèrement. Forme d'asservissement à l'instar d'une liberté véritable, sa soif de voyage n'était que supercherie si ses pas étaient réellement guidés par des entités divines. Du moins c'était ce que les technologistes septiques de ce monde disaient. Et pourtant, quoi qu'en pensent les Daënars, le soigneur était persuadé que ses Créateurs n'allaient pas l'abandonner maintenant qu'il avait plus que jamais besoin de les sentir l'accompagner dans sa quête.

Abandonnant l'idée de continuer ses recherches à Cerka, il se rabattit sur la capitale de Vereist. Si les informations que lui avait transmises Léonie étaient bien vraies, il trouverait certainement une piste dans la grande ville. Les capitales étaient au centre de l'histoire de leurs régions et ses habitants portaient dans leurs cœurs l'histoire qui marquait les murs de leurs belles cités. Quelle ironie que celle de réaliser que si les informations de Léonie l'avaient dirigées vers une famille d'adeptes My'träns, sa quête se serait terminé avant même d'avoir commencé. L'oubli. Quel merveilleux don.

Secouant la tête comme pour chasser ses pensées, Flavien prit un chemin de traverse afin d'éviter l'une des places les plus actives de Zuhause. Sur une bonne centaine de mètres s'étendait une patinoire créée de toutes pièces des mains de l'Homme. La curiosité faisait le bonheur des touristes de passage et remplissait le porte-monnaie des commerçants assez courageux pour braver le froid et vendre boissons chaudes et autres douceurs. Il se serait bien rendu sur place pour poser ses questions, mais il avait vite appris que même habillé à la manière d'un Daënar, les commerçants cherchant à faire du profit comme ici n'avaient que peu de temps pour répondre à quelques questions et risquer de perdre de précieux clients.

Peu importe. Il trouverait certainement une piste plus loin.

La petite rue dans laquelle il s'était engagé était plutôt tranquille par rapport à sa voisine. Du coin de l'oeil, il repéra un écriteau richement décoré, quoiqu'un peu sombre. Il devait s'agir d'une boutique à rapidement observer la bâtisse. Peut-être était-ce son jour de chance. Sans prêter attention à ce qui était écrit sur la devanture, Flavien passa les portes de la petite boutique. Il devait s'agir d'un commerce de proximité, pensé explicitement pour les résidents de la ville et non pas pour attirer les foules. Il allait certainement tomber sur quelqu'un qui pourrait le renseigner.

Flavien réalisa son erreur à la seconde où il passa la porte du magasin.
Il fut noyé dans le bruit de rires d'enfants et fut tenté de faire demi-tour sur le champ en avisant la foule d'enfants qui semblait s'être agglutiné dans la boutique. Selmac, son Aitah et familier, eu lui l'idée inverse et se hâta de sauter de son épaule pour aller à la rencontre des enfants qui arrêtèrent un moment de parler entre eux pour observer l'Aitah. Celui-ci se frotta contre leurs jambes, tapissant leurs pantalons de poils, ce qui fit rire les enfants qui se hâtèrent d'offrir de nombreuses caresses à Selmac avant de retourner à leur jeu.

Décidant visiblement qu'il méritait l'attention de tous les petits d'homme présent ici, Selmac abandonna le premier groupe pour se poster devant d'autres enfants, obtenant la même réponse de leur part. Flavien hésitait entre siffler à son familier de revenir près de lui ou céder à l'étonnement. Mais où étaient donc passés les parents de tous ces enfants ? Que faisaient-ils tous ici ? Pourquoi ces jouets contenaient-ils autant de mécanismes ?

Jetant un coup d'œil un peu perdu en direction des présentoirs, il grimaça intérieurement.
Un magasin de jouets.

Évidemment que des enfants seraient attirés par la boutique comme des abeilles par un pot de miel. Récupérant Selmac après que celui-ci eu terminé son tour de présentation, Flavien hésita à rester pour demander sa route. Certains enfants avaient suivi Selmac des yeux, réalisant enfin que l'Aitah n'était pas entré seul dans la boutique. De petites paires d'yeux écarquillés l’observaient curieusement et le soigneur engagea une retraite discrète.

Enfin. Disons plutôt qu'il tenta une retraite. Quelque-chose agrippait son manteau et l'empêchait de se faufiler jusqu'à la porte.

- Eh monsieur ? Dis. Dis.

Flavien se figea en entendant la petite voix, sentant quelque-chose, ou plutôt quelqu'un, tirer sur la manche de son manteau. Prudemment, il baissa les yeux. Une fillette à laquelle il manquait une dent de lait lui souriait joyeusement.

- Oui ? Se risqua-t-il à demander.

Il était peut-être mal à l'aise, mais pas au point de remballer sèchement un enfant aussi jeune.

- Toi aussi t'aimes la Baronne des Glaces ?
- Pardon ? Demanda-t-il avant de répéter un peu bêtement, La baronne des glaces ?
- Bah oui ! T'es coiffé comme elle tu sais !
- Ah ? Répondit-il. A ce point, il ne pouvait pas faire grand-chose de plus.

Ce fut tout ce dont la fillette avait besoin. Toujours cramponnée à son manteau, elle se lança dans l'explication d'une fable contée par les bardes de la région. Une histoire de baronne qui fonda son empire sur la découpe de blocs de glace. Il y avait un bonhomme de neige et un renne quelque-part dans l'histoire, mais la petite parlait si vite que Flavien n'en était pas sûr à cent pourcent. Pris au piège, le soigneur se contenta de hocher la tête bêtement aux dires de la fillette, cherchant du coin de l'œil une échappatoire. Malheureusement la petite main ne semblait pas vouloir le lâcher, l'enfant ravi d'avoir trouvé une oreille attentive à son histoire.


Dernière édition par Flavien Teleri le Sam 21 Avr - 14:37, édité 1 fois

Ophélia Narcisse
Ophélia Narcisse
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[Terminé] L'enfance n’est donnée qu’à quelques-uns EmptySam 17 Mar - 23:54
Irys : 1609400
Profession : Cible mouvante pour Régisseur
Pérégrins -2
Une aube optimiste se levait sur Zuhause, les nuages se comptaient sur les doigts d'une main, contrairement aux rayons du soleil, qui eux, abondaient. Le ciel n'était pas souvent aussi bleu à Vereist, il était déjà bien assez rarement cyan, mais aujourd'hui, il semblait que le climat n'était pas d'humeur à faire des caprices. Le vent venait de l'Ouest, avec des nuances de Sud, ramenant la tendresse d'un temps printanier entre les ruelles, d'habitude gelées. Les habitants n'étaient pas encore sortis, mais cela n'aurait su tarder. Il fallait bien leur pardonner, après tout, si la journée ne jurait qu'activités en plein air et balades dans les grandes places, il n'était que six heures du matin. Mais il y a bien quelques petites exceptions dans la ruche qui se doivent de butiner dès les premiers signes de l'aurore.

Affalée sur son lit, Ophélia avait entre-ouvert son oeil-droit au bruit de son réveil qui lui hurlait qu'elle avait assez dormi. Et diable qu'il avait raison, elle s'était endormie à minuit la veille, s'allouant ainsi six longues heures de sommeil. Sa pupille saphir balaya un instant l'arrière-salle qui lui servait de chambre, l'autre iris, émeraude et bien plus fainéante, ne se dévoila que lorsque sa propriétaire ne se releva sur son lit, baillant longuement. Son regard vairon appartenait encore au royaume des rêves. La gérante se faisait souvent la remarque qu'elle dormait de mieux en mieux ces temps-ci, sans mentionner ses pensées oniriques auxquelles elle avait désormais droit. Cela changeait des cauchemars et cette dérive était plus que bienvenue. 

Passant une main en plein éveil sur la partie droite de son visage, la dame aux cheveux de jais esquissait quelques gémissements engourdis du fond de sa gorge, tandis qu'elle frottait son oeil abyssal. Tournant la tête vers le mur du fond, elle put constater qu'elle avait les cheveux bien plus ébouriffés que de coutume. En une vaine tentative d'arranger ce petit bazar, elle ondula ses mains entre les mèches qu'elle jugeait trop rêches ou trop rebelles. Mais il n'y avait qu'un seul remède à une chevelure affligée, et la gérante savait qu'elle n'y couperait pas. De toute manière, il n'y avait rien de mieux qu'une douche pour s'échapper de la fatigue du réveil. Passant son équilibre à ses jambes, elle se balança un court instant sur ses pieds, tentant de retrouver ses appuis que la nuit avait provisoirement dérobé. A tâtons, Ophélia se redirigea vers la petite alcôve que son père avait destiné à devenir la salle de bain. Dû à l'absence permanente et irréversible de ce dernier, sa fille était désormais la seule à profiter de ses bienfaits. 

Lorsqu'elle eut enfin jugé être assez présentable et brillante pour accueillir une nouvelle fois les enfants dont elle connaissait désormais les noms, elle fit simplement battre la porte qui séparait l'arrière-salle de la boutique. Elle déposa un regard empli d'espoir sur l'entrée, espérant y voir un visage familier. Mais elle le changea vite en une expression lasse, déçue de ne plus recevoir de visites. Ces derniers mois avaient été riches en rencontres, alors pourquoi ses connaissances ne voulaient-elles pas se résoudre à revenir la voir ? Malgré cela, pas un instant elle ne doutait sur l'affection que lui portaient ces personnes qu'elle avait aidé et qui à leur tour, lui avait tendu une main vers la lumière. 

Pas pour aujourd'hui, apparemment ...

Murmura-t-elle à elle-même. De toute manière elle était la seule à l'écouter dans cette boutique ... et aussi la seule à parler. Elle avait bien l'habitude de la solitude, après tout, elle avait été sa seule amie dix-sept années durant. Mais on l'avait habitué à recevoir de l'affection, et comme la plus délicieuse des sucreries, elle aurait tout fait pour en ramasser ne serait-ce que les miettes. Poussant un long soupir, la gérante fit le tour de ses allées, vérifiant la position des jouets, leur état et leur propreté. Tout était en ordre, comme d'habitude. Elle avait déjà tout inspecté hier soir, il y avait peu de chances que ses enfants aient bougé d'eux-mêmes ... mais qui sait ? Après avoir fait sa petite randonnée en boucle sur son parquet, elle revint au comptoir, juste pour voir qu'il y était déposé une petite boîte à musique achevée qui n'avait plus sa place sur l'atelier. La soulevant doucement entre ses doigts fins, elle l'apporta à la rangée destinée aux "petites inventions". Elle y regroupait tous les gadgets qui cachaient des mécanismes, sans pour autant avoir la forme de poupées. Les effigies mécaniques, elles, se trouvaient sur le promontoire juste en face.


Le temps était généreux avec la dame des jouets, il lui restait encore une heure avant d'ouvrir boutique, mais par acquis de conscience, elle décida que l'ouverture aujourd'hui se ferait à sept heures de la matinée. Se réfugiant derrière son comptoir, Ophélia fouilla les tiroirs à la recherche de l'oeuvre sur laquelle elle travaillait depuis maintenant beaucoup de temps. Et aujourd'hui, c'était le jour où elle allait l'achever. Elle déposa sur sa table une peluche étrange, avec une forme animale et de la matière verte, imitant de la fourrure. Avec toute la modestie qu'elle pouvait s'attribuer, la tenancière trouvait qu'elle avait vraiment bien réussi son imitation de khulganna, surtout le petit visage qui avait les traits de celui d'un petit chimpanzé. Mais il manquait bien quelques sutures à ajouter, le rembourrage s'échappait encore du dos et du derrière de la peluche. Etrangement, elle se donnait beaucoup de mal pour un simple doudou à la structure presque simpliste, surtout que la réplique n'était en aucun cas destinée à la vente, mais bien à Ophélia elle-même.


L'heure défila bien vite, accélérée par la concentration que la dame aux cheveux de jais accordait à son oeuvre. Focalisée, elle ne perçut son premier client que lorsque son nez dépassa de la bordure du comptoir, surmonté par deux petits yeux azurés. C'était un garçon, un enfant d'à peine six ans qui vivait à deux pâtés de maisons et qui avait pour habitude de venir du petit matin jusqu'au midi. Surprise par sa soudaine apparition, la créatrice eut un léger sursaut qui se résulta en un rire bon enfant, suivie d'une mimique exagérément boudine. 


Eh bien, Felix, est-ce une manière de saluer une dame ?


Pffft, t'es pas une dame, t'es mon amie ! 


Dans ce cas est-ce une manière de saluer une amie ? 


Les enfants sont taquins, et curieux par nature, certains sont aussi grincheux et parfois insupportables pour ceux qui n'ont pas la patience d'endurer leurs sottises. Mais Ophélia s'y était habituée, c'était son métier après tout. Elle aimait voir cette parcelle d'innocence dans leurs yeux, cette émotion inaltérée qui ne laissait sous-entendre que les méfaits les plus enfantins, comme voler des bonbons, ou bien chatouiller leurs soeurs. Au final, ce sont des crimes auxquels on aime assister, du moins, lorsque l'on possède l'instinct maternel de Mme. Narcisse. 


Tu fais quoi, dis ?


Qu'est-ce que tu penses que je suis en train de faire ?


Hum ... une autre poupée !


Perdu ! 


Dis-moi, allez ! 


Hin, hin ... la curiosité est un vilain défaut.


Elle ne lui dirait jamais ce que c'est vraiment, sinon il la voudrait absolument et la pauvre Ophélia n'avait vraiment pas envie de partager cette peluche là. C'était un souvenir, après tout, et aussi l'espoir de revoir un jour le visage qui l'a inspiré ... et celui de celle qui l'accompagnait surtout. A mesure que les heures passaient, la masse d'enfants abondait et le magasin se voyait rempli dès neuf heures. C'était la routine, les enfants criaient, riaient ... ils jouaient en somme, et c'était bien le fondement même de cette boutique. Le nombre imposa à la gérante de sortir dans les allées pour aller amuser les petites âmes pures qui hantaient désormais les allées. 

Accroupie parmi eux, elle était méconnaissable, de par sa taille assez petite et surtout à cause du fait que sa tête ne dépassait pas des promontoires. Mais elle avait toujours un oeil sur tout, et une oreille bien tendue. La porte du magasin était raccordée à une clochette et l'ouverture causait un petit claquement qui résonnait partout dans le magasin. Aussi, lorsque cette sonnerie retentit deux fois d'affilés, Ophélia comprit qu'un de ses clients était entré et directement ressorti. Elle se redressa donc pour voir de ce qu'il en était, et vit un pauvre hère se faire harceler par les histoires enfantines d'une petite fille que la gérante ne connaissait que trop bien. Elle savait  bien que tout les adultes n'avaient pas le même degré de patience qu'elle, mais elle fut bien amusée par l'effort que faisait l'étranger pour tenter de garder une attitude adaptée. Heureusement pour lui, la dame aux poupées n'était pas assez cruelle pour laisser un tel supplice durer. Elle vint au côté de l'enfant et lui chipa sa main. 


Livia, arrête d'embêter le monsieur.


Mais je l'embête pas ! Je lui raconte la légende de la Baronne ...


Mais je pense qu'il la connaît, tu sais. elle adressa un furtif clin d'oeil à l'étranger.


Ah bon ? Mais je veux lui raconter, moi ...


Tu me la raconteras à moi, si tu veux.


Toi ? Mais tu la connais déjà ! 


Pardon ? Oh je ne crois pas ! En tout cas ça ne me dit rien. Au fait, c'était pas toi qui voulait une poupée danseuse ? 


Oh si si ! 


Eh bien, tu ferais mieux de te dépêcher. Elle se pencha pour murmurer à son oreille. Je crois que Delhii la veut aussi.


Aux mots de la tenancière, la fillette arrondit les yeux et retourna le regard vers l'allée de droite, tandis qu'Ophélia se redressait. Comme une fusée, Livia partit dans la section concernée du magasin, sans doute pour pouvoir chiper l'effigie mentionnée. Baissant les yeux avec un sourire effacé, la tenancière laissa s'échapper quelques expirations qui pouvaient s'apparenter à de petits rires légers. Sans lâcher son regard de la coquine, elle susurra au nouvel arrivant.


Excusez-la, c'est une petite maline et elle est extrêmement possessive. 


Seulement alors remarqua-t-elle les étranges animaux qui accompagnaient l'étranger et par la même, elle fit le lien avec l'amoncèlement de petits êtres juste devant la porte d'entrée. Ca ne facilitait pas le passage, mais bon, les enfants restent des enfants. Et puis ça les amusait de voir de nouvelles choses, et bien qu'elle n'en dit pas moins, Ophélia était elle aussi fascinée par les créatures qui venaient d'entrer dans sa boutique. Elle n'interdisait pas les animaux, à vrai dire, elle n'avait jamais vraiment pensé qu'un seul puisse venir ici. Attendant que les jeunes gens ne retournent à leurs jouets, elle se posta au côté de l'étranger, le fixant de son regard vairon avec une expression courtoise.


Eh bien ! Vous faites foule. Vous êtes à peine rentré que tout le monde vous adore déjà. Ce n'est pas étonnant ... après tout, vos compagnons ont l'air adorable. Elle entra un instant en contemplation, mais s'en extirpa bien vite. Pardonnez-moi ! Vous pouvez m'appeler Ophélia, et ceci est ma boutique. Vous cherchiez quelque chose en particulier ? 

Flavien Teleri
Flavien Teleri
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[Terminé] L'enfance n’est donnée qu’à quelques-uns EmptyDim 18 Mar - 23:53
Irys : 887826
Profession : Soigneur itinérant - Guérisseur
My'trän +2 ~ Chimères
La petite fille, qui s'appelait Livia, fut miraculeusement coupée dans son récit par l'arrivée d'une jeune femme aux longs cheveux noirs qui se plaça devant l'enfant, se penchant à sa hauteur pour capter toute l'attention du moulin à paroles qui dénombrait les maintes qualités de la Baronne avec la passion et l'engouement propre aux enfants. Doucement, la jeune femme demanda à la petite fille de laisser un peu d'espace à Flavien, expliquant qu'il avait très certainement dû entendre parler de cette histoire.

C'était évidemment faux, mais Flavien se hâta de hocher positivement la tête. A tout vous dire, il devait en être à l'acte final de cette intense épopée, et il était déjà fatigué d'entende parler des muscles d'acier de la Baronne. Lui qui avait grandi bercé par les contes relatant les prouesses des Architectes de ce monde, il fallait croire que du côté de Daënastre, les héros des enfants étaient des hommes et des femmes du peuple.

Habilement, la jeune femme détourna l'attention de Livia vers une poupée exposée un peu plus loin. Le modèle articulé d'une poupée qui s'animait au son d'une musique douce attirait les convoitises de bien des regards envieux, mais c'est Livia qui s'appropria l'objet de désir, clamant fièrement qu'elle avait rendus plein de services à son voisinage pour pouvoir se l'acheter avec sa propre monnaie. La perspective de voir son bien précieux lui être chapardé avait suffi à la fillette pour laisser en plan le soigneur et sa sauveuse, et récupérer la poupée si précieuse à ses yeux.

Regardant la fillette s'éloigner vers une autre allée du magasin en compagnie de quelques amis, la jeune femme s'excusa pour le comportement de Livia.

- Elle est passionné par ce qu'elle raconte. Répondit lentement le soigneur. Pour un peu, il aurait l'impression que ses oreilles sonnaient. Je vous remercie d'être intervenue.

Il inclina la tête, croisant les yeux vairons de la jeune femme. Une caractéristique physique plutôt rare, bien que totalement bénigne.

Baissant les yeux, la jeune femme glissa qu'il était normal qu'il s'attire les faveurs des enfants en présence de compagnons de route aussi mignons. Son regard passa de l'Aitah joueur qui roucoulait joyeusement dans ses bras à la Tairakh ensommeillée qui reposait sur son épaule pour une fois. Hua somnolait à moitié, perdue entre l'éveil et les limbes. Selmac, lui, était bel et bien réveillé. Galvanisé par toute l'attention positive qu'il venait de recevoir, il tendit les pattes vers la femme aux yeux vairons, une tentative un peu molle de lui quémander à elle aussi quelques caresses.

La jeune femme se présenta : elle s'appelait Ophélia et tenait cette étrange boutique de jouets. Flavien opina légèrement. Par la suite, elle lui demanda ce qu'il était venu chercher dans son humble commerce.

Le soigneur hocha une nouvelle fois la tête, se présentant à son tour sommairement. Les rires des enfants tout autour de lui le forçaient à parler un peu plus fort que ce dont il avait l'habitude pour bien se faire comprendre.

- Oui, j'aurais besoin d'un renseignement. Expliqua-t-il. Les présentations lancées, il rendit la politesse à Ophélia en se présentant à son tour. Je me nomme Flavien et...

Un miaulement interrompu sa phrase, son Aitah battant l'air devant lui. Un léger sourire exaspéré se dessina sur les lèvres du soigneur devant la comédie que lui faisait son familier, bien décidé à être présenté lui aussi.

- Et lui, c'est Selmac. Ajouta-t-il en désignant son compagnon du menton, tournant légèrement la tête pour indiquer la Tairakh reposant sur son épaule, Et voici Hua.

Les présentations bouclées, il reprit sa demande là où il l'avait laissée, c'est à dire à son début.

- J'aurais besoin de renseignements. On m'a indiqué qu'une famille Brandtner faisait des affaires à Zuhause. J'aimerais les rencontrer. Est-ce que vous les connaitriez ?

HRP:

Ophélia Narcisse
Ophélia Narcisse
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[Terminé] L'enfance n’est donnée qu’à quelques-uns EmptyLun 19 Mar - 11:25
Irys : 1609400
Profession : Cible mouvante pour Régisseur
Pérégrins -2
Aux remerciements de l'étrange étranger, la jeune dame n'eut qu'un sourire pour réponse, mais il était large et doué de sentiments honnêtes. Mentir n'était pas le chic de la maison, l'arnaque n'y était pas la bienvenue et seule une authentique enflure aurait sut trouver la force de profiter de la naïveté d'un enfant. Fort heureusement, Ophélia savait ce qui était bon pour elle, comme pour ses clients. 

Lorsqu'elle vit le petit geste quémandeur du petit animal fort particulier, elle ne put résister que de jouer de son doigt sur le bout de son museau et de son front. Elle avait son faible pour tout ce qui est mignon, et il fallait bien dire que les compagnons de l'hère recelaient une certaine attractivité innocente qui faisait fondre la tenancière. Accentuant sur ses caresses, elle se vit assaillie par ce qui semblait être une petite étreinte alors que l'Aitah se serrait contre sa poitrine avec des étranges miaulements. N'en prenant aucune offense, la tenancière se contenta de rire avec un sourire à peine retenu.

Hahaha ... adorable ...


L'étranger finit par mettre un nom sur son visage, Flavien, et à ce même moment, la petite bestiole se tira du corps d'Ophélia pour venir faire remarquer à son maître qu'il n'avait pas tout à fait fini les présentations. Le brin de folie s'appelait donc Selmac, et la force tranquille Hua. La gérante se répéta les trois noms dans sa tête pour faire en sorte de ne pas les laisser s'effacer immédiatement, mais elle eut bien du mal à retenir ces consonances étrangères. Elle n'en fit pas la remarque, mais son intuition lui disait que cet étranger venait sans doute des mêmes terres que la petite mage qu'elle avait reçu, il y a longtemps de cela. C'était sans doute son lien avec ses compagnons qui lui mettaient la puce à l'oreille, elle ignorait déjà qu'un animal pouvait comprendre la langue des humains.

Flavien donc ... ravie de vous rencontrer.


Elle accompagna ses paroles d'un geste cordiale de la tête, s'inclinant à moitié et pliant les genoux. Mais elle se retrouva bien démunie face à la demande de renseignements, elle n'était pas la plus informée des femmes quand il en venait aux patronymes, et la sonorité de celui-ci ne lui semblait pas vraiment familière.

Navrée ... je ne crois pas pouvoi...


Mwa je sais ! Mon papa quand il rentre à la maison le soir, il parle souvent de ces Brandtrucs ! 


C'était un gamin avec des cheveux en vrac qui avait pris la parole, il avait aussi un petit bobo sur la joue, un genre de griffure causée par la poupée militaire qu'il tenait en main. Toujours attentive, Ophélia s'empressa de lui essuyer son petit bobo avec sa manche, lui demandant de sa douce voix.

Et tu sais où est-ce qu'on peut les trouver ? 


Beh quand mon papa il en parle, c'est quand il revient de Blumar, c'est qu'il vend des choses aussi mon papa, et il est pas souvent là, mais il revient toujours avec des...


L'âme des enfants est toujours assoiffée d'attention, et le petit Garick avait vraisemblablement beaucoup à dire, mais la gérante savait très bien que le pauvre étranger ne supporterait pas de devoir écouter à nouveau une telle histoire, la Baronne l'avait déjà presque mis à bout. Enfin ... de ce que la tenancière pouvait percevoir. Elle fit chemin derrière le comptoir, invitant Flavien à la suivre avant de s'engouffrer dans l'arrière-salle. 

Vous pouvez entrer, mais essayez de garder les enfants dans la boutique.


Faisant balader ses doigts sur les étagères, elle tirait des tranches de livre qui traînaient sur une immense bibliothèque qui n'était pas souvent exploitée par la jeune dame. Celle-ci fut d'ailleurs bien embêtée quand elle dut trouver un ouvrage de géographie régionale. Chaque couverture se ressemblait et les gravures avaient peine à faire la distinction. Si elle avait su où était Blumar, elle lui aurait directement indiqué la direction. Pendant qu'elle feuilletait un livre intitulé "Vereïst, région aux milles flocons", ses yeux se relevèrent brièvement dans ceux de Flavien, accompagnés d'un sourire plus léger, et peut être un peu plus mesquin, sans tomber dans le médisant.

Vous cherchez quelqu'un en particulier ?


C'était peut-être indiscret, mais elle avait développé une nature curieuse au fil de ce dernier mois, et puis, ce n'était pas souvent qu'elle voyait des adultes dans sa boutique. Encore moins des adultes qui parlaient aux animaux. Son doigt trébucha finalement sur une carte de la région avec les noms de chaque ville indiquée, ainsi que le réseau routier ... pour ce qu'il en subsistait. 

Vous pouvez la prendre si vous voulez ... Ophélia fut alors pris d'un doute soudain. Vous comptez y aller à pied ? 

Flavien Teleri
Flavien Teleri
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[Terminé] L'enfance n’est donnée qu’à quelques-uns EmptyMer 21 Mar - 21:22
Irys : 887826
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Ophélia allait lui annoncer la mauvaise nouvelle, celle-là même qu'il avait maintenant l'habitude d'entendre. Cela ne lui disait rien, et elle en était probablement désolée. Flavien s'y attendait, presque implicitement désormais, cela ne l'étonnait guère. Ce qui l'étonna, en revanche, fut l'intervention brutale d'une petite voix aiguë. En soi, il avait l'habitude de ce genre d'évènements, mais cette fois la tonalité était autrement plus grave que celle d'Hua.

Clignant des yeux, seul signe de sa surprise, Flavien baissa la tête pour croiser le regard d'un enfant qui avait dû les écouter avec tout le manque de pudeur associé aux petits d'hommes. Nullement gêné d'avoir interrompu de la sorte les deux adultes, il déclara à une vitesse alarmante que son père évoquait parfois ce nom, grimaçant uniquement lorsque la femme aux cheveux d'ébène essuya sa joue marquée d'une fine coupure d'un revers de la manche.

Sans perdre le Nord, Ophélia demanda au petit garçon de préciser sa pensée. Conscient d'avoir obtenu toute l'attention de deux adultes, le garçonnet leva fièrement le menton et expliqua que son père était marchand et qu'il se rendait parfois à Blumar. Immanquablement, il finissait par évoquer le nom des Brandtner.

Flavien avait du mal à croire qu'il tenait réellement une piste solide après tant de mois passés à brasser du vent avec autant de détermination que les plus déterminés des novices d'Amisgal. Résolument, il inclina la tête en signe de remerciement. Son geste courtois passa malheureusement complètement au-dessus de la tête de l'enfant qui se perdait maintenant dans le récit de confiseries typiques de Blumar qui faisaient son bonheur.

Ophélia les sauva tous deux d'une étude en trois parties sur la supériorité des dragées de Blumar comparés à ceux de Zuhause et l'invita à le suivre dans l'arrière-boutique.

Flavien avait trouvé ce qu'il était venu chercher, mais il ne pouvait pas simplement tourner les talons maintenant, alors que tant d'enfants le regardait encore d'un air curieux. Il risquait fort d'être attrapé au passage. Tant qu'il était avec la gérante, les enfants semblaient le laisser un peu tranquille. Autant l'accompagner un temps. Le magasin finirait bien par se désemplir.

Ophélia feuilletait un livre tandis qu'il se tenait en retrait le dos appuyé contre un mur. Selmac reniflait curieusement le sol comme à son habitude, alors qu'Hua, toujours perchée sur son épaule, avait refermé ses grands yeux perçant pour une petite sieste bien méritée. La jeune femme n'accordait pour l'instant aucun regard à ses hôtes de l'instant, perdue dans son livre sans expliquer à Flavien sa soudaine envie de s'instruire. Assez rapidement pour que ça n'en devienne pas pesant, la Daënare leva les yeux sur lui.

Elle eut un petit sourire qu'il fut bien incapable de qualifier, préférant s'intéresser à la question de la gérante. Cherchait-il quelqu'un en particulier ? Certes. Les détails ne la concernaient en revanche pas. Aussi, Flavien se contenta de lui répondre par le minimum. Juste ce qu'il fallait pour ne pas passer pour un rustre (détail auquel il faisait grandement attention ces derniers temps), mais assez courte pour que le message implicite soit on ne peut plus clair.

- Oui, la famille d'une disparue.

Ophélia lui tendit alors son étrange petit livret. Une carte de la région, détaillée comme il en avait rarement vu. Il repéra Zuhause où il se situait actuellement et haussa un sourcil à l'interrogation de la jeune femme. Il avait l'habitude de marcher partout où il allait et il avait juré de ne plus se déplacer en navire qu'en cas d'extrême nécessité. Là où certains seraient rebutés de devoir marcher, sa nature de nomade faisait de lui un être appréciant les voyages et les aventures qu'ils permettaient.

- Merci. Dit-il en acceptant volontiers le plan, Marcher ne me dérange pas. Je trouve les voyages beaucoup plus agréables et enrichissants lorsqu'ils sont éprouvés à pieds.

Ses yeux accrochèrent enfin au nom tant espéré, et Flavien grimaça visiblement. Prenez Zuhause, pratiquement tout au Nord de la carte, et vous trouverez Blumar environ à même distance du bord de la page... tout à Sud. Le soigneur ferma longuement les yeux, à la fois soulagé d'avoir dégoté une première piste sérieuse, mais presque aussi ennuyé. S'il voulait régler l'affaire assez rapidement, il lui faudrait faire exception à la règle et passer par les airs. A moins qu'il décide de se rendre malade pour toute la durée du trajet.

- Ah... ça risque d'être un peu long, à pieds.

Surtout pour quelqu'un qui ne connaissait finalement pas tant que ça la région. Voyager n'était pas aussi simple que de prendre une carte, regarder les étoiles et marcher toujours tout droit jusqu'à la destination voulue. Les obstacles naturels étaient bien souvent présents.

Un bruit de chute se fit entendre derrière eux, suivi d'une petite voix criant "Je vais bien ! Je suis tombé en cour-!", très vite interrompue par un "Tu sais qu'on a pas le droit de courir !".

- Je devrais peut-être vous laisser gérer votre boutique. S'excusa Flavien, Avant que quelqu'un ne se casse quelque-chose. Son regard se perdit sur les étagères et les différents modèles de jouets qui y étaient exposés presque religieusement. Ou ne casse quelque-chose.

Ophélia Narcisse
Ophélia Narcisse
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[Terminé] L'enfance n’est donnée qu’à quelques-uns EmptyMer 21 Mar - 22:43
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Profession : Cible mouvante pour Régisseur
Pérégrins -2
Ophélia eut vite fait de se blâmer cette stupide question qui ne regardait que l'étranger, elle savait bien que chacun avait ses propres problèmes, elle était même la première à le savoir. Mais les jours du moment lui insufflaient un enthousiasme étrange, malgré ses apparences calmes et maternelles. Elle était contente en elle, mais il y avait quelque chose qui ressortait malgré tout, comme une triste lassitude. Il s'affichait sur son visage lorsqu'elle souriait calmement, ses yeux se fermaient, comme s'ils dissimulaient quelque chose derrière leurs reflets. Quant à la réponse de son visiteur, elle n'y donna suite que par un baissement des yeux et un ravalement de son sourire. 

Désolée...

A cet instant précis, lorsque son faciès heureux s'effaça, son vrai visage ressortit, mais l'espace d'une seconde seulement, car elle eut tôt fait de relever le visage pour prendre le livre qu'elle avait légué à l'étranger. Et aux remerciements de ces derniers, elle n'eut qu'un sourire pour maigre réplique. Donc, il comptait vraiment y aller à pied ... bien que sa dernière réplique indiquait un certain découragement par rapport à ce fait, il subsistait le doute. La dernière personne adulte qui venait de loin qu'avait rencontré Ophélia lui avait appris qu'il y avait du bon chez les autres, et dès lors, elle s'était essayée de se mettre à disposition d'autrui pour rattraper les fautes de son passé. Elle fut prompte à informer le voyageur sur la vraie nature des inquiétudes qu'il devait avoir.

Ce n'est pas tant que le chemin soit long qui me pose problème ... mais ici, nos campagnes sont bondées de créatures redoutables ... et avec le froid qui va venir, vous aurez bien du mal à marcher, le temps a beau être clément, vous ...


Et à ses mots, elle leva les yeux vers la vitrine de son magasin. Si la journée avait démarrée avec un rayon de soleil, la nature de Vereïst avait bel et bien repris ses droits. De la neige venant du Nord commençait abondamment à tomber, déposant lentement un tapis blanc devant l'enseigne d'Ophélia. Mais malgré cela, l'hère commençait à manifester son intention à partir. N'avait-il pas vu la médiocrité du climat ? La gérante avait espéré que le soleil ne dure plus longtemps que les autres jours cette fois-ci, mais la chance n'est pas un principe applicable à la volonté des vents. Cela faisait une semaine que ses espoirs ne faisaient que s'élever à chaque réveil pour mieux se démonter au fil de la journée. Une petite voix enfantine s'éleva alors, une nouvelle fois. Après tout, n'est pas boutique de jouet insigne qui n'accueille pas d'enfants.

Il re-neige !


A ces simples paroles les trois-quarts des enfants détalèrent dans la rue, confrontant le froid de par leurs mitaines couvertes de gants et leurs petits corps abrités par des manteaux. Leurs jeunes doigts venaient rassembler la neige dans le creux de leurs paumes, la modelant en des boules qui dans la minute qui suivit, se mirent à voler, éclaboussant parfois la vitrine de la boutique. Ophélia ne s'en plaignait pas, c'était coutume par ici et comme s'en était assez répété, "les enfants sont des enfants". A Vereist, la neige n'excelle pas pour sa patience, mais la chute venait de commencer et finalement, ce n'était rien de bien grave. Elle adressa donc un mot à l'étranger, un conseil en plus qu'elle pourrait lui aviser.

Haa ... le soleil ne dure jamais ... si vous voulez, vous pouvez envisager de prendre le train. Il me semble que la gare n'est pas si loin, mais partez maintenant, sinon le vent risque de ...


Ses mots furent interrompus par les faits qu'elle tentait de lui expliquer. La porte de son battant s'ouvrit soudainement, poussée par une rafale bien plus forte que ce que les derniers jours n'avaient pu offrir. Comme un tonnerre, le bois rebondit contre l'étagère à droite et revint à son emplacement initial, entrant et sortant de son encolure selon les caprices du vent, tandis que le mécanisme assurant sa fermeture se brisa. Les coups qui rentraient avaient fait bouger les quelques marchandises de l'allée centrale, ainsi que les poupées disposées sur celle de droite. 

Surprise par l'aggravation de la météo ainsi que par la tempête qui s'était mugie dans le magasin, Ophélia se couvrit les yeux, pleinement exposée à l'entrée d'air. Elle posa un pas en arrière, avant de rouvrir ses paupières. Dehors, les enfants trébuchaient un par un devant l'orage qui s'amoncelait. Se précipitant vers l'entrée, la gérante saisit tant bien que mal la poignée qui battait, s'exposant entièrement à la tempête qui s'était levée. Ses cheveux flottaient vers le Sud alors qu'elle levait les yeux au ciel. Les nuages là-haut étaient si noirs qu'ils en assombrissaient toute la ville. Voyant que ses petits clients avaient de plus en plus de mal à se lever, elle n'eut d'autre choix que de complètement poser le pas dehors.

Rentrez-vite chez vous !


La plupart d'entre eux étaient des gosses du quartier, aussi, leurs maisons étaient avoisinantes, mais il y avait certains courageux qui habitaient dans des rues à deux ou bien trois pâtés de maison. Avec la violence de cet orage, ils n'auraient aucun moyen de rentrer sain et sauf auprès de leurs parents. Les enfants restants dans la boutique s'en étaient vite allés, mais il en restait encore trois qui pleuraient de devoir affronter la tempête qui mugissait bien vite. Ophélia était certaine de deux choses, la première, c'était que jamais leurs parents n'oseraient mettre le pied dehors, ils devaient penser que la boutique était un refuge sûr, mais l'entrée était désormais brisée et le vent faisait à son bon vouloir. La seconde, c'était que si elle les laissait se balader seule dans Zuhause, ils se feraient emporter par les rafales. Tournant la tête vers l'étranger, elle cria entre les souffles tumultueux du vent.

Restez à l'intérieur ! Si vous posez le pas dehors, vos amis vont s'envoler ! Allez vous réfugier dans l'arrière-salle, j'ai des enfants à raccompagner ! Dépêchez-vous ! 


Elle ne prit pas la peine d'écouter ce qu'il avait à répondre, elle comptait bien se faire entendre dans cette situation de risque. Tirant les trois enfants restants par la main, la gérante s'enfonça dans le blizzard à venir, jetant un dernier coup d'oeil à sa boutique. C'était risqué de la laisser seule aux mains d'un inconnu, mais elle n'avait pas le choix. Tout ce qu'elle espérait c'était que Flavien soit aussi gentil que ce qu'il paraissait être ... bien qu'un peu coupé des autres. Dans cette mesure ... elle retrouvait un peu d'elle en lui. 
Informations Inrp:

Flavien Teleri
Flavien Teleri
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[Terminé] L'enfance n’est donnée qu’à quelques-uns EmptyLun 26 Mar - 23:18
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Ophélia avait l'air plus embêtée par sa situation que Flavien lui-même ne l'était. Elle réfléchit un petit instant, son visage s'éclairant d'un fin sourire lorsqu'elle trouva une solution parfaitement adaptée aux déboires de son hôte. Il lui suffisait de monter à bord d'un de ces fameux trains dont il avait tant entendu parler mais qu'il avait simplement eut l'occasion d'apercevoir de loin. Seuls les nombreux rails qui couraient Daënastre telles des artères étaient le signe de leur présence et de leur importance sur le continent.

Flavien grimaça devant la proposition. Il se garda de dire à la Daënare qu'il préférait largement tenter sa chance avec la faune locale plutôt que dans une de ces machines. Si le bestiaire de la région n'était pas tendre, il pouvait tout de même espérer raisonner avec lui. Aucune chance qu'il arrive au même résultat avec ces petits bijoux de technologies qui fusaient à toute allure à travers les cités du continent. Hors de question qu'il mette les pieds dans un de ces engins.

Un craquement sinistre tira Flavien de sa rêverie et Selmac sursauta, bondissant d'une bonne trentaine de centimètres sous le choc. Tremblant, l'Aitah se réfugia sur l'épaule de son maître, enfouissant son museau dans la fourrure de la capuche du soigneur. Le My'trän sentit un froid lécher le bout de ses doigts avant qu'il ne réalise que la porte d'entrée n'avait pas tenue le coup sous la violence du vent. Désormais grande ouverte, elle n'était d'aucune utilité pour bloquer la neige qui s'engouffrait dans la boutique, balayée par de nombreuses bourrasques de vent. Sans aucune considération pour les objets précieux sur son passage, le vent fit trembler les étagères et s'envoler quelques feuilles de ci de là.

Ophélia, accusant le choc de cette intrusion, se précipita vers l'entrée de sa boutique pour se rendre compte des dégâts. Flavien lui emboita naturellement le pas, Selmac toujours perché sur son épaule. Trois enfants se trouvaient regroupés près de l'accueil du magasin, en pleurs. La violence du vent et le choc de la porte de bois contre le mur les avait effrayés plus que de raison et ils n'étaient pas prêts à prendre le chemin de la maison, seuls.

N'écoutant que son désir de les savoir en sécurité, Ophélia attrapa les trois enfants par la main pour les reconduire elle-même chez eux. S'engouffrant par la porte d'entrée, les enfants sur ses talons, elle cria à son hôte de l'attendre dans l'arrière boutique plutôt que de risquer la fureur du vent. Selmac et Hua ne feraient pas long feu dans la tempête et leur maître n'était pas mieux lotis. Lui qui ne connaissait pas les lieux, il n'avait aucune chance de se repérer à l'extérieur par ce temps.

La gérante du magasin somma l'homme de trouver refuge dans l'arrière-boutique et d'attendre son retour, puis elle disparut dans un tourbillon de neige.

Flavien se trouvait à présent seul en compagnie de ses deux familiers. Réveillée par le mugissement du vent et le mal-être de son maître, Hua s'extirpa de son sommeil réparateur. Elle pointa le bout de son museau hors du capuchon du soigneur mais fit bien vite demi-tour.

" Flav, qu'est-c... "

Encore à moitié endormie, Hua peinant à comprendre ce qu'il lui arrivait. Une bourrasque de vent encore plus violente que la précédente invita un véritable tourbillon de neige à rentrer dans la boutique et Flavien grimaça en entendant plusieurs craquements sinistres. Quelques-unes des poupées reposées à la va-vite par les enfants s'écrasèrent au sol et le soigneur jura voir l'une d'entre-elles bouger et il était presque sûr d'en entendre une autre rire. Il secoua la tête comme pour chasser cette pensée. Le vent était l'unique responsable de tout ce bouquant. D'ailleurs, il allait devoir faire quelque-chose avant que la boutique d'Ophélia ne soit balayée par la neige.

Courant jusqu'à l'arrière-boutique, il fit un rapide inventaire de la pièce, trouvant heureusement vite son bonheur. Il attrapa à deux mains le lourd fauteuil qui reposait dans un coin et entrepris de le pousser jusqu'à l'avant de la boutique, non sans avoir demandé à Hua et Selmac de rester à l’abri dans l'arrière-boutique le temps qu'il mette à exécution son plan.

Glissant le fauteuil derrière la porte fragilisée, il poussa ce dernier de manière à ce que la porte se rabatte malgré l'absence de fermeture digne de ce nom. Le vent avait beau être plutôt fort, il n'avait pas arraché la porte de ses gonds. Ainsi placé, le fauteuil rabattait légèrement la porte, ne laissant qu'un maigre passage dans la boutique. Ophélia pourrait facilement s'y engouffrer, comme continuaient naturellement de le faire la neige et le vent, bien qu'à moindre mesure. Le bois de la porte claquait contre celui du lourd fauteuil, mais ce n'est pas ce bruit qui gênait Flavien.

Maintenant que le chant furieux du vent s'était atténué, il pouvait clairement entendre les petits rires qui s'échappaient d'une poupée gisant au sol. Un crissement métallique se mêlait à ce son purement enfantin et le soigneur ne savait trop quoi en penser. Les Daënars trouvaient cela... plaisant ?

Décidant qu'ils avaient assez attendus dans l'arrière-boutique, Selmac et Hua le rejoignirent. Hua se réfugia dans le capuchon de son maître en grondant, quand à Selmac, il s'approcha d'une petite boite qui produisait de la musique et qui reposait dans un peu de neige. Sa chute avait enclenché son mécanisme et un petit levier tournait lentement sur sa droite. D'un coup, au plus grand étonnement de Flavien et de son familier, le son s'arrêta et une créature d'apparence grotesque bondit hors de la boite. Ou plutôt... se montra. Elle était attachée au support coloré et n'allait pas poursuivre Selmac. Sauf que ça, l'Aitah ne le savait pas.

Terrorisé, le petit animal qui se sentait toujours mieux perché en hauteur s'élança en direction des escaliers, son maître sur les talons. S'arrêtant en bas des marches, Flavien appela d'une voix douce son compagnon de route pour essayer de le faire descendre. Tapis dans l'ombre, Selmac n'avait pas l'air décidé à bouger.

Ophélia Narcisse
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[Terminé] L'enfance n’est donnée qu’à quelques-uns EmptyMar 27 Mar - 14:08
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Pérégrins -2
Dans le blizzard hurlant comme une meute de loup sous une pleine lune consacrée de brume et mauvais présages, Ophélia avança, enfants à sa suite, tenant chacun la main l'un de l'autre. Ils couraient dans le froid, le sol n'était pas encore recouvert de neige, mais cela ne saurait tarder. A vrai dire, il était probable que la gérante ne doive en supporter les déboires et ses pieds ne seraient pas épargnés du lit blanc qui l'attendait. Les flocons étaient déjà bien trop gros, et bien trop solides pour n'être que de simples assemblages de neige douce. Du ciel ne furent pas envoyés de la tendresse au teint laiteux, mais bien des éclats de glace qui agressaient la peau de la tenancière qui s'était débarrassée de sa fourrure pour protéger les visages de ses protégés. Il ne lui restait que son léger haut qui ne lui couvrait pas les bras, et une partie seule des épaules. Mais elle avançait dans le froid, les petits êtres n'habitaient plus très loin.

Déposant un à un auprès de leurs foyers respectifs leur progéniture, elle récupérait ses pièces de vêtement, et comme elle l'avait prédit, le sol était devenu glissant par endroit et recouvert de neige à d'autres. Croisant ses bras pour venir chercher ses épaules, elle courut à nouveau pour rejoindre la boutique, à quelques rues de sa position. Mais le vent était puissant, et impitoyable. Elle dut lutter contre l'air qui lui était envoyé au visage, lui faisant fermer ses paupières pour sauver ses yeux. Ses regrets se redirigèrent vers son bandeau qu'elle ne portait plus, il lui aurait été bien utile. Néanmoins, la dame aux cheveux de jais inondés par l'or blanc put revenir chez soi, dont la porte était entre-ouverte. Fermant ses yeux, elle n'osait pas imaginer l'état de ses pauvres enfants. Son invité ne l'avait cependant pas oublié ... il aurait été malheureux qu'il ne ferme la porte pour la laisser dehors, à mourir dans la tempête. 

Elle se glissa donc dans l'enceinte de son foyer, pour y trouver un fauteuil qui servait de levier pour maintenir le battant de la porte à l'écart du mur. Poussant le siège, elle renfonça l'entrée qu'elle tentait de contenir, malgré la serrure brisée. Cherchant quelque chose pour complètement la maintenir, elle se rappela qu'elle avait encore sa planche pour la barricader. Cela faisait bien trop longtemps qu'elle ne l'avait pas abaissée ... elle en avait oublié son existence.

Après s'être accusée de stupidité, Ophélia tendit la main droite vers le mur. Il fallait dire que le morceau de bois était bien camouflé. Elle rabaissa celui-ci en un vacarme qui se fit taire celui de la tempête. Craignant pour ses vitres, elle abaissa les volets de son magasin, comme lors d'une fermeture. En claquant des dents, la gérante se retourna vers la pièce. Il faisait sombre, mais c'était remédiable, les dommages de l'ouragan le seraient moins. Elle alluma quelque lampes pour témoigner des dégâts que sa marchandise avait encaissé. Les plus légères d'entre elles s'étaient écrasées sur le sol, certaines s'étaient brisées, d'autres étaient intacts, mais quoi qu'il en était, cela lui donnerait beaucoup de travail. Elle rassembla les objets tombés, et se redirigea dans l'arrière-salle avec tout ceux qui étaient devenus défectueux. Son regard croisa alors celui de l'étranger qu'elle avait accueilli. 

Vous allez bien ? Vos amis aussi ? 


Son expression inquiète témoignait de l'implication qu'elle éprouvait envers ceux que son toit abritait. Sa peur de l'inconnu d'autrefois avait presque disparu, mais en se retrouvant seule avec un homme, une nouvelle fois, elle fut pris d'un léger malaise qui ne dura que très peu ... les conditions l'avaient imposé après tout. Sa main gauche aurait été chercher sa nuque si elle n'avait pas été occupé par d'autres menus détails. Suite à un petit moment de gêne, causé par la paralysie temporaire qu'eut Ophélia avec les yeux fixés sur Flavien, elle se remit en trajet vers le premier, non sans laisser son regard errer sur sa droite lorsqu'elle réalisa à quel point son attitude avait été maladroite. 

Empruntant les marches de l'escalier, le tas de mécanismes brisés en main, elle manqua d'écraser la petite bête du pied. Celle-ci évita cependant la semelle de sa chaussure avant de décamper, laissant la gérante dont les chaussures étaient encore glissantes dans une situation de déséquilibre, qui se termina de la manière la plus déplaisante qu'il soit. Tentant de se rattraper, elle dut libérer sa main droite du port qu'elle soutenait, saisissant la rampe ... mais personne n'entretenait la menuiserie dans cette bâtisse, aussi, le bois n'était en aucun cas lisse et taillé. Elle sentit donc sa paume s'érafler contre les échardes et les morceaux brun qui vint lui déchirer sa peau fini, avant de tomber de trois marches et se réceptionner sur les fesses, contre le mur en face. Les poupées et mécanismes, elles avaient fini une fois de plus sol, à côté d'Ophélia qui se retrouvait bien sonnée. 

Levant sa main du sol, elle porta sa jumelle sur la peau abîmée de celle-ci. Serrant les dents pour faire s'en aller la douleur. Son dos aussi avait souffert de sa chute et elle avait bien du mal à le recourber pour reprendre une posture droite. Néanmoins, elle s'y pris à l'essai, tentant de se relever de par elle-même, mais rattrapée par une douleur aigu au niveau des vertèbres inférieures. Elle se laissa donc rabattre contre la façade. Bien contente fut-elle que quelqu'un soit avec elle à ce moment, même si c'était la petite créature qui était en partie responsable de cet incident. La rancune était un des pires  vices de la boutiquière, le même qui la poussait à éliminer d'une manière radicale ceux qui ne respectaient pas son établissement ou sa marchandise. Elle baissa donc la tête, observant ses créations ... sans dire un mot. Tout ce qui pouvait transparaître, derrière ses cheveux raides et trempés, c'était sa lèvre inférieure qui semblait trembler, mais le froid n'était pas en cause.

C'est qu'elle était longue sa chevelure, juste assez pour dissimuler la goutte qui coulait le long de sa joue, lorsqu'elle constata que l'une de ses créations avait été brisée dans la cire même, et qu'à l'intérieur, les mécanismes étaient en miette. Plus que la douleur qui lui lacérait le dos, ou bien la paume, c'était d'assister au "décès" d'une de ses poupées à fantaisies. Peu importait son âge, peu importait les circonstances, c'était à chaque fois une déchirure pour la gérante qui considérait ses effigies comme une partie d'elle et de sa famille. Et ainsi, elle restait immobile, à fixer les miettes de cire solidifiée qui s'étaient éparpillées devant elle, accompagnés  de quelques rouages qui avaient terminé de tourner.

Flavien Teleri
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[Terminé] L'enfance n’est donnée qu’à quelques-uns EmptyVen 30 Mar - 15:27
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Selmac se tassa de tout son poids sur la plus haute marche de l'escalier. Le diablotin mécanique dans sa ligne de mire, l'Aitah n'entendait que le son de son propre cœur battre à ses oreilles. Les douces réassurances de son maître n'avaient aucun impact sur la pauvre créature qui venait d'avoir la peur de sa vie. Fixant le jouet d'un air effrayé mais étrangement courroucé, Selmac n'avait pas l'air prêt à rejoindre Flavien au rez-de-chaussée tant que cette chose n'avait pas disparu de sa vue.

Un craquement se fit entendre derrière lui et le soigneur se désintéressa de son familier le temps de voir ce qui pouvait bien se passer du côté de l'entrée. Il espérait seulement que le vent n’ait pas redoublé d'effort pour s'engouffrer dans la petite boutique.

Ophélia poussait tant bien que mal la porte pour se glisser dans la boutique et Flavien attrapa le fauteuil pour permettre à la gérante de rentrer chez elle sans s'épuiser davantage. Le vent poussa la porte aussi bien qu'Ophélia à l'intérieur et il n'attendit pas de signal de la part de la jeune femme pour repousser le fauteuil devant la porte, grimaçant lorsque celui-ci grinça légèrement au sol. La bourrasque était improbablement violente et le soigneur se demandait comment la jeune femme menue avait bien pu faire pour ne pas s'envoler. Cette dernière reprit ses esprits et attrapa une planchette solide cachée dans la pénombre de la pièce et se hâta de la glisser à son juste emplacement, sur les clenches fixées de part et d'autre de la porte.

Enfin fermée correctement, la porte empêchait le vent de pénétrer dans la pièce désormais glaciale. Le loquet de bois avait l'air bien robuste, retenant la porte bien mieux que ses charnières. Dans le doute, le nomade appuya tout de même le fauteuil contre l'entrée, reportant son attention sur Ophélia lorsque celle-ci lui demanda d'une voix inquiète si ses compagnons et lui n'avaient pas eu trop de difficultés.

- Nous allons bien.

Ils avaient tous connus bien pire qu'une simple tempête de neige (My'trä était une terre sauvage et aussi impardonnable que Daënastre), mais il n'allait pas nécessairement s'attarder sur ses aventures avec la Daënare, surtout maintenant qu'il venait essentiellement de s'enfermer chez elle. Il n'était jamais très à son aise dans un espace confiné. Cela devait aussi être le cas d'Ophélia, car malgré l'éclairage sombre de la boutique il pouvait lire l'anxiété sur ses traits. Avait-elle été secouée par son expédition improvisée en pleine tempête ou était-elle aussi mal à l'aise que lui de se trouver en compagnie d'un parfait inconnu ?

Après s'être assuré de fermer les volets, la jeune femme jeta un coup d'œil aux dégâts occasionnés, récupérant au creux de ses mains l'une de ses créations. Elle la contempla un moment, une expression peinée figée sur le visage et Flavien croisa les bras sur son torse, plus mal à l'aise encore. Il n'avait que peu de possession matériel et peinait à comprendre la douleur réelle et dévorante qui se lisait sur les traits d'Ophélia. Quelques mois auparavant il aurait été tenté de lever les yeux au ciel et d'inviter la jeune femme à s'occuper de ce détail plus tard, lorsque la tempête serait passée, car ce n'était absolument pas important pour le moment. Aujourd'hui, il avait appris à y réfléchir à deux fois avant de lancer des suppositions hasardeuses.

Ophélia secoua la tête et prit la direction de l'étage, tenant dans ses bras sa création brisée comme elle aurait pu le faire pour un nouveau-né. Il ferait certainement plus chaud à l'étage qu'en bas, et peut-être devait-elle vérifier si ses fenêtres n'étaient pas restées grandes ouvertes.

Flavien fronça légèrement les sourcils et lui emboita le pas à défaut de rester en bas, parmi le chaos. S'il aurait voulu être honnête, il aurait dit que davantage que de suivre son hôte par politesse, il était assez soulagé de changer d'environnement. Certains des jouets bougeaient par eux-mêmes -l'œuvre de leurs mécanismes malmenés par une chute fatale- et l'admirateur de Möchlog sentait un frisson parcourir son échine à chaque fois qu'un spasme secouait l'un des êtres mécaniques.

Perturbé par les créations de la jeune femme, il oublia de la prévenir de la présence de Selmac en haut des escaliers et la Daënare manqua d'écraser l'Aitah. Alertée par le cri de surprise de l'animal, elle sursauta au même moment ou Selmac détala en bas des marches pour rejoindre la sécurité des bras de son maître qui l'accueilli à la volée. Ophélia, elle, n'eut personne pour la réceptionner. Elle attrapa la rambarde mais son pied rata la marche et elle glissa, tombant en arrière et arrêtant sa chute quelques marches plus bas. Des cliquetis mécaniques accompagnèrent le bruit de sa chute, la jeune femme lâchant ses poupées pour serrer ses mains l'une dans l'autre, une expression peinée tordant son visage doux de douleur, mais Flavien n'eut pas l'occasion de la voir longtemps. Ophélia baissa la tête, se recroquevillant sur elle-même.

Ses longs cheveux d'ébène cachaient son visage et le soigneur eu tout d'abord peur qu'elle se soit cogné la tête en chutant et qu'elle vienne de perdre connaissance. Il ne fut que très légèrement rassuré en grimpant les marches deux à deux pour rejoindre la jeune femme. Selmac désormais perché sur son épaule, il s'agenouilla près d'Ophélia pour l'examiner. Elle n'avait pas l'air d'être évanouie, mais elle tremblait beaucoup trop pour quelqu'un qui allait bien. Le guérisseur novice ne se formalisa donc pas à lui demander comment elle allait, passant directement à l'essentiel.

- Où avez-vous mal ?

Flavien passa une main devant le visage de la jeune femme. Elle ne réagit pas. Le tressaillement qui agitait ses épaules était l'unique signe qu'elle était toujours consciente et honnêtement, le nomade ignorait si elle arrivait seulement à le distinguer derrière sa masse de cheveux.

- Ophélia. Appela-t-il, hésitant, Ophélia, est-ce que vous m'entendez ?

Ses yeux vairons étaient grands ouverts derrière ses mèches lisses, mais le regard de la jeune femme ne se portait pas sur son hôte. Plutôt, elle fixait les jouets tout justes bons à être jetés, serrant ses mains devant elle. Flavien porta son attention sur ces dernières et pinça les lèvres en avisant une coupure ressemblant plus à une déchirure au niveau de sa paume. La peau blanche de la jeune femme était teintée de rouge et Flavien soupira intérieurement. Peut-être détestait-elle le sang au point d'en être affectée à l'extrême ? Il savait que c'était le cas de certaines personnes, même si la notion était particulièrement étrange à ses yeux. Pourquoi avoir peur de -ou éprouver du dégoût pour- l'essence même de la vie ?

Peu importe. Ophélia lui avait offert un refuge alors qu'une tempête battait son plein dehors. Elle ne l'avait pas renvoyé en même temps que les autres visiteurs de sa boutique car elle avait eu l'air de comprendre qu'il n'aurait eu nulle part où aller. Lui venir en aide à son tour était la moindre des choses, complications à venir ou non.

- J'aurais dû vous avertir que Selmac s'était réfugié en haut des marches. Dit-il lentement.

S'il avait horreur de faire la conversation, il savait qu'il s’agissait là d'un outil crucial pour rappeler à lui les êtres choqués.

- Vous êtes blessée. Laissez-moi regarder votre main un instant.

Sans réfléchir plus longtemps, il attrapa la main de la jeune femme pour inspecter la plaie, ne s'attardant pas sur le fait qu'Ophélia était glacée et rigide. Il était assez facile de repéré ce qui avait occasionné une telle blessure : une écharde épaisse était plantée dans sa paume et Flavien fronça les sourcils. D'une main experte, il retira l'éclat de bois. L'intervention n'avait rien de plaisant, mais au moins la taille de l'écharde lui permis de ne pas nécessiter d'outil pour s'en saisir correctement. Ne restait plus qu'à débarrasser la paume du sang en la nettoyant et panser la plaie s'il était nécessaire de le faire.

- Voilà. Un peu d'eau vous fera du bien... Vous avez de quoi panser la blessure ?

La Daënare ne réagit toujours pas et Flavien passa une main dans ses cheveux, un peu perdu. En temps normal il se serait contenté de panser la blessure à la manière des technologistes, gardant son don de guérison bien caché du jugement Daënar. Aujourd'hui, malheureusement, n'avait rien de normal. Il ne pouvait pas abandonner une Ophélia catatonique sur les escaliers et fouiller son domicile à la recherche d'un kit de premiers secours et il ne pouvait certainement pas la laisser là et s'en aller sans plus un mot, blizzard ou non. Sa décision fut prise en un instant et le soigneur envoya toute notion de prudence par la fenêtre.

- Bien. Je vais m'en occuper. Ne paniquez pas. Marmonna-t-il pour lui. Ça ne prendra qu'un instant.

Focalisant toute son attention sur la paume d'Ophélia, il plaça sa main droite au-dessus de cette dernière, s'arrêtant à quelques millimètres de la peau glacée pour appeler Möchlog à lui venir en aide une fois encore et stopper le saignement. Ironiquement, il avait ces derniers mois passé plus de temps à soigner des ressortissants Daënars qu'il ne l'avait fait ces dernières années pour ses propres frères et sœurs My'träns.

- Est-ce que vous avez mal ailleurs ? Vous êtes-vous cognée la tête en tombant ?

Si la chaleur trop importante pour être celle d'une main recouvrant la sienne n'était pas suffisante à comprendre la nature magique de Flavien, la lueur bleutée qui émanait du creux de sa main et le picotement de sa peau qui se ressoudait avec une rapidité déconcertante était certainement de bons indices.

Ophélia Narcisse
Ophélia Narcisse
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[Terminé] L'enfance n’est donnée qu’à quelques-uns EmptyVen 30 Mar - 16:46
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Profession : Cible mouvante pour Régisseur
Pérégrins -2
Fixant les pièces éparpillées, immobile, stoïque ... paralysée comme une macchabée, elle se contentait de garder le silence devant cette création qui n'avait désormais même plus la valeur d'un bout de papier blanc. Elle était une danseuse autrefois, une effigie de cire qui pouvait tourner, posée sur un socle qui s'était détaché, simplement en tournant la manivelle. Une boîte à musique faisait résonner une douce mélodie à l'extérieur, accompagnant la grâce de la poupée. Les battements étaient ajustées pour correspondre au rythme des valses, trois temps, une ronde ... trois temps ... une ronde. 

Combien de temps avait-elle passé sur celle-ci ? Combien de temps avait-elle consacré à cette petite pièce de merveilles, de fantaisies ? Ce n'était pas même quelque chose dont une femme enceinte pouvait se vanter. Ophélia s'était coupée les doigts sur ses jointures, écorchée lors de son ponçage, pincée sur les rouages. Elle avait enduré les frottements atroces qui indiquaient qu'un vérin était mal placé, ses tympans se souvenaient encore de la stridence de leur sifflement. Chaque minuscule petit mécanisme qu'elle avait infiltré dans sa cire, chaque infime vis, de la sculpture de sa petite poupée à la fixation à sa plateforme, passant par l'attache de la boîte à musique. Tout cela, faisait qu'elle était leur mère.

L'ouragan avait bel et bien été premier fautif,  balançant ses créations à terre, brisant la plupart d'entre elles, mais ce n'était rien d'irréparable. Mais ... cette petite saleté avait arraché son enfant à sa mère, de par sa maladresse. Même si ce n'était qu'une innocente erreur, la faute s'était rabattue sur un visage désormais, et Ophélia savait parfaitement ce qu'elle avait à faire.

Pas une seule fois elle n'avait eu de pitié envers les raclures qui malmenaient ses créations, pas une seule fois n'avait-elle épargné du tranchant de sa lame les moucherons qui brisaient ses fantaisies incarnées. Pourquoi en serait-il autrement ? Pourquoi devrait elle soutirer ses bonnes sentences ? Parce que c'était un animal ? Non, sûrement pas. Elle ne craignait pas de se salir les mains, même sur du sang présumé innocent par autrui. Car la gérante venait de poser un jugement coupable sur Selmac ou peu importait son nom, et jamais elle n'avait changé d'avis. 

Et donc, Ophélia ... que comptes-tu faire ? 


Une voix familière vint résonner dans sa tête, une voix masculine et mature, une voix qui lui chantait les berceuses lorsqu'elle pouvait encore s'adresser à elle. Ses yeux ne firent que gagner en rondeur lorsqu'elle sentit son père lui murmurer des paroles dans le creux des oreilles. Mais il n'avait pas de souffle, et elle ne le voyait pas. Ses mots résonnaient contre sa peau et rebondissaient dans son esprit. Flavien lui ne pouvait rien voir. Tout se déroulait dans le même visage immobile et inexpressif.

Il a détruit ta création ... et tu ne la reverras sans doute jamais. Ma pauvre petite, tu dois être si triste. Et elle était si jolie.


Je ... pourrais la refaire. - répondit-elle à son propre esprit


Oh penses-tu ? Ne vois-tu donc pas ta partition métallique au sol ? Serait-elle sortie de sa boîte à musique ? Elle a l'air tordu ... tu penses pouvoir rectifier ça ? Oh et regarde ! Son visage tout entier est en miettes. Ses bras ne sont pas mieux. N'est-ce pas compliqué de reformer de la cire solidifiée, ma fille ? Réponds moi.


Si ... c'est compliqué.


J'ai pitié de toi, mon enfant. Mais tu agis bien. Une Narcisse doit faire sourire, elle n'a pas à sourire. Alors garde tes lèvres droites, ou pleure. Mais ne souris pas. Tu le vois son visage arrogant ? Neutre au possible, comme s'il n'en avait rien à faire ... tout ce qu'il veut, c'est s'en aller. Il ne fera rien pour toi, il est seul ... et tu as bloqué la porte. Quelle issue pour lui ? Réfléchis bien à ta prochaine action, ma fille ... elle pourrait être sa dernière.


Où avez-vous mal ?

Et son père déserta ses pensées, semant la graine de la discorde dans son âme. Ophélia n'avait pas bougé, pas un mouvement de recul, pas un seul air étonné. Non, elle était blanche, autant dans son teint que dans son expression. Sa respiration était calme et ses membres étaient relâchés. Du coin de l'oeil, mais sans bouger sa pupille, elle concentrait son attention sur le visage de Flavien qu'elle distinguait dans sa vision périphérique. Elle analysait ses mouvements, regardait où elle devait viser, où se trouvaient ses cordes vocales et où les veines étaient le mieux exposés. Mais c'était bien peu, sa vue était embrumée tant qu'elle ne le regardait pas, lui. 

Alors que sa main droite s'en allait se réfugier dans celles de Flavien, la jumelle se glissait dans son propre dos frêle, effleurant du bout des doigts le manche de son couteau. Lentement elle le fit glisser hors de son fourreau, pour ne pas qu'il siffle contre les rebords. Lorsque l'intégralité de la lame fut mise à nue, Ophélia n'avait toujours pas esquissé la moindre expression. Et enfin, lorsqu'elle se sentit prête à frapper, elle leva le bras et abattu la pointe de sa lame vers la gorge de son ... "invité".

Mais son mouvement de dos vint interrompre sa course, la bloquant sur place. Tout portait à croire qu'elle forcerait pour s'affranchir de sa maigre contrainte physique. Elle restait de marbre. Cette dague, elle aurait pu l'abattre, si seulement cette lumière ne s'était pas mise à luire au creux de sa main. Son corps tout entier se mit à trembler, alors que son bras, lui se baissait progressivement, toujours menaçant mais bien plus hésitant. Et Ophélia, elle, était tétanisée ... cette lumière ... ça lui rappelait ...

Ru ... Ru ...


Et son poing frémissait, son esprit flanchait, coincé entre deux voix intérieures qui sans cessent se contredisaient. Egorge-le. Epargne-le. Il est le responsable. Il n'est coupable de rien. Sa mort est amplement méritée. Sa vie ne te coûte rien. Déchirée entre ses propres hallucinations intérieures, son regard s'était empli d'une maigre teinte opaque, un lit de larmes tiré par le souvenir de celle qu'elle considérait comme sa propre fille. Ses dents se serraient de manière aussi spastique que son visage s'adoucissait. La femme aux cheveux de jais était bloquée sur un choix qu'elle n'avait jamais eu à faire auparavant. 

Flavien Teleri
Flavien Teleri
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[Terminé] L'enfance n’est donnée qu’à quelques-uns EmptyVen 30 Mar - 23:50
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Profession : Soigneur itinérant - Guérisseur
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Il ne remarqua pas de suite la lame, trop occupé à inspecter la blessure de la Daënare pour seulement songer à ce que son hôte puisse être en train de se saisir d'un couteau dissimulé sur elle. La magie de soin agissait avec précision, tiède et contenante comme à son habitude, et Flavien était loin de se douter que quelqu'un puisse interpréter ses intentions comme néfastes. Le soigneur se reposait sur la magie comme il pouvait le faire sur l'oxygène qu'il respirait. Elle faisait partie intégrante de lui et il y faisait donc tout naturellement appel pour panser la plaie de celle qui l'avait accueilli aussi gracieusement.

Le nomade aurait peut-être dû y réfléchir à deux fois avant d'user de magie sur une Daënare sans l'y préparer avant. Lorsqu'Ophélia esquissa enfin un mouvement, il réalisa son erreur. La jeune femme pointait une lame dans sa direction, l'objet contendant arrêté à quelques centimètres seulement de Selmac, toujours perché sur son épaule. L'adepte d'Orshin ignorait après tout l'opinion de la jeune femme sur les mages avant de soigner sa paume écorchée. Il n'avait plus besoin de lui demander son avis sur les siens : la lame qui brillait sous l'éclairage était apparemment sa réponse.

" Flav. "

La voix fluette qui résonna dans son esprit était inquiète et alerte. Deux éléments plutôt dangereux quand on savait qu'Hua était la propriétaire de cette voix. Entre la tempête et le remue-ménage de Flavien, elle n'avait pas réussi à s'endormir malgré le confort du capuchon de son maître. A présent rien ne pouvait la convaincre de fermer les yeux tant qu'elle se trouvait en compagnie d'Ophélia.

Contrairement à son compagnon mage, la Tairakh préférait de loin être la première à porter un coup contre quiconque se risquait à se montrer menaçant envers Flavien.

Et il fallait dire qu'elle l'était, menaçante, cette jeune et frêle gérante. Ses yeux vides fixaient ce que la petite carnivore supposait être un point derrière l'épaule du soigneur, non pas l'Aitah perché sur cette dernière. La lame qu'elle tenait n'était peut-être pas bien grande, elle ferait d'important dégâts très rapidement si jamais la jeune femme décidait de l'abattre.

" Elle est armée. "
" J'ai vu. "
" Tu veux... "
" Non." Interrompit-il son familier " Laisse-moi faire. Ça va aller. "
" Hmm. Si elle bouge... "

Hua n'eut pas besoin de poursuivre son avertissement. Le soigneur savait bien ce qu'elle pensait : un geste brusque de la part d'Ophélia et la Tairakh n'hésiterait pas à attraper son poignet entre ses dents acérées pour lui faire lâcher sa prise sur son couteau.

Flavien souffla doucement. Il avait l'habitude de faire face à des créatures effrayées. Dans cet état, acculée et se sentant en danger, Ophélia n'était pas bien différente d'un animal sauvage. Sa réflexion n'avait rien de dégradant, il constatait tout bonnement que la jeune femme avait écouté son instinct en se saisissant du couteau. Il avait tout intérêt à se faire le moins menaçant possible s'il voulait que tout se finisse bien, et ce n'était pas en lâchant sa Tairakh sur la boutiquière qu'il réussirait cet exploit.

La lame de la Daënare était toujours dirigée vers sa jugulaire, à quelques centimètres de la tête de Selmac. Les yeux de l'animal s'étaient posé sur Ophélia tandis qu'il se colla contre son maître. Maintenant qu'elle avait relevé la tête pour l'observer sans un mot, Flavien pouvait apercevoir les yeux d'Ophélia. Aucune expression sur son visage. La jeune femme restait de marbre, invitant Flavien à lentement lever les mains devant lui. Il se serait bien redressé, mais à cet instant, cela risquait bien de faire plus de mal que de bien.

- Je suis désolé. Je vous assure que vous allez bien, je n'ai fait que soigner votre main. Assura-t-il sans savoir si Ophélia l'entendait, Ecoutez... je peux m'en aller...

Il s'interrompit en constatant les larmes qui coulaient sur les joues de la Daënare. La jeune femme était clairement en état de choc, articulant un mot que Flavien ne parvint pas à comprendre. Le nomade jura intérieurement. Quel rapport entretenait-elle donc avec la magie pour que cette dernière la mette dans un tel état ? Le soigneur grimaça et éloigna ses mains du visage d'Ophélia. Lui qui voulait prouver ses bonnes intentions n'avait peut-être pas eut la bonne idée en présentant ses mains à la jeune femme. Si la magie la plongeait dans une telle torpeur, ne voyait-elle pas ses mains comme de potentielles armes ?

Agenouillé de manière précaire sur l'escalier, il ne bougeait plus d'un pouce. En silence, ils passèrent un moment à se regarder en chien de faïence. Ophélia avait clairement l'air de vouloir dire quelque-chose, mais Flavien n'était pas sûr que creuser le sujet soit une bonne idée.

Selmac, tout empli de bonne volonté qu'il était, n'écouta que sa compassion et étira son cou vers la boutiquière. L'Aitah était long à la détente, mais il pouvait sentir le malaise de son maître et lire la détresse dans la posture de celle qui leur avait offert un abri. Les yeux de l'animal se posèrent sur la jeune femme tremblante et il miaula doucement. Si l'objet dangereux que son maître avait passé plus de temps que nécessaire à éloigner de lui ne reposait pas dans la main de la jeune femme, il se serait certainement approché d'elle pour lécher les larmes qui mouillaient ses joues.

HRP:

Ophélia Narcisse
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[Terminé] L'enfance n’est donnée qu’à quelques-uns EmptySam 31 Mar - 8:43
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Pérégrins -2
Le poing levé et tremblant, Ophélia fixait la gorge si fine qui s'offrait à elle presque généreusement. Il n'avait pas bougé d'un pouce, pas un seul tremblement. L'étranger était resté de marbre face à une situation où n'importe qui aurait saisi le poing de la gérante pour lui contraindre à lâcher la lame. C'était une chose aisée, elle n'avait pas les bras du jeune homme et encore moins sa poigne. La maîtriser aurait facilement été possible, tout ce qu'il avait à faire, c'était lui faire lâcher son arme. Tâche plus aisée encore, son emprise sur le manche s'étant relâchée grandement à cause de la stupeur qui vint la saisir.

Combattant intérieurement sa conscience contre son instinct, la tenancière tremblait de plus belle, comme si un démon s'apprêtait à sortir de son corps. Son poing était sans aucun doute la partie la plus sensible à ces secousses, s'approchant lentement de la peau de Flavien, lentement, mais sûrement. Elle voulait vraiment trouver la rétribution des actes du petit animal à travers le sang, c'était cette minuscule voix qui la retenait encore de faire payer ses actes à leur maître. Le regard qu'elle imposait à ses iris était devenu lourd et psychotique, le blanc de ses yeux injecté de sang. Et elle déposa la pointe de sa lame sur la gorge de son invité. Juste une pulsion et c'était fini. 

L'expression de la gérante s'était dessinée d'une expression mauvaise, mais pas haineuse. Quelque chose dans ses pupilles indiquaient à l'étranger qu'elle semblait avoir peur, comme un instinct primaire qui refaisait surface. Ses dents se serraient, laissant passer des sifflements entre les écarts qui séparaient le cartilage. Les respirations qu'elle tirait de sa gorge serrée étaient saccadées et ses oeillades vaironnes sur la peau de Flavien se faisaient de plus en plus obsessives. Ses doigts se serraient sur le manche de sa dague, tandis que comme un éclair, une voix enfantine vint éclairer sa conscience. 

Arrête ! 


Et elle jeta la dague à l'autre bout de la pièce et un râle plaintif alors que la voix de Ruby vint résonner en elle. Le souvenir de la petite la hantait encore, même si elle se baladait encore, là-dehors quelque part, loin sans doute. La lumière de la magie à laquelle elle venait d'assister l'avait troublé, creusant dans sa mémoire pour y remonter le visage sa petite diablesse bien-aimée. Son père, lui, ne dit plus un mot.

Redirigeant lentement son regard tombé au sol vers le faciès qui la mirait encore, elle se couvrit de a honte avec la paume qui quelques secondes auparavant encore tenait l'arme qui aurait pu mettre à bas une vie, dans cette même pièce. Mais elle ne l'avait pas fait. Pourquoi avait-elle seulement oublié sa petite fille ? C'était la première fois qu'elle pensait à elle depuis il y a bien des mois désormais, et la dame aux poupées se sentait comme si elle venait de déterrer un vestige condamné à pourrir. Frottant ses yeux du bout de ses doigts, essuyant les larmes qui étaient venues ramper sur ses joues, elle dévia à nouveau son regard vers l'itinérant. Ophélia avait l'air plus éveillée, consciente de ce qu'elle venait presque de commettre. La main qui essuyait son visage vint couvrir sa bouche, étouffant les mots qu'elle chuchotait à travers sa paume.

Désolée ... déso ...


Et une seconde venue de larmes vint la prendre, comme si elle s'apprêtait à vomir. Courbant son dos et contractant sa gorge, elle dissimulait du mieux qu'elle pouvait que ce qui l'effrayait vraiment ici, ce n'était pas le calme divin que conservait son invité, mais bien elle-même. Lorsqu'elle réalisa qu'elle était capable de tuer un homme pour une simple erreur commise, Ophélia sut qu'elle était la plus ignoble des femmes à exister dans ce monde. Elle étouffait ses sanglots du mieux que ses yeux serraient lui permettaient, refusant de soumettre ses pleurs à quelqu'un qui aurait pu finir égorgé par sa propre main. 

Son regard perçut du mouvement, au sol juste devant elle. C'était la même petite bête qu'elle avait condamné à mourir, alors qu'elle était encore dans son délire de maternité pour une création de cire. Voyant son adorable visage, la tenancière fondit presque à l'intérieur et entre ses doigts, elle se susurrait à elle-même.

Quel genre de monstre suis-je ...?


Et elle tendit la main vers Selmac, celle qui couvrait encore sa bouche, étendant son index pour caresser le front de l'innocent animal qui la regardait avec un air de compassion, qu'inexplicablement, elle parvint à déceler sans mal. Reniflant pour ravaler ses pleurs, elle lui effleurait sa petite fourrure, cherchant à se faire pardonner pour le mal qu'elle aurait pu causer à cette incarnation de pureté. Sans tourner la tête et avec un visage inondé par les remords, elle murmura à Flavien.

Restez ... je ne vous ferai pas de mal, plus maintenant. Je vous le promets ... me pardonnerez-vous ? 

Flavien Teleri
Flavien Teleri
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[Terminé] L'enfance n’est donnée qu’à quelques-uns EmptyMar 3 Avr - 0:03
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Si sa position surplombait celle de la gérante, Flavien se sentait être le plus acculé des deux. La rambarde derrière lui, l'empêchait de reculer et il était hors de question qu'il tente de se dégager rapidement, au risque de prendre par surprise la femme armée. Ophélia avait beau trembler de peur, il était le seul à être réellement en danger ici.

Un sifflement inquiétant, semblable au feulement d'une bête sauvage, s'échappa des lèvres de la boutiquière et Flavien comprit finalement que ce qu'il avait pris pour de la peur était en réalité de la colère. Les dents serrées, Ophélia ne le quittait pas des yeux. Tous ses muscles en tension, elle refusait catégoriquement d'accorder son attention à autre chose qu'à sa cible immobile. A cet instant son hôte tenait plus de la bête sauvage prête à bondir que de la Daënare sympathique dont il avait fait la rencontre.

Le soigneur posa le plus discrètement possible sa main dominante sur la rampe derrière lui. Si elle ne lui en laissait pas le choix, il espérait réussir à repousser Ophélia d'un coup de pied bien placé. Pour l'instant, il ne pouvait qu'attendre de voir ce que la jeune femme allait faire. Faire, non pas décider. Vu son état, Flavien n'était pas certain qu'elle soit réellement en train de décider quoi que ce soit par elle-même.

" Flav ! "

La voix de sa Tairakh résonnait dans son esprit, pressante et pleine d'angoisse. Presque au même moment, Ophélia leva la main et il sentit un poids sur son épaule. Alors qu'elle levait la main, probablement pour abattre la lame sur la nuque du nomade, Hua bondit sur l'épaule de son maître, prête à déchiqueter la main de celle qui oserait toucher à son maître. Le cliquetis caractéristique du métal ricochant sur une surface en contrebas freina la carnivore dans son élan et elle constata, avec le même étonnement que Flavien, que la demoiselle avait lâchée son arme. Le couteau reposait désormais en bas des marches tandis qu'Ophélia portait les mains à son visage, une expression horrifiée chassant celle plus meurtrière à laquelle il avait eu droit plus tôt.

" Flav...? "

La voix d'Hua était incertaine. Toujours en colère, la petite carnivore ne savait quoi penser de la situation. Il fallait dire que l'incompréhension mêlée de soulagement de son maître ne l'aidait pas beaucoup non plus. Adoptant une posture défensive, la Tairakh observait d'un œil critique la Daënare qui pleurait à chaudes larmes, hoquetant des excuses. Fière et sauvage un instant, elle était désormais happée par la tristesse et les regrets.

" C'est quoi son problème à celle-ci ?! "

Flavien secoua doucement la tête, partiellement pour répondre à Hua, mais surtout pour remettre de l'ordre dans ses pensées et se motiver à bouger. Ophélia avait beau ne plus être visiblement armée, il ne se risquerait pas à poser sa main sur son épaule ni même à lui demander comment elle se sentait à présent. Plutôt que de chercher à réconforter la jeune femme en pleurs, il profita du fait qu'elle se soit recroquevillée sur elle-même pour s'extirper de sa prison. Décollant son dos de la rambarde, il pivota doucement pour être dos aux marches. Le vide derrière lui, échappatoire probable, était immensément plus rassurant que les barreaux qui formaient la rampe.

Le nomade fut tenté de partir, de descendre les marches deux à deux et de tenter sa chance avec le blizzard hurlant aux fenêtres, maintenant que la jeune femme était désorientée. Ophélia avait beau être l'image même de la tristesse, il n'allait certainement pas tenter de la réconforter. Premièrement car ça risquait d'être une très mauvaise idée si elle éprouvait un sentiment aussi violent à l'encontre des mages, deuxièmement car il n'en avait absolument pas envie. Flavien n'était déjà pas de base le plus empathique des hommes, alors éprouver de la sympathie pour quelqu'un ayant manqué de grièvement le blesser, c'était hors de question.

Seul le comportement de Selmac le fit revenir sur sa décision initiale, à savoir tourner les talons et claquer la porte d'entrée derrière lui.

L'Aitah appuyait sa petite tête contre la paume d'Ophélia. Ronronnant plus fort qu'à son habitude, Selmac acceptait volontiers les caresses hésitantes de la Daënare qui murmurait maintenant qu'elle devait être un monstre pour agir d'une telle façon. Flavien croisa les bras sur son torse, interdit, tandis qu'Hua sifflait de mécontentement. La Tairakh avait le poil hérissé et ses grands yeux perçant fixaient avec animosité son compagnon quadrupède.

" Et son problème à lui, c'est quoi ? Elle a essayé de te tuer ! Qu'est-ce qu'il fout ?! "
" Je crois... qu'il essaye de la calmer. "
" La calmer. La calmer ? Attends, je m'en vais lui calmer ces ardeurs à cette tarée ! "

Flavien attrapa sa Tairakh dans ses bras avant de lui laisser une chance de mettre sa menace à exécution. La petite boule de nerf fondit instantanément dans ses bras, s'imprégnant du calme par lequel Flavien se laissait porter. Les roucoulements des Aitahs étaient bien connus pour leur effet apaisant sur la psyché humaine, mais ce n'était pas les vocalises de son Aitah qui l'incitèrent à se calmer, mais plutôt son comportement. Selmac, aussi imprudent qu'il soit, était en général un très bon juge de caractère (ce qui expliquait qu'il avait fini dans la gueule de deux prédateurs sans jamais être blessé, le carnivore surpris n'ayant jamais pour instinct de faire la peau à l'Aitah joueur). S'il acceptait d'approcher Ophélia et de la laisser le caresser après ce qu'il venait de se passer, la boutiquière devait être plus perdue qu'haineuse.

Les paroles de la Daënare vinrent appuyer ce point. En effet, elle promettait à présent de ne plus lui faire de mal, lui offrait de rester encore un moment auprès d'elle. D'une voix basse, elle lui demanda s'il lui pardonnait ses actions, ce qui plongea Flavien dans un sacré dilemme. La pardonner ou non n'était pas la question, c'était de rester qui lui causait problème. Il était pourtant au courant que bien des Daënars avaient des difficultés à accepter la magie. Son don pour les soins était si naturel pour lui qu'il oubliait parfois ce détail.

" Tu vas pas me dire que tu vas d'excuser pour l'avoir aidé ? "
" Non, je ne compte pas m'excuser pour ma nature. "

En revanche, il allait remettre les choses à plat entre eux. La Daënare était peut-être sortie de sa torpeur, il était cruciale qu'elle n'y replonge pas, couteau ou non.

- Je n'aurais pas dû supposer que vous étiez à l'aise avec la magie. Dit-il lentement au lieu de lui accorder ou non son pardon. Si vous nous autorisez à rester le temps que la tempête fasse rage à l'extérieur, je vous en serais reconnaissant.

En gage de bonne parole, il tendit la main à Ophélia pour l'aider à se relever. Selmac se blottit dans les bras de la Daënare une fois celle-ci sur pieds, et Flavien observa longuement son hôte à la recherche d'un signe de mal-être, du moindre indice pouvant laisser penser qu'elle pourrait lui sauter à la gorge à un moment ou à un autre. Elle avait l'air d'être à nouveau elle-même, mais le soigneur ne savait à présent que trop bien que son air agréable n'était pas entièrement vrai.

" Tu comptes sérieusement rester ? "
" Juste le temps de la tempête. "
" Hmpf. "

Une seule Daënare était sans question plus facile à gérer que les éléments déchainés. Flavien le savait et Hua aussi. Ceci n'empêchait pas la petite Tairakh d'être extrêmement méfiante. Elle grogna d'ailleurs lorsque Flavien fit un pas vers Ophélia. Le soigneur passa une main sur son visage et offrit une grimace à la boutiquière. Il ne lui faisait clairement pas confiance non plus, mais il était bien plus discret à ce sujet qu'Hua.

- Elle ne vous fera rien, elle est juste..., Furieuse, méfiante ? Flavien secoua la tête, Effrayée.

Hua se blondit dans le creux de ses bras. Il n'était peut-être pas si loin de la vérité.

Ophélia Narcisse
Ophélia Narcisse
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[Terminé] L'enfance n’est donnée qu’à quelques-uns EmptyMar 3 Avr - 11:32
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Pérégrins -2
Les yeux emplis de brume, la vaironne n'avait pas relâché son regard de la petite bête qui lui soumettait son front avec une bonté inégalée. Cet acte de confiance représentait pour Ophélia ce qu'une oasis représente au nomade assoiffé. S'abreuvant de cette affection inattendue, la tenancière fini par esquisser un sourire, toujours empreint de la même détresse. Elle n'osait toujours pas regarder son invité dans les yeux, ses actes étaient bien trop pathétiques pour qu'elle soit seulement capable d'en assumer l'existence auprès de lui. Fuyant sa profonde tristesse à travers les ronronnements qu'elle sentait pulser au bout de son index, elle sentait son fardeau s'alléger un peu. 

Une main vint se tendre devant son front, et même celle-ci, elle n'osait pas y déposer le regard. Mais éventuellement, elle dut lever les yeux, voyant l'éternelle neutralité qui s'était embrouillée lorsqu'elle tenait encore la lame entre ses doigts. La tenancière l'avait pris pour de l'arrogance, mais la soif de sang cherche toutes les excuses bonnes à prendre, lorsqu'il s'agit de commettre un meurtre. Sa paume se faufila donc dans celle de Flavien, qui l'éleva au-dessus du sol. 

A peine levée, elle sentit une boule de poil se serrer contre elle, la même dont elle avait taquiné le visage du bout de l'index. C'en était presque trop à supporter, tant de tendresse, le coeur d'argile qu'avait revêtu Ophélia s'était vu sauvagement brisé par le burin d'affection qui, blottit contre elle, ronronnait toujours. 

Fermant les paupières, elle porta le petit animal à son visage, frottant sa joue contre son minuscule faciès. Sa main droite vint le caresser de tout son long, redevable ce moment de soulagement qu'il lui offrait. En elle, elle sentait qu'elle ne méritait pas cette deuxième chance. La tenancière ignorait quel genre de regard son convié posait sur elle, après avoir montré les deux pôles les plus extrêmes de sa personnalité. Elle-même ne se comprenait pas, elle n'espérait en rien qu'il fasse preuve d'empathie.

Continuant à câliner la petite bête, elle dévia son regard sur son interlocuteur, dont elle avait presque percé la gorge. Peu importe la manière, il en était arrivé à la supposition que c'était sa magie qui avait été instigatrice de son instinct meurtrier. Elle ne pouvait pas décemment lui expliquer qu'elle tranchait les artères de chaque client adulte qui brisait une de ses créations. La vaironne suivit donc la pensée de son invité, creuser plus loin en expliquant que sa magie l'avait sauvé, c'était soulever l'interrogation du pourquoi.

J'ai ... j'ai juste été ... surprise. Je pensais que vous alliez me brûler la paume. La magie ne me pose pas vraiment de soucis ... c'est ... elle tira un soupir. Désolée ... là-dehors c'était un enfer et j'ai les nerfs à vif. 


Elle mentait bien mal, mais c'était mieux pour son invité qu'il ne sache jamais que c'était de la simple cire brisée qui avait guidé son poing à vouloir mettre fin à sa vie. Son regard vairon dériva sur le second animal, dont elle n'avait rien perçu des intentions protectrices. L'expression qu'elle arborait, en revanche, était plus que parlante. Les yeux hétéro-chromes dérivèrent vers le sol quand elle la croisa, alors que son maître expliquée que c'était la peur qui guidait ses agissements. 

Ophélia n'avait aucun mal à comprendre l'instinct naturel de territorialité. Protéger ce que l'on reconnaissait comme étant nôtre, c'est la racine même du concept d'affection, et la tenancière adorait ses jouets sans doute autant que la Tairakh aimait son maître. Sans même chercher à changer l'humeur de la carnivore, la vaironne s'adressa directement à Flavien.

Elle n'est pas la seule, vous savez ...


Ses cils se levèrent à nouveau vers son invité, avec un regard timide empreint d'un léger dédain. Ce n'était pas tant un reproche, mais plus une remarque sur à quel point leurs positions ici étaient égales. Elle offrait son foyer à un parfait étranger et lui était hébergé par une femme dont il ne connaissait rien. Les risques étaient les mêmes des deux côtés, bien que dans les intentions, c'était bel et bien le nomade qui était à son désavantage. 

Donc ... vous êtes My'tran ... est-ce bien cela ? 


Evidemment qu'il venait de l'autre continent, la magie était propre à ces citoyens-ci. Mais ce n'était pas tant une interrogation véritable, la Daënare avait une seconde question derrière la tête. Elle se faisait du soucis pour la petite qu'elle avait laissé partir il y a bien longtemps, et si quelqu'un pourrait la renseigner, c'était sans doute une personne originaire de la même région.

Ma question va vous paraître soudaine, mais ... connaîtriez-vous par hasard une petite magicienne ? Cheveux bruns teintés au rouge et yeux gris ? Elle s'appelle Ruby.

Flavien Teleri
Flavien Teleri
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[Terminé] L'enfance n’est donnée qu’à quelques-uns EmptyMar 3 Avr - 21:56
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Ils avaient fini par retomber tous deux dans une sorte de calme d'apparence, nullement serein. Flavien avait beau ne plus avoir une lame sous la gorge, on ne l'y reprendra plus de sitôt à baisser sa garde en présence de la Daënare, même si cette dernière avait l'air absolument désolée. Ophélia lui avait peut-être donné sa parole qu'elle ne se retournerait plus de la sorte contre lui, le nomade partait du principe que les actions parlaient bien plus que les mots. Pour le moment, il se réservait le droit de mettre en doute la sincérité des propos de son hôte. Même pour une jeune femme non initiée à la magie, il avait du mal à croire qu'elle puisse être à ce point aveuglée par la peur pour confondre le don de Möchlog avec celui de Zolios. Et pourtant, cela pouvait être la vérité. Flavien était assez bien placé pour savoir que les My'träns étaient à ce point mystifiés, que certains Daënars voyaient la magie comme une arme plutôt qu'un don.

Pour le moment, les deux s'efforçaient de faire un petit brin de causette. Ophélia car elle souhaitait clairement mettre cette mésaventure derrière eux, et Flavien par désir de ne plus laisser la jeune femme replonger. La conversation l'aidait visiblement à reprendre pieds et le nomade était prêt à ce petit sacrifice s'il signifiait que son hôte retrouve un état d'esprit plus stable qu'il y a quelques minutes. Selmac avait sauté à terre pour rejoindre son maître, tandis qu'Hua s'accrochait à l'épaule du soigneur. Derrière elle, sa longue queue touffue effectuait de lents mouvements de balancier. Elle était prête à se tenir tranquille mais il était hors de question qu'elle retourne sommeiller. Elle se reposerait plus tard, une fois qu'ils seraient sortis de cet endroit.

Les mains croisées devant lui, Flavien répondit d'un hochement de tête à la question timide posée par Ophélia. Il venait évidemment de My'trä, la jeune femme devait bien s'en douter. Il évita de lui faire part de cette réflexion exaspérée pour préserver la paix commune difficilement acquise et répondit à la question posée.

- Je suis My'trän.

Il s'était persuadé de faire un effort, pas de changer de comportement du tout au tout. Lorsqu'il se trouvait dans une situation délicate ou en compagnie d'une personne qui le brossait dans le mauvais sens du poil, Flavien était un homme de peu de mots.

Heureusement pour lui, Ophélia n'eut pas l'air de s'offenser de sa réponse très sommaire. La jeune femme avait vraiment l'air de vouloir faire table rase du passé. Dommage qu'elle poursuive son innocente question initiale par une interrogation beaucoup plus personnelle pour le nomade. Connaissait-il une magicienne du nom de Ruby ? Avec une description pareille, c'était facile de la reconnaitre. Une petite demoiselle au caractère bien trempé, qui l'avait aidé à trouver sa place sur ce territoire inconnu, sans rien demander en retour ? Un peu qu'il connaissait Ruby. C'était d'ailleurs en partie grâce à elle et aux Daënars qu'elle lui avait permis de rencontrer qu'il n'avait pas tout bonnement tourné les talons, tempête de neige ou non.

Restait à savoir pourquoi Ophélia lui posait cette question. Si la boutiquière était aussi facilement effrayée par la magie, que pouvait-elle avoir à faire avec Ruby ? Malgré ses suspicions, il gratifia la Daënare d'un court hochement de tête. Mentir ne lui aurait rien apporté, bien qu'il n'allait certainement pas s'étaler sur sa rencontre avec la jeune My'tränne avant d'en savoir plus.

- Énergique, avec un penchant pour les sucreries ? Accompagnée d'une Khulgana ?, Demanda-t-il prudemment, Si c'est bien la même Ruby dont nous parlons, oui, je la connais.

Il faisait même plus que simplement la connaitre. Il avait travaillé avec elle à Kali'ns, mais ça Ophélia n'avait pas besoin de le savoir pour le moment.

- Pourquoi me posez-vous cette question ? Vous a-t-elle causé du mal ?

Flavien avait été aux premières loges pour assister aux dégâts que pouvaient produire la furie de Ruby. Il était fort possible que la jeune illusionniste ai causé du tort à Ophélia. Si tel était le cas, Flavien pouvait être sûr d'une chose : il n'était pas en sécurité ici. Il ne connaissait pas Ruby depuis bien longtemps et il ne l'avait pas côtoyé longtemps, mais si sa compatriote à la justice inflexible avait eu des raisons de s'en prendre à la boutiquière, c'est qu'elle y avait été contrainte et forcée.

Ophélia Narcisse
Ophélia Narcisse
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[Terminé] L'enfance n’est donnée qu’à quelques-uns EmptyMar 3 Avr - 23:12
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La petite boule de poil qui s'était blottie contre elle s'était finalement lassée de son étreinte. Mais elle avait bien agi, car la nouvelle de Ruby agitait profondément Ophélia. Cela faisait déjà si longtemps qu'elle n'avait pas entendu son nom, et simplement la dualité des syllabes résonnant dans ses oreilles était une jouasse sensation. A mesure de la description que lui dressait Flavien, les pupilles à nouveau blanche de la gérante devinrent luisantes, s'arrondissant lorsque la fragrance de la mémoire de la petite magicienne revint à elle. Cela faisait bien trop de temps, une soudaine envie de la revoir la traversa comme une hâte que l'on pouvait retenir. Mais faute de pouvoir déverser sa joie sur sa petite diablesse, elle en prit l'incarnation la plus proche, l'étranger dans sa maison.

Se penchant donc en avant, les yeux brillants, elle fixait le nomade dans la prunelle de son oeil gauche, accrochée à ses mots. Ses mains se serraient fermement l'une dans l'autre alors que ses épaules frémissaient d'enthousiasme. Car si lui était là, c'était qu'il l'avait croisé peu auparavant, ou du moins, qu'il l'avait vu, possiblement, après Septembre de l'année passée. Ce devait être le cas ! Ophélia n'aurait su accepter l'inverse et au fond d'elle, elle s'était déjà persuadée que la petite lui reviendrait bien assez tôt. 

La voix de la gérante devint presque enfantine, elle avait complètement oublié qu'elle venait de lui porter un couteau à la gorge. Riant de milles éclats, visage illuminé d'une radieuse expression qui n'avait rien d'une tromperie, pour ce que Flavien pouvait en percevoir, du moins. Des images du passé lui revint, la petite nourrissant son amie qu'elle avait gardée dissimulée, jusqu'à ce que la tenancière en devine l'existence. Si sa mémoire était bonne, c'étaient ses propres biscuits qu'elles grignotaient. Elle confirma donc la description que lui dressait son invité avec une intonation de fillette.

Oui ! Oui, c'est elle ! Elle se goinfre toujours autant ? Quelle chipie celle-là ...

Devenue nostalgique du temps où elle l'hébergeait dans cette même salle, un soupir vint décompresser ses épaules, comme un soulagement ou plutôt, une profonde satisfaction. Elle ignorait l'air distant qu'avait pris son interlocuteur, le sujet de conversation l'avait inhibée et elle n'en ressortirait plus avant de tout savoir. Et son convive vint à supposer qu'elle lui ait fait un quelconque mal, interrogation à laquelle Ophélia ne trouvait pour réponse qu'un rire aussi doux qu'adorable alors que ses pommettes reprenaient un ton rose. 

Comment pourrait-elle me causer du tort ? Cette petite diablesse est comme une fille pour moi ! Enfin, quand elle logeait ici. Ca va faire bien huit mois maintenant ... bientôt. Huit mois ...

Et son regard dériva sur sa gauche inférieure, prenant un ton à nouveau mélancolique. L'humeur de la gérante était comme une girouette, changeante au moindre coup de vent. Mais c'était ainsi qu'étaient les humains lorsque leur coeur prenait plus de place dans leur thorax que leur cervelle n'empruntait de leur tête. En soi, la vaironne était une imbécile malheureuse qui ne voulait que du bonheur, autant pour les autres que pour elle. Il est cependant bien trop rare que tout se passe selon la bonne volonté de chacun, et la femme aux cheveux de jais devait commencer à le savoir plus que quiconque. 

Le nomade semblait usé aux animaux, peut-être pourrait-il comprendre une femme qui en a plus les traits que n'importe quel autre de ses congénères ? Tout les instincts primaux se réunissaient en elle, instinct maternel, instinct de survie, instinct territorial. Absolument tout ce qui avait pris possession de son âme raisonnée pour la changer en le monstre qu'elle s'efforçait de ne plus être et que Flavien avait eu le malheur de croiser. 

Mais peu importe ce que lui en pensait, la dame à laquelle il faisait face était la première à en souffrir de ces maux. Les cicatrices invisibles sous ses gants témoignaient de ce fait. Elle avait maintes fois attenté à sa vie, sans jamais trouver le courage d'en finir le processus. 

... elle me manque vous savez ... beaucoup. Avant son arrivée, j'ignorais même que la magie existait et elle, elle entre dans mon magasin et s'amuse avec tous les jouets qui y étaient alignés ... J'étais sous le charme devant une si belle innocence. Et donc ... je suis descendue la voir et elle m'a fait découvrir cette chose que vous du continent d'en face pouvez maîtriser. C'était fascinant ... c'était ... c'était ...

Et elle perdit ses mots à de nouveaux sanglots redondants, serrant ses épaules dans ses paumes et contenant les pulsions que son vide grandissant venait exercer sur ses clavicules. Mais elle secoua la tête, serrant les dents et gardant un peu de son sang-froid. Le manque de sa petite fille vint s'exprimer dans sa voix enrouée, qu'elle tentait de reformer au mieux.

Excusez-moi ... je n'ai aucun droit de pleurer devant vous. 

Détournant le visage vers sa gauche, elle dissimula une furtive larme qui coula le long de sa joue. La vaironne fut prompte à l'écraser d'un mouvement arrondi de l'épaule. Elle n'avait aucune légitimité d'être triste devant un homme qu'elle avait failli assassiner. Il était hors de question qu'il doive ressentir de l'empathie pour elle, pas après ce qu'elle lui a fait endurer. "Une Narcisse ne sourit pas, elle doit faire sourire" autant qu'une Narcisse doit souffrir pour ne pas faire souffrir. Et en l'occurrence, une Narcisse doit prendre sur elle, pour garder sa fierté intacte.

Flavien Teleri
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[Terminé] L'enfance n’est donnée qu’à quelques-uns EmptySam 7 Avr - 2:55
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La nostalgie qui teintait la voix d'Ophélia ne laissait aucun doute quant au réel attachement de la Daënare à la jeune My'tränne. Elle en parlait comme d'une chose précieuse, un réel sourire éclairant ses traits tirés par les larmes quelques minutes plus tôt. La mention des petites habitudes de Ruby avait rendu le sourire à la boutiquière avec une facilité déconcertante. A la manière du climat de la région, le tempérament d'Ophélia était changeant, déroutant voir dangereux pour qui n'y était pas préparé. Flavien faisait partie de ces personnes. Lui qui avait déjà bien assez de difficultés en temps normal à s'accoutumer de la présence de ses paires, composer avec une jeune femme qui passait des intentions meurtrières à un rire cristallin était relativement compliqué.

Riant doucement, Ophélia s'enthousiasmait à haute voix du fait que la jeune magicienne soit restée fidèle à elle-même, amatrice du sucre sous toutes ses formes. Elle perdit son sourire pour prendre offense de sa question. Ruby était pareille à une fille pour elle, elle l'avait logé un temps et l'avait a priori énormément aimé. A nouveau, son visage fut mué par l'émotion, perdant son air légèrement outré au profit d'une mélancolie sans nom. La Daënare était complètement abattue, répétant ses derniers mots comme pour se convaincre de leur véracité.

Flavien passa une main dans ses cheveux, tirant quelques mèches de sa natte dans le mouvement chargé d'énergie. Les sauts d'humeurs de la Daënare étaient fréquents et le nomade se méfiait toujours du prochain qui, peut-être, le verrait une nouvelle fois placé devant une lame dissimulé par la jeune femme. Il avait l'habitude d'approcher des créatures farouches et dangereuses, mais Ophélia n'avait rien d'un membre de la faune locale, malgré ses actions. Non, elle était bien plus dangereuse que n'importe quelle créature qui avait croisé sa route. Les actions des créatures sauvages étaient motivées par des raisons concrètes et facilement repérables pour lui. Les êtres humains cachaient leurs véritables intentions, ce qui faisait d'eux des créatures plus difficiles à cerner que leurs contemporains animaux.

Se remémorant sa rencontre avec Ruby, Ophélia était à présent émue aux larmes. Une fois les premières perles d'eau libérées de leur prison, une véritable cascade de larmes s'échappa des yeux de la Daënare. Serrant ses épaules de ses mains pour se rassurer comme elle le pouvait, Ophélia oscillait légèrement en murmurant ses excuses au soigneur qui eut du mal à les comprendre, tant ils étaient noyés par des sanglots bien réels tandis qu'elle taisait ses pleures avec bravoure, une unique larme roulant le long de sa joue.

Flavien ne savait trop que répondre à ce débordement d'émotion. Lui qui avait appris très jeune à les gérer, ce tourbillon d'énergie pure était assez terrifiant à naviguer.

" Eh bah. ", Souffla une petite voix dans son esprit, suivie d'un sifflement impressionné, " Sûr que le blizzard te tente toujours pas ? "
" Hm... "
" Nan mais sérieux ! ", Marmonna Hua, déconcertée, " Et après c'est moi qui suis lunatique ! "

Toute mauvaise langue qu'elle était, la Tairakh n'avait pas tort. Ophélia était compliquée à saisir, passant du rire aux larmes avec une facilité déconcertante et laissant le soigneur complètement démuni. La faible flamme de l'empathie qui brillait pour toute personne se trouvant hors de son cercle privilégié fut ravivée par la douleur réelle qui se lisait sur le visage d'Ophélia. Il n'avait pas un cœur de pierre et la détresse le mettait immanquablement mal à l'aise, son être lui commandant de faire quelque-chose, n'importe quoi, pour chasser l'angoisse de la Daënare. Parallèlement, un tel discours lui rappelait pourquoi il n'aimait pas passer plus de temps que nécessaire avec ses paires.

Bataillant silencieusement à propos de la démarche à suivre, il finit par se mettre d'accord sur une combinaison plus ou moins réussite des deux. Il ne leva pas les yeux au ciel mais il ne chercha pas non plus le contact avec la jeune femme, haussant les épaules.

- Ne vous excusez pas de pleurer, c'est naturel lorsqu'on est bouleversé.

Flavien repassa une main dans ses cheveux, songeur. La jeune femme était à nouveau perdue dans ses pensées, un lieu que Flavien commençait à considérer comme plutôt toxique. Lorsqu'elle se posait pour réfléchir, Ophélia perdait de son éclat, la candeur qu'elle irradiait à présent diminuant considérablement, étouffée par une fascination dont Flavien ignorait le sujet.

- Elle va très bien. Ruby. Précise-t-il, engageant la conversation. Il n'avait pas particulièrement envie d'assister à un nouvel effondrement de la Daënare. Parler de Ruby lui avait redonné le sourire, après tout, Je l'ai rencontré il y a deux mois à peine. Elle vous a montré ses talents d'illusionniste ?

Tout en parlant, il faisait quelques pas dans la pièce (rester immobile ne devait pas être fait pour lui). Ce faisant, il manqua de trébucher sur un jouet qui avait plongé à sa perte lorsque le vent s'était engouffré dans la boutique. Un pas sur le côté lui évita d'écraser la création et il inspecta rapidement la pièce du regard. De nombreuses poupées, figures articulées et autres jouets complexes et terrifiants d'inventivités jonchaient le sol. Tous étaient en plus ou moins bon état, malmenés par le vent indélicat.

- Je peux vous aider à ranger, qu'en dites-vous ?, Proposa-t-il, Pendant ce temps, expliquez-moi... Vous n'aviez jamais vu de magie à l'œuvre avant ce jour ? Je sais qu'elle n'est pas la bienvenue, mais elle est si naturelle pour moi que je ne pourrais pas envisager un jour sans l'avoir à mes côtés.

Pour user de son temps à bon escient et pour éviter d'avoir à regarder Ophélia dans le blanc des yeux le temps de la conversation, il attrapa une poupée qui était tombée de son étagère. Le jouet n'avait rien, fort heureusement, et Flavien la replaça sur une étagère après avoir demandé confirmation de l'emplacement à la Daënare. Une fois qu'elle fut alignée avec ses sœurs de cire, le soigneur la regarda d'un peu plus près. La poupée était effrayante de réalisme, à la manière d'un animal empaillé. Tout rappelait au vivant, mais une chose, on ne savait trop quoi, empêchait d'associer l'objet à la vie.

- Vous fabriquez tous ces jouets vous-même ? Se demanda le nomade à haute voix.

Des jouets, il y en avait un sacré paquet. Ou bien la boutique d'Ophélia était debout depuis longtemps, ou bien elle consacrait beaucoup, beaucoup de temps à son travail.

Ophélia Narcisse
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[Terminé] L'enfance n’est donnée qu’à quelques-uns EmptySam 7 Avr - 16:37
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L'empathie du visiteur, toute montée qu'elle était mais néanmoins assez vraie pour que la boutiquière y croit, toucha cette dernière. Malgré son erreur, il lui adressait une écoute bienveillante et elle avait l'impression de s'écarter du monstre qu'elle avait libéré à chaque mot que le nomade lui adressait. C'était étrange, il était extrêmement constant, bien trop calme pour quelqu'un qui s'était vu se glisser une lame sous la gorge. Ou peut-être Ophélia n'était simplement pas assez aisée au niveau comportemental, qui l'aurait cru ? Ce visage de marbre, cependant, laissait la tenancière en une zone de confort appréciée, n'ayant pas à s'adapter à son interlocuteur. C'était comme dessiner sur une feuille blanche, la vaironne pouvait s'y laisser aller à l'instinct et n'avait pas besoin de réfléchir à quel sourire adopter, ou bien quel regard adresser. Elle ne relevait même pas que c'était une imprudence similaire qui l'avait conduite à sa déviance précédente. 

Réconfortée par le semblant d'excuses qu'elle s'était vue adressée, l'incarnation de l'instabilité qu'elle était s'en tenait finalement au sourire effacé. Ses larmes avaient assez coulées pour l'instant, il était de décrocher ses pupilles du passé pour se concentrer sur l'homme qu'elle accueillait dans sa demeure. Après avoir manqué de le tuer, faire preuve de courtoisie était la plus élémentaire des redevances. Et puis, s'il savait des choses sur la petite diablesse, elle comptait bien extraite chaque parcelle d'information qu'il avait à délivrer. Son enthousiasme ne fit que s'accentuer encore lorsqu'il lui annonça que leur rencontre ne remontait qu'à deux mois à peine. Elle tenta bien sûr de dissimuler un trop plein de joie, s'écartant du coin dans lequel elle s'était coincée depuis qu'elle était tombée. Passant le bandeau qu'elle portait au cou sur ses cheveux, elle les dressa en une longue queue de cheval. Elle avait du travail après tout, au moins le quart de son magasin était tombé de ses étales.

Se baissant pour ramasser les marchandises tombées, elle se contentait de s'accroupir pour ne pas avoir à disloquer son dos qui la faisait encore souffrir. La main qu'elle passait au-dessus de ses reins était révélatrice de cette défaillance qu'elle n'avait pas mentionné à Flavien. Si seulement elle ne lui avait pas glissé cette lame sous la gorge, elle aurait pu lui demander de réarranger cela. Mais la fierté lui imposait de rien n'en faire. Surtout, de quelle pathétique créature aurait-elle l'aspect si elle devait se rabaisser à demander un service supplémentaire à un homme qui avait senti le froid de sa lame. Elle se contenterait de souffrir en silence, pour ce que ça importe. Ce faisant, il lui posait des questions sur sa petite Ruby, mentionnant ses talents à plonger autrui en transe.

Elle est douée, pas vrai ? La première fois que je l'ai vue, elle m'a fait apparaître une rose pourpre entre les paumes ... c'était sublime.
E
Elle se souvenait encore de cette vision, comme si elle datait de la veille. Cette soirée là aussi elle avait pleuré. A cette époque, elle était bien plus fragile et instable qu'à l'heure actuelle, et le mystère de la manière dont la petite l'avait dressée restait un mystère entier. C'était son visage enfantin qui l'avait charmé, malgré son âge assez mûr, sans mentionner son attitude de petite fille. Ophélia était toujours si touchée par ce qui est adorable et innocent, comment aurait-elle pu seulement détester sa jeune visiteuse ?

L'étranger se proposa de l'aider, mais la tenancière ne comptait pas abuser de sa gentillesse. Ce n'était que juste rétribution que de devoir faire ça elle-même.

Non, je vous en prie, laissez-moi faire. Vous demander votre aide me troublerait plus qu'autre chose, alors restez tranquillement avec vos amis. Déposez simplement celle-ci derrière vous et laissez-moi faire, d'accord ?


Et elle continuait à ramasser et remettre ses marchandises, écoutant d'une oreille subsidiaire les interrogations de son convié. Sa relation à la magie relevait de la fascination, si bien qu'elle aurait souhaité naître sur l'autre continent. Mais le destin avait voulu qu'elle soit fille de fabricant de jouets daënar et c'était ainsi. Elle ne comptait pas en faire un drame, mais elle était curieuse quant à la manière dont on pouvait faire usage de la magie. 

Ruby a été la première à m'apprendre son existence. Avant, je pensais que ce n'était que des contes que mon père me racontait pour m'endormir ou me faire passer le temps. Votre art n'est pas le premier que je vois. 


Ophélia fronça les sourcils lorsqu'il mentionna qu'elle n'était pas la bienvenue. La vaironne n'en saisit pas entièrement le sens, mais savait pertinemment que c'était faux. Elle oubliait déjà le mensonge qu'elle avait esquissé par rapport à la lumière qu'il avait fait briller sur sa main. Il semblait croire que sa magie était l'instigatrice de son attaque, alors qu'au contraire, elle en était celle qui y avait mis fin. 

Je n'ai aucune haine envers la magie, vous savez. Elle me fascine à vrai dire et j'aimerais un jour pouvoir faire comme vous, moi aussi. Mais je ne suis pas sûre de bien comprendre ce que cela enquiert.


Déposant une poupée sur la dernière étale de l'allée gauche, la vaironne esquissa un soupir lorsqu'enfin il ne restait plus rien au sol, les objets défectueux avaient été déposés sur le comptoir et la boutiquière vint s'y installer. Elle n'avait pas attaché ses cheveux pour rien après tout. Plusieurs mécanismes étaient sortis de leurs gonds, ou bien s'étaient simplement arrêtés à cause du manque de composantes. La marchande sortit une boîte à outil de son tiroir inférieur. Elle en tirait divers instruments, passant de la clé à remonte au tournevis. Son attention était toujours tournée vers son convié, bien évidemment, qui eut la bonne présence de lui demander à cet instant précis si elle était bien la mère de toutes ces créations.

Oui, je travaille seule ici. Je fabrique, je vends ... et occasionnellement je répare. Mais je préfère éviter d'avoir à faire cette dernière tâche. 


Elle releva son regard curieux vers les yeux de Flavien, accompagnée d'une nuance de reproche involontaire qui faisait échos à ses mots. La vaironne retira cependant immédiatement cet éclat de rancune que son instinct avait rappelé, immisçant simplement dans son regard une teinte de fouine courtoise. 

Alors, dites-moi. Qui est donc cette mystérieuse disparue que vous cherchez ?

Flavien Teleri
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[Terminé] L'enfance n’est donnée qu’à quelques-uns EmptyDim 8 Avr - 20:54
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Ophélia lui indiqua de prendre ses aises et de la laisser remettre de l'ordre dans sa boutique et Flavien n'insista pas pour lui prêter main forte, préférant observer la jeune femme que l'animosité avait tout simplement quittée. Elle n'avait plus rien à voir avec celle qui avait manqué de s'en prendre à lui, laissant le soigneur plus que perplexe. La seule mention de Ruby avait chassé les larmes de la femme qui remettait en ordre avec entrain sa boutique, bien qu'elle effectue des gestes lents n'ayant rien à voir avec une quelconque minutie.

Evidemment, il ne mis pas longtemps à remarquer l'angle étrange auquel la Daënare se baissait, ou encore la grimace qui accompagnait ses mouvements lorsqu'elle se redressait de toute sa hauteur pour poser à sa juste place un jouet épargné par la tempête. Sa chute n'avait pas épargné le bas de son dos et cela la gênait visiblement, bien qu'elle garde la tête haute, souffrant en silence.
Flavien était assez rancunier, mais c'était bien là son moindre défaut. Il ne pardonnait pas facilement le mal commis, mais dans le cas d'Ophélia, la situation était un peu plus compliquée que ça. Elle avait manqué de lui faire du mal. Elle avait voulu trancher sa gorge, certes, mais pouvait-il tenir compte des actes manqués ? Elle s'était arrêtée avant de commettre l'irréparable, reprenant le contrôle sur sa peur pour éviter de le blesser. Flavien n'éprouvait aucune satisfaction à voir la jeune femme souffrir.

Désireux de ne pas mettre en péril le semblant de paix qui s'était installé dans la boutique, il ne releva pas la blessure d'Ophélia, la laissant lui conter la relation qu'elle entretenait avec la magie. Une relation bien singulière, qui aida légèrement le nomade à comprendre la réaction si exacerbée de la jeune femme. Si cette dernière avait grandi en entendant son père lui conter des fables Daënares parlant des mages du continent, Flavien ne pouvait qu'imaginer la lumière sous laquelle ils avaient été peints.

Ainsi, Ophélia était aussi fascinée qu'effrayée par la magie. Aucune haine profonde envers les Arts, simplement une angoisse liée à la méconnaissance. La chaleur qui se répandait lors d'un soin n'avait rien de comparable à celle d'une flamme créée par un admirateur de Süns, mais ça la Daënare ne pouvait pas vraiment le savoir. Un malentendu l'avait poussé à chercher à se protéger. Tout comme sa Nokhoi qui avait manqué de lui broyer la main pendant leur première rencontre, alors qu'il avait voulu lui porter secours, il avait poussé Ophélia dans ses derniers retranchements sans le réaliser.

" Tu rigoles ? T'as rien fait de mal ! "
" Pas intentionnellement, non", Répondit-il à son familier, " Mais je n'ai pas à lui en vouloir pour ça. "
" Méfie-toi, Flav ! Tu ne la connais pas. "
" Je sais. Il faut accorder le bénéfice du doute avant de juger, pas vrai ? "
" C'est vraiment le bon moment pour ressortir ces leçons de morale ? Je te rappelle que Zaël n'a pas essayé de te trancher la gorge, lui. "
" Tout de même. "

Il ne reviendrait pas sur sa décision. Maintenant qu'Ophélia s'était expliquée, il lui accordait le bénéfice du doute. Il était bien sûr loin de lui faire confiance, mais il n'accueillerait pas les questions de la Daënare avec animosité et essayerait de chasser de son esprit la petite voix qui lui soufflait qu'elle était clairement instable et qu'il ferait mieux de braver la tempête plutôt que de rester le temps de voir quel autre sujet de conversation la transformait.

" Tu m'énerves parfois, tu sais ça ? ", Grogna sa Tairakh plutôt que d'approuver ses dires, " Bien. Fait comme tu veux. Je me charge de lui en vouloir pour toi. "

Ainsi, la discussion était close et Flavien continua d'observer Ophélia qui terminait son rangement. Elle avait rassemblé les jouets cassés sur le comptoir et s'affairait à réparer les objets cassés, invitant le soigneur à lui demander si elle était la créatrice de ces bijoux d'ingéniosité. Ophélia répondit par l'affirmative, expliquant que la boutique lui appartenait exclusivement et que tout ce qu'il y trouvait était de sa création. Elle appréciait son métier immensément mais rechignait à avoir à réparer ses créations. Furtivement, elle fronça les sourcils en direction de Selmac et Flavien grimaça. L'Aitah effrayé avait complètement détruit l'une de ses créations, nul doute qu'Ophélia aurait bien du mal à réparer le diable dans sa boîte.

La Daënare ne s'attarda heureusement pas sur le méfait de Selmac, changeant le fil de la conversation tout en s'affairant à travailler sur ses créations. Flavien se rapprocha pour l'observer travailler, gardant tout de même une bonne distance entre la Daënare, ses outils pointus, et lui. Pas le moins du monde dérangée par son approche, Ophélia lui demanda quelle était la personne qu'il cherchait.

- Je ne sais pas exactement, Répondit-il honnêtement, Je suis à la recherche de la famille d'une disparue... Une connaissance, une amie, Un amour, peut-être, passa sous silence, Je dois les prévenir de son décès, mais tout ce que j'ai, c'est son nom de famille. Si je m'en souviens, c'est simplement car elle l'avait écrit un journal que j'ai retrouvé.

Avant qu'Ophélia ne puisse lui demander des précisions, il continua, orientant la conversation sur un domaine plus général que personnel.

- La magie est un don des Architectes, mais il n'est pas le seul qu'ils nous ont offert. L'oubli en est un autre. A notre niveau de maîtrise le plus bas, nous gardons le souvenir des moments heureux passés en compagnie des nôtres et oublions les peines vécues. Les rivalités n'ont pas lieu de tenir après la mort, ni de se répercuter sur les descendances car nous perdons toute animosité envers les morts, Expliqua-t-il lentement, Nous les Adeptes oublions simplement ceux qui quittent cette terre. Nous ne sommes pas enchainés par le passé, nous vivons en paix avec nos actions... Je ne me souviens pas d'elle. Tout ce que je sais, c'est qu'elle souhaitait revoir les siens et leur conter ses aventures. Elle les a retranscrits dans un carnet. Je veux le remettre à ceux qui se rappellent d'elle, tout simplement.

Son explication terminée, il tomba dans le silence. Si la magie fascinait tant Ophélia, il attendait de voir sa réaction devant l'oubli. Ce don des Architectes était au centre de bien des disputes entre les My'träns et leurs voisins Daënars. La Magilithe et son extraction irrespectueuse du continent des mages y étaient pour beaucoup dans l'animosité qui opposait les deux peuples, mais elle n'était pas la seule responsable d'une rivalité séculaire.

Ophélia Narcisse
Ophélia Narcisse
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[Terminé] L'enfance n’est donnée qu’à quelques-uns EmptyDim 8 Avr - 21:52
Irys : 1609400
Profession : Cible mouvante pour Régisseur
Pérégrins -2
Les doigts d'Ophélia se baladaient entre les rouages et les vérins qui s'étaient déboîtés de leurs emplacements attitrés. Concentrée sur son oeuvre, elle écoutait d'une oreille presque sourde ce que lui disait Flavien, bien que ce fut-elle qui avait démarré la conversation. Fort heureusement, cette mine distraite n'était qu'une apparence, la créatrice avait consacré assez de temps à son travail pour qu'il devienne un automatisme. Concilier parole et réparation était une tâche aisée pour elle, ses mains bougeaient seules, sans même qu'elle ne se rende compte. Et avant même qu'elle ne le sache, la vaironne avait achevé de réparer la première poupée. Certes, il n'y avait qu'une vis à recaler et un rouage à fixer, mais le fait était là. Elle n'aurait pas autant de mal que ce que la quantité de jouets au sol laissait sous-entendre. 

Le jeune ermite cherchait donc une proche, bonne amie si l'on en croyait ses dires, et Ophélia n'avait aucune raison d'en douter. Mais l'hésitation la prit lorsqu'il mentionna sa mort. Ce fait ne la dérangeait pas, sa relation avec le principe de néant éternel n'était pas vraiment conflictuelle. C'était son visage, le ton dans sa voix, comme si cela ne signifiait rien pour lui. Un instant durant, la tenancière releva les yeux sur ceux de son invité, ne sachant s'il mentait, ou bien s'il avait simplement moins de coeur qu'elle à garder un calme aussi impérial. Lorsqu'elle pensait à son père, l'orpheline manquait de s'étouffer avec ses larmes, en parler était peine perdue. Perdue par ce comportement qu'elle jugeait assez anormal, elle balança finalement son regard sur le coin inférieur gauche de ses paupières, avant de le focaliser à nouveau sur son oeuvre. 

Avant qu'elle ne puisse lui dire qu'elle était désolée pour sa perte, qui ne semblait d'ailleurs pas l'affecter plus que cela, l'itinérant se mit à soliloquer des paroles que la tenancière ne comprenait qu'à moitié. Qui étaient ces Architectes ? Si elle se référait aux ouvrages de son père et à sa mémoire assez défaillante, ils auraient été des géants, des dieux. A quel point est-ce qu'elle pourrait y croire ? Après tout, si la magie a une place dans ce monde, c'est bien que quelque chose l'a engendré. Et quoi que sont ces choses, elles ne vivaient sûrement pas dans le quartier. Et à mesure qu'il continuait son explication, Ophélia relevait doucement la tête, de plus en plus attentive aux mots qu'il adressait, proportionnellement à la noirceur que son regard venait prendre.

L'oubli, hein ...?


Elle grogna ce mot entre ses dents. Si elle semblait fixer le torse de Flavien, c'était bien dans ses pensées qu'elle s'était perdue. Mais elle ne lâchait pas les mots de son interlocuteur. Ces ... Architectes enlevaient donc la peine de leurs enfants. La mort ne les affecte donc pas ? Au moins, l'expression neutre et inchangée sur le visage de l'itinérant se justifiait. Quel genre de présent était-ce donc là ? Cela lui rappelait étrangement la berceuse que l'on donne à l'enfant pour l'empêcher de cauchemarder. Ce traitement était si enfantin. Mais en même temps, Ophélia en était bien envieuse. 

Ne sentez-vous donc pas de peine ?


Son ton était grave, sans être agressif. Elle parlait du fond de la gorge, sa question qu'elle voulait rhétorique avait fait vibrer sa peau claire. Pour peu qu'il ne parle pas, la vaironne aurait pu le considérer comme une marionnette de chair. Pas d'attache au passé, pas d'émotions subsidiaires. De la neutralité pure et parfaite. C'était agaçant, mais en même temps, cela la faisait réfléchir quant aux véritables closes que ce type de présent engendrait. Etait-ce bon pour autant ? Les anesthésiants endorment, soulagent la douleur, mais ils rendent aveugle, une cécité de laquelle on ne peut s'échapper. 

Mais l'instant de réflexion de la tenancière vint s'interrompre, biaisé par une mémoire secondaire qui lui remontait à nouveau à l'esprit. Et si elle avait oublié son père ? Et si elle n'avait pas connu la peine de sa perte ? Et si elle aussi s'était vue administrée cette drogue aux effets sédatifs ? Serait-elle celle qu'elle est aujourd'hui ? La réponse lui semblait limpide comme la glace, non, elle n'aurait pas été la même. Même à l'heure actuelle, le deuil de son géniteur n'avait pas été complété, la vaironne en portait encore les marques psychologiques. Un égoïsme profond ressortit de ces pensées toutes aussi creuses, Ophélia en venait à se demander quelles raisons ces Architectes avaient trouvées pour la priver d'un tel traitement. Elle s'orna d'un sourire sarcastique, courbant le coin de ses lèvres alors qu'elle se remit au travail.

Vos "Architectes" sont bien cruels. Savez-vous pourquoi des gens comme moi n'ont pas eu droit à tel traitement ? 


Aussi rhétorique que pouvait paraître cette dernière interrogation, elle était bel et bien une véritable question. La dame aux poupées ne connaissait rien des dieux, ni de la culture my'tranne. Mais sa voix laissait traduire que le sarcasme de sa risette ne s'accordait pas à ses paroles. Elle releva également un regard curieux, mais les chaînes dans sa tête s'étaient bien vites reliées. Si Flavien connaissait ce privilège, et elle non, c'est qu'il avait quelque chose qui lui manquait à elle.

Est-ce donc votre croyance qui vous accorde cette bénédicité ? Ce doit être agréable ...


Et elle s'en retournait une nouvelle fois à son travail. Cette fois, c'était une boîte à musique dont le capot s'était relevé, découvrant l'intégrité du mécanisme. Le rouleau était encore en place, mais certaines lamelles s'étaient décrochées du support. De sa main droite, la vaironne ouvrit un tiroir qui se trouvait juste devant son flanc. Faisant glisser les divers matériaux qui glissaient sous son index, elle tira finalement plusieurs des composantes désirées, avant de retirer leur socle de la boite. Une par une, elle déposait les fines lames contondantes sur les orifices préposés à accueillir les vis. Ophélia saisit le tournevis de sa boîte, renfonçant les éléments manquants à la place qu'elles n'auraient jamais du quitter. Et pendant qu'elle réinstallait le socle, une pensée vint se mêler à sa voix.

Si j'aime ce travail, c'est parce que je peux créer ma propre vie. Tout ce que vous voyez autour de vous est animé, tout peut bouger plus longtemps et parfois plus vite que vous et moi. Chacune de ces créations, je les considère comme mes propres enfants. Elle arrêta subitement ses travaux. Avez-vous déjà donné une valeur à la vie ? Moi, je me le demande souvent. 


Elle avait un avis tranché sur la question, aussi, toute l'importance de cette question résidait dans sa volonté de voir si Flavien considérait la vie comme une valeur matérielle, comme Ophélia le pensait. Ou alors, y donnait-il un sens plus haut ? La tenancière, elle, se cramponnait à la vision réaliste qu'elle avait toujours eu. La valeur d'une vie est proportionnelle à son utilité. Si chaque jouet qu'elle créait tirait plus de sourires sur les visages des enfants que le cirque avoisinant. Alors, c'est le cirque qui devrait être détruit, qu'importe le nombre d'êtres humains qui le composent. Le surnuméraire n'est pas une notion que la vaironne affectionne particulièrement. 

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