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 :: Les terres d'Irydaë :: My'trä :: Suhury
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 Jusqu'aux sommets des montagnes

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Jusqu'aux sommets des montagnes EmptyDim 10 Sep - 0:02
   Il est de ces endroits du monde qui vous laissent un souvenir plus vif que d’autres, Suhury en faisait partie, avec son climat doux et ses paysages bucoliques. Il a un jour été dit que les artistes étaient les citoyens du monde et que leur port d’attache était le coeur des dames qui se languissaient en soupirant sous les étoiles, si Odard avait dû choisir un lieu où poser son baluchon, un seul endroit où prendre racine et se laisser gagner par l’aisance et l’oisiveté, ça aurait été celui-là. Heureusement ou malheureusement pour lui ses jours d’errance étaient loin d’être terminés, il était jeune, la tête pleine de projets et les jambes fourmillant encore de cette énergie juvénile qui le conduisait encore et encore aux quatres coins de My’trä.

    Les belles nuit d’été et les folles soirées d’hiver étaient propices au chant des cordes, ces mélodies à nulle autre pareil qu’il tirait de son Luth avec une aisance et un plaisir sans cesse renouvelés. Son instrument le ravissait toujours autant, mais parfois c’est en se séparant quelques temps d’un amour vivace que l’on apprécie d’autant de le retrouver. Alors il s’imaginait accompagner le chant des oiseaux du matin au son d’une flûte majestueuse. Et quel atout cela serait! Quelle magie et quel charme il pourrait inventer grâce à un tel instrument. Hélas ses recherches étaient restées jusque là vaines, tous les instruments qu’il avait pu voir avaient soit un défaut, soit souffraient d’une banalité affligeante, d’un terne à vous faire pleurer l’âme. Et un barde tel qu’Odard ne saurait se contenter d’un vulgaire roseau percé à la hâte de quelques trous. Non, il voulait une beauté sauvage, une pièce unique et authentique, un joyau que les Architectes eux-mêmes viendraient à jalouser.

    Une perle, tout simplement. Et pour l’instant ce n’était pas des perles qu’il contemplait, mais des courges.

    Si tout cet étalage de fruits et légumes était bien beau, il l’était peut-être un peu trop. La jeune femme qui tenait l’étal semblait vouloir se fondre dans la masse et à bien y regarder, Odard pouvait percevoir une espèce de scintillement dans l’air, très discret, presque invisible, comme un bourdonnement à la périphérie de sa vision. Quelque chose que seul un illusionniste aurait pu remarquer. Quant aux autres eh bien n’était-ce pas là le but d’une illusion?

    Le barde s’approcha avec un sourire coquin de la jeune et jolie vendeuse de fruits et saisit une pomme avec nonchalance, une belle pomme rouge à la courbure parfaite, parsemée de petits points blancs étincellants. Un fruit magnifique, même sous le voile d’illusion qui l’embellissait le produit restait d’une belle qualité. Les gens allaient et venaient sur ce marché de plein air, et le bruit des conversations mêlé aux rires des enfants et aux cris indignés des ânes que l’on traînait de force offrait à la scène une vie qui lui était propre. Le tout rehaussé d’une myriade d’odeurs toutes plus alléchantes les unes que les autres, et même si certaines auraient largement pu tuer un boeuf elles étaient fort heureusement rares. Certain que ce qui se dirait n’irait pas se perdre dans de mauvaises oreilles, Odard se pencha pour reposer la pomme et sourit toutes ses dents à la vendeuse.

    Bien le bonjour noble dame! Quel bel étal que vous avez là, et quelle journée magnifique! N’est-ce pas merveilleux? De si beaux produits parfaitement mis en valeur par un temps radieux, sans compter cette petite touche de miracle de votre cru! Vraiment gente dame tout y est, l’effet, la présentation, j’ai moi-même failli passer à côté tant votre tour est discret! Mais est-ce là l’étendue de vos talents ma mie? N’avez vous pas d’autres cordes à votre arc?”

    Il pencha de nouveau et se fendit d’une révérence exagérée.

    Mais mon enthousiasme m’emporte et je manque à tous mes devoirs, permettez moi de me présenter. Je suis Odard Coursang, humble conteur et joyeux ménestrel, pour vous servir gente dame! De qui ai-je l’insigne honneur de faire la connaissance?”

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Jusqu'aux sommets des montagnes EmptyDim 10 Sep - 11:03
Le mois de juin était un mois agréable, ensoleillé. L’odeur des fleurs venait titiller l’odorat de tout à chacun tirant des sourires généralement plus larges qu’en saison hivernale. Qui irait se plaindre des rayons de l’étoile venant chauffer les peaux délicates, qui iraient se plaindre de ne sentir à chaque inspiration que la délicate odeur de fleurs diverses et variées. Personne. Et c’était bien de cet insignifiant élément qu’Aure tirait toute son énergie. Les individus étaient toujours en meilleure disposition à cette période de l’année, moins râleurs, moins chipoteurs, aussi ne pouvait-elle que le savourer pleinement. Aujourd’hui était une journée commune, la rouquine avait délaissé très tôt l’habitation de sa mère et de son père pour se rendre au marché, sa jument soigneusement attelée pour tirer la totalité de ses produits. Des produits de saisons évidemment, pas de supercherie sur la qualité, plutôt vis-à-vis de l’aspect, de temps en temps seulement. Les clients voulaient souvent de la perfection, perfection qui n’existait malheureusement pas sans tricherie. Une pomme pouvait avoir une forme différente et ne pas ressembler à sa voisine, il en était d’ailleurs de même avec les autres fruits et légumes. Alors, pour éviter toute explication qui l’épuisait déjà à l’avance, Aure utilisait en toute discrétion un léger voile d’illusion afin de donner une forme et une couleur parfaite à chacun de ses produits, qui même sans cesse rester d’une excellente qualité. Personne ne l’avait jamais suspecté, après tout n’était-elle pas une novice d’Asmigal uniquement. Qui irait supposer que la douce Aurore pouvait être intéressée par l’attrait de l’illusion, du paraître, elle qui semblait pourtant toujours plus conviviale et chaleureuse ? C’est que la jeune femme savait parfaitement s’adapter, à son interlocuteur/interlocutrice.

Une fois arrivée à son lieu de destination, Aure avait lâché un bref soupir, comme souvent. Le plus dur était à venir à présent, décharger, installer l’étalage et pour le coup, sa magie ne l’aiderait nullement pour ça. Elle avait amené sa monture qui tirait elle-même la roulette contenant les aliments. Lentement elle avait tout d’abord installé le stand, pendant que sa jument broutait patiemment l’herbe, habituée visiblement par la manœuvre. Une fois les bases installées, Aure était venue récupérer cagette par cagette les fruits et légumes pour les déposer sur l’aménagement.  Cela faisait les muscles n’avait de cesse de lui répéter sa mère adoptive, et comme-ci celle-ci était là à le lui dire, Aurore avait mollement haussé les épaules. L’installation lui prenait généralement entre trente minutes et une heure, tout dépendait de sa motivation, de son envie de faire vite. Quand la température était agréable, comme aujourd’hui, la rousse installait tout rapidement. La jeune femme n’avait qu’à peine eut le temps de saluer les autres marchands, que déjà les premiers clients pointaient le bout de leur nez, pour son plus grand plaisir évidemment. Parmi eux, il y a les habitués ceux qui viennent toujours à la même heure, prennent toujours la même chose. Les radins, ceux qui veulent tout pour rien, trouvant toujours un petit élément pour faire diminuer le prix, ceux que Aurore aime le moins, ceux qui lui permettent d’user sans le moindre scrupule de sa faible maîtrise de l’illusion. Évidemment il y en d’autre aussi, les curieux, les voyageurs, ceux qui viennent uniquement pour baver devant les produits, les sans-le-sou aussi à qui la jeune offre toujours quelques choses à la fin du marché.

Un sourire sur les lèvres, charmant, accueillant presque chaleureux, c’était bien la première étape pour appâter le client. Aurore n’était pas de celle qui usait de la voix inutilement, ainsi il était presque impensable de l’entendre hurler « venez acheter mes bons légumes, mes bons fruits, venez, venez » non. Elle laissait ça à son collègue plus loin, qui n’avait de cesse de souligner le fait que ses poissons étaient frais et bon, au fond, elle l’espérait pour lui. Rapidement, un brouhaha agréable venait s’installer entre les étalages, le monde affluait, comme souvent à cette période de l’année, les discussions s’intensifiaient dans certain coin, les enfants s’amusaient dans d’autres coins et puis les clients, ceux qui souhaitent acheter, s’amasser autour des stands les plus réputés. Aure n’avait pas réellement à se plaindre, elle avait toujours du monde, même si elle appréciait aussi les petits moments de calmes. C’est une voix masculine, un peu chantante qu’elle ne connaissait pas qui la fit stopper son début de rangement. Instinctivement elle avait relevé le visage sur l’inconnu, fixant de ses deux perles émeraude son interlocuteur. Un barde à ne pas en douter visiblement soit très observateur, soit un adepte de l’illusion, au minimum. Il avait pris une pomme, puis l’avait redéposé, s’adressant à elle, comme on s’adresserait à une personne importante, ou à une amante. Aurore en perdit presque son sourire sous la surprise, le réajustant évidemment immédiatement.


- «  Bonjour monsieur » débuta-t-elle en forçant l’articulation « Je ne suis malheureusement pas certaine de vous suivre… Mon talent s’arrêtant à la qualité de mes produits. » Elle préféra jouer la carte de la naïveté plutôt que celle de l’honnêteté « Je me nomme Aurore, Aurore Seraphon, marchande, cultivatrice et vendeuse de produits frais, chasseuse à ses heures perdues. »

Heure qu’elle souhaiterait bien voir moins perdues que ça, là étant ça préférence. Aurore attrapa une pomme, simple, rouge, agréable à l’œil avec ou sans illusion et le tendit à son interlocuteur, un sourire toujours agréable sur les lèvres.

- « Un cadeau de bienvenue. Vous êtes un voyageur alors ? Qu’est-ce qui vous amène dans la magnifique capitale de Darga ? Hormis son environnement plus qu’agréable, est-ce l’inspiration qui vous manque ou une envie soudaine de s’installer dans un endroit où il fait toujours ou presque bon vivre ? »

Affichant un nouveau sourire, la rouquine l’avait délaissé un instant pour répondre à une cliente, une habituée dont le panier était déjà prêt. Elle le tendit à la brune qui la remercia la paya avant de disparaître rapidement vers d’autre horizon. Aurore serait incapable de dire son prénom ou encore son nom, en revanche elle connaissait son heure de passage sur le bout des doigts, ainsi que la composition fétiche de son panier.

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Jusqu'aux sommets des montagnes EmptyDim 10 Sep - 17:55
   Qu’elle était mignonne la jeune vendeuse, à la fois sympathique et humble tout en étant pas certaine de ce qui était en train de se produire. Ce qui rendait la scène franchement amusante et Odard jubilait des possibilités que semblaient offrir cette rencontre fortuite. Une chasseresse avait-elle dit? Voilà qui tombait à pic!

    Eh bien je suis enchanté belle Aurore! Puis-je vous affirmer que votre minois est à la hauteur de votre ô combien solaire patronyme? Par le grand Griffon je suis charmé!”

    Odard se saisit de la pomme que lui tendait la jeune femme, encore une fois l’occasion était bien trop belle pour ne pas en jouer. Tenant le fruit du bout de ses doigts le barde s’amusa de la réaction d’Aura lorsque les petits points blancs de la pomme virèrent au doré et se mirent à briller faiblement, juste assez pour qu’ils soient les seuls à s’en rendre compte mais suffisamment pour que la jeune femme ne puisse pas passer à côté. Son petit tour accompli il croqua dans la pomme d’un air ravi et en apprécia la qualité, juteuse et sucrée elle était parfaite, et parfaitement bien cultivée.

    Je pense néanmoins gente dame que vos talents ne s’arrêtent pas à la culture de fruits et légumes, je pense que vous allez un tout petit peu au delà de cela, dans la mesure de vos capacités bien sûr! Mais je dois avouer ma mie que si votre tour est rudimentaire il est exécuté avec suffisamment de finesse pour rester discret et s’il ne s’agit pas là d’une marque certaine d’intelligence eh bien je ne sais pas de quoi il s’agit!”

    Savourant un instant ce qui était la première chose qu’il parvenait à se mettre sous la dent ce jour, il ferma les yeux un instant pour profiter de l’atmosphère si particulière du marché et mit la main à sa ceinture où pendait sa bourse, habilement dissimulée sous un voile d’illusion. On est jamais trop prudent. Pour un musicien les affaires ne manquent jamais, il y aura toujours même dans le recoin le plus sombre et le plus isolé du monde une taverne remplie de soulards avides de chansons et prêts à débourser quelques piastres pour s’entendre conter les nouvelles du monde. Il n’était pas à une pièce près, la jeune femme elle, semblait vivre de ses produits et s’il n’avait aucuns scrupules quand il s’agissait d’alléger quelques ivrognes dans des bouibouis malfamés, Odard se serait damné plutôt que d'appauvrir une méritante. Ainsi il lui tendit son juste paiement, toujours avec un grand sourire et le regard qui pétille, mais un petit quelque chose dans la posture qui insinuait qu’il était inutile d’argumenter. Au moment où il lui tendait la pièce le visage frappé sur celle-ci s’élargit d’un large sourire et se fendit d’un clin d’oeil, ce qui ne manqua pas de faire rire le barde.

    J’apprécie votre générosité noble marchande, mais je tiens à ce que vous soyez justement récompensée pour votre travail. De plus si ce que je pense s’avère exact, nous aurons l’occasion si le coeur vous en dit ma mie de faire bien des affaires tous les deux! Mais pour vous répondre oui je voyage ça et là au gré des vents et des saisons, mais mes deux pieds ayant leur volonté propre je les laisse me guider où bon leur semble. Je dois dire que cette fois-ci les deux compères ont eu du flair car j’étais justement en quête de quelqu’un capable de chasser, comme vous pouvez le constater gente dame je n’ai guère d’ardeur au combat et la vue d’un animal sauvage m’effraie au plus haut point. Surtout quand celui-ci a décidé de m’arracher les os pour en sucer la moelle, non, vraiment, je préfère laisser ce genre de besognes à des gens dont la vigueur dépasse la mienne!”

    La mention d’un animal arracheur d’os était tombée aux oreilles d’une femme qui passait par là et qui s’était vivement redressée comme prise d’un hoquet, passablement choquée par ce qu’elle venait d’entendre. Elle avait saisi l’enfant qu’il l’accompagnait par le poignet et s’en était allée à grands pas indignés, que l’on profère de telles ignominies? Ça non! Pourtant le monde grouillait d’horreurs et de créatures avides de bien pire que cela. Odard avait rit de ce spectacle et fait un geste de la main comme s’il chassait une mouche.

    Voyez ma mie, je ne suis pas le seul que cette idée rebute. Mais si d’aventure vous étiez disposée à prendre quelques risques, mesurés n’ayez point d’inquiétude, eh bien je pense que nous aurions là de bien belles aventures en perspective! Rassurez vous belle Aurore nous n’irons point chasser de dragons où encore sonder les océans pour y dénicher les horreurs qui rampent en leurs fonds! Que nenni! Ce que j’ai en tête est bien plus accessible, bien moins dangereux, et vraiment plus amusant, que dis-je? Excitant! Stimulant!”

    Il s’imaginait déjà le genre d’aventure que cela pourrait être, et bien que rebuté à l’idée de traquer des créatures bien plus fortes et résistantes que lui il s’en remettrait aux talents de la jeune femme et aiderait à sa manière. Une petite illusion par ci, un petit voile par là, il est dit que certains maîtres étaient capables de tromper la réalité à un tel point que leurs illusions pouvaient prendre racine en ce monde et acquérir une vie qui leur était propre. Il en était bien loin, mais les quelques petits tours qu’il connaissait étaient d’une aide redoutable au quotidien, et seraient sans aucun doute encore une fois très utiles.

   Qu’en dites-vous? Votre prix sera le mien noble dame! Que l’on ne dise pas qu’Odard Coursang est un pingre, un avaricieux ou encore une vulgaire pince! Ça non ma mie! Vous serez payée rubis sur l’ongle ou bien je serais damné! Parole de barde!”

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Jusqu'aux sommets des montagnes EmptyDim 10 Sep - 20:53
La jeune femme était restée un instant presque sans réaction, l’avisant un peu perdue face à cet individu ô combien extravagant. Si son sourire était au début parfaitement courtois, signe d’une politesse mise en place certainement pour mieux vendre, il se transformait petit à petit vers un étirement de lèvres beaucoup plus amusées par la situation. Comme souvent, la capacité d’adaptation de la rousse n’avait pas tardé à se mettre en place, adoptant petit à petit un comportement proche de celui du barde. Elle en oublia presque les autres clients présents autour, qui pour certains s’amusaient un peu de la voir ainsi soudainement moins sérieuse.

- « Par la grande étoile serait plus juste » dit-elle simplement afin de faire référence à l’étoile qui permettait l’alternance jour/nuit « Je me demande combien de fois par jour vous êtes charmés par une femme. Vil séducteur. » Taquina-t-elle ensuite.

Il n’était pas rare pour un barde de jouer la carte de la manipulation, de savoir mettre en avant ses charmes, de prononcer habilement les bonnes paroles pour flatter l’ego de son interlocuteur ou interlocutrice. Au fond, Aure n’était pas bien différente, c’était même quelques choses qu’elle faisait sans réellement sans rendre compte en usurpant un peu une partie du caractère de ceux qu’elle fréquente sur une durée plus ou moins longue. Ainsi n’était-il pas surprenant de la voir froide comme la mort quand elle était proche de son père adoptif, ou bien simplement complètement stupide quand elle était avec une de ses amies d’enfance. Là était toute la surprise chez la rouquine, c’est qu’il était difficile de savoir qui elle était vraiment, ne le savait-elle certainement même pas elle-même. Satisfaite de la réaction de son client vis-à-vis de la pomme, Aure ne laissa rien paraître quant à sa surprise vis-à-vis du petit scintillement. Confirmant par ce simple geste, sa première hypothèse, elle faisait face à un adepte au moins de Khugatsaa. Un petit pétillement avait trouvé naissance à l’intérieur de ses prunelles, soudainement beaucoup plus intéressées par son interlocuteur. Une montagne de questions menaçait déjà de passer les lèvres de la rousse qui s’appliqua à ravaler le tout pour répondre à une question d’une cliente de passage qui se questionnait sur la provenance des produits. De la région évidemment.

Contre toute attente, le barde avait fait le choix de payer Aure et la pièce qui lui avait tendu c’était s’animer quelques secondes pour lui faire un clin d’œil. Surprise, elle avait néanmoins répondu à la pièce de la même manière, un peu naïvement, un peu spontanément même. Le jeune homme était ensuite parti dans une conversation presque solitaire, exprimant son désir de chasser un monstre qui à la connaissance de la rousse, n’existait pas, du moins, pas ici en tout cas. Si lui s’amusa d’avoir fait fuir une cliente, pour la marchande, l’amusement avait été un peu plus mitigé, après, elle n’était nullement responsable des conversations qui pouvaient animer son étale. Aurore n’avait donc pas pu s’empêcher un roulement des yeux discrets, mais néanmoins présents, trahissant certainement son agacement vis-à-vis des petites natures qui disparaissaient à peine le mot « sang » était-il prononcé. Si la question du prix de cette petite escapade n’avait nullement encore été prononcée, ni même imaginée, Aurore avait pourtant déjà sa réponse à l’esprit. Un énorme et grand oui, mais pour des réponses bien différentes que celle que le barde pourrait supposer. Premièrement, cette rencontre allait lui permettre d’en apprendre plus vis-à-vis de son architecte, deuxièmement, cela allait forcement lui permettre de savoir comment s’améliorer vis-à-vis de son don grandissant dans son cœur et puis évidemment, cela permettrait à la jeune femme de s’évader un peu de son quotidien trop… plan-plan à son goût. Soucieuse de conserver sa maîtrise de la situation et de la négociation, Aure évita tout de même de dévoiler l’engouement que la présence du barde représentait pour elle.

- « J’ignorai que la parole d’un barde avait une quelconque valeur, je voyais plutôt les gens comme vous un peu roublard, beau parleur, séducteur, menteur certainement aussi. » Piqua gentiment la rousse un sourire au coin des lèvres « Mon prix sera la viande de l’animal, si toutefois c’est également elle qui vous intéresse alors en ce cas, la moitié plus un complément qui sera l’équivalent de mon absence sur le marché. En fonction de la dangerosité de la bête, une prime de risque pourra également être mise en place, prime qui pourra être oublié ainsi que davantage, si vous êtes enclin à discuter de notre disons talent naturel commun, si vous voyez ce que je veux dire. » Elle laissa un bref silence et tendit la main « Je suppose que nous tenons notre accord ? Je vous laisse y réfléchir, vous n’avez cas m’attendre proche de la fontaine. Une fois le marché touchant à sa fin, je vous y rejoindrai. »

Parce qu’Aurore ne pouvait pas se permettre de discuter trop longtemps, qu’elle en avait parfaitement conscience. Les clients étaient souvent exigeants et sans patiences. Ainsi, avait-elle mis en avant ses conditions, sans scrupules, ni remords ou hésitation. Évidemment tout n’était pas exact, généralement quand Aure s’absentait sa mère prenait le relai du marché, le barde n’était-il pas dans l’obligation de le savoir. Au fond, toute sa stratégie devait le pousser dans une même direction accepter de partager son savoir et la viande, parce que la chasse pouvait rapporter une petite somme et que si le voyageur n’était pas sur ses sous, Aure, elle, était un véritable écureuil prêt à exploser tant elle ne faisait qu’économiser en dépensant toujours le moins possible. Son attention avait fini par délaisser le barde, conservant cependant cette petite pointe d’inquiétude et si il n’acceptait pas et si il ne se présentait pas au rendez-vous ? Cependant, la rouquine n’avait pas vraiment le temps d’y réfléchir, plus que déjà la file d’attente augmentait.

- «  Madame, que puis-je faire pour vous ? »

~  ♣ ~ ♣  ~♣  ~

Le temps du rangement approchait enfin, nerveuse Aure ne pouvait s’empêcher de jeter quelques œillades en direction de la fontaine un peu plus loin. Difficile à cette distance de visualiser qui que ce soit, la surprise restait donc entière, bien trop à son goût. Un soupir avait fini par se faire entendre, soupir qui la surprit elle-même tant son intensité avait été important. Une cagette sur l’autre, un effort et le tout dans la charrette soigneusement attaché à sa jument. Trois petits paniers avaient été réalisés  au cours de la matinée pour les gens sans le sou, paniers qu’elle avait laissé de côté le temps de terminer de tout ranger. Quelques gouttes de sueur avaient dévalé le haut de son front pour se perdre dans le pli de ses vêtements, certainement provoqué par l’effort. Une fois le rangement terminé, la rousse était venue flatter l’encolure de sa jument, lui murmurant qu’elle n’en avait pas pour très longtemps. Loin de s’en inquiéter, l’animal n’avait qu’à peine relevé la tête, bien trop occupé à se remplir la panse d’herbe et de pomme fraîche que sa propriétaire venait de lui glisser devant le bec. S’éloignant, Aure n’avait pas oublié les paniers qu’elle alla comme elle le faisait souvent offrir à une femme visiblement âgée, un homme dont l’odeur ne laissait que peu de supposition quant à son lieu d’habitation et une jeune fille portant à bout de bras un nourrisson. Malheureusement Aure ne pouvait aider tout le monde et tâchait néanmoins de ne pas donner toutes les semaines à la même personne. Ceci étant fait, elle prit la direction avec cette angoisse plus que naissante, le barde serait-il là ?

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Jusqu'aux sommets des montagnes EmptyLun 11 Sep - 23:30
   Jeune jolie et… Taquine?! La petite boutade laissa un instant le barde bouche bée, heureusement ou malheureusement ce genre de choses étaient bien trop rares pour durer et le naturel que l’on chasse finit toujours par revenir au galop. Amusé Odard sourit devant cette audace qu’il appréciait au plus haut point, trop lassé qu’il était par les cohortes de gens fades et ternes qui arpentaient ce monde sans but apparent.

    Oh je ne saurais vous le dire noble dame, certainement bien des fois, mon émerveillement pour ce monde et ses charmes est sans limites, aussi je ne saurais me contenter que d’un seul éblouissement par jour! Néanmoins ma mie parmi tous ces miracles qui ont jalonné cette journée vous trônez sans conteste sur la plus haute marche! Vraiment belle Aurore cette rencontre me ravit au plus haut point, croyez le.”

    Les joies de l’illusion, la magie d’un esprit jeune et frais, et cette spontanéité un peu naïve mais tellement touchante dans un monde où l’ordinaire côtoie le merveilleux et où personne ne s’étonne d’une pièce qui s’anime et sourit soudainement. C’était l’un des aspect de sa magie qu’il aimait le plus, cette capacité à donner au quotidien une touche de merveilleux et d’extravagance, un léger voile de sublime qui rendait la vie tellement savoureuse. Une morne pièce se mettait à sourire tandis qu’un bol de soupe s’animait d’une houle féroce, les possibilités étaient infinies, limitées seulement par l’imagination du mage. Et à ce jeu là, il était loin d’être en reste.

    Si son monologue avait fait fuir une cliente potentielle, il avait peut-être épargné à Aurore une mégère de la pire espèce, une harpie de la race des prudes. Le genre d’êtres qui cachaient leur peur du monde derrière des manières bien trop millimétrées et une pudeur vis à vis de quasiment tout qui frisait l’embarassant. Au vu de la qualité des produits de la jeune vendeuse, une cliente perdue serait vite remplacée par une autre, mais il réalisa tout de même que ce n’était ni le lieu ni le moment pour ce genre de fantaisies.

    Ah veuillez m’excuser ma mie, je crains que ma langue bien pendue ait encore fait des siennes. Mais pour vous répondre avant de vous laisser à vos ô combien importantes besognes, sachez que la parole d’un barde a pour simple valeur que nous en dépendons totalement, ainsi il est crucial que tout un chacun puisse trouver en son prochain ménestrel un homme de confiance, aux valeurs solides et incorruptibles! Quant à la séduction eh bien, qui se priverait du plaisir de plaire? Certainement pas moi gente dame, ça non! Haha!”

    La proposition de la belle était raisonnable, d’autant que son intérêt pour la viande s’arrêtait à son envie de la consommer, si d’aventure un tel animal était comestible. Le reste était bien plus intéressant. Odard n’était pas avare de sa parole, ni de son expérience, et si quelques conseils avisés pouvaient permettre à une jeune âme de s’aventurer un peu plus avant sur les chemins du vénéré Khugatsaa eh bien il aurait fait là pour son Architecte bien plus que ces dernières années. Il saisit la main qu’elle lui tendait et la secoua vigoureusement.

    Eh bien si ce n’est pas un marché je ne sais pas de quoi il s’agit ma mie! J’accepte vos conditions et je vous assure qu’en dehors du contenu d’un bivouac vous aurez toute la viande que vous voudrez! Et si échanger à propos de notre talent mutuel vous permet de gagner les bonnes grâces de Khugatsaa eh bien sachez ma chère que j’en serai le plus heureux! En attendant je vous salue bien bas et je n’aurai de cesse que de vous attendre à l’endroit désigné, dussé-je y passer le restant de mes jours!”

    Il fit volte face sur une courbette et s’en alla, laissant la jeune marchande à ses clients impatients que la présence du barde volubile perturbait quelque peu. Il en profita pour flâner au gré des venelles formées par des étals aussi divers que variés, et s’acheta au passage un morceau de viande fumée bien grasse qui embaumait délicatement le hêtre et les algues vertes, une spécialité locale qu’il appréciait toujours autant après tant d’années et qu’il ne manquait jamais d’acheter à chacun de ses passages à Darga. Les heures passèrent et avec elles s’en allèrent la plupart des marchands, ainsi Odard s’asseya-t-il sur le rebord de la fontaine où ils étaient supposés se retrouver et s’empara de son précieux Luth afin de passer le temps. Quelques enfants intrigués étaient venus l’écouter religieusement tandis que certains passants y allaient de leur petite pièce, toujours bienvenue. Il était pris dans son jeu, une série d’arpèges fluides et légers qui allaient si bien au climat estival Dargan, tant et si bien qu’il ne vit Aurore arriver que lorsqu’elle se planta devant lui. Il fit taire les cordes du plat de la main et sourit à la jeune chasseresse.

    Ah vous revoilà belle Aurore! J’ai besoin de la corne d’un Yamaany!”

    C’était bref et précis, peu habituel de sa part mais pour une fois il trouvait l’effet saisissant et attendait avec impatience la réaction de la jeune femme.

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Jusqu'aux sommets des montagnes EmptySam 16 Sep - 16:48
Défi de Lizzie:

Aurore avait esquissé un sourire en direction du barde, lui pardonnant volontiers cette maladresse. Difficile pour elle de lui reprocher d’être lui-même, elle qui enviait plus que de raison cette capacité d’être soi-même, vraiment. Son sourire s’était élargi, simplement, et son visage légèrement incliné quand il argumenta pour faire valoir ses excuses, Aure avait levé une main, lui signifiant de cette manière que ça n’avait pas grande importance. Comment cela aurait pu en avoir ? Même si la rouquine s’appliquait à s’adapter à plaire à tout le monde, elle avait conscience que cela ne pouvait pas être toujours le cas. Ainsi ne devait-elle se plaindre de perdre une cliente, sur la multitude qui commençait à s’agglutiner autour de son petit stand. Les murmures des discussions commençaient d’ailleurs à s’intensifier, formant un brouhaha habituel à l’oreille de la marchande. La main des deux compères fut serrée, concluant de cette manière le marché qu’il venait de passer. Aure avait abandonné son sourire, pour un visage plus sérieux, moins inexpressif.

- « L’attente sera bien moins longue que l'arrivée de votre fin de vie » répondit simplement la rousse « A tout à l’heure mon cher Coursang. »

~ ~ ~

Un œil brillant, plus pétillant, fut l’unique de source de réconfort, de bonheur, qui avait pu sur l’instant trahir la satisfaction de la jeune femme en constatant la présence du barde au lieu de rendez-vous. Ses pas s’étaient faits légèrement plus rapides, plus pressants, par craindre de le voir s’envoler juste au moment où elle serait face à lui. Mais non, l’homme n’avait pas disparu, il était bien réel, prêt à travailler avec elle, à lui faire découvrir l’étendue de l’architecte qui fait palpiter le cœur de la jeune femme. Un véritable sourire avait finalement fait son apparition, quand la petite foule qui semblait l’écouter jouer s’était éloignée pour laisser seul les deux jeunes gens. L’homme n’était pas passé par quatre chemins, peut-être aurait-il dû, plus que les lèvres de la rousse s’ouvrirent de quelques millimètres sous la révélation. Un Yamaany, Aure ne connaissait la bête que de nom, savait la bête pas particulièrement intelligente, mais dotée d’une force remarquable. Elle avait haussé les épaules, faisant mine que la bête à chasser ne lui importait que peu, alors qu’en réalité, la jeune femme savait déjà le niveau plus élevé que ses chasses habituelles.

- « Je ne suis pas certaine d’être la chasseuse qu’il vous faut pour ce genre de bête. » Dit-elle plein de bon sens et d’honnêteté « Cependant, si ma personne vous suffit, alors je serais ravie de faire cette activité en votre compagnie. »

Un nouveau sourire, simple et efficace, sans autre soupçon de bienveillance elle était venue s’installer juste à sa droite. Un peu fatiguée, la marchande avait tendu un peu ses jambes, fait quelques mouvements avec ses poignets pour les soulager un peu. Sa longue chevelure rousse cascadait le long de son dos, alors que ses deux prunelles émeraude scrutaient le ciel avec un semblant d’intérêt. Aure avait évidemment jeté un œil vers l’instrument du barde, tout comme elle avait eu la chance d’entendre quelques notes avant que celui-ci ne cesse son activité en la voyant arriver.

- « Et si vous me racontiez d’où vous vient le don de la musique en me raccompagnant jusqu’à ma demeure ? Ma monture et la charrette devraient largement supporter notre poids. »

Doucement, Aure avait fini par se relever consciente que si elle traînait davantage, son père et sa mère risquaient de s’inquiéter. Elle avait dépoussiéré sa tenue, plus par réflexe que par nécessité, puis tendu la main vers ce cher barde pour l’aider à en faire de même. Une fois levée, elle lui offrit un nouveau sourire, expliquant ses intentions et le temps qu’elle prévoyait pour cette mission.

- « Je vous propose de loger à la maison aujourd’hui et demain. Le temps de préparer le nécessaire pour notre voyage. Pour arriver à Nalan, il nous faut bien 2 jours et demi voir trois jours à cheval. Puis deux bonnes journées, si on a de la chance pour trouver dans les montagnes l’animal de vos rêves. Nous sommes parties globalement pour une semaine et quelques jours tout compris. »

Dans la tête d’Aurore, tout était plutôt simple, presque déjà calculé. Le temps de route, le matériel nécessaires, l’alimentation et la boisson à prendre, les armes. Ainsi, essayait-elle d’être le plus simple possible dans ses explications pour ne pas trop troubler son interlocuteur, qui devait à ne pas en douter être aussi un grand voyageur. Une fois la petite explication terminée, Aure avait repris le chemin de sa monture, qui attendait toujours sagement son retour. Elle invita Odard à monter dans la charrette, alors qu’elle venait se hisser sur sa jument, une petite tape bienveillante sur l’encolure.

- « Je n’habite pas très loin d’ici… C’est un petit village un peu méconnu, mais très agréable. » Ajouta-t-elle avant de prendre la route.

Elle faisait confiance à son client pour animer la discussion durant le voyage. Peu bavarde de nature, Aurore avait toujours préféré écouter, plutôt que de communiquer. La jeune femme estimait ne rien avoir à raconter, ne rien avoir de suffisamment exceptionnel pour s’octroyer l’attention de quiconque. Le chemin était calme, sans difficulté quelconque, quelques petites bosses venaient faire sursauter le corps de la cavalière et certainement de son invité installé peu confortablement dans la charrette.

- « Oh. » dit-elle en faisant ralentir le tout alors que le village se dessinait déjà au loin « Je vous serais redevable d’éviter d’ébruiter à quiconque notre talent commun. Du moins, de dévoiler surtout que je puisse avoir le même que vous. »

Elle fut un peu gênée de cette demande un peu particulière. Mais Aurore avait bien conscience que cela lui éviterait bon nombre de soucis et de conflit. L’ignorance de ses proches et de son village était à ses yeux, son unique solution. Sa mère ne supporterait pas l’idée de voir sa vie se détourner d’Amisgal. Elle arrêta enfin le convoi à une distance raisonnable de deux habitations un peu éloignée du village, la sienne, qui ressemblait plus à une petite ferme et celle de sa voisine qui fait de la cuniculiculture. Plusieurs petits clapiers étaient d’ailleurs visibles de là. Pied à terre, Aure s’en était approché d’un, comme elle avait l’habitude de le faire pour saluer toutes les petites familles de lapin.

- « Espèce de petit foutriquet » hurla une voix féminine qui la fit sursauter « Oh c’est toi Aure, excuse-moi, je pensais que c’était encore le petit garnement qui vient faire peur à mes lapins. » Le regard de la bonne femme s’était déposé sur Odard « Oooh, mais tu ne me présentes pas ? »
- « Eh bien… » elle laissa faire le barde quant à sa présentation, consciente qu’il le ferait de toute façon, beaucoup mieux qu’elle.

Pendant ce temps, la rousse, tapoter d’un doigt la tête d’un lapin, câlinant ses poils entre les oreilles. La voisine avait fini par reporter son attention sur elle.

- « Pas de chance pour toi, aucun priapisme pour le moment » devant le visage choqué d’Aurore elle ajouta «Ooooh, ne fais pas ta timide devant le monsieur, je sais bien que ça t’amuses beaucoup de les voir coincés ou encore de compter les heures que dure ce petit problème. J’suis certaine que tu dois comparer ça à un homme ? Ahah, si seulement ça pouvait durer aussi longtemps chez eux aussi. »

La bonne femme était partie dans un rire gras et intense, une petite tape sur sa cuisse pour accentuer le tout. La rousse elle avait lancé un regard dépité vers le barde, presque désolée de cette situation un peu particulière.

- « Je suis désolée, nous avons beaucoup de choses à décharger… » dit-elle en tirant le licol de sa jument pour refaire avancer le tout.

Un peu dépitée Aurore ne savait pas trop quoi rajouter à tout ça, elle avait amené l’animal et la charrette jusqu’à son habitation visiblement vide, détaché sa monture pour la laisser vagabonder à sa guise.

- « Désolée pour ça » souffla Aurore dans un soupir, alors qu’elle se dirigeait déjà pour décharger le tout.

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Jusqu'aux sommets des montagnes EmptyDim 17 Sep - 14:41
    “L’attente sera bien moins longue que l'arrivée de votre fin de vie.”

    C’était le genre de phrases qui pouvaient pousser un scribe à noircir du parchemin jusqu’à ce que ses doigts saignent et que ses yeux ne se ferment d’eux-mêmes, et un barde à composer une ode aux étoiles. Cela voulait-il dire que la marchande serait vite de retour, où bien que leur entreprise était vouée à l’échec et les conduirait à se jeter en courant dans la gueule hurlante d’un monstre des montagnes pour y être accueillis par les bras aimants de la mort? Il avait joué sans réellement y songer en l’attendant et une oreille attentive aurait peut-être pu y déceler la tempête qui faisait rage sous l’épaisse chevelure du ménestrel.

    L’attente fut fort heureusement et comme promis de courte durée, il lui avait annoncé ses intentions sans ambages et avait constaté une pointe d’effarement chez la jeune femme, voire d’inquiétude. Certes il ne s’agissait pas là d’un lièvre dont la seule arme était de courir - parfois, pas toujours - plus vite qu’une flèche. Mais la bête était réputée d’une telle stupidité qu’une approche frontale serait dispensable, inutile de prendre des risques quand la chasse pouvait devenir une vraie source d’amusement, voir d’une leçon de magie.

    À la fois inquiète et intriguée par une telle entreprise, Aurore lui avait fait part de ses réserves mais paraissait assez intéressée pour tenter l’aventure si sa personne lui suffisait. Et comme c’était le cas! Odard n’aurait su que faire d’un vieux chasseur bourru et arrogant fier d’avoir écumé mille fois le monde pour y exterminer tout ce qui avait l’outrecuidance de respirer le même air que lui. La belle était jeune, fraîche et humble et c’était tout ce qui comptait aux yeux du barde.

    Je vous assure ma mie que votre auguste personne est plus que qualifiée pour cette mission! Après tout ne s’agit-il pas là d’une simple chèvre aux proportions... Draconiques? Mhh peut-être que ce n’était pas une image appropriée, disons simplement une grosse chèvre. Stupide, comme toute chèvre qui se respecte se doit de l’être. Je vous assure gente dame qu’hormis quelques bêlements indignés nous ne risquons rien de plus qu’une bouse à nos souliers, et en cela la neige sous sera salvatrice car elle devrait nous arriver aux genoux. Voyez ma mie? Une véritable promenade de santé je vous l’assure!”

    Ils s’en étaient allés sur une main tendue qui lui avait fait bien plus plaisir qu’il ne l’aurait cru, bien des dames en ce bas monde pensaient la galanterie acquise et à sens unique. Lui qui faisait grand cas des manières et de l’étiquette en était très touché et accepta sa main avec ravissement. Elle s’enquit ensuite de son don, lui ne voyait pas cela comme ça, c’était des années et des années de travail acharné, d’une motivation sans relâche et d’un plaisir toujours renouvelé qui avaient fait de sa vie et du monde un véritable terrain de jeu. Mais que la chose paraisse innée et si naturelle qu’il ne pouvait s’agir que d’un don était finalement la récompense de tout ce travail, qu’importe si certains ne voyaient pas ce que cela lui avait demandé, ils s’émerveillaient et lui avec. Et par dessus tout lui étaient offerts le trajet et l’hospitalité, vraiment on avait beaucoup à apprendre des jeunes gens qui surpassaient souvent leurs aînés sur bien des points!

    Eh bien ma mie vous êtes bien bonne, je ne sais que vous dire à part vous noyer sous d’interminables remerciements qui je pense auraient raison de vous. Vous avez dores et déjà mon éternelle gratitude et vous serez dûment récompensée sachez le! Et cette fois-ci si ma parole d’homme est plus rassurante pour vous que ma parole de barde eh bien vous l’avez gente dame!”

    Avant de monter à l’arrière de la charrette Odard était allé présenter ses respects à la jument d’Aurore, on sous estime bien trop souvent l’importance des chevaux et du respect qui leur est dû ainsi que de l’importance que ces derniers accordent à la politesse. Aucun homme sain d’esprit ne songerait à offenser un cheval, qui plus est aucun voyageur. Il lui flatta l’encolure et s’assura à son attitude qu’elle tolérait sa présence avant de prendre place.

    C’est une bien belle monture que vous avez là ma mie, comment se nomme-t-elle? Et pour répondre à votre question concernant ma musique eh bien je ne saurais vraiment vous dire quand cela a commencé, certainement depuis toujours! J’ai sifflé avant de savoir parler et fait mes premiers pas une flûte à la main. Je ne sais pas s’il s’agit là d’un don très chère mais c’est quelque chose que je chérirai pour le restant de mes jours, dussé-je trépasser encorné par une chèvre furieuse et gargantuesque!”

    C’était un petit trajet calme propice à la conversation, simplement rythmé par le bruit des sabots de la jument sur le sol rocailleux, rythme qu’Odard appréciait et rejouait du bout de ses doigts sur le rebord de la charrette. Il faisait beau et cette rencontre fortuite se révélait pleine de promesses, mais la jeune femme restait à l’écoute sans pour autant se dévoiler mais en étant pas non plus avare de son sourire, elle écoutait simplement le récit d’un étranger qui semblait l’intriguer autant par sa foi que ses manières et son histoire.

    Ayez l’assurance de mon silence en ce qui concerne notre intérêt commun ma mie, mais j’en conclus que vous êtes bien loin des attentes que les vôtres ont placé en vous n’est-ce pas? Parfois ces petits secrets cultivés pour nul autre que soi-même sont ceux qui vous apportent le plus, je vous comprends ma mie et vous assure que je ne piperai mot de tout cela à quiconque! Je peux même m’avérer être une oreille attentive à ce sujet très chère, n’hésitez surtout pas!”

    La carriole s’était arrêtée un peu à l’écart du village où ils avaient été accueillis par une femme haute en couleurs, comme certains paysans le sont parfois. Il était question de priapisme et de lapins coincés et bien que l’idée puisse prêter à sourire le barde n’avait pas renchéri de peur que la bonne dame en profite pour taquiner Aurore et la tourner en ridicule. S’il aimait rire des gens il savait que ces derniers appréciaient rarement la chose, et galanterie et respect obligent il avait gardé ses facéties pour lui d’autant que la fermière semblait penser qu’ils formaient là un jeune et joli couple. Odard perçut une certaine gêne dans l’attitude de la rousse et pensa à embraera immédiatement sur une tempête de mots qui donneraient envie à l’éleveuse de lapins de courir se réfugier au silence, chez elle, seule et pour toujours. Mais un certain respect s’impose lorsque l’on rencontre des gens, qui plus est lorsqu’ils vous invitent en leur demeure, alors le barde se mordit la langue et se contenta de répondre poliment sans brusquer personne ou presque.

    Ah bien le bonjour ma bonne dame! Je suis Odard Coursang, un simple ménestrel de passage et bien que l’idée vous semble réjouissante je n’ai nullement l’intention de voler la vertu de la belle Aurore. J’ai recours à ses services de manière strictement professionnelle, rien de plus très chère, rien de moins non plus. Néanmoins nous avons beaucoup à faire, alors je vous souhaite une bonne continuation et une foultitude de lapins coincés pour égayer votre quotidien. Ainsi naturellement qu’une bonne journée, que dis-je? Une excellente journée!”

    Il s’inclina sans cesser de sourire et tira son chapeau de manière volontairement théâtrale avant de prendre la suite d’Aurore.

    Très chère.”

    On pouvait percevoir la gêne et le soulagement chez la jeune femme qui s’empressa de remettre sa jument en marche, allant même jusqu’à s’excuser de ce contretemps embarrassant tandis que la charrette s’engageait sur le chemin de ce qui semblait être sa demeure. Une petite ferme sympathique où il faisait bon vivre à quelques encablures de Darga, l’endroit était bien trouvé et ne souffrait pas de l'effervescence de la ville. Bien que le barde en soit venu à apprécier cette agitation qui faisait son gagne pain il comprenait totalement la paix et la quiétude que ces gens pouvaient trouver en ces lieux calmes et verdoyants. Il sauta joyeusement à terre et s’empressa d’aller tendre sa main à la jeune femme afin qu’elle descende de son siège et se perdit dans la contemplation des alentours.

    Eh bien voilà donc le repaire de la belle Aurore, c’est charmant, pittoresque et bucolique ma mie! Je comprends la paix qui saisit les gens de labeur dans des endroits tels que celui-ci, je suis ravi très chère, vraiment! Et n’ayez crainte au sujet de ce petit contretemps, à vrai dire c’est presque moi qui devrais m’excuser tant ma présence à attisé les élans taquins de votre bonne voisine. Je suis sûr qu’elle ne pensait pas à mal mais j’ai partagé votre malaise sachez le ma mie, sachez le.”

    Il ne restait plus qu’à décharger la carriole puis se reposer et organiser leur expédition. Pas très manuel Odard craint un instant que le bois des cagette ne lui abîme ses si précieuses mains et faillit renverser la première caisse tant il la tenait du bout des doigts, alors il saisit la seconde à pleines mains et tenta d’aider autant qu’il le pouvait et surtout sans broncher, même s’il devait avoir l’air ridicule tout rouge et essoufflé qu’il était on ne pourrait lui reprocher son oisiveté cette fois-ci. Une fois le tout déchargé et correctement rangé il prit un moment pour s’asseoir et retrouver son souffle, il restait quelques détails à régler et c’était à son sens le meilleur moyen de passer le temps en attendant le souper qui au vu des lieux promettait d’être à la fois simple et réconfortant.

    Et dire que ces caisses étaient pour la plupart vides, je n’ose imaginer le labeur que vous avez dû endurer lorsqu’elles étaient pleines ma mie. Voilà une belle leçon d’humilité, on peut cancaner à loisir sur les femmes et leur vigueur mais vous autres gens de fermes en avez bien plus que certains à bien des égards, et moi le premier! Je me suis habitué il y a belle lurette au poids de mon instrument mais c’est bien la seule chose qui me passe dans les mains, toutefois j’ai eu un avant-goût de votre vie et j’en suis ravi ma mie, cette journée est décidément pleine de surprises!”

    Aurore avait parlé de voyager jusqu’à Nalan, tandis que lui avait pensé à Essarim et aux contreforts des Tsagaan Oi qui lui semblaient être à égale distance de Darga. Ce n’était qu’un petit détail puisqu’on pouvait trouver ces chèvres monstrueuses sur à peu près tous les massifs montagneux de My’trä, aussi avaient-ils le choix.

    Ainsi donc votre fascination pour Khugatsaa vous pousse à vister ce bon vieux et inhospitalier Khurmag? Je doute que le voyage soit aussi ravissant que les contrées de Suhury mais je comprends votre enthousiasme ma mie. Heureusement la mauvaise saison est encore loin sans quoi nous aurions dû nous diriger vers Zolios et ses majestueux Tsagaan Oi afin de ne pas finir morts congelés et oubliés de tous dans une crevasse profonde et blanche. Je suis partisan de la simplicité ma mie aussi le choix est-il vôtre, après tout je ne suis que le commanditaire, je laisse les affaires des professionnels à ces derniers et je me contenterai d’animer le voyage et de vous jouer une ritournelle au coin du feu! Qu’en dites vous très chère?”

    Se rappelant soudain d’un détail d’importance Odard porta la main à sa bourse désormais libérée de son voile d’illusion et en sortit une belle pièce, de quoi se nourrir une bonne semaine ou bien de faire face aux imprévus et réparations qu’exige habituellement une exploitation comme celle-ci.

    Ah et j’oubliais, pour votre hospitalité gente dame, je ne saurais profiter gracieusement de vos largesses, ça non! Et inutile de refuser ma mie sans quoi vous la trouverez un jour dissimulée quelque part dans votre humble demeure, et si cela pourrait être un bon souvenir il se peut que vous en ayez besoin entre temps et qu’une chasse au trésor soit la dernière chose que vous souhaitiez!” Avec ma gratitude et mes remerciements!”

    Il lui plaça la pièce au creux de la main et referma doucement ses doigts par dessus, surtout sans brusquerie, uniquement avec bienveillance et sans vouloir avoir l’air d’étaler son argent. Sa vie de musicien ambulant était assez confortable et les tavernes dans lesquelles il s’arrêtait lui offraient généralement le gîte et le couvert, aussi il avait suffisamment d’or pour vivre décemment et entretenir son instrument et ses vêtement à un bon niveau de conservation. C’était simplement normal pour lui de se montrer redevable envers ceux qui se montraient généreux. Un sourire, c’était tout ce qui faisait défaut à la plupart des gens, lui n’en manquait pas et s’en servait parfois plus que de raison, mais au moins personne ne pouvait se méprendre sur ses intentions.

    Mais dites moi très chère, avez vous une idée de la manière dont nous nous y prendrons pour débusquer et occire notre draco-chèvre?”

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Jusqu'aux sommets des montagnes EmptyDim 17 Sep - 19:22
Une promenade de santé, l’idée pouvait prêter à sourire ou même à rire, difficile de le prendre au sérieux tant le descriptif qu’il faisait tout en certifiant cela était plutôt laborieux. Quoi qu’il en soit Aure n’avait pas dit grand-chose de plus, haussant simplement les épaules sans perdre pour autant l’étirement de ses lèvres. Fatiguée ? La jeune femme n’en montrait rien, se contentant de conserver cette dynamique qu’elle copiait plus au barde qu’à elle-même. Odard avait voulu la remercier, du moins avait-il commencé à avancer cette envie de la noyer sur une panoplie de belle parole. Aure avait presque  aussitôt secoué la main de droite à gauche, comme pour balayer l’air environnant, mais surtout le faire taire. Elle n’était pas fanatique des compliments à rallonge, des compliments tout court d’ailleurs. L’unique chose qu’il allait parvenir à faire été de la gêner et de lui offrir une délicieuse migraine qui lui ferait sans aucun doute vibrer trop intensément le cerveau l’obligeant à dormir pour se soulager.

Devant la jument, la rouquine avait eu quelques difficultés à conserver son impassibilité, tant le comportement du barde venait de la surprendre. Très peu d’individus accordaient de la valeur à la pensée de l’animal, du moins très peu d’individus autres que les adorateurs d’Orshiin. Ses lèvres avaient de nouveau affiché un léger sourire alors qu’elle mettait déjà un pied à l’étirer pour se hisser délicatement et sans aucune difficulté sur sa monture. L’homme n’avait pas tardé à faire, Aurore l’aidant au besoin. Pour un non-habitué, les mouvements de l’animal pouvaient surprendre, tout comme le petit tapotement de fessier qui pouvait laisser quelques traces bleuâtres.


- «  Rassurez-vous, je n’ai pas dans l’idée de voir mon client se faire écorcher par une chèvre géante. Vous aurez encore bon nombre d’années devant vous pour contenter vos admirateurs et admiratrices. » Plaisanta la jeune femme « La jument se nomme Alezane, comme la couleur. Petite, je n’étais pas très inspirée pour les prénoms, c’est toujours le cas d’ailleurs. »

Conversation, courte, réponse dans la même idée, au moins avec lui elle répondait, chose qui n’était pas donnée à tout le monde. La route fut calme, peut-être un peu trop au goût d’Aure qui ressentait ses derniers temps cette petite palpitation silencieuse l’animer, ce petit souffle d’envie de découvrir autre chose que cette routine lassante. Ne s’imaginait-elle pas vivre toute sa vie ainsi, à vendre des fruits et des légumes, chasser de temps en temps. Ne s’imaginait elle-même pas reprendre la demeure de la famille, pour y élever un jour ses propres enfants, l’idée lui donnait déjà la nausée rien que d’y penser. La marchande écoutait attentivement le barde, opinant avec simplicité, émettant des petits « mh,mh » de compréhension ou au contraire d’incompréhension en fonction de la conversation. Ses épaules s’étaient de nouveau levées pour retomber mollement quand il aborda le fait qu’elle ne répondait pas au critère de la volonté de ses proches. Au contraire, elle y répondait trop bien même, beaucoup trop bien. Seul son père adoptif n’était pas dupe, comment l’aurait-il pu alors qu’elle lui avait dit la vérité d’une manière si simple et complexe à la fois.

Pied à terre, devant la demeure de la vieille voisine à l’esprit visiblement tordu, Aure avait ressenti cette gêne empourprer ses joues, un peu trop à son goût. Elle avait fini par abandonner tout type de dialogue, non pas sans un petit sourire en coin vis-à-vis de la présentation d’Odard. Ce barde était un étrange personnage, très étrange même. Tirant délicatement la jument jusqu’à la laisser par la suite vagabonder autour de la ferme familiale elle était venue décharger les restants de cagettes. Son regard c’était voulu amusée par le comportement du barde qui semblait vouloir faire bonne impression en l’aidant à ranger alors que son corps semblait lui supplier de faire le contraire. Évidemment, la rousse ne s’était pas moquée, n’avait même pas osé un petit sourire en coin. Trouvant bien au contraire plutôt ça admirable pour un invité que d’aider. La maison semblait silencieuse, aussi était-il facilement déductible qu’elle était vide, que ni le père adoptif ni la mère adoptive n’étaient présents. Assis sur les premières marches de la maison, Odard semblait vouloir discuter, Aurore n’avait pas tardé à le rejoindre étendant ses jambes un peu douloureuses.  


- «  Tout est toujours une question d’habitude et d’entretien surtout. La ferme n’est pas un métier évident, enfin comme le fait de voyager, il n’y pas métier facile, juste des facilités en fonction de notre éducation, de notre modelage pour une vie. » Elle sourit, un peu perdu dans ses pensées «  Cela n’a pas d’importance, si vous préférez l’autre chemin et les autres villes, cela me convient tout autant, c’est vous le commanditaire, c’est à vous que revient la décision. Prenez le temps d’y réfléchir, nous ne sommes dans aucune obligation de nous décidés sur l’instant. »

Le regard de la jeune femme avait fini par se perdre sur sa jument, qui semblait animée par son quart d’heure de folie, celle galopait à toute hâte autour de l’habitation, parcourant les quelques terrains possédés par la famille, hennissait avec force, sautait à droite puis à gauche, avant de finalement se stopper pour faire ce qu’elle savait faire le mieux. Manger. Un bref secouage de tête plus loin, Aurore eut un léger sursauter au contact de la main d’Odard contre la sienne, quand elle ouvrit les doigts elle y découvrir l’argent, un peu vexé par ce geste qui pourtant se voulait agréable.

- «  Si vous tentez de la dissimuler quelque part, croyez moi que je vais m’appliquer à vous la faire avaler sans la moindre illusion. » Ronchonna la rouquine en lui rendant « Une invitation est une invitation et vous serez particulièrement impoli de la refuser en me payant. Croyez-moi, vous dépenserez suffisamment dans la préparation du départ et pour la chasse. Inutile de perdre davantage d’argent inutilement. »

Un petit soupir était venu ponctuer l’agacement passager de l’hôtesse des lieux, agacement qu’elle perdit aussi rapidement qu’il avait pu arriver. Elle avait réfléchi rapidement à la dernière question. Difficile de mettre en place un plan à l’avancement, au fond, Aure était une adepte de la spontanéité.  Un haussement d’épaules plus loin, elle avait finalement répondu :

- «  Eh bien, je suppose que pour attraper notre Draco-chèvre, il va falloir miser sur son déficit d’intelligence. Peut-être user un peu d’illusion, ou simplement de nourriture pour l’attirer… Idéalement il faudrait l’assommer pour le tuer en douceur, ou le laisser se tuer tout seul. Il faut déjà observer son environnement, on se décidera par la suite. Une idée particulièrement en tête ? »

À peine avait-elle terminé sa phrase que déjà deux cheveux et par conséquent, deux cavaliers débarquèrent. Une jolie brune avec aucune ressemblance vis-à-vis d’Aurore, et un homme aux cheveux court et particulièrement foncé. Les deux semblaient très amoureux, en une harmonie agréablement à l’œil. L’homme était descendu le premier aidant sa partenaire à faire de même, chacun avait retiré le licol à sa monture, pour la laisser ensuite vagabonder.

- « Tiens, notre fille est déjà rentrée. »
- « En charmante compagnie en plus » ajouta l’homme à la voix particulièrement grave

Aurore s’était levée doucement, sans se précipiter, jugeant qu’il était plus raisonnable de faire les présentations.

- «  Père, mère, je vous présente Odard Coursang. Un barde. Un client pour une chasse, je lui ai proposé de l’héberger le temps de préparer le voyage. » Elle pivota vers Odard «  Monsieur Coursang je vous présente Éléanore Seraphon et monsieur Alderic Seraphon, mes parents. »

Un petit inclinement de tête des deux, un large sourire et déjà, la mère s’éclipsait en prétextant le fait qu’elle allait préparer un repas digne de cette merveilleuse nouvelle. Alderic était resté un moment devant le duo, tendant une main tout aussi ravi de l’invitation que sa fille avait pu proposer au désormais invité.

- « Tu as bien fait Aure, je suis enchanté, monsieur. Qui dit Barde, dit certainement beaucoup d’histoire à raconter, vous êtes ici chez vous. »

La complicité père fille était aussi évidente que la différence physique. Aucun point commun, aucune ressemblance ni dans les traits du visage, ni dans la corpulence, aucun des deux parents ne ressemblaient à la rouquine et ça même un enfant de trois ans était en mesure de le remarquer. En revanche, le regard qu'ils s'offraient ne laisser aucun doute à la complicité et les sentiments intenses de parents à enfants qui les unissaient.  

- «  Alors ma fille, le marché rien à signaler de particulier ? »
- « Rien du tout. »
- « Bien, je vais rejoindre ta mère. Messire, préparez-vous mentalement, ma femme ne sait pas cuisiner en petite quantité. Oh. Aure… Toi aussi tu devrais te préparer, ta mère… pense qu’il faut te mettre en situation de stress intense pour te faire d’améliorer vis-à-vis de tes capacités de la maîtrise de l’air. »

Elle n’avait pas répondu, et l’homme avait compris immédiatement qu’il était inutile de répéter ou de reformuler. Il avait rapidement rejoint son épouse, laissant la rouquine et son invité sur le pas de la porte. L’ambiance n’avait pourtant pas changé, légèrement courtoise, aimante, tout respirait bon vivre ici, absolument tout et Aurore ne faisait rien pour le changer. Après tout qui était-elle pour tourmenter l’esprit de ceux qui l’avait adopté et élevé. Elle conserva un sourire respirant la fausseté, conserva également des petits yeux brillants et c’est son masque qui avait finalement pris le relais.

- «  Je vais vous montrer votre chambre, suivez-moi. Que vous puissiez déposer vos affaires. »

Elle était rentrée dans l’habitation en s’assurant qu’il la suivait bien, un sourire toujours imprégné sur ses lèvres. Aurore avait laissé le temps à Odard d’observer la pièce à vivre plutôt grande, une cuisine banale au fond de la pièce, une petite porte menant certainement à un cellier ou reposait bons nombres d’aliments, une immense table en bois trônait au milieu de la pièce. Tapis et fauteuil confortable remplissaient le reste, le tout dans une décoration très rustique, simple, mais particulièrement agréable et chaleureuse. Le crépitement du feu ne faisait que souligner l’impression de calme qui régnait ici. Une fois les quelques marches menant à l’étage montés, elle s’arrêtant dans le petit couloir qui offrait 6 portes différentes.

- « La première, à droite, la chambre de mes parents, la seconde à droite, ma chambre, celle en face, la vôtre du coup, notre chambre d’ami. » Elle fit une pose s’assurant qu’il retenait tout « La première là, c’est un bureau, il y a de quoi peindre ou se reposer simplement. La vue est agréable de là. » Elle lui sourit « Pour terminer, tout au fond, c’est la salle d’eau. Vous ouvre la fenêtre il y a un mécanisme pour puiser l’eau de pluie et une cheminé pour faire chauffer. »

Elle se dirigea vers la porte de la chambre d’ami, donc au fond à gauche, et l’ouvrit afin de lui faire découvrir sa suite. Enfin, suite, il ne fallait pas trop s’emballer non plus. Un lit en bois de plutôt bonne qualité, un matelas de plume, un oreille de bourrés de plume, une couverture en laine. Deux petites tables de chevet, une étagère avec des bibelots, un tapis en peau tout doux et puis une armoire vide simple et efficace.

- « Tadam ! » se sentit obligé d’agrémenter Aurore, dans un plus large sourire encore « Je vous laisse vous installer ? Comme vous l’a dit mon père, surtout faites comme chez vous… » elle fit une pause parlant plus bas « Oh, ne soyez pas surpris. Mère est une adepte d’Amisgal, comme vous l’aurez certainement compris, père de Möchlog, avec du coup le caractère très terre à terre qui va avec. »

Elle lui offrit un nouveau sourire.

- « Si vous voulez déjà vous laver, je vais aller faire chauffer de l’eau chaude, vous n’aurez plus cas vous glisser dedans… Et puis si vous avez besoin, je suis dans la chambre en face. Enfin bref. Vous faites comme chez vous. »

Aussitôt dit, aussitôt fait, Aurore avait disparu derrière la porte de la salle d’eau afin d’y puiser de l’eau et de la faire chauffer en prévision des bains de l’habitation et en priorité de celui de l’invitée. En bas la discussion des parents semblait plutôt paisible des éclats de rire, des taquineries, puis une conversation un peu plus sérieuse sur le fait qu’Éléanore devrait cesser d’imposer à la rousse son envie de la voir devenir une grande adepte d’Amisgal. Le tout se soldant comme souvent en échec.

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Jusqu'aux sommets des montagnes EmptyMer 20 Sep - 7:30
   Alezane. Curieusement ou non c’était le premier mot qui lui était venu à l’esprit en observant la jument, outre sa couleur bien sûr c’était ce qui lui était naturellement venu. Alors était-ce une coïncidence ou bien la rencontre de deux grands esprits? Il n’aurait su le dire et laissait au destin et à l’avenir le soin de répondre à cette question. Il avait toutefois noté la satisfaction de la jeune femme, rare étaient les gens qui s’intéressaient aux animaux en dehors de l’usage qu’ils en avaient, une petite marque d’affection ne coûte rien et peut dans certains cas faire toute la différence. Les animaux eux n’oublient pas ces choses là.

    Eh bien je dois dire qu’il s’agit là d’un nom parfaitement approprié ma mie! Et gageons que pour le profane Alezane sonnera bien plus comme un prénom que comme une couleur n’est-ce pas? Et je suis ravi d’apprendre que ma sécurité a de la valeur à vos yeux, mes admiratrices vont en seront certainement reconnaissantes ma mie! Et je ne manquerai pas de vous citer soyez-en certaine!”

    Cette petite discussion qui servait de répit après le déchargement était riche de sens, en effet rien n’était facile et l’on avait beau s’imaginer l’herbe plus verte dans le pré voisin elle n’en restait pas moins de l’herbe, parfois truffée de chiendent, parfois moins, mais toujours égale à elle-même. Il se souvenait avoir souffert lors de son apprentissage de la musique, les soirées et nuits passées à jouer jusqu’à ce que ses doigts ne saignent et que la voix ne s’éraille alors qu’il s’imaginait les autres bien au chaud et confortables pour découvrir plus tard que le boucher voisin s’était sectionné deux doigts d’un coup de feuille imprécis et que le boulanger avait craqué sous la charge de nuits trop courtes et avait manqué de perdre l’esprit. À chacun son fardeau comme dit, celui des autres n’est pas forcément plus enviable, mais pas moins admirable.

    Oh certes le voyage a ses inconvénients gente dame, mais je ne peux m’empêcher de nourrir un profond respect pour les petites gens qui s’échinent et se brisent les reins à récolter ce que la terre nourricière a à nous offrir. Je vois dans les métiers de la terre un profond altruisme et une humilité qui me touchent particulièrement ma mie. En cela vous avez mon respect ainsi que ma sympathie sachez le! Pour ce qui est de notre destination je laisse à la chasseresse aguerrie que vous êtes le soin de trancher, mais je parierai que vous mourrez d’envie de visiter Khurmag, n’est-ce pas très chère?”

    La scène qui suivit était comique de par la jument qui s’amusait dans son pré d’une part, et la mine sévère d’Aurore d’une autre part. Odard réalisa un instant que son geste frôlait l’injure, on ne peut se permettre de monayer l’hospitalité qui nous est offerte de bon coeur, surtout en ces campagnes où les gens sont plus riches de leurs âmes que de leurs possessions. Et en cela ils possédaient tellement plus que certains seigneurs croulant sous des monceaux d’or. L’humain est une pépite en soi, l’exploiter est vil et inacceptable quand on peut se satisfaire de la chaleur de son rayonnement. Si la promesse sous forme de menace d’Aurore avait de quoi faire sourire le barde prit pour une fois la chose au sérieux et remisa sa pièce au fond de sa bourse, légèrement penaud et encore une fois dépassé par ses excès de manières.

    Je vous prie de m’excuser noble dame, mon obséquiosité me joue parfois des tours et vous m’en voyez confus, vraiment. Sachez que j’accepte votre généreuse invitation et que je l’apprécie à sa juste valeur, je constate que nous partageons tous deux des principes moraux élevés et je suis ravi que nous puissions nous comprendre sur ce point. Pour ce qui est de l’argent je veillerai à ce que vous soyez dûment récompensée pour vos efforts, peu importe ce que cela coûtera!”

    Chasser la bestiole promettait d’être amusant, d’autant que si ces bêtes étaient aussi stupide que ce l’on en disait, jouer un peu avec ne devrait pas être trop risqué. Odard s’imaginait déjà déployer des trésors d’illusion pour rendre le yamaany chèvre et l’envoyer au trépas sans que lui ni sa comparse ne prennent le moindre risque. Enfin c’était la théorie, et dans la pratique rien ne se passait jamais comme on l’avait prévu, alors il passa en revue le matériel dont ils pourraient avoir besoin en essayant de s’assurer qu’ils ne manqueraient de rien. Tous connaissaient l’histoire de ce chasseur qui parvenu à court de flèches avait tenté d’abattre un aimshgiin avec des pierres, ou au moins de se défendre, le résultat avait été funeste et c’est son jeune disciple également un fervent adepte de Khugatsaa qui avait pu s’enfuir à temps et raconter cette histoire en se disant que s’il y avait là une leçon à retenir elle serait bien plus utile à la postérité qu’à feu son maître. La mémoire de cet homme avait transcendé la mort et l’oubli de par le ridicule qu’elle représentait. Depuis tous les chasseurs emportaient par superstition le contenu d’un carquois supplémentaire et si personne ne pouvait affirmer que la méthode était efficace puisque tous ceux qui mourraient disparaissaient entièrement de la mémoire du monde, la tradition vivait d’elle-même et était bien ancrée dans les esprits.

    On sous estime souvent l’importance d’une bonne préparation, en voyageur endurci Odard tentait toujours de parer à l’éventualité, pour oublier une fois sur deux la moitié de ce qu’il avait imaginé, alors il comptait sans oser l’avouer sur l’organisation de la jeune femme. Après tout quand les hommes ne pensaient qu’à boire et s’amuser les femmes n’étaient elles pas expertes en la matière? Aurore avait l’air d’avoir la tête sur les épaules et il lui faisait totalement confiance. Dans leur intérêt il valait mieux qu’il ne se trompe pas.

    Pour tout vous dire très chère j’avais dans l’idée quelque chose de tout à fait semblable à ce que vous venez d’énoncer. La bête étant notoirement stupide il serait judicieux de l'attirer dans un piège subtil et sournois de notre cru! Qu’en dites-vous ma mie? Pour ce qui est de la nourriture n’ayez point d’inquiétude, je peux aisément façonner quelque chose qui mettra l’eau à la gueule de cette draco-proto-mocho-chèvre! Quant au matériel eh bien je pense ma mie que des tenues chaudes ainsi que des cordes ne seront pas de trop! J’ai pour ma part en ma possession une excellente bouteille de Brandy qui saura nous réchauffer et nous aider à faire face aux rigueurs de la haute montagne! Pour ce qui est du reste je m’en remets à votre sagacité ma mie, puisse-t-elle nous servir mieux que la mienne!”

    L’oreille d’un musicien lui fait rarement défaut, et quelle catastrophe lorsque cela se produit, le cliquetis assourdi qu’ils entendaient au loin depuis quelques instants s’avéra être les fers de deux cavaliers, à savoir les parents de la jeune femme. Repensant à la réaction de la voisine Odard s’empourpra légèrement, ne souhaitant pas passer pour ce qu’il n’était pas ni embarrasser Aurore qui aurait à coup sûr maille à férir pendant longtemps avec cette dernière. Le couple rayonnant semblait s’aimer comme aux premiers jours et offrait un spectacle rare qui faisait chaud au coeur, surtout quand l’on sait combien d’être incompatibles s’assemblent pour se déchirer l’un l’autre au fil des ans. Le barde était resté en retrait comme il se devait le temps que les présentations soient faites, s’il savait abuser de son verbiage il savait aussi rester à sa place lorsque cela seyait et attendit calmement le moment de faire son entrée.

    La ressemblance entre Aurore et ses parents était… Absolument pas frappante, et tellement étrangère qu’il était presque impossible qu’ils soient ses géniteurs. Mais après tout bien des gens de par le monde adoptaient les enfants de ceux qui ne pouvaient ou ne voulaient pas s’en occuper, ces gens là étaient de la race des seigneurs, de ces héros qui offraient la vie à la seule force de leur humilité. Le barde garda ses observations pour lui et s’inclina bien bas devant les maîtres des lieux. La mère d’Aurore était pétillante et espiègle tandis que son père faisait trembler les alentours de sa voix rocailleuse mais irradiait dans le même temps une certaine sympathie.

    Bien le bonjour nobles seigneurs, je suis Odard Coursang, conteur et ménestrel! Je m’excuse de faire ainsi irruption dans votre ô combien charmante demeure, votre fille et moi sommes en affaire pour un gibier rare et cette dernière a eu l’extraordinaire bonté de m’offrir l’hospitalité! Je tâcherai de ne pas être trop encombrant et si ce sont les histoires du monde qui vous intéressent eh bien je suis prêt à vous en abreuver jusqu’à l’aube!”

    Les deux semblaient avoir des choses à se dire alors le barde ferma quelque peu ses esgourdes ne voulant pas donner l’impression d’écouter aux portes jusqu’à ce qu’Alderic ne s’adresse à lui de sa grosse voix. Il était question d'appétit et en cela le barde n’était pas en reste, loin s’en fallait.

    Ah messire n’ayez point d’inquiétude à ce sujet, je saurai faire honneur à votre tablée et si je vous disais que mon appétit est à la hauteur de ma volubilité je serais encore en deçà de la vérité! Imaginez donc messire, imaginez donc!”

    L’homme s’était éclipsé en riant et les avait laissés seuls sur le pas de la porte. Aurore l’avait ensuite invité à entrer et avait marqué une pause pour lui laisser le temps d’observer les lieux. La première chose dont s’imprégnait le barde en découvrant un nouvel endroit était son parfum, aucune maison ne possède la même odeur et l’on pouvait avoir un aperçu de l’ambiance qui régnait chez quelqu’un à la senteur que dégageait sa maison. La maison d’Aurore sentait bon le feu de bois et les herbes fraîches, il y faisait bon vivre et il s’en dégageait une atmosphère conviviale et chaleureuse. Le barde soupira d’aise, c’était le genre d’endroit qu’il aimait, où l’on se sentait bien et en sécurité. Il ne lui en fallait pas plus.

    Les marches de bois plein donnaient sur un étage formé d’un long couloir, et comme il aimait les couloirs! Chaque porte invitait au mystère et il s’imaginait toujours ce qui se cachait derrière celles-ci. Il suivait Aurore avec le même sourire que cette dernière et l’écoutait religieusement, tâchant de tout retenir afin de ne pas faire irruption au mauvais endroit. Sa chambre, simple, était parfaite. Pour avoir dormi à même la rocaille de terrains accidentés où au sommet d’arbres lorsqu’il était clair que la faune locale n’attendait qu’un instant d'inattention pour passer à table, il se sentait comme un prince devant une chambre munie ne serait-ce que d’un matelas.

    Odard rit franchement de la présentation de la jeune femme et ne put s’empêcher de taper du pied et de tendre les mains en les agitant pour accompagner le geste à la parole. C’était un plaisir d’être si bien accueilli et pour une fois les mots lui en manquaient, il posa simplement son Luth sur son lit et se prépara à faire un brin de toilette, il ne serait pas de bon ton de dîner sale surtout quand la soirée promettait d’être longue et riche en rebondissements!

    Ma mie c’est une bien charmante demeure que vous avez là, chaude et chaleureuse! Vous formez une belle famille et sachez que j’en suis heureux pour vous! Et n’ayez crainte j’ai assez parcouru My’trä pour ne plus m’étonner de rien, et pour moi nous somme tous les mêmes après tout. J’en suis venu avec le temps à apprécier tout un chacun pour ce qu’il est ma mie, qu’importent l’Architecte que nous vénérons n’est-ce pas? Pour ce qui est de me laver j’aimerais en effet me débarbouiller avant le repas de ce soir, il serait fort malséant de ma part d’empuantir mes hôtes n’est-ce pas très chère? Je vous salue encore bien bas pour la générosité dont vous faites preuve vous et vos parents, c’est admirable ma mie, admirable!”

    Une fois Aurore partie Odard entreprit de déposer ses maigres possessions dans sa chambre, son Luth ayant une place de choix comme toujours. Il prit également le temps d’une petite facétie qui ne serait découverte que bien plus tard, sur une étagère entre deux bibelots représentant l’un un cerf et l’autre une petite pyramide, Odard posa une pièce bien à plat et la recouvrit de deux voiles d’illusion. Le premier bien ancré et durable donnait un grand sourire au visage frappé dans le métal, le second la dissimula à la vue de tous. Le premier sort durerait quelques mois tandis que le second se dissiperait au bout de quelques semaines. Après tout qui pourrait lui reprocher d’avoir si maladroitement perdu une pièce? Personne, ça non!

    Son bain prêt le barde se dévêtit et s’y glissa avec délectation en souriant toujours de cette petite blague qui à coup sûr rendrait Aurore folle mais lui rappellerait également leur rencontre sur le marché et leur don commun. Il se perdit en pensées et tandis que la conversation au rez de chaussée dérivait sur les attentes d’Eléanore concernant sa fille, il sentit son esprit s’aventurer sur des chemins plus oniriques et abstraits et s’endormit sans même s’en rendre compte. D’aise, de confort peut-être, voilà longtemps qu’il n’avait pas connu la chaleur d’un foyer et l’effet relaxant que cela pouvait avoir. Si quelqu’un était entré dans la pièce il aurait pu voir que le barde souriait légèrement dans son sommeil, mais personne n’aurait osé faire ça, personne.

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Jusqu'aux sommets des montagnes EmptyMer 20 Sep - 16:26
- «  Ne me citez pas, ça sera d’autant plus simple. » Avait simplement soufflé la rouquine, toujours dans un sourire caractéristique.

Aurore n’était pas de ces femmes à la recherche constante de considération, de remerciement ou même d’attention. Elle était plus attirée par la discrétion et l’invisibilité que quoi que ce soit d’autre. C’était d’ailleurs ce qui devait faire la plus grande différence entre le barde et sa petite personne, lui qui aimait attirer les regards, se faire remarquer, et elle, la femme à la chevelure flamboyante et terriblement passe-partout. La rencontre avait de quoi surprendre, du moins, c’était bien dans la différence que l’on pouvait avoir la plus intéressante des conversations. Le déchargement du restant de marchandise avait été plutôt rapide, même si Odard n’était pas le plus musclé des deux, il avait au moins fait l’effort d’essayer. Aurore voyait cela comme un bon présage, celui d’avoir affaire à une bonne personne et non à un type à l’esprit un peu tordu.  La discussion s’était ensuite poursuivie, jusqu’au moment fatidique où Odard s’était ravisé vis-à-vis de son envie de payer. Pour le choix de la destination, Aurore avait simplement opiné, si elle pouvait allier l’utile à l’agréable, elle n’allait certainement pas se priver, d’autant plus lorsqu’il s’agissait de son affection pour l’illusion. La stratégie évoquée par le barde était plutôt identique à la sienne, ainsi ne jugea-t-elle pas intéressant de rajouter quoi que ce soit. Aurore était de celle qui parlait que quand cela lui semblait judicieux et justifié. La conversation avait ainsi duré plusieurs minutes, quelques instants de presque monologue pour celui qui découvrait le lieu et d’écoute attentive pour celle qui y vivait depuis sa naissance, ou presque. Les parents et propriétaires de la charmante demeure avaient fini par faire leur apparition, coupant le moment d’échange et de partage, sans pour autant frustrer qui que ce soit. Après quelques banalités échangées, Aurore avait pris l’initiative de faire visiter le lieu à Odard et de lui montrer la chambre où il allait s’installer le temps de la préparation du voyage.

Le rire du jeune homme était presque contagieux, Aurore avait eu un sourire plus sincère, plus amusée que précédemment, alors qu’elle l’écoutait une nouvelle fois faire preuve d’une montagne de compliment. La rousse avait haussé elle épaule, peu sensible à ce genre de choses.  


- « Les compliments sont agréables uniquement en petites quantités » piqua-t-elle avec douceur pour lui signifier que ce n’était pas quelque chose qu’elle appréciait « Sinon, je suis d’accord avec votre point de vue. Notre croyance ne devrait pas être prise en compte dans le jugement, nous sommes tous du même peuple après tout. Malheureusement, cela ne fonctionne pas encore ainsi, peut-être que l’avenir sera différent, qui sait. » Elle afficha un nouveau sourire, plus pensif cette fois « Je vais préparer tout ça, vous n’aurez cas descendre une fois terminé. »

Ceci étant dit, Aurore était allée naturellement dans la salle de bain histoire de préparer le nécessaire. Serviette bien douce, eau tout juste chauffée donc à une température plus qu’agréable, petit courant d’air avant de partir pour être certainement que le lieu ne soit pas trop embrumé quand il viendrait dans la salle d’eau. Les pas d’Aurore avaient ensuite descendu les quelques marches menant à l’étage inférieur ou elle y retrouva ses parents en pleine discussion.

- «  Qu’est-ce que vous allez chasser alors ? » questionna son père
- « Un draco-chèvre… Enfin, je veux dire un  Yamaany »
- « Tu t’en sens capable ? » s’enquit immédiatement sa mère
-       « Il n’y a pas de raison. » confirma la rousse dans un demi-sourire.

Rapidement, la conversation avait touché à sa fin. Le père étant aussi bavard que sa fille, et la fille n’ayant visiblement pas envie d’étaler le peu d’information qu’elle avait obtenue sur le barde. Éléanore quant à elle avait visiblement choisi une autre occupation pour sa fille chérie. Ainsi l’emmena-t-elle en extérieur, attrapa un arc, encocha une flèche tout en reculant pour maintenir une certaine distance entre sa fille et elle, sous le regard perplexe d’un époux et d’une progéniture dépitée.

- «  Tu n’as pas le choix que de faire stopper la flèche avec ton don. Sinon tu vas finir avec des blessures. Avec ça, si tu ne finis pas par t’améliorer, c’est qu’il y a un véritable problème. »

Aurore avait haussé un sourcil, lâchant un soupir résigné, connaissait-elle trop bien sa mère pour éviter toute contre argumentation. De toute façon, elle n’avait pas vraiment eu le temps d’y réfléchir, puisqu’à l’explication terminée que la flèche fusa en sa direction. Par réflexe, Aurore s’était jetée sur le côté, instinct de survie oblige. La brune n’avait pas tardé à rentrer dans une colère, obligeant verbalement sa fille à ne plus bouger et à utiliser le don d’Amisgal. Encore une idée lumineuse. Si les premières flèches avaient été parées avec succès par quelques bourrasques de vent, la dernière eut une conséquence plus dramatique. La cadence s’accentuant, Aure n’était pas parvenue à maîtriser l’air environnant, ainsi la flèche était venue effleurer sa joue droite, offrant derrière elle un filament rougeâtre qui s’échappait déjà de l’entaille. Aucun couinement, aucun gémissement de la part de la rouquine qui porte sa main à la plaie, un soupir franchissant la barrière de ses lèvres.

- « Je pense que c’est bon pour aujourd’hui », déclara la jeune femme en s’éloignant pour remonter les marches menant à l’étage.
- « Élé, tu exagères tout de même… »
- « J’ai été gentille, je n’ai pas visé les points vitaux. »

Derrière la jeune, le couple entrait dans une énième querelle toujours sur le même sujet. Comme souvent le père abandonnerait, trop fatigué par la détermination sans faille de son épouse à faire d’Aurore une véritable adepte d’un architecte en lequel elle ne croyait que par obligation. Une fois dans le petit couloir de l’étage, Aure l’avait traversé d’une ligne droite, entrant sans réellement réfléchir dans la salle d’eau dans le but de nettoyer la petite plaie rougeâtre. Ses joues n’avaient pas tardé à s’empourprer de rouge, alors que déjà, sa voix venait de se faire entendre pour se confondre en excuse dans un bafouillement et une hésitation plus que sincère.

- « Nom d’un mogoï farci … Je…pardon.. Je.. Désolée… j’ai pas.. Enfin.. Heu… Désolée. »

Une main sur les yeux, les doigts légèrement écartés, les yeux clos juste en dessous, Aurore avait fini par faire dos à la baignoire ou reposé visiblement encore à moitié assoupi le barde. Comment avait-elle pu l’oublier ? L’autre main devant elle, la jeune femme cherchait à trouver la sortie, abandonnant l’idée même d’humidifier l’entaille de sa joue. Manquant de chuter sur un vêtement sur le sol, la rouquine s’emmêla de nouveau dans de profondes excuses.

- « Hurmf… Je… Je… Enfin…. Je… » la main enfin sur la poignée de porte elle ajouta dans un soupir « J’attends dehors… On va .. heu… bientôt manger. Je crois. »

La porte ouverte puis refermée, Aurore s’était adossée à celle-ci. Un long soupir s’échappa de ses lèvres, alors qu’elle passait ses doigts dans sa longue chevelure. Comment avait-elle pu être aussi sotte ? Comment est-ce que… peu importe. Elle avait fini par prendre une longue et profonde inspiration, cherchant à se détendre. Un petit raclement de gorge plus loin, elle avait un peu poussée sur sa voix pour être certaine de se faire entendre à travers la porte.

- « Monsieur Coursang, je vous attends en bas. Prenez votre temps. Vous prendrez bien un verre d’un bon vin en apéritif n’est-ce pas ? Je vais préparer ça. »

Un nouveau soupir, puis Aurore était descendu, le regard curieux de sa mère ne tardant pas à s’abattre sur la silhouette féminine. Cependant, ni l’un ni l’autre ne brisa le silence. La mère culpabilisant un peu sous les reproches de son époux, et Aurore encore bien trop gênée pour exprimer quoi que ce soit. La jeune femme s’appliqua à mettre la table, pendant que la plus âgée terminait de préparer de quoi alimenter tout ce beau petit monde.

- « Tu aurais dû passer un peu d’eau sur la plaie. » Grommela néanmoins le père de la rousse « Ce n’est pas très beau à voir. Remonte dans la salle d’eau, ou directement au puits si tu veux. » Il soupira « Aure… Arrête de courir partout. Pose-toi un peu. »
- « Non ça va. » La réponse avait été expéditive et surtout sans négociation possible.

Hors de question pour la chasseuse de revivre une situation délicate. Une par jour était amplement suffisante, du moins à ses yeux.  La table enfin prête, elle avait rempli les verres, d’un vin blanc pétillant, réalisé par une personne de la région, dans un autre village tout aussi perdu que celui-ci. La jeune femme s’était finalement laissé glisser dans un fauteuil, laissant un nouveau et énième soupir s’enfuir de ses fines lèvres.

- «  Vous pensez en avoir pour longtemps pour cette chasse ? »
- « Je ne sais pas trop » admit la rousse « Nous pensions passer par Khurmag. »
- « Pourquoi par-là ? » s’enquit immédiatement sa mère.
- « Pourquoi pas » intervint fermement le père sans pour une fois, laisser d’ouverture à sa femme « Vous pensez aller directement à Nalan ? Ou plutôt plus vers le sud ? »
- « Honnêtement, je ne sais pas trop. Pour loger, je pensais que cela serait plus simple de descendre jusqu’à Forëal, voir même Reoni, acheter ce qu’il nous manque éventuellement, puis pour le reste, on se débrouillera. »

La mère n’avait rien dit, le père simplement opiné. Le duo un peu particulier avait encore le temps de se mettre d’accord. Au fond, Odard n’avait pas tort, l’idée pour Aurore de découvrir la région avait fini par faire son chemin, peut-être envisagerait-elle un peu de traîner sur le retour ou sur l’aller ? Un fin sourire avait fini par se dessiner de nouveau sur ses lèvres, alors que des bruits de pas indiquaient que l’invité n’allait pas tarder à rejoindre la petite famille. Aure, s’était simplement levé pour l’accueillir en bas des marches, lui tendant son verre de vin, comme elle lui avait promis. Plus aucune trace de gêne sur son visage préférait-elle sincèrement oublier le petit incident passé.

- «  Nous étions en train de parler de Khurmag. Pour notre chasse. »
- « Vous êtes un grand chasseur monsieur Coursang ? Pourquoi cet animal en particulier ? Vous ne préfériez pas chasser votre créature ailleurs, monsieur Coursang ? »

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Jusqu'aux sommets des montagnes EmptyDim 24 Sep - 21:48
   Après une discussion sur la sur-abondance de compliments qui déroutait souvent ces dames, le barde était allé faire ses ablutions en se demandant si un jour sa verve ne finirait pas par lui jouer des tours. Oh ç’avait souvent été le cas et il avait pris plus de coups que de raison, mais ce genre de contusions ne marquaient pas tant l’esprit que celles du coeur. Même si Aurore semblait l’apprécier et s’amuser de la situation il se serait senti bien mal de l’éloigner en usant et abusant de son miel habituel. Alors il se dit que pour une fois il allait tenter de mettre un peu d’eau dans son vin, tenter seulement. Ne dit-on pas sur le naturel que l’on chasse revient au galop? Essayez de faire taire un barde pour voir, essayez seulement!

    Les propos de la jeune femme résonnaient cruellement dans son esprit car les gens se réduisaient toujours à un Architecte et refusaient souvent de voir au-delà, ce qui était dommage humainement l’était d’autant plus pour une nation aussi évoluée que la leur, l’assaillant Daënar n’aurait aucun mal à triompher si les My’träns se divisaient d’eux-mêmes sans qu’on les y pousse. C’était triste mais c’était comme ça, ce genre de moeurs étaient étaient bien ancrées et faisaient partie intégrante de la culture My’träne, il serait plus facile d’apprendre les échecs à un chien que d’enseigner la tolérance au peuple Elu.

    Je doute que l’avenir soit bien différent en la matière, les siècles ne nous ont pas appris à voir au delà de nos préjugés ma mie, je vois difficilement comment les choses pourraient changer mais vous avez raison sur ce point très chère, l’espoir ne coûte rien! Et n’est-ce pas la seule chose qu’il nous restera au final?”

    Bien que la haute saison n’ait pas encore réellement débuté il faisait déjà relativement chaud et Odard rêvait de se défaire de la poussière et de la crasse accumulées durant cette journée, le déchargement de la charrette ayant été le coup de grâce pour ses petits bras frêles. Un bain tombait à merveille et le requinquerait pour la soirée. Quelques instants plus tard il s’endormait paisiblement dans l’eau chaude et bienfaitrice, laissant ses pensées divaguer à leur gré vers des contrées inexplorées et probablement inexistantes.

*  *  *  *  *

    Par les Saints Rognons!”

    Il s’éveilla en sursaut à l’instant où un yamaany furieux et ricanant se jetait sur lui armé d’une trompette et s’en servait pour lui écraser le crâne dans un craquement humide et écoeurant, pour découvrir une Aurore rouge pivoine comme l’estafilade qu’elle portait au visage, figée comme une statue et visiblement bien embarrassée. Il réalisa au moment où la jeune femme portait la main à ses yeux qu’il était nu comme au premier jour et que l’eau claire ne dissimulait rien de sa personne. La jeune femme se confondit en excuses et manqua de chuter et de s’ouvrir une nouvelle fois le visage, ce qui aurait été dommage car il était fort joli.

    Encore sous le choc de son propre meurtre et à moitié endormi le barde changea légèrement de position pour ne pas trop s’exposer et incommoder son hôte, qui quitta la pièce en bégayant des excuses confuses, aussi morte de honte qu’on pouvait l’imaginer. Odard lui n’était pas réellement pudique et même s’il n’avait pas le corps d’un Dieu il n’était pas particulièrement gêné par celui-ci, mais il était réellement embarrassé pour elle et se demandait comment il avait pu s’endormir aussi facilement, s’offrant ainsi à la vue de tous.

    Elle lui avait proposé un verre avec un ton un peu fébrile qui servait à dissimuler son embarras et le barde se dit qu’aussi polie et avenant qu’elle était elle craindrait surtout de croiser son regard, au moins le temps que ses émotions retombent. Aussi prit-il son temps et se rhabilla sans hâte, tâchant d’être présentable pour le repas qui s’annoncait.

    Volontiers très chère, je ne saurais refuser une telle offre! J’arrive tout de suite!”

    Khurmag. C’est le premier mot qu’il parvint à distinguer dans la conversation qui se tenait au salon tandis qu’il descendait les marches afin de les rejoindre. Un bref souvenir à la fois de son passé et de leur voyage à venir, par chance ils entamaient cette expédition au bon moment, les plaines auraient été impraticables et bien trop dangereuses en hiver, sans parler des montagnes. Mais il se dit qu’il devait bien ça à Aurore et qu’un petit séjour chez lui ne lui ferait finalement pas de mal.

    Elle s’était levée pour l’accueillir et lui tendre gentiment son verre de vin, il lui sourit et la regarda comme pour lui dire que rien ne s’était produit et que cela n’avait pas d’importance. Avant d’accepter son verre et de passer sa main devant le visage de la jeune femme, dissimulant ainsi la coupure qui ornait celui-ci. Ce n’était pas de la guérison loin de là, juste un petit tour visuel qui aiderait à mettre la rousse à l’aise.

    Je vous remercie ma mie! Que serait donc un repas sans apéritif? Je vous le demande! Et voilà que votre minois retrouve son éclat, il serait dommage que vous trembliez devant votre propre reflet très chère, cela n'empêchera pas les démangeaisons mais je me doute que vous avez connu bien pire que ça n’est-ce pas?”

    Comme il se doutait il était question de leur chasse et des terres désolées de Khurmag, il pouvait percevoir une pointe d’inquiétude dans les paroles d’Eléanore ce qui était finalement bien naturel. Un inconnu débarquait et projettait d’entraîner sa fille dans un des pires recoins du monde, il y avait de quoi se faire du mourron, aussi se voulut-il rassurant.

    Je ne suis pas plus chasseur que cuniculiculteur noble dame, bien au contraire, je ne suis qu’un humble musicien itinérant qui cherche à se fabriquer un nouvel instrument voyez-vous? J’ai parcouru My’trä bien des fois très chère et de toutes les créatures dont j’ai connaissance le yamaany est celle possédant des cornes qui sera la moins dangereuse à traquer! Je n’imagine pas une seule seconde entraîner votre fille dans une chasse au mogoï ni au dragon, d’autant que leurs ramures seraient bien trop lourdes et volumineuses pour les deux pauvres hères que nous sommes.”

    Il se tut un instant pour savourer son vin, un petit blanc léger et frais délicatement relevé de fines bulles avec un léger goût de vieillissement juste comme il fallait. Il le fit doucement tourner dans son verre et apprécia les effluves fruitées qui s’en dégageaient.

    Mais pourquoi ne pas acheter une corne directement monsieur Coursang?”

    Il s’était déjà lui-même posé la question plusieurs fois et se la posait encore d’ailleurs quelques instants avant de rencontrer Aurore. Est-ce que cela en valait la peine? Il en était arrivé à la conclusion qu’une vie sans risques était une mort en soi, aussi quand la jeune femme lui avait annoncé son métier il n’avait pas hésité une seule seconde.

    Eh bien autant par amour de l’aventure que pour le prestige de détenir un objet unique ma mie, une véritable pièce de collection dont je connaîtrai l’histoire dans les moindres détails. Le prix du sang, de la sueur et des larmes gente dame. L’exceptionnel don d’une vie au service de l’art, ainsi cette incroyable histoire viendra étoffer le répertoire de celles que je conte ça et là de par le monde. Mais n’ayez crainte noble dame, je prendrai grand soin de votre fille, dussé-je y laisser des plumes! Que dis-je? Des cornes!”

    Il s’esclaffa et rit de sa propre blague, probablement aidé par les vapeurs du vin qui embrumaient le peu de sang qu’il possédait.

    Et quel genre d’instrument souhaitez vous fabriquer monsieur?”

    Une flûte messire! C’est pour cela que nous aurons besoin d’un individu encore jeune dont les cornes ne se seront pas encore développées complètement, une pièce longue et fine que je pourrai confier à un artisan de talent afin qu’il la magnifie et en tire une oeuvre d’art à nul autre pareil messire, un joyau qui rendra chaque jour honneur au sacrifice de cet animal!”

    Le barde se tourna vers Aurore afin de ne pas monopoliser l’attention et la conversation. Pas qu’il n’aimait pas être au centre des choses, c’était son métier après tout, mais parfois il était bon de se concentrer sur autrui, surtout quand la personne en question méritait d’être mise en valeur.

    Et vous ma mie, quelles sont donc les raisons qui vous ont poussée à chasser? Quelles folles anecdotes rapportez vous de vos traques? Je suis un homme d’histoires voyez-vous gente dame et il me tarde de vous entendre narrer vos exploits!”

    Avant de réaliser que sa demande pouvait être gênante et d’ajouter.

    Si tel est votre souhait naturellement, loin de moi l’idée de vous embarrasser ma mie, ça non!”

    De la cuisine toute proche s'échappaient des effluves succulentes, s’il n’était pas encore capable de mettre un nom sur ces odeurs elles lui mettaient tout de même l’eau à la bouche et l’apéritif que
l’on venait de lui resservir contribuait lui aussi à lui donner une faim de chèvre, enfin de loup!

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Jusqu'aux sommets des montagnes EmptyLun 25 Sep - 17:25
Un sourire entendu, l’unique réponse qu’Aurore avait offert à cet être si particulier. Difficile pour elle d’agir autrement dans cette atmosphère agréable, quoiqu’un peu complexe tout de même. Le verre en main, il avait été difficile pour la rousse de cacher sa surprise vis-à-vis du comportement son interlocuteur, lui qui venait de faire disparaître la marque sur sa joue avec une facilité déconcertante. La question qu’il avait posée n’avait pas obtenu de réponse autre que ce simple sourire, peu sincère. Elle avait connu pire, c’était un fait, un fait qui ne la concernait qu’elle. Aurore avait fini par s’éloigner du barde, alors que le père et la mère semblaient avoir décidé d’en apprendre plus que leur invité.

- « Un adepte de khugastaa, j’aurai dû m’en douter. » Débuta-t-il en lançant un regard vers sa fille « Pour un barde, cela doit être pratique, j’entends.»

Odard, avait fini par monopoliser l’attention, chose absolument pas dérangeante pour la rouquine, qui préférait largement être invisible que sur le devant de la scène. Abandonnant son poste d’observation, en constatant que tout se déroulait plutôt bien, Aure s’était installé contre le rebord de la fenêtre, portant le délicieux alcool à ses lèvres, avalant plusieurs gorgées, avant de froncer les sourcils. Au fond, il n’avait pas se justifier vis-à-vis de leur collaboration, elle était chasseuse, lui client, elle n’avait fait que répondre à une demande afin d’obtenir une rémunération et quelle rémunération. Ses lèvres s’étaient donc entrouvertes, prête à réagir afin de remettre les choses dans le bon ordre, mais déjà une autre question avait émergé. Pourquoi ne pas acheter ? Un soupir de lassitude avait réussi à s’échapper, alors qu’elle secouait doucement la tête de droite à gauche. La mage fut presque déçu de la réponse sérieuse apportée par leur invité, aurait-elle préféré le revoir remettre la curiosité un peu trop débordante de sa mère remise à sa place. Le rire du barde était quelque peu communicatif, ou bien était-ce déjà le subtil mélange d’alcool qui faisait son effet sur l’esprit fatigué de la rousse. Difficile à dire. La conversation continuait son bout de chemin, la jeune femme n’y prenant absolument pas parti. Un œil extérieur aurait pu croire qu’elle se désintéressait simplement du sujet, mais en observant attentivement, il était évident qu’elle écoutait, mémoriser les éléments annoncés. Pour le reste, elle estimait que ses deux parents adoptifs étaient suffisamment curieux pour trois.

Son ventre avait fini par lui rappeler qu’il était l’heure de manger et elle ne put s’empêcher d’aller jeter un œil ou non du côté de la préparation, soulevant le couvercle de la marmite encore sur le feu. Un nuage de vapeur s’en était échappé et avec elle, une délicieuse odeur de lapin et d’un mélange de légumes aussi colorés qu’appétissants. Une valeur sure, sauf pour un individu ne mangeant pas de viande, évidemment. La rousse avait légèrement sursauté en comprenant qu’on venait de lui adresser la parole, le couvercle avait donc retrouvé rapidement son point d’origine alors qu’elle pivotait légèrement pour faire face aux différentes personnes, les yeux rivés sur elle.

- « Eh bien.. »
- « Aure ne chasse pas depuis très longtemps » coupa sa mère « Elle a appris toute seule, c’est qu’elle est têtue. Elle avait déjà une suite à reprendre, mais elle a eu ce besoin de nouveauté. La jeunesse, vous devez savoir ce que c’est. »

Là n’était pas réellement la vérité et le regard que la rouquine lança vers son père ne pouvait que le confirmer. Aurore se pinça doucement les lèvres, alors qu’elle retirait la marmite du feu pour venir la disposer au centre de la table, invitant ainsi les différentes personnes à changer de sujet, mais aussi à commencer le repas.

- « Ce n’est pas tout à fait exact » ajouta finalement l’homme en question « Depuis petite Aure à un penchant particulier pour l’observation et le pistage, elle a toujours passé un temps fou à observer son environnement et à le reproduire. »

Toujours silencieuse, la mage terminait de servir les assiettes de chacun, avant de prendre place face à son client. Drôle d’idée que de le ramener aussi ne cessait-elle de se répéter en se faisant la promesse que cela n’arriverait plus.

- « J’ai eu un très bon professeur. » Affirma finalement la jeune femme sous la surprise générale –peut-être moins pour le père- « Je ne suis pas réellement faite pour rester inactive et vu que je rencontrai pas mal de difficulté à maîtriser la magie de mon architecte, j’ai cru bon de me spécialiser vers autre chose… Au cas où que… »

- « Tout enfant fini par maîtriser son don Aure. Tu deviendras une grande adepte d’Amisgal tu verras, il faut faire preuve de patience. »

Un demi-sourire, faiblard, presque éteint et un hochement de tête, voilà tout ce qu’elle s’autorisa à répondre. Comme souvent Aure ne rentrait pas dans le conflit, préférant mettre de côté ses désirs pour mieux combler ceux de ses proches. Elle leva son verre et reprit la parole :

- « En parlant des architectes, je pense qu’on peut remercier nos créateurs pour ce délicieux repas. Bon appétit à vous. »

La réponse ne c’était pas réellement fait attendre, pas vraiment tout du moins. Le repas avait presque aussi débuté, dans un silence aussi grand que le plat était agréable sous la langue. Après une nouvelle et dernière gorgée de son verre de vin, Aurore avait de nouveau fait entendre le son de sa voix.

- « Mais, pour vous répondre, je pense que chaque partie de chasse est un agréable souvenir. Il y a d’abord ce sentiment d’incertitude de doute, le moment du début de pistage, puis ensuite il y a la sensation d’être plus en vie que jamais… C’est le moment que je préfère, entre le mot ou l’animal est juste là devant moi et celui où il s’éteint. »
- « Tu devrais raconter la fois où tu as dû te cacher dans un marécage et que tu es rentrée pleine de boue, elle avait tellement séché qu’il a fallu des jours avant de tout retirer de tes cheveux. »
« Non, ma chérie, ce n’était pas de la boue, mais de la bouse. » rectifia le père, soucieux de préciser ce détail de la plus haute importance

Aurore secoua doucement la tête. Leva les mains innocentes avant de rire doucement.

- « Très bien, d’accord, vous avez gagné. C’était ma première chasse. »
- « Elle voulait nous prouver qu’elle en était capable »
- « Elle visait quelque chose de simple, de très simple, elle n’arrêtait pas de le répéter »
- « Je voulais capturer un Khavcha… Je pensais attirer la bête avec plein de choses brillantes… J’ai donc fait un chemin hors de l’eau, jusqu’à un espace d’endroit plein d’eau boueuse. Une fois arrivée là-bas… Il y en avait déjà un. Comment est-ce que j’aurai pu le savoir moi ? j’étais petite. Il a du se sentir agresser et il m’a foncé dessus, je suis tombée dans l’eau, et quand je suis enfin parvenue à en sortir, j’ai glissé dans une bouse plus grande que moi. J’ai eu tellement peur que la bête vienne me chercher que j’ai plus bougé jusqu’à la tombée de la nuit. L’odeur était atroce… »

Cette fois-ci le couple avait éclaté de rire, manquant de s’étouffer avec le dernier élément avalé. Aurore s’était contentée de secouer doucement la tête. La première chasse était toujours un souvenir particulier, surtout quand la redoutable chasseuse était une enfant haute comme trois pommes.

- « Mais rassurez-vous, je n’ai pas l’intention de vous faire un masque de défécation. Promis. » Souligna la rousse en remplissant de nouveau le verre de son interlocuteur principal de vin.

Aurore avait terminé son assiette, se préparait déjà à se lever pour débarrasser et mettre le tout dans une bassine d’eau. Dehors, une fine pluie commençait à tomber, recouvrant les fenêtres imprégnant l’environnement d’une odeur d’humidité très agréable. Son propre verre en main, la mage s’était installé non loin de la cheminée. Avisant ses parents, puis le barde.

- « Vous m’excuserez, je vais me coucher. Étant donné que ma chère fille part en chasse, je me lève entretenir nos gagnes pains. »

Et elle était partie, simplement déposant une main affectueuse sur l’épaule de son mari et un sourire charmant vers leur invité. Aurore avait simplement opiné avisant un instant son père, difficile de savoir si l’amour qu’il éprouvait l’un pour l’autre pourrait s’éteindre ou s’oublier un jour. Les bruits de pas à l’étage avaient fini par devenir inexistants, signe qu’Éléanor dormait ou du moins n’en était pas bien loin. Aurore avait repris la parole en douceur, pour s’éclipser :

- « Je vais rentrer les chevaux, avec la pluie, je préfère, je reviens. »

Un sourire sincère pour Odard, puis pour son père et elle avait disparue, verre toujours à la main, joue un peu plus rosée que d’habitude. La porte d’entrée s’était refermée derrière elle, laissant les deux hommes désormais seuls.

- « Vous n’avez jamais eu envie de vous installer définitivement quelque part monsieur Coursang ? » demanda pensif le père « Nous en avons toujours rêvé avec ma femme et on l’a d’ailleurs fait ici. Quand nous avons trouvé Aurore, nous avons d’abord cru à un signe et on a cru naïvement qu’elle suivrait notre chemin. Elle est tellement différente… Elle n’en montre rien, fait ce qu’on lui demande, ce qu’on attend d’elle, simplement. Alors pour la remercier, je lui ai appris l’art de la chasse. » il lui fit un clin d’œil, comme pour lui faire comprendre que c’était un secret entre lui et sa fille « Je lui souhaite d’arriver à s’affirmer un jour. Elle rêve d’aventure, de découverte et pourtant, elle reste là, pour ne pas décevoir sa mère, elle tente de maîtriser un don qu’elle n’apprécie pas et accepte sans broncher des méthodes qui en choquerait plus d’un. » il eut un bref soupir. « Vous savez, les gens comme vous, ceux qui ne font que voyager me fascinent autant qu’il m’effraie, je me demande toujours ce que vous fuyez, vous les voyageurs. »

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Jusqu'aux sommets des montagnes EmptyJeu 28 Sep - 23:57
   La question n’appellait aucune réponse tant celle-ci était évidente, tant dans le regard que dans l’attitude de la jeune femme. Ne pas être né avec une cuillère en argent dans la bouche était gage de mépris pour certains, tandis que pour le barde c’était là le signe d’une valeur et d’une solidité qu’on ne trouvait que rarement ailleurs. Un gage de confiance et l’assurance d’être compris quoi qu’il arrive. Il n’en attendait pas plus qu’il n’en reçut, hormis un sourire qui voulait tout dire et qui sonnait comme une récompense. Pas qu’Odard ait eu une vie particulièrement pénible, mais il avait connu son lot d'embûches et conservait un souvenir vivace d’une tragédie pas si ancienne que ça. À cette pensée il posa machinalement sa main sur le collier qu’il portait en permanence sur lui, et si une ombre traversa son regard il espérait qu’elle fut fugace et que personne n’en ai rien vu.

    Ce qui n’était pas passé inaperçu en revanche était le petit tour qu’il avait réalisé presque sans y penser, tant ce genre de subterfuges était devenu naturel chez lui. Un de ces nombreux petits ajouts à la réalité qui la rendait plus pétillante ou au contraire moins triste, et qu’il aimait tellement pratiquer! C’était ce contrepoids à l’image de nombreux mages qui le différenciait, à son sens, de la masse des magiciens. Lui ne pratiquait pas la magie par devoir ou nécessité, mais par plaisir avant tout, et quand la nécessité pointait le bout de son nez elle avait bien du mal à éclipser le bonheur qu’il y trouvait. C’était peut-être le secret de son éternelle joie de vivre, de ne finalement vivre qu’à son image et de ne jamais laisser l’ennui ou la morosité ternir les choses. Mais Alderic avait raison, c’était commode, très commode même. Cela lui permettait de pratiquer et de s’exercer chaque jour et d’ajouter une petite touche à son art que d’autres ne possédaient pas. Alors oui la magie ne remplace pas le talent et beaucoup de bardes s’en sortaient parfaitement munis de leurs seuls atouts, lui aimait agrémenter ses prestations de petites touches d’excentricité qui collaient finalement si bien au personnage.

    Oh que oui messire, c’est pratique, très pratique même! Je dois dire qu’un auditoire subjugué vaut mieux qu’un auditoire captivé, et bien que l’un n’aille pas sans l’autre cela fait tout de même toute la différence!”

    Finalement les parents s’ils ne sont pas tous les mêmes ont les mêmes penchants, à commencer par celui d’éclipser volontairement ou non leur progéniture et de bombarder leurs conjoints, amis, clients, de questions qui pouvaient parfois mettre ces derniers quelque peu mal à l’aise. Odard savait y faire et soutint sans broncher l’assaut conjugué des deux parents, qui finalement s’enquéraient simplement des fréquentations de leur fille et cherchaient par ce biais à en savoir un peu plus sur elle. Il faut dire qu’elle était devenue presque muette et que s’ils venaient à soupçonner un intérêt non professionnel entre les deux l’interrogatoire risquait de durer toute la nuit. Mais ce qui frappait le plus était cette tendance qu’avait sa mère à croire qu’elle connaissait sa fille mieux qu’elle ne se connaissait elle-même, et que cette dernière avait besoin qu’on parle ou prenne des décisions à sa place. Ces parents qui pêchent par excès de bonne volonté sans réaliser quel enfer ils peuvent infliger à leurs proches, le tout derrière les remparts d’un amour trop vorace qui était censé tout justifier et rendre chaque abus pardonnable puisqu’au final ils n’avaient pas pensé à mal. L’enfer est pavé de bonnes intentions comme on dit et le barde ne s’étonna pas de voir une Aurore si effacée alors qu’elle avait prouvé être capable de s’ouvrir un peu lorsque son environnement ne l’écrasait pas. Odard lui lança un regard qu’il voulait plein de compréhension, presque comme s’il excusait d’être témoin de tout cela et de la gêne que cela pouvait causer chez elle.

     La jeune femme mit un terme au débat en déposant la marmite sur la table, déclochant ainsi un ragoût de lapin aux parfums enchanteurs qui emplirent la pièce en quelques instants. S’il avait été plus à son aise Odard aurait fait tressauter les pattes du petit animal dans la marmite, au risque de choquer tout le monde, mais cela aurait été de très mauvais goût et aurait fortement embarrassé la pauvre Aurore alors il s’abstint. Même si l’idée renforcée par l’alcool l’amusait beaucoup.

    Je pense que chacun doit trouver la voie qui lui convient, chercher à embrasser des chemins qui ne nous conviennent pas serait à mon sens une terrible erreur, un drame en soi messeigneurs, une véritable tragédie! Mais trêve de babillages, remercions nos créateurs ainsi que nos hôtes pour ce festin, bon appétit nobles gens!”

    Il s’était tout de même permis ça, rien de trop irrévérencieux, juste ce qu’il fallait même si dans le cas d’Eléanore cela ne changerait strictement rien il n’aurait pas été lui-même s’il était parvenu à tenir sa langue. Et finalement elle était parvenue à raconter son histoire, avec ce trémolo dans la voix et les étoiles dans les yeux. Simplement sa vie propre et ce qu’elle ne faisait que pour et par elle-même, cela semblait évoquer pour elle beaucoup plus que la foi en un Architecte auquel elle ne croyait pas. Et venait ensuite le deuxième trait de certains parents, celui-là beaucoup plus répandu, celui des anecdotes embarrassantes. Celui-là est en général moins pernicieux et souvent bien plus amusant, même s’il aura fait lever les yeux au ciel de générations d’enfants plus ou moins jeunes. Le barde était comme il le disait un homme d’histoires et tant qu’il ne percevrait aucune gêne chez la jeune femme il accepterait volontiers d’en rire avec eux, d’autant que l’histoire s’annonçait croustillante!

    Ah je dois dire ma mie que lorsqu’on parle chasse et bouse, mon intérêt s’en trouve immédiatement piqué au vif! Il me tarde de vous entendre raconter la chute, ou plutôt votre chute, de cette histoire!”

    Et le récit plein d'innocence de la jeune femme était touchant dans le naturel qu’il dégageait, le genre de mésaventures qui arrivaient à tous les enfants et dont on ne riait que bien plus tard une fois la tragédie digérée. Le couple souriait déjà au début pour carrément éclater de rire à la fin, fou rire auquel Odard se joignit avec plaisir, autant parce que l’histoire était franchement drôle que parce qu’il avait cessé de compter les verres de vin qu’il avait vu, vin qui allait d’ailleurs magnifiquement bien avec la sauce du lapin. Le coup de grâce vint avec la réplique suivante et le barde manqua de s’étouffer avec son vin.

    Un masque de…? Par les Saints Rognons quelle épouvantable idée! Et si les yamaany sentent fort et mauvais que ce que l’on en dit, je n’ose imaginer les remugles que doivent dégager leurs… Cela dit ma mie je vous fait entièrement confiance pour m’éviter un sort aussi disgracieux, je tâcherai également de protéger vos arrières afin qu’aucune bouse ne nous tombe sur la tête! En cela vous avez ma parole, ou du moins l’assurance que je ferai tout ce qui est en mon pouvoir!”

    Il s’imaginait déjà le visage plongé dans une bouse fumante, la tête retenue par un yamaany démoniaque ricanant à pleins poumons. Une terrible vision s’il en est, mais tant qu’elle demeurait à l’état de songe il voulait bien en rire. Et c’est ce qu’il fit, autant parce que c’était réellement drôle que pour dissiper le moindre doute quant à son air faussement choqué. L’alcool a la vertu de tendre à tout rendre amusant, tandis qu’il savait très bien que si leur rencontre avec les draco-chèvres tournait mal, le yamaany ne lui maintiendrait pas la tête dans sa propre bouse mais le prendrait par un pied pour le fracasser contre le premier rocher qui passerait. Et peut-être qu’en un sens ce serait une manière bien moins déshonorante de mourir, un poil plus douloureuse certes, mais bien plus digne.

    Rien de tel qu’un ragoût de lapin aux petits légumes généreusement nappé de sauce, le tout également généreusement arrosé de vin pour repaître un barde fine gueule et gourmand à la fois. Vraiment on a beau dire mais la bonne cuisine du terroir aura toujours plus de vie - à l’exception du lapin - que les élucubrations et extrapolations de certains chefs excentriques. Odard était repu et s’appuya contre le dossier de sa chaise en soupirant d’aise, un brin enivré par le vin mais juste ce qu’il fallait pour se sentir à l’aise et détendu.

    Eh bien nobles gens ce repas était un véritable délice, vraiment! Pour avoir roulé ma bosse ça et là et avoir siégé dans quelques auberges prestigieuses, je dois dire que j’en viens toujours à apprécier la bonne cuisine traditionnelle simple et chaleureuse, sans artifices! Et gagez que venant de moi cela ne peut-être qu’un compliment messires!”

    Un adepte de Khugatsaa vanter les mérites du naturel, il aurait pu surprendre mais en un sens c’était vrai et même lui n’osait pas tricher avec certaines choses. C’était ce côté terre à terre qu’il appréciait chez Aurore et sa famille, une simplicité qui lui faisait parfois défaut dans la vie de tous les jours. Aurore avait débarassé la table et se tenait non loin de l’âtre son verre à la main, avec un air pensif, comme il aurait aimé la voir s’ouvir un peu plus. Et il espérait que leur voyage et ce don qu’ils partageaient lui permettraient de s’épanouir pour elle-même, et juste elle-même. Il est parfois bon d’être égoïste lorsque l’on passe sa vie à tenter de répondre à des attentes qui ne sont pas les notres, il est facile de se perdre en chemin et de ne finalement pas plus se convenir à soi-même qu’aux autres.

    Dame Eléanore s’était éclipsée, ayant besoin de repos avant d’attaquer une rude journée. Le barde ne pouvait qu’estimer ces gens, ayant eu un mal de chien ne serait-ce qu’à décharger une charrette il s’imaginait mal s’échiner une journée entière aux champs, sous le soleil ou sous une pluie battante. En un sens il s’estimait heureux car il avait une vie relativement facile et confortable, pas de cals aux mains et les reins toujours intacts.

    Encore un grand merci pour cet excellent repas noble dame, je me permets de vous souhaiter la bonne nuit ainsi qu’un courage sans faille pour votre labeur à venir!”

    Il avait simplement incliné la tête en signe de respect et écouté les pas s’éteindre petit à petit tandis qu’Aurore n’avait pas bougé, regardant son père avec cet amour inconditionnel de petite fille qui voyait en lui à la fois un roc et un héros. Une situation difficile pour elle d’autant que le secret qu’elle portait vis à vis de sa mère devait être un fardeau écrasant. Encore une fois il lui avait lancé ce sourire plein de compréhension alors qu’elle sortait mettre les chevaux à l’abri, parfois les mots sont superflus, même pour quelqu’un dont le métier est de jouer avec. Le laissant seul avec Alderic, cette force tranquille et rassurante, un contrepoids au caractère de sa femme mais qui rendait évident l’amour qu’ils se portaient l’un à l’autre.

    C’était clair depuis le début tant aucun des trois ne se ressemblait mais il aurait été mal poli de poser la question, alors il avait attendu la confirmation de la voix d’Alderic qu’Aurore était adoptée, trouvée était un mot plus juste. Il était évident tant dans les paroles de son père que dans les attentes et le regard de sa mère qu’elle était une bénédiction pour eux, un don qui sans verser dans une gratitude exacerbée faisait de son mieux pour satisfaire tout un chacun, quitte à s’oublier au passage.

    Ah messire je suis un citoyen du monde, la vie est mon terrain de jeu et je ne me vois pas jeter l’ancre pour l’instant. Peut-être un jour qui sait? J’en doute mais n’ignorons nous pas ce que le destin nous réserve? L’avenir sera probablement bien différent de l’idée que je m’en fais, alors je vis au jour le jour sans pour l’instant ressentir le besoin de me projeter.”

    Ainsi donc elle tenait son goût pour la chasse de son père, en un sens ça n’avait rien d’étonnant et ce genre de petits secrets tendaient à resserrer des liens tout en permettant à l’un et l’autre de s’épanouir. Mais le barde pouvait sentir le chagrin que l’homme avait pour sa fille d’endosser un rôle dont elle ne voulait pas, et d’essayer encore et toujours. Ce petit soupir voulait tout dire, et c’était peut-être ça le pire pour Alderic, d’assister sans réellement rien pouvoir faire. Finalement ce voyage serait une excellente chose pour Aurore, sur tous les plans.

    J’admire ce que vous avez fait messire, sachez le. Peu en auraient été capables ou bien en auraient simplement eu le courage. Mais n’ayez crainte, nous finissons tous par trouver notre voie un jour, je pense qu’en cela vous l’avez justement aiguillée. Le reste ne tient qu’à elle mais je pense qu’elle renferme suffisamment de force et de détermination pour accomplir bien des choses et nous étonner tous autant que nous sommes!”

    Il comprenait ce que voulait dire Alderic, les itinérants sont souvent mal compris voir mal perçus, dans le sens où ils sortent du schéma habituel. Peut-être que lui aussi aurait envie de poser bagages un jour, il en doutait à ce moment précis mais après tout il l’aurait peut-être déjà fait si sa bien aimée était toujours de ce monde. Et nul ne connaît l’avenir, encore heureux.

    Au risque de vous imposer une réponse des plus banales messire, je ne fuis que l’ennui qui ronge tant des nôtres. Et j’avoue bien trop m’amuser pour songer à faire autre chose, mais je comprends que cela soit perturbant pour vous messire, après tout ma vie est aux antipodes de la votre. Sachez néanmoins que j’ai un grand respect pour ce que vous faites.”

    Le barde se leva, laissant un instant à ses sens embrumés de retrouver leur équilibre et salua son hôte.

    Je pense qu’une petite balade digestive me fera le plus grand bien, je vous souhaite une bonne nuit messire et vous remercie encore de votre hospitalité.”

    Dehors couvrant le bruit de la pluie fine mais régulière qui détrempait tout, l’on pouvait entendre les renaclements des chevaux reconduits aux écuries. La lune peinait à éclairer les lieux à travers les nuages et parvenait tout juste à dessiner quelques ombres ça et là, la lumière provenant de la maison contribuait à plonger le reste de l’exploitation dans la pénombre, comme si tout ce qui pourrait se dire ou se faire ce soir n’appartiendrait finalement qu’à l’obscurité. Elle était là dehors, menant les chevaux d’une voix douce et patiente, nonobstant la pluie qui n’épargnait rien. Il vint se placer à côté d’elle et flattant l’encolure de la jument qu’elle menait lui sourit calmement.

    Tout va bien ma mie?”

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Jusqu'aux sommets des montagnes EmptyMar 3 Oct - 23:25
Spoiler:

- « J’espère que la vie et les architectes vous permettront de trouver une raison de vous projeter, que ce soit en continuons votre route ou en vous installant. Il n’y a rien de plus important pour le cycle, de naître, vivre, partager, s’associer, offrir une succession puis mourir. Même si le cycle peut être plus court, le réaliser dans son ensemble est largement plus satisfaisant. »

C’était une réponse simple, froide, mais terriblement honnête pour celui qui n’avait de cesse d’argumenter que le cycle avait toujours un début et une fin. Certains des voyageurs, des gens de passages avaient énormément de mal à accepter cette philosophie de vie pourtant si commun pour ceux qui croient en son architecte. Doucement, il était venu déposer une petite tape sur l’épaule du barde, plutôt symbolique que réellement sentimentaliste. L’homme ne savait pas vraiment quoi rajouter, quoi dire de plus à ce visiteur qui ne devait certainement pas comprendre le lien qui le poussait à soutenir sa femme de manière officielle et sa fille de manière sous officielle.

- «  Aure n’est pas prête encore, pas prête à partir, à abandonner ce côté rassurant qu’elle connait ici. Il faudrait un événement important pour la faire réagir, pour la faire laisser de côté sa sécurité. » il se pince les lèvres, avalant une gorgée «  Je crois que même si elle n’en a jamais rien dit, son abandon a marqué profondément son esprit. Nulle magie ne peut résoudre ce problème. »

Le père avait opiné d’un geste de la tête, souhaitant simplement une bonne balade digestive à celui qui lui semblait plutôt bien sous tout rapport, encore fallait-il se fier uniquement aux apparences. Dehors, la pluie avait redoublé d’intensité sans pour autant paraître extrêmement forte, un petit vent était venu rafraîchir ce début de soirée. La chevelure rouquine de la mage s’était humidifiée, quelques mèches rebelles imprégnaient les traits de son visage. La rousse attendait là, au milieu du terrain que la dernière monture accepte enfin de rejoindre l’abri un peu plus loin, visiblement en vain, l’animal semblait être aussi têtu que la propriétaire. La bête semblait enfin daigner revenir vers elle, attrapant la jument, Aurore s’apprêtait à revenir vers le lieu de repos quand Odard refit son apparition elle sursauta légèrement, affichant un nouveau sourire :

- «  Oui, ça va et vous ? J’espère que vous n’avez plus faim… Si jamais vous avez envie de quoi que ce soit, il ne faut pas hésiter. » Elle hésita, offrit un sourire « Demain matin, nous irons faire les achats pour notre voyage, ensuite on sera libre chacun l’après-midi, après-demain matin dès les premières lueurs du jour nous partirons. »

Aurore tira légèrement sur le licol, afin de ramener le cheval vers l’abri, invitant Odard à la suivre. La jeune femme n’avait pas envie que celui-ci ne prenne froid, juste avant leur départ, hors de question de le reporter, du moins dans son esprit. S’adossant contre une poutre, la rousse avisa un long moment le barde, pendant que les différentes montures se remplissaient le vendre d’un foin visiblement suffisamment agréable pour eux.  

- «  J’ai cru voir que vous aviez un bijou, autour de votre cou… Si il a une valeur importante, vous devriez le laisser ici durant notre petite aventure, je ne voudrais pas prendre le risque de vous voir le perdre, je m’en sentirais responsable. »

Évidemment qu’elle avait compris qu’il avait de la valeur, mais la jeune femme ne se voyait simplement pas demander de but en blanc sa provenance et la raison de cet attachement, c’était une forme détournée avec habilité d’obtenir des informations sans paraître trop curieuse, ni même dérangeante dans son raisonnement. Un peu gênée malgré tout, la rousse s’autorisa un sourire un peu plus timide, un peu moins plein d’assurance ou de faux semblant. Elle s’avance doucement vers son interlocuteur puis retourna sous la pluie désormais un poil plus légère, prit une grande et profonde inspiration, profitant de cet air extérieur, de cette odeur d’humidité qu’elle trouvait particulièrement agréable.

- « Vous n’êtes pas obligé de me raconter quoi que ce soit, je dis simplement cela à titre d’information. » Se sentit-elle obligé de rajouter « Vous avez vraiment le don de vous faire accepter partout monsieur Odard. » elle pivota légèrement vers lui puis ajouta : «  Vous souhaitez encore profiter de l’air extérieur ou l’heure de dormir à sonner pour vous ? »

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Jusqu'aux sommets des montagnes EmptySam 7 Oct - 21:56
   Au fond de lui Odard comprenait Alderic même s’il ne partageait pas son mode de vie, certaines personnes avaient besoin de ressentir cette appartenance à un tout, à un cycle. Ce besoin de ressentir le poids des générations derrière eux et de cette sagesse collective qu’ils viendraient enrichir à leur mort même s’ils n’avaient en rien contribué à l’élévation du monde. Un jour eux aussi seraient des ancêtres et rayonneraient, ironiquement, à l’ombre de l’oubli général. Lui avait besoin de se sentir unique, libre et vivant à sa manière, en s’amusant tout simplement. Et si un jour l’occasion de prendre racine se présentait eh bien il l’accueillerait comme il se doit et réfléchirait à poser des bagages.

    En attendant le monde était un immense terrain de jeux qu’il entendait bien faire découvrir à Aurore, et même s’il n’en dit rien il n’était absolument pas d’accord avec son père. La jeune femme était plus que prête, et de son point de vue n’attendait qu’une occasion de courir le monde, c’est pour ça que ce voyage tombait si bien, il lui permettrait de rompre avec son quotidien et d’embrasser une destinée à laquelle elle semblait aspirer sans oser vraiment le dire. Le barde n’avait pour une fois pas eu grand chose à dire, il se serait senti mal de contredire son hôte, cela serait presque revenu à l’insulter sous son propre toit, alors il s’abstint et sortit sous la pluie en souhaitant la bonne soirée au père d’Aurore.

    La pluie avait redoublé d’efforts, de cette intensité calme mais implacable. Une nuit sans vent où le ciel pouvait pleurer tout son soûl sans que rien ni personne n’y puisse rien. Mais ni Odard ni Aurore ne s’en souciaient, ce qu’ils avaient à se dire allait bien au delà de choses aussi triviales qu’une averse, aussi drue soit-elle.

    Ah ma mie c’est à peine si je peux encore me mouvoir, vraiment très chère votre mère possède un talent pour la cuisine que je ne saurais décrire. Quel lapin ma mie, quel lapin!”

    Mais ce n’était pas la question principale, et il ne vit pas la deuxième arriver alors qu’ils se dirigeaient en compagnie de la jument vers un abri au sec.

    Ma foi je vais très bien, c’est plutôt vous qui m’inquiétez très chère, vous sembliez perdue dans vos pensées. Sachez que si vous ressentez le besoin de parler je suis tout ouïe ma mie, que ce soit maintenant ou bien plus tard, les tagtas font un travail formidable de nos jours n’est-ce pas?”

    Son collier, c’était tout ce qu’il lui restait de sa vie passée encore pas si lointaine mais qu’il avait enterré profondément derrière ses airs débonnaires. Aurore visait juste, il ne pourrait supporter que quelque chose arrive au collier, mais en même temps il était absolument incapable de l’enlever, ne serait-ce que pour quelques instants. La jeune femme pêchait ses informations de manière habile et douce, alors pour une fois, une très rare fois, Odard s’autorisa un moment de répit et porta la main à son cou en soupirant.

    Ce collier appartient à une jeune femme que j’ai aimé passionnément, et qui m’a tellement plus aimé en retour que ce que j’aurais pu souhaiter. Jusqu’à ce qu’on me l’arrache brutalement. Un meurtre sordide, la pauvre a surpris quelqu’un qu’elle n’aurait pas dû. Vous n’avez pas idée de l’état dans lequel on l’a retrouvée… Bien sûr la plupart de ceux qui étaient là ont tout oublié, mais pas moi, jamais je ne pourrais oublier. Quant au monstre qui a fait ça, il l’a payé de sa vie mais pas de ma main, je ne lui aurais pas fait le plaisir d'entacher mon âme de son sang. J’ai laissé ce soin à ceux dont c’est le métier, et j’ai eu plaisir à savoir qu’il avait souffert avant d’être oublié.”

    Il secoua doucement la tête, le regard dans le vague.

    Je n’en suis pas fier, mais il avait au moins mérité ça. Depuis j’essaie de rendre hommage à ma douce Tiphaine en vivant le plus intensément possible. Et je dois dire que ça marche la plupart du temps, pas toujours, mais le plus souvent.”

    Il ne se confiait jamais, mais avait puisé dans le sourire d’Aurore la force d’ouvrir son âme finalement moins chatoyante que ses excentricités habituelles. Elle écoutait calmement, et il savait au fond de lui-même qu’elle parvenait à comprendre malgré son jeune âge. Certaines âmes sont bien plus vieilles et sages que les corps qu’elles occupent, et ces gens là sont les plus sûrs, parce que sans vécu une personne est comme vide, il n’y a que ceux qui ont souffert qui peuvent se comprendre mutuellement. Le reste du monde est bien trop jeune.

    Vous savez tout ma mie, veuillez m’excuser de m’être épanché si brusquement, j’ai senti que c’était le moment voilà tout. Et vous très chère, que souhaitez vous donc faire? J’avoue volontiers ne pas être contre une petite balade au clair de… pluie! Et je suis ravi que vous m’ayez accepté ma mie, vraiment, j’en suis ravi.”

    Et en dehors de ceux qui étaient visibles comme le nez au milieu de la figure, quels sombres drames se terraient dans l’esprit de la jeune femme? Il l’écouterait si elle voulait parler, et respecterait son silence si elle trouvait plus de confort en elle-même que dans des paroles parfois douloureuses. Lui se sentait curieusement bien, même après avoir retraversé l’espace de quelques instants ces moments difficiles. Parfois il suffisait simplement de parler.

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Jusqu'aux sommets des montagnes EmptyDim 8 Oct - 17:47
L’art de mettre les deux pieds dans le plat était un art difficile, complexe à obtenir, soit on l’avait de naissance, soit on ne pouvait jamais l’avoir. Pour Aure, elle avait malheureusement vu le jour avec ce don particulier. Poser les mauvaises questions, faire preuve de curiosité sur le mauvais sujet. Oh oui, Aure avait cette faculté de s’indigner ou ce questionner sur le mauvais thème, toujours. Adossée contre un pilier, la rouquine avisait son interlocuteur, les yeux quelque peu écarquillés. Si la révélation sur la qualité culinaire de sa mère n’était pas une surprise, la suite l’était en revanche beaucoup beaucoup plus. La jeune femme, avait pincé ses lèvres, consciente qu’elle venait de toucher un point sensible, certainement trop. La rouquine avait lentement haussé les épaules, n’ayant jamais eu l’impression d’être malheureuse ou de ne pas avoir le choix de son existence, au contraire. Elle n’eut cependant pas réellement le temps de répondre, la suite devenant soudainement plus complexe à gérer. Odard dévoila un pendentif, plutôt féminin qui semblait en effet avoir beaucoup de valeur à ses yeux. Le barde ouvrit son cœur, du moins se confia avec une sincérité touchante, non tactile, non excessivement sentimentale la rousse n’eut pas de geste tendre ou de larme aux yeux. Cela ne signifiait pas qu’elle n’était pas touchée, simplement qu’elle ne réagissait pas de la même façon que les autres, qu’elle ne savait de toute manière pas réellement comment réagir. Son père l’avait éduqué avec la notion du cycle, ne s’attristait-elle donc pas de la disparition bien que tragique de la jeune femme.

- « Les architectes ont pensé pour nous un avenir aussi variable que surprenant. » C’est tout, ou presque ce qu’elle répondit « Ne soyez pas triste de la perte, soyez plutôt reconnaissant des moments que vous avez pu vivre et passer ensemble. La tristesse ne devrait pas nous toucher, aussi cruel soit l’arrachement qui a provoqué son départ. »

Pour la suite, la mage n’était pas certaine d’avoir saisi le sous-entendu, ou plutôt refusait-elle de réellement le comprendre. Avait-il embauché des mercenaires pour abattre l’individu en question, ou des individus étaient passés avant lui, par chance ou malchance. La jeune femme se pinça les lèvres, sans réellement porter un jugement à la situation. Elle n’avait pas la chance de se souvenir, du moins, pas encore et n’était pas certaine d’avoir envie de vivre cette souffrance, de connaître le sentiment d’absence que la perte des proches imposait à l’esprit de certain membre de leur peuple. La rouquine était finalement venue déposer une main amicale sur l’épaule du barde, qu’elle tapota lentement, comme pour avouer qu’elle comprenait, ce qui n’était pas obligatoirement le cas. Elle afficha un demi-sourire, consciente du courage qu’il avait dû lui falloir pour lui raconter son passé.

- « Vous n’avez nullement à vous excusez de raconter votre passé, il vous appartient, il ne changera pas, jamais. Bon ou mauvais, il fait partie de vous. » Elle prit une légère inspiration « Permettez-moi de vous dire que les problématiques de votre esprit sont aussi lourds que peut-être léger l'apparence que vous vous autorisez à montrer, comme quoi sont-elles plus que trompeuses… Est-ce une capacité commune des amoureux de Khugastaa ? »

La rousse avait retiré sa main s’avançant dans la pluie fine qui continuait de s’abattre sur le duo un peu particulier. Elle avait simplement opiné à la proposition signe qu’elle n’était pas contre une marche nocturne et pluvieuse. Aure avait l’habitude de disparaître, de prendre le temps d’apprécier la nature, l’environnement, la vie simplement. Pivotant pour lui faire face, marchant à reculant, elle n’était pas certaine d’avoir grand-chose à raconter, à confier. Rien d’aussi poignant, sa vie était un long fleuve tranquille bercé par l’exigence d’une mère adoptive et d’une croyance toujours aussi attirante pour un architecte qu’elle ne connaissait même pas.

- « Je suis navrée, je n’ai rien d’aussi fort à confier. Ma vie est calme, mon enfance aussi. Je n’ai pas connu d’amour aussi fort que le vôtre, je n’ai pas d’amitié aussi intense qu’elle le devrait. Mes parents sont aimants, du moins, autant qu’ils le peuvent malgré le fait que je n’appartienne pas à leur sang. » Elle afficha un sourire, continuant sa marche arrière en douceur « Je ne suis pas malheureuse, si parfois je suis pensive, c’est simplement que je prends le temps d’analyser les choses, de contempler ce qui m’entoure et de prendre le temps de me souvenir de ce qui est réellement important. »

Ce qui est réellement important, la jeune femme avait cessé de reculer en avançant, afin d’attendre le barde. Dépose ses doigts sur ses lèvres comme pour lui demander de faire silence, chose qui devait être complexe pour celui qui vivait de ses belles paroles. Elle glissa ses doigts le long de son bras, jusqu’à venir attraper sa main pour l’entraîner dans un petit sentier à l’abri des regards où la végétation ne semblait pas être entretenue. Aurore l’empruntait pourtant régulièrement, préférait-elle le laisser dans son jus pour protéger ce qu’elle appréciait tant observer et qu’elle avait décidé de partager. Toujours silencieuse, la jeune femme avait enjambé quelques troncs d’arbre sur le sol, jusqu’à se stopper en haut d’une petite pente, elle s’abaissa lentement fit signe à Odard de faire de même. Devant eux, en contre bas, une biche et ses deux petits semblaient profiter de la pluie pour se rafraîchir, pour s’alimenter aussi au calme. La rousse avait pris l’habitude de venir observer chaque soir le duo un peu particulier et si agréable au regard. Volontairement, elle fit dégringoler quelques petites pierres, provoquant la fuite des deux animaux qui détalèrent d’une façon si particulière. Elle murmura :

- « C’est de ça que je parle, ce qui est vraiment réellement important. Le cycle de la vie et de la mort. On naît pour prendre en fin, on prend fin pour naître. » Elle prend une légère inspiration « Cela doit vous semblez étrange cette vie, celle où j’accepte sans broncher les choix des autres, pourtant elle ne me dérange pas, elle ne me blesse pas non plus. Je suis simplement reconnaissante de ce que j’ai. » Elle opine « Cette femme que vous avez aimée, cela a duré longtemps ? Comment l’aviez-vous rencontré ? »

La rousse se laissa glisser sur les fesses, s’installant dans la terre humide, presque collante. Ses cheveux étaient désormais aussi imbibés d’eau qu’après un bain, elle s’allongea sur le dos, avisant le ciel qui s’obscurcissait peu à peu, avisant les gouttes qui dégringolaient de ce ciel.

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Jusqu'aux sommets des montagnes EmptyMer 11 Oct - 7:25
    Il s’était livré sans détours et sans attendre une quelque pitié de la part de la jeune femme, s’il n’était pas réellement d’accord avec la tristesse il n’en dit rien. En un sens il chérissait cette tristesse car lui pouvait se souvenir et même si sa douce lui manquait il avait eu le plaisir et l’honneur de partager son existence et en garderait le souvenir à jamais. Il avait obtenu justice, désormais sa vie et ça serait ternir le souvenir de son aimée que de la gâcher en lamentations aussi vaines qu’inutiles.

    Qu’elle lui touche l’épaule était bien plus que ce qu’il aurait pu attendre, et il la remercia simplement d’un regard profond pour une fois délaissé de l’espièglerie qui y siégeait habituellement. Un sourire vaut finalement plus que bien des paroles, aussi lui rendit-il le sien avec sincérité, et peut-être une pointe de gratitude.

    Vous avez raison ma mie, il serait trop dommage de perdre le peu de temps que nous avons à pleurer sur notre sort n’est-ce pas? Et comme vous le dites si bien très chère, mon passé m’appartient et a fait de moi ce que je suis aujourd’hui, j’ai au moins la chance de me souvenir, je n’imagine pas le vide que l’on doit ressentir sachant que l’on devrait pleurer mais que l’on ignore qui. C’est terrifiant ma mie, terrifiant!”

    Et comme cela contrastait avec la légèreté dont il faisait preuve au quotidien, ne dit-on pas que de tous, le comique est celui qui pleure le plus? Le barde n’en était pas là et le temps faisait lentement son oeuvre et apaisait sa blessure, mais ses démons étaient à mille lieues de l’image qu’il renvoyait si bien que personne ne se doutait jamais de rien.

    Je ne sais pas ma mie s’il s’agit là d’un point commun entre adeptes, mais il est vrai que l’habit ne fait pas le moine. Et si les apparences sont parfois trompeuses je ne cherche nullement à tromper mon monde, bien au contraire ma mie, j’essaie de vivre comme je l’ai toujours fait et de refléter ce que je suis intérieurement. Le tableau comporte certaines tâches voilà tout. Je suis moi-même, entier, ou presque!”

    Il avait terminé sa phrase sur un sourire entier lui aussi, le barde était simplement heureux d’être en vie et s’il se lamentait parfois - rarement - il tâchait le reste du temps de vivre le plus intensément possible en hommage à sa belle Tiphaine. Elle marchait à reculons devant lui, dans une démarche à la fois enfantine et désinvolte qui lui allait bien. Lui suivait, peu importaient la pluie et le froid, l’instant était à la contemplation et il aurait été dommage de tout gâcher pour quelque chose qu’une bonne couverture et un feu douillet régleraient en quelques minutes.

    Si la jeune femme ne semblait pas avoir connu de grand drame elle n’en paraissait pas moins mature et faisait preuve de sagesse, d’une intelligence qui plaisait au barde. Si l’on ne pouvait blâmer ceux que la vie avait choyé, la bêtise était en revanche quelque chose qu’Odard abhorrait et en cela Aurore avait de l’esprit à revendre. Une étincelle, une lueur dans le regard et il avait su qu’ensemble ils pourraient accomplir de grandes choses, qu’importent le temps et la distance. Et c’était peut-être ça le plus important.

    Je suis heureux ma mie que la vie vous ait protégée jusqu’ici et que vous preniez cette dernière avec philosophie, vos parents sont de bonnes gens et le sang n’a rien à voir là dedans. Qu’importe son origine lorsque l’on accepte un enfant comme sien, il devient votre vie et plus rien d’autre ne compte, vous avez eu de la chance d’avoir été recueillie par des gens aimants ma mie, sans quoi votre vie aurait pu être bien plus difficile. Pour ce qui est des amitiés fortes très chère eh bien permettez moi de postuler à ce rôle, j’en serais plus qu’heureux! Mais n’avez vous donc jamais connu l’amour?”

    Son geste était inattendu, venant d’une femme d’une part et d’Aurore d’autre part, mais il se laissa faire docilement et glissa sa main dans la sienne tandis qu’elle l’entraînait à l’écart. Il la suivit avec curiosité, se demandant quel secret se cachait derrière ce sentier envahi par la végétation. Et le spectacle avait de quoi ravir, il resta sans voix les quelques instants que durèrent cette parenthèse. Parfois on a juste besoin d’un rappel, de se rappeler combien la vie est belle dans sa fragilité éphémère. Le barde se dit qu’il garderait cette image gravée en lui aussi longtemps qu’il pourrait souvenir, comme d’une leçon d’humilité, on est rien par rapport au tout qui n’est rien sans nous.

    Vous êtes d’une grande sagesse ma mie, d’une grande sagesse! Je vous remercie pour cet instant de contemplation, sachez qu’il est pour moi très précieux! Quant à ma douce je ne l’ai malheureusement connue que très peu de temps, mais je garde un souvenir fort de cette idylle de qui je le pense aurait pu naître une longue et belle histoire.”

    Il soupira un bref instant avant de se souvenir des paroles échangées, et rit à la place.

    Je pense que ni elle ni vous ne souhaitez que nous nous morfondions, alors rions à la place ma mie, rions!”

    Imitant Aurore il s’allongea à même le sol, trempé pour trempé. Ils restèrent là un moment à observer le ciel s’assombrir à mesure que le jour mourrait, couverts d’eau et probablement aussi sales qu’un yamaany mais curieusement le barde se sentait comme vide et apaisé. Ils étaient bien, alors il profita de l’instant, tout simplement.

    Je suis heureux de vous avoir rencontré ma mie, vraiment très heureux.”

    Il avait dit ça en posant un bref instant sa main sur la sienne, dans un geste qui ne se voulait ni déplacé ni ambigu, simplement pour souligner ses paroles et exprimer sa gratitude d’une rencontre à laquelle il ne s’attendait pas mais qui promettait de bouleverser sa vie.

    Ils étaient trempés, sales, et heureux.

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Jusqu'aux sommets des montagnes EmptyMer 11 Oct - 20:49
Les apparences étaient trompeuses, trop trompeuses au goût de la jeune femme qui n’en disait rien. Aure ne portait aucun jugement, mais un léger frisson avait parcouru son échine en imaginant cet homme s’adonnant à des arts plutôt sombres. Avait-il réellement pu embaucher une personne pour en assassiner une autre ? La rousse avait du mal à y croire. Fermant les yeux, savourant les gouttes qui venaient s’abattre sur son visage, elle avait quelque difficulté à sortir de son silence de réflexion. Son sourire avait disparu pour laisser voir des traits plus naturels, plus sincères. Le fil de la conversation lui revenait doucement, lentement les mots raisonnaient dans son esprit, lui imposant le moment présent. Si elle avait déjà eu une relation amoureuse ? Peut-être, ou peut-être pas, Aure ne s’en souvenait plus vraiment. Elle n’avait pas eu l’impression d’accepter suffisamment longtemps quelqu’un dans son cercle intime pour que cela devienne une relation, sérieuse du moins. Ce n’était pas un sujet qu’elle appréciait réellement aborder, elle n’aimait d’ailleurs pas vraiment se dévoiler non plus. A chaque fois, cela lui donnait l’impression d’avoir une lame sous la gorge, une simple question pouvait à ses oreilles, sonner comme une menace dangereuse, un risque qu’elle n’avait nullement envie de prendre.

- « Père dit qu’il suffit parfois d’une seconde pour comprendre qu’une personne est faite pour nous, qu’elle s’assemble avec perfection à notre âme. » Elle sourit amusée « C’est tellement étrange venant d’un homme froid qui ne voit généralement la vie que par le cycle. » c’était certainement ça qu’elle tenait de lui, cet esprit terre à terre « Vous avez bien raison, inutile de se morfondre. Le cycle est ainsi fait. »

Aurore ne croyait pas à cette façon de voir les choses, elle ne pensait pas qu’une seule personne pouvait vous combler toute votre vie. Aure n’avait pas confiance en les autres, ne s’amuserait jamais à marcher à l’aveugle avec pour seul guide un ami ou un inconnu. La confiance était quelque chose qui se gagnait normalement, chez Aure, elle était presque impossible à obtenir. Au fond de son être, il y aurait toujours ce doute, ce « et si », cette voix qui murmure sans cesse que le doute doit toujours être permis. Cette fragilité, la rouquine ne la montrait à personne, ne la comprenant pas elle-même. Il est pourtant si aisé de s’apercevoir qu’une personne abandonnée à la naissance redoutera toujours cette notion, craindra toujours le rejet, aura toujours peur que son apparence ne convienne pas. Toute sa vie elle avait lutté pour s’insérer parfaitement dans le profil qu’on avait dressé pour elle. Comment pourrait-elle parler d’elle-même alors qu’elle n’était qu’un masque, une façade, un moment d’une personne qu’elle inventait de jour en jour. Lentement, la mage avait ouvert les yeux, manquant de se prendre une larme du ciel dans l’œil. La question avait fini par hurler dans esprit : « Qui suis-je ? »

- « Le bonheur est éphémère. Vous pourrez dire que vous êtes heureux de m’avoir rencontré, une fois votre corne entre les mains. Sinon, c’est que je n’aurai pas été très efficace. »

Il était possible que la jeune femme ai parfaitement compris le sens premier de la phrase, mais son esprit ne pouvait accepter qu’on puisse l’apprécier elle, une image, un reflet, une connaissance d’elle-même qu’elle n’avait même pas encore. Lentement, elle avait fini par se relever, dévoilant des avant-bras boueux, une chevelure plus qu’humide et des vêtements collants. Un petit vent commençait à se lever et la température à diminuer avec elle. Ils allaient finir par être malades. Elle esquissa un bref sourire en directement du barde, lui tendant la main pour l’aider à se lever au besoin.

- « Nous allons finir par être malades, nous devrions rentrer. Cet endroit, ça sera notre petit secret, interdiction de dénaturer le lieu. »

Même si cela ne semblait pas être le genre du barde, Aure avait préféré le dire. Elle ne supporterait pas de voir le lieu saccager ou modifier, c’était un peu son endroit refuge, le lieu où elle allait pour oublier. Tapotant ses propres fesses dont le tissu de son vêtement humide collait à sa peau blanche. Elle lâcha un bref soupir et frissonna. Brbrbr c’est qu’il commençait vraiment à faire froid. Une fois l’homme debout, la rouquine afficha un nouveau sourire plus large, plus sincère.

- « Je pense qu’une bonne infusion et des serviettes chaudes seront les bienvenues en rentrant… Et pour moi, un bain. Si vous voulez en reprendre un, ce n’est pas un souci. »

Elle avait dit ce qu’il fallait, mais c’était honnête, ici il n’y avait pas de problème d’eau, ni même de restriction alimentaire. C’était un peu la maison du bonheur, familiale, chacun faisait ce qu’il voulait, dans la limite du raisonnable, évidemment. L’obscurité avait fini par tomber tout autour d’eux et le trajet inverse dû se faire beaucoup plus prudemment. Le duo ne voyait pas vraiment plus loin que le bout de leur nez. Les bruits de pas, les craquements des branches, ou des pas dans les flaques pouvaient uniquement être perçus jusqu’à percevoir une légère lumière au niveau de la demeure de la famille. Une fois la porte ouverte, un petit vent de chaleur fit frissonner la rousse, qui referma la porte derrière le barde. Des bougies étaient allumées pour rivaliser avec la noirceur de la nuit tombée. Proche de la cheminée, des serviettes étaient proches des flammes, deux. Sur la table une infusion et deux tasses encore fumantes semblaient être l’unique trace de vie du lieu. Le père semblait avoir devancé les pensées et envie de sa fille. Retirant ses bottes qu’elle poussa sur le côté, la mage laissa quelque emprunte de pas humide sur le sol de la demeure récupèra les deux précieuses serviettes. Elle en rapporta une à Odard, et conserva la seconde qu’elle enroula entoure d’elle. Un petit luxe agréable, une attention touchante.

- « Vous avez une préférence pour les plantes ? »

La rouquine était déjà devant la table, déversant l’eau chaude dans les tasses, prête à rajouter les plantes en fonction des préférences du barde. Une fois le choix fait, elle prépara l’infusion et apporta la tasse fumante à son invité, conservant la sienne entre ses mains, visiblement satisfaites. Elle était à présent un peu hésitante, devait-elle l’accompagner, le laisser en bas, pour sa peur, la rouquine rêvait de se glisser dans une eau chaude, dont elle était certaine était déjà prête à l’étage au niveau de la salle d’eau.

- « Si vous le permettez, je vous laisse faire ce qui vous plaît. Je vais prendre mon bain… Vous n’aurez cas, juste éteindre les bougies ? Le bois dans la cheminée devrait suffire pour la nuit. Vous n’avez besoin de rien d’autre avant que je remonte ? »

La voix de la mage était plus douce, plus calme, moins portante aussi. A l’étage ses parents devaient déjà dormir et particulièrement respectueuse, Aure n’avait nullement l’intention de réveiller qui que ce soit.

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Jusqu'aux sommets des montagnes EmptyDim 15 Oct - 17:38
    La jeune femme avait terriblement raison, certains êtres étaient faits pour s’aimer au premier regard tandis que d’autres se voueraient une haine éternelle sans qu’aucun mal n’ait été fait d’un côté comme de l’autre. Certains y voyaient là l’oeuvre des Architectes, de la conscience du monde qui assemblait comme elle détruisait simplement parce que cela faisait partie d’un cycle immuable d’amour et de haine, de paix et de guerres. Odard y voyait là la marque romanesque du destin, du hasard, de ce qui était simplement fait pour être, sans plus de raisons. Et c’est ce qui donnait toute sa saveur à la vie, qu’un être rencontré parmi des millions soit fortuitement celui que l’on attendait depuis toujours, c’était simple, beau. Parfait.

    Votre père est un homme bien sage très chère, nul doute que certaines doctrines ont leurs entorses, l’Amour est une exception à tout n’est-ce pas? N’est-ce pas la seule chose que personne n’a jamais réussi à expliquer mais que chacun comprend au plus profond de soi? Le cycle est une chose, l’attraction de deux âmes en est une autre, il n’y a qu’à voir le regard qu’il vous porte à vous et votre mère pour comprendre qu’il est assez sage pour faire la différence. Et cela ma mie fait toute la différence.”

    Son rôle lui tenait à coeur, ce besoin d’être utile, de trouver sa place et son utilité. Le barde était plus frivole et se contenterait du résultat qu’il obtiendrait de cette aventure, même s’il n’obtenait rien au bout du compte il aurait nourri son coeur et son esprit d’une belle rencontre. Alors à quoi bon les chèvres et les cornes? Certes son instrument lui tenait à coeur mais cette aventure promettait au moins de se dérouler en excellente compagnie, le reste importait peu. Lui se fichait bien qu’elle soit efficace tant que tout cela leur profitait à tous les deux, et les Dieux savaient qu’elle avait besoin de s’évader, de se trouver même. Quel meilleur opportunité qu’un voyage pour se découvrir autant que l’on découvre le monde?

    Ah ma mie que vous soyez efficace ou non m’importe peu, quelle que soit l’issue de notre expédition - si tant est que nous survivions - sachez que je garderai la plus haute estime de vous, ainsi qu’une sincère affection. Mais je compte bien vous ramener chez vous saine et sauve et vous faire au passage une démonstration de mes talents de flûtiste! Je serai heureux quoi qu’il arrive, corne ou non, celle-ci ne sera que la cerise sur le gâteau!”

    Ils parlaient et parlaient comme s’ils se connaissaient depuis toujours au point qu’il ne faisait plus attention au froid et à la pluie qui les enveloppait. La nuit était fraîche et le petit vent qui sévissait par dessus l’ondée menaçait de les geler jusqu’aux os puis de les clouer au lit une bonne semaine. Et personne, personne au monde n’était capable de supporter un barde aphone, pas même lui. Il accepta la main tendue et se releva avec douceur, s’il avait tiré trop fort ils auraient glissé tous les deux dans la boue, et cela aurait été bien gênant.

    N’ayez crainte très chère, aussi curieux que cela puisse paraître je sais tenir ma langue quand la situation l’exige.” Il rit doucement. “Cet endroit restera le nôtre, un secret que je garderai jusqu’à mon dernier souffle ma mie, en cela vous avez ma parole d’homme et de barde, avec toute la valeur que je leur accorde!”

    S’il avait eu une veste ou une quelconque cape il l’aurait déposée sur ses épaules, il ne sied pas aux dames de grelotter sous la pluie, mais ils étaient aussi démunis l’un que l’autre à ce jeu là. À vrai dire il s’était aventuré sous la pluie parce qu’il aimait ce contact frais et humide, et parce que le vin du repas l’avait bien réchauffé. Elle n’avait pas semblée être gênée non plus jusqu’ici, mais ils étaient désormais tous deux gelés. Aussi rentrèrent-ils sans hâte mais avec l’envie de se réchauffer au coin d’un feu douillet et d’une tasse de thé fumant.

    Ah je dois dire ma mie qu’une bonne serviette sera un bonheur des plus délectables! Sans parler d’un thé bien chaud. Rentrons avant d’attrapper la mort très chère, je préfèrerais encore la trouver aux cornes d’une draco chèvre plutôt qu’aux bras d’une fièvre sans vergogne!”

    Le chemin du retour s’était fait à tâtons, dans une semi pénombre glaciale, mais la jeune femme semblait connaître le chemin comme sa poche. Lui s’y serait probablement perdu et on l’aurait retrouvé au matin transi de froid et à moitié mort, délirant de fièvre. Comme il aurait été dommage de trépasser à quelques pas d’une si charmante demeure et d’un âtre rougeoyant. La porte s’ouvrit sur une douce chaleur et un sentiment de paix, de sécurité. C’était l’effet des vieilles chaumières, celles où l’on se sent le mieux, où l’on a l’impression que rien de mal ne peut arriver, où même le temps a du mal à s’écouler, si bien qu’on a l’impression de vivre dans une bulle, dans une parenthèse que l’on ne voudrait pas voir s’interrompre. Le barde accepta la serviette que lui tendait Aurore avec plaisir et un sourire aussi large que ravi, il se saisit de la tasse fumante laissée là par Alderic et même si aucune plante n’y baignait pour l’instant il laissa ses doigts se réchauffer autour de la porcelaine délicieusement brûlante.

    Je ne m’y connais guère en plantes très chère, aussi je vous fais entièrement confiance et prendrai ce que vous prendrez! Merci pour cette serviette, c’est un soulagement divin! On se sent à l’aise chez vous ma mie, et pour quelqu’un qui passe sa vie à courir les routes il est rare que je me sente chez moi quelque part. Merci pour ça.”

    Se sentant assez réchauffé et suffisamment proche du feu pour profiter de sa chaleur il se défit de sa serviette et vint la déposer sur les épaules de la jeune femme, si jamais il tombait malade il aurait le soulagement de se dire que ça aura été par galanterie et par altruisme, ainsi il n’aurait personne d’autre que lui-même à blâmer et cela rendrait la chose bien plus acceptable.

    Vous en avez plus besoin que moi, et je suis plus proche du feu que vous n’est-ce pas? Eh bien je pense que si vous vous retirez je vais en faire de même, un peu de repos ne nous fera certainement pas de mal avant d’entamer nos préparatifs. Je pense avoir tout ce dont j’ai besoin, j’ai passé une excellente soirée en votre compagnie ma mie, et je vous souhaite un bon bain ainsi qu’une bonne nuit! Si jamais vous aviez besoin de moi eh bien je pense que vous savez où me trouver n’est-ce pas?”

    Il rit doucement, veillant à ne surtout pas faire de bruit pour ne pas réveiller ses hôtes et s’inclina devant la jeune femme qui s’éclipsait.

    À demain très chère!”

    Une fois dans sa chambre il faisait assez chaud pour qu’il étendre ses vêtements sur le dossier d’une chaise pour qu’ils y sèchent. Il resta là un moment à moitié nu, son Luth en main, feignant de jouer sans en toucher les cordes et se perdit dans ses propres pensées. Des dragons et des chèvres, des monstres des montagnes aussi affreux que puants. Et pourtant cette aventure qui avait commencé comme toutes les autres s’annonçait être une des plus fantastiques qu’il avait vécu.

    Sentant son esprit divaguer le barde reposa doucement son instrument dans son étui, avec toute la tendresse qu’on réserve à un ami fidèle et s’allongea sur son lit, laissant le sommeil l’emporter dans ses bras chauds réconfortants. Il s’endormit en souriant, ayant déjà hâte de voir ce que la journée du lendemain leur réserverait.

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Jusqu'aux sommets des montagnes EmptyLun 16 Oct - 23:00
Défi accepté ♥:

La serviette sur les épaules, les deux émeraudes d’Aure avisaient une dernière fois cet homme qui profitait de la chaleur des flemmes du feu. Une main sur la rambarde en bois menant à l’étage, le corps en ouverture vers la silhouette masculine, la rousse eut ce petit moment d’hésitation, ne ferait-elle pas mieux de profiter encore un peu de cette rencontre si singulière ? Ses lèvres s’étaient pincées, alors qu’elle abandonnait définitivement la possibilité de rester encore un peu. Aure avait simplement souri à son bonne nuit, répétant les mots avec une délicatesse certaine avant de gravir définitivement les marches menant à l’étage. Finalement, sa tasse d’eau chaude était restée sur la table de la pièce à vivre, ne rêvait-elle plus que d’une seule chose, se glisser dans sa baignoire à température ambiante. Le fait de laisser Odard seul ne semblait nullement la gêner, lui faisait-elle suffisamment confiance pour comprendre qu’il ne ferait rien qui risquerait de déranger le lieu.  Poussant la porte de la salle d’eau, qu’elle ne tarda pas à refermer, Aure s’était dévêtue laissant glisser sur sa peau les tissus qui la recouvraient encore il y a peu. Par la suite, la rousse ne s’était pas fait prier pour rentrer dans la grande bassine, frissonnant de plaisir au contact de la chaleur de l’eau sur son corps. Un moment de calme, de solitude, de plénitude.

Les yeux de la mage, n’avaient pas tardé à se fermer, son esprit a vagabondé ailleurs, alors que tous ses membres se relâchaient peu à peu. Où était-elle à présent ? Pas si loin, simplement sous cette pluie désormais plus battante que précédemment, proche de ses animaux qu’elle avait vu avec le barde. Il était là d’ailleurs lui aussi, à la regarder avec cette simplicité, à la noyer sous une multitude de paroles qu’elle ne comprenait pas toujours. La jeune femme l’avisait avec intérêt, alors qu’elle se redressait doucement, abandonnant son assise dans l’herbe gorgée d’eau pour se retrouver debout. Odard était semble-t-il obnubilé par cette corne qu’il tenait tant à récupérer, à moins que cela soit déjà fait ? La pluie avait redoublé d’intensité et l’homme à la langue bien pendue avait commencé à compter son récit en chantant, des rimes, des beaux mots, ceux qu’Aure n’utilise pas, jamais et puis il sort cette flûte, commence doucement à jouer tout en dandinant de la tête et des épaules.

Le rire de la rousse était étrange et si rare à la fois, était-elle ivre ? Probablement. Sa vision devenait trouble alors que les vêtements qu’elle porte humide et pleine d’eau viennent épouser à la perfection la moindre de ses courbes. Contre toute attente et sous la pluie qui n’avait de cesse de dégringoler de ce ciel grisâtre, Aurore s’était mise à danser, à sautiller sur place, comme une enfant qui découvre le vrai sens de l’expression « se laisser aller ». Ses hanches ondulaient doucement, alors que ses mains et bras tendaient des mouvements plus fluides, plus féminine sans pour autant que l’effet soit entièrement réussi. Elle souriait la rouquine, visiblement heureuse de passer ce moment plein d’insouciance en si bonne compagnie, tout semblait se dérouler pour le mieux, jusqu’à ce que ça respiration se coupe, se hache, qu’elle tombe sur le sol à la recherche d’air, le regard perdu dans la silhouette masculine qui venait immédiatement à son secours.

La tête brusquement hors de l’eau, les lèvres bleutées, Aure cherchait déjà à reprendre son souffle, reprenant doucement ses esprits. Elle était là, dans sa salle de bain, l’eau était désormais froide, sa peau fripée, combien de temps était-elle restée dans son bain ? Depuis combien de temps s’était-elle assoupie ? Lentement, elle avait fini par retrouver une respiration convenable, moins saccadée, elle avait manqué de peu de se noyer… Cela aurait été presque trop pitoyable de mourir ainsi, même pour elle, cycle ou non. Après une quinte de toux un peu trop bruyante à son goût, Aure avait fini par sortir de l’eau froide, laissant les quelques gouttes dévaler ses courbes pour retomber dans le grand récipient. Enjambant un rebord d’une jambe, puis de l’autre, la mage s’enroula lentement dans la serviette tout aussi peu chaude que le lieu qu’elle venait de quitter. Brbrbrbrbr.


- « Tu es vraiment une sacrée cruche… » murmura la jeune femme pour sa propre conscience sans terminer sa phrase.

Ramassant les vêtements qui traînaient sur le sol, mettant le tout en boule contre elle, c’est bien nu et protégé par une petite serviette qu’elle était sortie pour rejoindre sa chambre, refermant immédiatement la porte. Un soupir s’était extirpé de ses lèvres, avant qu’elle se laisse tomber sur son lit, avisant un long moment le plafond avant de s’endormir.

La nuit fut plus calme, reposant, même si les premières lueurs du jour n’avaient pas tardé à la mettre en éveil. Comme souvent son esprit commençait déjà à s’animer dans diverses réflexions, lui offrant une migraine à peine les yeux ouverts. La pluie n’était désormais qu’un mauvais souvenir, la météo semblait beaucoup plus conciliante. A l’étage inférieur, des bruits significatifs étaient parfaitement perceptibles, signe que la vie et le quotidien ne changeaient pas. Dans un petit ronchon presque trop habituel, la rousse s’était vêtue d’un pantalon en cuir, d’une chemise blanche en lin et d’une petite veste en cuir. Elle avait remonté en une queue de cheval haute sa longue tignasse rousse, dévoilant un visage fin en opposition avec ses joues un peu rondes. Pas de bijoux, pas de fioriture particulière, Aurore était une femme authentique, qui n’aimait pas franchement sortir du lot, ou attirer l’attention sur sa personne. Elle avait par la suite rassemblé ses affaires, ce qu’il suffirait pour le voyage, des cordes, des couvertures légères, de quoi installer un campement, des vêtements de rechange, le minimum qu’elle s’appliquait à faire rentrer dans un petit sac, qu’elle hissa sans attendre sur son dos. Dévalant par la suite les marches jusqu’en bas, la rouquine s’arrêta au pied des escaliers, avisant le couple qui s’enlaçait devant le feu mourant.


- «  Faites comme-ci je n’étais pas là » dit-elle amusée « Odard est levé, je voudrais faire quelques achats avant le départ. »
- « Odard ? » souligne la mère dans un demi-sourire.

Aure roule des yeux, secouant doucement la tête, puis répondit au tac au tac, visiblement lasse des sous-entendus et cette pression vis-à-vis des relations.

- « Nous allons peut-être mourir ensemble, je ne vais pas lui signifier un danger en perdant du temps en l’appelant monsieur très cher Coursang tout de même. » Elle fit une pause, plissa le nez « Je vais préparer les montures, si il n’est pas déjà dehors, dites-lui de me rejoindre là-bas. Il doit se souvenir du chemin. »

Aucun des deux n’eut le temps de rétorquer quoi que ce soit, que déjà, la porte de la demeure s’était refermé derrière la jeune femme. Alderic avisa sa compagne avec de gros yeux ronds.

- «  Tu exagères, tu vas finir par réussir l’impensable et la mettre en colère. »
- «  Voyons, depuis petite, elle n’a jamais offert un mot plus haut que l’autre, ce n’est pas maintenant que ça va commencer. »
- « Mh, le cycle peut parfois jouer des tours, ma chère tu sais. »

Le couple avait continué sa conversation, qui n’avait pas tardé à devenir plus légère, moins sérieuse au fil que les minutes s’écoulaient. De son côté Aure était en train d’installer des tapis sur les cheveux, espérant rendre ainsi le trajet plus confortable pour le barde. Si elle avait hésité un instant le fait de partager une seule et unique monture, elle avait rapidement changé d’avis, la sécurité était plus importante que n’importe quoi d’autre.

- « Vous avez plutôt intérêt d’être bien et agréable avec notre ami le barde vous deux. » Dit-elle à l’intention des fidèles destriers.

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