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Chroniques d'Irydaë
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 Jusqu'aux sommets des montagnes

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Jusqu'aux sommets des montagnes - Page 3 EmptySam 9 Déc - 23:47
    Sa petite escapade avait jeté un froid et il pouvait le comprendre, on n’engage pas quelqu’un pour s’en aller batifoler aux premiers battements de sourcils énamourés. Mais il était en un sens resté fidèle à lui-même, saisissant la vie comme elle se présentait sans réellement se soucier des conséquences que cela aurait pu avoir. Il voulait vivre sans regrets aucuns, mais en l'occurrence il commençait à se demander si ses “appêtits” ne lui avaient pas finalement mis des bâtons dans les roues. Loin de lui l’idée de vexer son amie, encore moins de lui mentir, mais qu’aurait il pu lui dire d’autre? À l’écoute de ses mots prononcés avec une froideur qu’un Khoral n’aurait pas renié, le barde rougit légèrement et - chose rarissime - en manqua la corde de son luth, préférant regarder devant lui plutôt que d’affronter un courroux qu’il avait légitimement mérité.

    Oh je suis navré ma mie… Vraiment… Mais hormis m’excuser pour mon comportement animal qu’aurais-je bien pu vous dire? Il est vrai que notre “discussion” n’a comporté que peu de mots mais j’ai suffisamment de finesse et de respect pour vous pour ne pas vous envoyer mes penchants libidineux au visage. Vous méritez mieux que cela Aumie. Mais je vous présente mes plus plates excuses très chère, et je vous promets qu’à présent mon regard est entièrement fixé sur notre expédition.”

    Malgré les avertissements d’Aurore le trajet s’était plutôt bien déroulé, hormis la dépouille d’un animal sur le bas côté de la route en proie aux charognes qui avait effrayé les chevaux. Ils avaient senti le changement dans l’air à mesure qu’ils progressaient vers l’ouest, un froid glacial qui descendait des montagnes et n’avait rien à envier à un Khoral des plus féroce. La végétation s’était petit à petit raréfiée, densifiée, regroupée en bosquets plus larges et épais parés à faire face aux vents et à la neige. Les chênes avaient laissé place aux sapins, les vallées verdoyants à la neige.

    Bienvenue en Khurmag. Bienvenue en hiver. Ici le soleil est trop lointain pour faire autre chose qu’éclairer, et encore. D’aucuns disaient que les grandes montagnes à l’ouest étaient en permanence plongées dans une semi pénombre, en proie à des vents terrifiants venus du néant tout proche, et qu’aucune chaleur n’y pénétrait jamais. Que la vie pouvait être bornée, butée dans son extrémité, féroce dans sa volonté de s’étendre partout. Qui pouvait bien vivre là? Et comment pouvait on être assez fou pour ne pas abandonner ces terres aux loups et aux lièvres? Et pourtant ces montagnes qui abritaient certaines des plus coriaces formes de vies semblaient être un rempart assez rassurant pour que les hommes s’installent à leurs pieds, bornés eux aussi et déterminés à vivre quoi qu’il en coûte.

    Bienvenue en Khurmag, bienvenue à Variel. Où les hommes sont assez stupides pour vivre et assez fous pour aimer ça. Où l’on érige des murs assez imposants pour contrer la nature elle-même. Où la vie est finalement chaude et vibrante, peut-être encore plus qu’ailleurs.

    Oui. Nous y voilà. Je dois dire qu’il y a meilleur endroit au monde pour poser son baluchon très chère, mais j’imagine qu’il doit y avoir bien pire, très certainement. Malheureusement Aumie je ne connais de Variel que son fameux dôme, pour le reste eh bien j’imagine que nous allons devoir trouver quelque chose. Je ne me sens pas d’humeur assez guerrière pour dormir à même le sol dur d’une ruelle ce soir, j’espère que vous n’y voyez pas d’inconvénient. Peut-être qu’une taverne cossue ferait l’affaire? Nous pourrions nous y divertir avant de passer la nuit et qui sait, peut-être que quelques chopes de la bière locale aideront à dissiper ma terrible bévue pour laquelle je m’excuse encore mille fois ma mie. Je vous promets de ne jeter mon dévolu sur personne aujourd’hui, parole de barde.”

    L’entrée en ville ne se faisait que par un seul point, lourdement gardé. C’était en soi quelque chose de rassurant, si tant est que l’on n’eut rien à se reprocher, et parce que personne mieux qu’un soldat ne saura vous dire où boire et vous amuser. Après tout dans ces contrées l’alcool a valeur de nectar et nombreux sont les idiots qui pris en plein froid n’eurent la vie sauve que grâce à l’immense taux d’alcool qui avait empêché leur sang de geler.

    Un des gardes à la mine patibulaire observait les arrivants en grognant son approbation ou au contraire son mécontentement à son second, bien plus jeune et sympathique. Peut-être que le vieux bougre avait souffert des armes Daënars et ne pouvait plus s’exprimer que de cette manière, ce qui aurait expliqué ses humeurs et son faciès de geolier. Ou peut-être était il simplement las et usé, rendu aigre par une météo trop peu clémente et un métier bien trop exigeant. Le barde s’approcha des deux hommes, tirant son chapeau comme il seyait à tout homme convenablement éduqué.

    Bien le bonjour nobles seigneurs! Mon amie et moi arrivons de Darga pour quelques jours et nous aurions aimé un endroit pour passer la nuit, peut-être une taverne où je pourrai exercer mes talents de barde.” Il pointa du menton le manche de son Luth qui dépassait de son épaule. “Connaitriez vous un endroit susceptible de convenir aux deux voyageurs que nous sommes? Nous en vous serions grandement reconnaissants messires!”

    Le premier des deux gardes grogna et renifla avec dédain, semblant trouver l’idée de se promener avec un crincrin totalement grotesque et ridicule.

    Mhprf.”

    Le second semblait bien heureux de voir enfin arriver quelqu’un après avoir attendu des heures, debout face à l’immensité des plaines qui s’étiraient autour de Variel, la compagnie de son camarade n’étant pas des meilleures. Après une rapide inspection du chariot et des regards humides en direction d’Aurore le jeune homme délaissa légèrement sa réserve toute militaire pour s’ouvrir un peu aux deux voyageurs, après tout on n’était jamais trop prudent.

    Bonjour voyageurs. Madame. Une taverne vous dites? Vous trouverez “Le Forain et le Fou” à quelques rues d’ici, ou bien “La plume du Poulpe” qui est bien plus loin. Si vous cherchez une petite auberge bon marché il y a bien “Les Trois Voleurs” dans les bas quartiers mais… Ce n’est pas vraiment un endroit recommandé. À vous de voir.” Sur un nouveau grognement de son collègue le jeune homme se raidit légèrement et leur fit signe de passer, dégageant le passage en s’écartant de quelques pas sur le côté. “Bienvenue à Variel.”

    Ils passèrent les grandes portes pour ne s’arrêter qu’une fois de l’autre côté, happés par le spectacle grandiose de l’immense mur végétal qui les entourait, merveille d’illusion célèbre pour son réalisme et son sa virtuosité. On pouvait se sentir comme chez soi ici, à l’abri derrière une muraille végétale qui ne l’était pas mais qui offrait tout de même un grand réconfort. Certains aimaient vivre entourés d’espace, d’étendues d’eaux claires et foisonnantes de vie. D’autres aimaient la compagnie des plantes et le sentiment de bien être qu’elles apportaient, le bourdonnement des insectes et les piaillements des oiseaux qui voletaient çà et là. Malgré tout la nuit était froide et bien qu’à l’abri du vent les rues restaient glaciales et étrangement silencieuses. C’était comme si à l’abri de son dôme la ville vivait hors du temps, une sorte de jardin à ciel ouvert où les éléments n’avaient que peu d’emprise. Variel était calme et paisible, malgré l’endroit où elle se trouvait elle ne servait que de contrefort à cette région désolée. Le reste était bien pire…

    Odard arrêta un instant sa jument, tant pour apprécier le silence que pour se perdre dans la contemplation du décor qui les entourait, qui si il était totalement faux était sublime. Quel talent! Et quel mage fallait il pour accomplir un tel exploit! Il se permit un petit sifflement admiratif qui se perdit en échos avant de faire face à son amie.

    Eh bien voilà un endroit des plus singuliers très chère, je dois dire que je suis admiratif. Par les Saints Rognons quel brio! Et je dois dire que leurs tavernes ont des noms particulièrement imagés, un poulpe avec des plumes? Bigre! Et vous Aumie? Laquelle de ces auberges vous inspire le plus? Naturellement le séjour est pour moi alors choisissez en toute liberté, nous pouvons même en trouver une autre qui sera plus à votre goût si l’envie vous en prend!”

    C’était peut-être la dernière nuit confortable qu’ils passeraient avant quelques temps, alors il entendait bien la passer au chaud, dans une chambre avec deux lits et sans serveuse trop légère. Un bon feu, un brin d’alcool et quelques chansons aideraient à dissiper les raideurs du voyage et décoincer leurs dos endoloris. En attendant il n’était pas contre un peu de marche, aussi descendit il de sa monture pour la mener par la bride et venir se placer à la hauteur d’Aurore.

    C’est vraiment splendide ma mie, n’est-ce pas? Mais ne devrions nous pas tout d’abord songer à trouver une écurie? Je doute que nos montures apprécient de passer la nuit dehors.”

    Les sabots des chevaux résonnaient sur le sol des rues désertes à cette heure, c’était le genre d’endroit où l’on finissait par se sentir bien, presque chez soi. Malgré l’horreur de son histoire récente et les cicatrices bien dissimulées de la guerre. C’était calme, paisible, presque un peu trop. Mais les tavernes étaient toutes les mêmes, peu importe l’endroit du monde où l’on se trouvait. Ils y trouveraient de quoi se divertir et se reposer, et avec un peu de chance le barde pourrait louer ses services en échange de la nuit, ou d’un repas, même s’ils ne manquaient pour l’occasion pas de vivres.

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Jusqu'aux sommets des montagnes - Page 3 EmptyLun 11 Déc - 11:13
- « Pas d’humeur à dormir sur le sol ? Le sport était trop rude pour vos vieux os ? » sa voix était piquante, un sourire en coin venant ponctuer sa phrase. « De la bière, êtes-vous certain que vous pouvez placer dans la même phrase l’idée même de vous tenir à carreau et celle de vous abreuver le gosier de ce fabuleux mélange, parfais bien alcoolisé dans certaine région ? »

Aurore n’était pas une femme particulièrement rancunière, quoique son comportement laissait entendre le contraire. Charge à Odard de lui faire oublier ce malencontreux incident de parcours par une action positive qui effacerait le reste. Ne lui restait-il plus qu’à trouver quoi. La rouquine n’était pas réellement jalouse, bien qu’elle est trouvée désagréable qu’un homme ayant la chance de partager sa compagnie, ayant presque obtenue sa confiance et un semblant de conversation alignant plus que deux mots, la délaisse pour une petite femme de bas étage, visiblement sans respect pour elle-même. Sacré Odard. C’était tellement répétée à plusieurs reprises tâchant de faire diminuer le sentiment désagréable qui animait son esprit. Même après autant de kilomètres et un trajet sans encombre, elle ne démordait pas de cet incident. Glissant doucement le long de sa jument, dont elle flattait l’encolure une fois pied-à-terre, elle tira légèrement la longe pour la faire avancer jusqu’à l’entrée. Elle jugeait cela plus agréable que ce soit pour les futurs interlocuteurs, ou pour elle-même d’être sur la même hauteur pour pouvoir échanger.

Une fois devant les gardes, l’accueil offert n’avait pas été digne de l’attente que la rousse s’était imaginée. Froide, ne donnant guère envie de s’aventurer plus loin, elle avait même jeté un regard vers son complice d’aventure pour s’assurer que la même idée ne lui traversait pas l’esprit. Visiblement non, puisque celui-ci avait poursuivi sa demande en argumentant davantage. L’homme plus âgé s’exprimait de grognement en grognement, peut-être n’avait-il plus de langue pour parler convenablement ? Quoi qu’il en soit, ce n’était nullement sur cette silhouette gagnée par le temps que le regard émeraude de la jeune femme s’attardait, mais bien sur le deuxième, plus jeune, ayant visiblement le don de formuler des mots.

- « Bonsoir » s’était-elle contenté de dire entre deux ‘mh’ du vieux débris. « Merci pour les informations, la bonne soirée à vous. »

Elle ne s’était adressée qu’à celui qui avait eu le respect de formuler une phrase complète, passant doucement les portes pour se retrouver enfin à l’intérieur. Ses deux prunelles brillaient d’une intensité nouvelle et même si l’accueil n’avait pas été des plus agréablement, le fait d’être enfin à Variel avait, semble-t-il, balayer toutes ses mauvaises pensées. Avisant l’environnement tellement différent, tellement faux, la rousse n’avait nullement ressenti l’engouement du barde, au contraire, elle avait peut-être trouvé sa triste. Vivre dans une création de toute pièce, s’enfermer dans du non réel plutôt de savourer chaque instant de ce qui était beaucoup plus vrai. Grimaçant légèrement, elle n’en restait pas moins admirative vis-à-vis du talent qu’il fallait pour mettre en place ce genre d’illusion, qui tiendrait forcement sur bon nombre d’individus. Odard voyait-il la même chose qu’elle où est-ce que la vision évoluait en fonction des préférences du visiteur, difficile à dire, au fond, Aure n’avait nullement envie de le demander. Préserver les mystères avaient quelque chose d’autant plus plaisant que le reste. Reportant son attention sur son partenaire de chasse, elle s’était frotté l’arrière de la nuque. Hésitante quant au chemin à emprunter ? L’homme avait bien spécifié que celle avec un nom de poulpe était plus loin, si en plus il fallait trouver une écurie, était-ce celle-ci qu’il fallait trouver.

- « Je penche aussi pour le poulpe, parce que l’animal me parle, puis ça nous permettra de visiter un peu donc de potentiellement trouver une taverne ? En revanche, je nous encourage fortement à progresser vite, le froid est vraiment omniprésent ici. »

Tirant davantage sur le licol, la rouquine ne s’était nullement attardée sur un débat inutile sur la direction qu’il fallait emprunter. Elle espérait pouvoir encore faire confiance à son instinct, ou simplement à ne pas se transformer en glaçon. Frottant ses avant-bras, la progression du binôme était plutôt lente, bien qu’efficace. Il fallait bien avouer que la découverte d’un paysage et d’une architecture si différente n’aidait en rien au fait de devoir accélérer le pas, malgré l’air glacial qui provoquait une multitude de frissons et une fumée blanche s’échappaient de leurs lèvres lorsque les deux échangeaient.

- « C’est vrai que c’est différent ici… J’ignore si c’est tout le temps ainsi, ou si le paysage évolue en fonction des pensées et sentiments des habitants de la ville… j’ai toujours eu cette impression que l’illusion n’était le fruit que de nos émotions profondes… »

Descendant lentement une petite ruelle amenant visiblement sur une petite place, dont l’eau de la fontaine ne devrait nullement couler au vu de la température, la rouquine avait fini par s’arrêter. C’était réellement étrange de vivre ainsi, de n’évoluer que dans des éléments faux. Coulant un regard vers le barde la jeune femme avait fini par se demander s’il apprécierait de vivre de cette manière, avec des éléments inventés de toutes pièces, qui rassurent certainement, qui permettent d’oublier la dureté de la vie, sans doute, mais qui n’en restent pas moins entièrement faux. Poursuivant leur progression, sans oublier les fidèles montures, celles-ci avaient finir d’ailleurs par se stopper net, visiblement attiré par l’odeur d’un foin promettant mille promesses. Alezane s’était mise brusquement à aller plus vite, entraînant avec elle sa cavalière qui marchait à côté d’elle, sans attendre elle s’était stoppé quelques rues plus bas, devant une immense écurie parfaitement fermée dont la pancarte semblait offrir mille promesses, toutes plus intéressantes les unes que les autres. L’appel du ventre et la gourmandise ne semblaient visiblement pas être uniquement des traits du caractère du barde.

- « Je crois que vous n’êtes définitivement pas le seul à avoir envie de vous remplir l’estomac, monsieur Dardard. » Elle avisa la pancarte une dernière fois « Allons-y, je suis certaine qu’il a encore de la place et en plus regardez. » Elle montra un bâtiment plus loin, avec une immense représentation d’un poulpe sur la façade avant « je suppose que c’est également l’auberge, taverne qu’on recherche. »

Tirant doucement sur le licol, la rouquine avait poussé la haute et large porte de l’écurie pour rentrer, à peine le seuil passé que déjà une petite bonne femme s’était précipité à leur rencontre, elle avait l’air de tout, sauf d’être saine d’esprit. Ses gestes partaient dans tous les sens lorsqu’elle s’exprimait et pire, elle avait un débit de parole tellement rapide que la rouquine ne comprenait qu’un mot sur deux, espérant secrètement que le barde avait une façon de traduire de tout ça…

- « B’jour, B’jour, ma bonne dame, mon bon monsieur ahaha, j’suis surprise d’avoir des clients à cette heure tardive, vous les bipèdes vous n’avez qu’à nous suivre.. Venez ma bonne dame, venez mon beau monsieur » dit-elle en récupérant les longes des deux montures « Olalala, vos sabots ont du faire du trajet, je vais astiquer tout ça, et rhooo votre poil, c’est une honte de ne pas le brosser avec plus d’énergie, un soin à base de plante devrait vite rendre du tonus à votre magnifique crinière, vous êtes là pour combien de nuits, plusieurs j’espère ! OOOOOH, mais regardez-moi ce petit vendre qui grogne, vous devez avoir faim, NE BOUGEZ PAS »

Aurore en restait silencieuse, perdue, dépaysé complètement par la façon de faire de la gérante du lieu qui ne semblait même pas prendre en considération la présence d’Aurore et d’Odard. Elle avait déjà retiré l’équipement des deux chevaux, avaient remplis les mangeoires de foin, de pomme et de carottes et de granulé, de l’eau fraîche avait été placée dans l’abreuvoir et elle s’afférait déjà à brosser énergiquement un animal après l’autre.

- « Qu’est-ce que vous faites encore là vous deux ? C’est pour les clients ici, vous n’êtes pas des chevaux, non ? Allez, hop du vent, du vent ! »
- « » coulant un regard à Odard, Aurore était pour la première fois de son existence devenue muette de réactions et de répartie.

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Jusqu'aux sommets des montagnes - Page 3 EmptySam 16 Déc - 16:05
    “Il ne s'agit pas tant de me tenir à carreau que de profiter des fabuleuses largesses que m’offre la vie! Quand il est question de bière ma mie, s’abreuver n’est pas un mot adapté, non. Il s’agit d’un nectar Aumie, d’un don des Dieux que nous autres pauvres mortels ne pouvons qu’apprécier et savourer à sa juste valeur! Point de ripaille ni de beuverie, uniquement un plaisir fort heureusement abondant et accessible!”  

    Après quelques plaisanteries innocentes et un regard appuyé du garde en faction envers Aurore, les deux jeunes gens franchirent l’unique porte qui les séparait de Variel. Il est vrai que l’accueil n’était pas digne des plus grandes cités, il aurait même réussi à les faire fuir si le climat n’était pas si capricieux et si les loups qui peuplaient la forêt toute proche n’avaient pas la fâcheuse habitude de hurler à l’unisson. Alors oui ce n’était que des loups, que la présence d’hommes effrayait la plupart du temps mais certaines croyances ont la vie dure. Répétez à un jeune Khurmi qu’un loup viendra le dévorer à la première bêtise et ce dernier se figera comme un lièvre sous la lune au premier cri lupin, qu’il ait trente ou cinquante ans.

    Le grand dôme formait une barrière aux bêtes et aux éléments, mais aussi au vent. L’air était sec et presque immobile, laissant dériver des nappes de brumes glaciales au gré des ruelles, le tout sans un bruit dans ce décor irréel au possible qui se présentait devant eux comme une toile figée dans le temps. Une toile sublime et mensongère à la fois, qui sonnait comme une fausse note à en juger par la moue déçue d’Aurore. L’illusion du grand dôme était certes grandiose, elle n’en cachait pas moins une réalité bien moins chatoyante. Et pour quelqu’un d’aussi vrai, vivre sous un mensonge de cette ampleur relevait du non sens. Le barde pouvait le comprendre, mais l’horreur de cette réalité là ne valait elle pas que l’on l’embellisse un peu?

    C’est bien triste je vous l’accorde, mais je préfère voir cela comme un hommage à la vie plutôt qu’une volonté de dissimuler les affres de la guerre, qu’en dites vous très chère? Ainsi donc le poulpe vous parle, il est vrai que vous avez déjà eu maille à partir avec un khavcha, nul doute que cet établissement vous poussera à nous conter plus en détails ce souvenir ô combien délicieux!”

    Il n’y avait guère que quelques boutades pour se distraire et tenter de faire abstraction du froid mordant qui rôdait dans l’air immobile. Tout au plus quelques brises provoquées par l’ouverture de portes ou un courant descendant, une bourrasque venait parfois effleurer l’ouverture du dôme en provoquant un sifflement bas et sourd très bref. Une dose d’irréel de plus, mais rendu au pays de l’illusion qui aurait pu dire ce qui était réel ou non? Le barde pouvait apercevoir quelques fils de magie de ça de là, la toile formidable du sort qui recouvrait la ville, sans être capable de l’expliquer ni de se l’approprier. Un mélange d’admiration et d’horreur à l’idée de ce qu’un sort de cette ampleur pouvait dissimuler, même si tous ici savaient ce que la guerre avait coûté.

    Je pense que comme Khurmag cette cité est figée ma mie, à la fois dans le temps et dans le froid. Les Khurmis n’ont pas pour réputation d’avoir les pensées les plus vives, aussi quand bien-même le sort réagirait aux émotions des habitants, il n’en ressortirait malheureusement rien de transcendant je le crains.”

    Ne pas bouger. Autant dire que même si l’ordre ne leur était pas destiné les deux jeunes gens s’étaient figés de stupéfaction. Même Odard qui jouait pourtant souvent du martèle-crâne avec sa langue en était muet. Ça ne pouvait être qu’une anomalie, un être dont les Architectes devaient plaisanter entre eux tant elle était éloignée de tout standard humain. D’apparence elle était parfaitement normal, mais il suffit qu’elle ouvre la bouche pour que la réalité s’impose à eux comme un coup de poing, sous la forme d’un débit de parole et de gesticulation absolument ahurissant. Ignorant s’il fallait rire ou pleurer le barde avait machinalement porté la main à sa ceinture, se demandant si elle n’allait pas se jeter sur eux pour une raison qu’elle seule connaîtrait. Sa dague était là, familière bien qu’il ne soit pas versé dans le maniement des armes, sa présence seule suffisait à le rassurer de la folie bouillonnante qui allait et venait devant eux en faisant de grands gestes dans le vide.

    Nom de…”

    Les chevaux ne s’étaient pas fait prier, bien conscients d’avoir plus à faire à un animal qu’à ces humains qu’ils craignaient parfois. Deux ventres sur pattes qui s’étaient jetés dans leurs mangeoires sans un regard en arrière. Eux au moins ne saisissaient ni la folie ni l’apparente dangerosité de leur palefrenière et se laissèrent aller à se remplir l’estomac en battant joyeusement de la queue.

    Ils s’étaient regardés un instant, se demandant si cette harpie était véritablement en train de les mettre dehors, un air ahuri sur leurs visages figés auxquels elle ne prêtait aucune attention. Rien, pas un regard, juste un geste de la main comme une mouche que l’on chasse. Le barde avait fait un pas en avant, bien décidé à corriger cette infamie. Qui osait les traiter de cette manière? Et comment un être aussi vil pouvait il être en charge d’une écurie? Aussi abasourdi qu’il était, Odard était scandalisé, révolté qu’on puisse à la fois être aussi doux avec des animaux et d’une impolitesse sans nom envers ses congénères.

    Alors là non! Je…”

    La main d’Aurore avait retenu son bras avant qu’il ne se lance dans une tirade dont lui-même ignorait les répercussions. Pour ce qu’ils en savaient, cette vieille folle était capable de les noyer sous une pluie de fers à chevaux ou bien de se mettre à parler tellement vite qu’ils en seraient tombés raides, inconscients et en proie au froid qui se faisait encore plus mordant au niveau du sol. Un regard de sa part, comme pour le convaincre de ne pas se lancer là dedans. Et le barde recula, finalement plus raisonnable qu’il ne l’aurait crû. Il s’assura d’un coup d’oeil que les chevaux seraient bien traités, et ils le seraient. Et fit brusquement volte face avant de se diriger de nouveau vers la ruelle. Non sans avoir jeté un sort à la palefrenière, celle-ci entendrait le bourdonnement d’insectes pendant quelques temps, comme s’ils se tenaient juste derrière elle, mais ne parviendrait jamais à en trouver l’origine. De quoi devenir fou, mais quand on l’était déjà, où se situait la limite et quels dégâts une telle plaie pourrait causer aux ruines de son esprit? Ils en auraient très bientôt le coeur net. Mais maintenant que les chevaux étaient en sécurité, il leur restait à se mettre au chaud et à l’abri pour la nuit.

    Je ne sais quoi penser Aumie… Etait-ce vrai? Comment peut on… Fichtre, partons!”

    La Plume du Poulpe était tout proche, seul moyen de réaliser qu’ils avaient beaucoup déambulé dans ces rues qui pour eux se ressemblaient toutes. Au moins ne seraient ils pas loin de leurs montures, si la tenancière de l’écurie était au moins aussi douce avec les animaux qu’elle était exécrable avec les humains ceux-ci seraient parfaitement en sécurité, nourris et pansés.

    Les tavernes du monde se ressemblent toutes, puisque c’est finalement l’un des traits les plus répandus des hommes : le besoin de boire, de se divertir en public. Qui aurait pensé aux origines du monde que de se délecter du nectar de fruits pourris deviendrait un tel pilier de la civilisation? Le premier aubergiste ayant peut-être eu l’une des meilleures idées après la découverte du feu. Ajoutez à cela le commerce des femmes, du tabac et de finalement tout ce qui est immoral et nocif et vous obtenez la taverne type, étendard par excellence de tout ce que l’homme a se faire à la fois de meilleur et de pire. Un florilège de luxure et de débauche nappé d’un soupçon de bon vivre et de bonne humeur.

    La Plume du Poulpe n’avait ni l’un ni l’autre, quasiment aucun de ses clients ne savait lire et il était fort probable qu’aucun d’entre eux n’avait jamais vu un tel animal de leurs propres yeux. Toujours est-il que derrière la pancarte bien imagée qui se balançait doucement au bout de ses chaînes, derrière son verre fumé volontairement mal dégrossi qui laissait passer la lumière jaune de l’âtre et du lustre, se dressait un tableau finalement bien familier. Celui des tables et des silhouettes que l’on distinguait à peine, noyées dans une fumée épaisse qui sentait à la fois le goudron et l’exotisme. Celui des rires et des injures qui volaient çà et là dans la salle. De la musique qui filtrait sous la lourde porte de bois. Un spectacle bien humain, rassurant tant il était primaire. Les meilleures choses sont les plus simples disait-on, et celle-ci ne dérogeait pas à la règle. Mais le trait le plus frappant et à la fois le plus délicieux était la chaleur qui s’échappait de l’établissement, formant un voile de condensation sur les carreaux qui s’écoulait lentement. Ici la chaleur rendait le froid plus difficile à supporter, parce qu’elle le rendait plus humide et plus pénétrant. Alors réprimant un frisson le barde ouvrit la porte et s’inclina en faisant signe à son amie de passer la première. La galanterie avant toute chose.

    Il y eut un bref silence lorsqu’ils entrèrent. Ici on semblait peu habitué aux étrangers, encore moins aux voyageurs. Qui aurait dans l’idée de voyager dans le coin? Et dans quel but? Pourtant natif de Khurmag Odard tranchait dans le décor austère de sa terre natale, tant il était l’opposé de ce que l’on disait des Khurmis. Aurore était rousse et cela en soi suffisait à la taxer d’exotique aux yeux de bon nombre de gens, il y avait peu de chances qu’elle s’en soucie mais il n’y avait qu’à voir le regard de certains hommes qui contemplaient sa toison avec un brin de luxure dans les yeux, et celui des femmes un peu jalouses, un peu étonnées aussi. C’est qu’elle était belle, et nouvelle dans le coin. Ce genre de choses pouvaient vite remiser les prétendantes d’un jour au second plan. Mais personne ne dit rien. Passé cet instant de flottement où tout le monde se jaugeait du regard les conversations reprirent comme elles s’étaient tues. Et quelques secondes plus tard on n’aurait pas pu dire que les deux amis venaient à peine de passer la porte.

    Bien le bonjour nobles seigneurs!”

    Le barde s’inclina légèrement, tout sourire. Quelques chopes se levèrent en guise de réponse, quelques exclamations. Et chacun se désintéressa de ces deux nouveaux venus qui ne l’étaient désormais plus. Une table libre se dressait devant eux et Odard s’avança pour tirer une chaise à son amie avant de s’asseoir et d’attendre que l’aubergiste ne vienne les voir. Il s’emplit les poumons de l’air parfumé de la salle et sourit en éliminant de ses bras les dernières traces de chair de poule. Il faisait chaud et au vu des chopes qui trônaient sur les tables l’établissement ne manquait pas de boisson. Un bon point, que serait une taverne sans bière après tout?

    La première est pour moi très chère! Au moins nos recherches n’auront pas été trop laborieuses, et quel bonheur que le feu d’un âtre! Je doute que les prochaines nuits soient aussi confortables, mais n’est-ce pas là tout l’intérêt de cette aventure ma mie? J’entends, quel mérite en retirerions-nous si cette fameuse corne nous tombait tout droit dans les bras? Aucun assurément! Sachez que j’en apprécie jusqu’ici tous les tenants! Que souhaitez vous commander?”

    Ils devaient avoir aussi faim l’un que l’autre, sans parler de la soif qui n’était pas quelque chose à prendre à la légère. Un fumet de ragoût planait par dessus la fumée des pipes et le barde en saliva d’avance. Au moins un lieu de normal au coeur de cette ville, de cette région étranges.

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Jusqu'aux sommets des montagnes - Page 3 EmptyMer 20 Déc - 18:49
Odard allait inévitablement s’emporter, de sa petite taille, la rouquine l’avait parfaitement compris. Sa main s’était levée et celle d’Aurore s’était faite plus vive pour agripper l’avant-bras du barde. Le duo n’était pas là pour faire le moindre scandale, la moindre animation. Ils allaient simplement passer une nuit dans l’étrange ville, s’imprégner du fonctionnement, de la manière de s’exprimer des personnes qui vivaient aussi. Peut-être même apprendre des autres coutumes, tous ne devaient pas ressembler à cette bonne femme, préférant la compagnie des animaux à celle des hommes. Dans le fond, la rousse ne pouvait nullement jeter la pierre à la palefrenière, pour le peu qu’elle avait vu, pour le peu que la compagnie humaine lui avait porté, Aure avait systématiquement préféré la solitude. Haussant lentement les épaules, la jeune femme avait simplement secoué son visage de gauche à droite, afin de signifier qu’il était inutile de s’emporter. Une fois à l’extérieur et les bras chargés de l’ensemble du matériel, que la rouquine avait regardé visiblement amuser la réaction de son partenaire. Un petit rire avait même fini par s’échapper de ses lèvres, alors qu’elle secouait une nouvelle fois la tête. Sacré Odard, si il n’existait pas, il faudrait sans aucun doute l’inventer.

- «  Allons, allons Odard, seriez-vous impressionné par plus de caractère que vous ? » un nouveau rire, suivi d’un roulage des yeux dignes des plus grands «  Allons-nous réchauffer autour d’une bonne bière, je suis convaincue que cela vous fera oublier ce malencontreux incident. » Fronçant légèrement les sourcils, comme une mère elle crut néanmoins bon de le mettre en garde «  J’espère que vous n’avez point usé de votre don sur cette pauvre femme, c’est que je commence à vous connaître. »

Haussant doucement les épaules, la rousse s’était appliquée à suivre le pas rapide de son client, qui semblait toujours contrarié. Rapidement, il avait fini par passer le seuil de la porte, suivi de la petite silhouette féminine les bras chargés plus que de raison. Le grincement de la porte avait clôturé l’arrivée quelque peu remarquée du duo. Se mordant la lèvre inférieure, la jeune femme ne semblait pas fortement à l’aise vis-à-vis des regards insistants se déposant sur sa petite personne, elle avait grommelé un bonsoir dans la barbe qu’elle n’avait pas, avant de déposer les affaires aux pieds de la table que le ménestrel avait choisie. Lâchant un soupir quelque peu bruyant, celle à la chevelure flamboyante s’était laissée tomber sur la chaise, visiblement épuisée. Contrairement à son ami, la rouquine n’avait qu’une idée en tête, loué deux chambres pour dormir profondément dans un bon lit à plume. Un peu honteuse, c’est après une longue tirade du barde qu’elle lui avait accordé un regard. Aurore ne l’avait absolument pas écouté, trop occupée à surveiller l’endroit, à le détailler avec des yeux pétillants, à en oublier même qu’elle était accompagnée. C’est en remarquant la présence de la jolie serveuse qu’elle comprit qu’il devait très certainement attendre sa commande. Se raclant doucement la gorge, elle fit entendre une voix douce, quelque peu étouffée dans le brouhaha constant de l’endroit et les éclats de rire.

- « De l’eau chaude avec des plantes fraîches du coin si possible. Sinon, une infusion convenable, qui ne m’énervera pas trop pour la nuit » souffla-t-elle tout en douceur. Elle releva son regard vers la serveuse ajoutant « Pourrions-nous également louer deux chambres s’il vous plaît, pour une nuit. »

Opinant rapidement la tête, la serveuse avait pris la commande de bière du barde avant de s’éclipser. Elle était revenue souriante quelques minutes après les bras chargés. Une chope immense et haute de bière, remplie jusqu’au bord, ainsi qu’une tasse d’eau chaude et une sélection de plantes fraîches de la région. La brune au sourire ravageur déposa également les deux clés avec le numéro des chambres, avant de s’éclipser. Ici le respect de l’intimité de chacun semblait être important. Ou presque. Le regard émeraude avait fini par s’arrêter sur un couple, la femme sur les genoux de celui qui semblait être son conjoint, dévorant sa bouche, laissant parfaitement visiblement le jeu de langue visiblement habile. La rouquine en avait avalé de travers son eau chaude, ponctuant cette surprise par une quinte de toux. Ronchonnant une nouvelle fois dans la barbe qu’elle n’avait pas, la jeune femme s’autorisa pour la première fois une petite critique, dévoilant ainsi une façon de penser plutôt ancienne et surprenante pour quelqu’un de son âge.

- « Je ne supporte pas ce genre de chose » dit-elle de sa voix étonnamment plus grave pour être discrète « Enfin, il ne manquerait plus que… »

La jeune femme n’avait-elle pas eu le temps de terminer sa phrase qu’un deuxième homme avait fait son apparition. La jeune femme gourmande d’échange salivaire, s’était précipitée à sa rencontre pour le saluer avec hâte, toute langue dehors évidemment. Les yeux de la rouquine c’était largement écarquillé, si bien qu’ils manquèrent de s’échapper de leurs orbites. Par tous les architectes, Aurore n’allait certainement jamais s’en remettre. Après avoir regardé avec insistance, le trio un peu particulier qui avait fini par s’éclipser à l’étage main dans la main, la rousse, elle avisa une nouvelle fois le barde. Choquée.

- «  Par tous les architectes, ne me dites pas que … S’il vous plaît Odard, dites-moi que je suis sujette à une nouvelle forme d’illusion… Mais où sont donc passées nos valeurs ?! »

Comme souvent lorsqu’elle était plus ou moins contrariée sa voix montait délicatement dans les aigus, appuyant sur les mots qui lui semblaient importants. Aurore n’en revenait définitivement pas et elle n’allait pas être au bout de ses surprises. Le poulpe n’avait pas irrité de ce nom pour rien visiblement, faisait-il à ne pas douter allusion à toutes les petites tentacules qui se tortillaient dans les pantalons alors que de charmantes danseuses venaient de faire leurs apparitions, en petite tenue évidemment. Les joues d’Aurore s’étaient atrocement empourprées alors que de nouveau ses yeux se gonflèrent en énoooooooorme billes. Son visage avait fini par pâlir, mais où donc étaient-ils tombés. De l’autre compté du comptoir, la charmante et discrète serveuse venait de s’exclamer avec joie et entrain :

- «  Tourné général, concours d’alcool » dans son plus beau sourire

Pas ça…. Avait dû penser la pauvre rousse qui s’enfonçait de plus en plus dans sa chaise. Son regard cherchait un peu de réconfort dans celui du barde, mais elle avait peur d’espoir qu’il puisse avoir un point de vue identique au sien.

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Jusqu'aux sommets des montagnes - Page 3 EmptyVen 29 Déc - 18:07
    Ils s’en étaient allés tous deux interloqués par cette entrevue des plus étranges. S’il était coutumier de certaines étrangetés et plutôt enclin aux extravagances ce genre d’attitude était au-delà de sa compréhension, que l’on préfère la compagnie d’animaux à celle d’hommes parfois voire souvent vils et retors était une chose, que l’on rejette ainsi ses pairs en était une autre. Quoi qu’il en soit certains étaient affublés d’une douce folie tandis que d’autres souffraient d’une trop grande normalité, cette dame là était clairement à part. Qu’elle y reste! Variel était certainement peuplé d’être plus à mêmes de les accueillir. Aurore était amusée, finalement après avoir fait quelques pas et vu une ombre étrange traverser le visage de la palefrenière, il commençait à trouver un certain comique à tout cela.

    Plus de caractère ne m’effraie pas très chère, encore que cela puisse parfois être explosif. Mais cette dame ne souffre pas tant d’un excès de personnalité que d’une folie tout à fait terrifiante! Aurais-je osé faire une telle chose? Peut-être bien Aumie, mais peut-être que son esprit est si carapaçonné que même mes humbles dons ne peuvent l’atteindre. J’imagine que nous en aurons le coeur net lorsque nous viendrons recouvrer nos montures et que nous aurons étanché cette horrible soif qui nous assaille tous deux depuis déjà bien longtemps!”

    Quelques foulées de plus dans l’air froid et sec et cet incident appartenait finalement au passé, remplacé par la douceur d’un feu et la chaleur d’un bon alcool bien mérité. La clameur d’une taverne vivante et la présence d’une amie, tout était pour le mieux. Un instant la crainte qu’un excès de boisson ne réveille son estomac encore convalescent traversa le barde, puis il se dit que la vie était faite de risques, puisqu’après tout et jusqu’à preuve du contraire on n’en avait qu’une. La commande d’Aurore fut accueillie avec un certain scepticisme, qui pouvait bien boire de l’eau, qui plus est chaude alors que tout autour les gens buvaient et ripaillaient à loisir?

    Bien le bonjour gente dame! Contrairement à mon amie je prendrai une chope de votre bière pour commencer, une brune. Ne dit-on pas très chère que la bière est à l’instar des femmes délicieuse sous toutes ses couleurs et tous ses aspects? À n’en pas douter celle-ci me ravira!”

    La jeune femme opina de la tête et revint chargée d’un plateau contenant la chope et une tasse fumante qui sentait bon les herbes fraîches et délicates, ainsi que deux clefs portant chacune un chiffre. Heureusement les deux chambres se suivaient et devaient donc être accolées, même s’il ne nourrissait pas l’idée de partager son lit avec Aurore Odard se sentirait plus rassuré en étant relativement proche, on ne sait jamais quel genre de malandrins peuvent errer dans les couloirs des auberges la nuit tombée. Et encore moins ce que l’alcool pouvait les pousser à entreprendre, pas que le barde se sente particulièrement guerrier ou capable de triompher de malfrats immanquablement plus robustes que lui, mais l’idée qu’ils ne soient pas trop éloignés le rassurait et il espérait qu’il en soit de même pour elle.

    Numéro 16 et 17 ma mie, au moins ne serons nous pas trop éloignés si d’aventure quelques scélérats nous tombaient sur le râble. Je promets de défendre chèrement votre vie et votre vertu si nous devions en arriver jusque là! Mais je ne vois pas de raisons pour qu’un tel drame survienne, tous ces gens ont l’air de bien comme composition! Mais qu’est-ce que… Par les Saints Rognons ma mie!”

    Les grands yeux ronds d’Aurore l’avaient distrait dans sa tirade. Et pour cause! Si tous ces gens semblaient être bien braves certaines de ces dames étaient décidément de bien petite vertu, des moeurs aussi légères qu’un jupon qui s’élevait sous la pression d’une main aventurer et de regards brûlants échangés avant de disparaître. C’était après tout une manière comme une autre de faire face aux affres d’une région aussi glaciale, la chaleur est dans l’humain lui avait-on dit, mais il n’avait pas imaginé que ce proverbe était tout sauf une image.

    Eh bien j’imagine que nous connaissons désormais la signification du Poulpe, reste à savoir ce que la Plume vient faire là-dedans. Quoi que non très chère, je ne préfère pas le savoir, certains mystères aspirent à le demeurer et ce pour le bien de tous! Mais je crains très chère que vous ne soyiez nullement victime d’un sort ou d’une hallucination, je crois simplement que ces gens ne s'embarrassent guère de valeurs ou de bienséance. Pas que les plaisirs de la chair soient une chose abjecte, bien au contraire, mais un peu de discrétion et de mystère apportent tant à mon sens. Bah j’imagine que nous ne les reverrons pas avant un moment, le brouhaha ambiant nous empêchera certainement de profiter d’un autre aspect de leurs… amusements.”

    Et comme un malheur n’arrive jamais seul, une cohorte de serveuses aussi légères que dévétues avait fait son apparition, apportant à chacun des clients une boisson offerte par la maison. Naturellement pas d’eau dans tout cela, que de l’alcool fort, une eau de vie de sapin de la région particulièrement odorante qui sentait la sève et les grands espaces. Comme si un tel breuvage ne pouvait que vous donner des envies de liberté, voire de libertinage, ce qui n’était le cas ni d’Aurore ni d’Odard, mais il aurait été bien malvenu de refuser une tournée. Tandis qu’Aurore coulait des regards horrifiés dans chaque recoin de la salle pour n’y trouver que plus de chair et de débauche, le barde lui tentait de garder une certaine contenance tant le mal être de son amie était flagrant.

    Je pense que nous pouvons aisément prétexter un long voyage pour nous éclipser gentiment, mais je crains que nous devions à minima boire ce premier verre. À moins que vous ne soyiez d’humeur à vous enivrer ma mie? Cela dit j’en doute fort. Sachez que si je suis adepte d’une certaine luxure je vous soutiens néanmoins dans cette épreuve qui semble être bien loin de vos principes, ce que je respecte. Si vous le souhaitez nous pouvons même nous mettre en quête d’une autre auberge, mais si vous souhaitiez rester ici je suggère que nous fassions chambre commune, je doute que ces soubrettes s’arrêtent au service de quelques chopes et j’imagine qu’il en sera de même pour tous ces gentilshommes réunis ici.”

    Leurs verres dûment posés devant eux l’un des clients se leva pour porter un toast, tout en assénant une fantastique claque sur la croupe d’une des serveuses qui s’éclipsa en riant gaiement. Aussitôt tous les clients firent de même et le barde les imita, tant par amour de l’alcool que par souci de ne pas faire tâcher. Un verre se dit-il, et ils pourraient aspirer à un calme et un repos bien mérité après les événements de ces derniers jours. Cul sec, comme il se devait de boire une eau de vie de ce genre, la garder en bouche aurait été jouer avec du feu et pour quelqu’un qui aimait tant parler la perspective de se brûler la langue était des plus déplaisante. Il reposa son verre sur la table et opina du chef à l’attention des clients.

    À la vôtre mes seigneurs! À la vôtre!”

    Il jeta un regard qui se voulait rassurant à une Aurore qui n’en menait pas large et au vu des corsages qui se faisaient de plus en plus lâches ça et là dans la salle il était certain qu’elle ne tarderait pas à vouloir mettre les voiles. Il la suivrait si c’était ce qu’elle désirait. Et si jamais la jeune femme décidait de se laisser aller à une folle nuit de beuverie et bien il veillerait à ce que rien de fâcheux ne lui arrive. Après tout n’était-ce pas son rôle de la protéger? Tout client qu’il était il se sentait finalement responsable du fait de l’avoir entraînée à travers le pays, aussi s’abstiendrait il de trop boire afin de rester alerte. Et aussi parce qu’il savait dans quels extrêmes il pouvait se lancer une fois proprement imbibé, ce n’était pas le genre d’image qu’il voulait montrer à son amie. D’un hochement de tête il lui témoigna son soutien et se rassit pour saisir sa chope. Restait à savoir ce qu’elle souhaiterait faire.

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Jusqu'aux sommets des montagnes - Page 3 EmptyMar 2 Jan - 14:08
Odard avait commandé une bière, chose qui n’avait guère étonné la rouquine. Celle-ci s’était contentée d’opiner, décrochant un sourire à la serveuse, trop bien faite physiquement pour que tout ceci soit réel. Aurore était loin de lui jeter la pierre, n’abusait-elle pas elle-même de l’illusion pour faire disparaître de temps à autre sa chevelure de feu ? Ainsi, la chasseuse s’était contentée d’attendre, se forçant à ne pas laisser son regard vagabonder sur le lieu de débauche. Refusait-elle simplement et efficacement de croiser le regard vitreux d’un homme, ou d’une femme à califourchon sur un autre individu que son époux. Ne pouvait-il pas avoir des personnes se comportant normalement et dignement pour une fois. Un soupir avait fui la barrière de ses lèvres, qu’elle avait d’ailleurs pincées, cherchant à camoufler la gêne qui rongeait le moindre trait de son visage. La my’tränne avait tenté de trouver un peu de réconfort dans la silhouette d’Odard, sans que celui-ci ne perçoive pleinement les appels à l’aide qu’elle lui lancé. Aaaaaah. Les hommes. La jolie serveuse n’avait pas tardé à refaire son apparition, déposant une tasse d’eau fumante à souhait, ainsi que le verre rempli à ras bord du précieux liquide visiblement tant adoré par le barde. L’employé avait également déposé les numéros de chambres, s’appliquant à préciser que les deux chambres étaient l’une en face de l’autre. La rouquine ne lui avait guère porté d’attention vis-à-vis de ses informations, chassant simplement l’air de sa main pour la voir disparaître de son champ de vision.

Si Aurore, semblait particulièrement emballé de découvrir l’environnement, son architecte et de chasser, elle dévoilait néanmoins aussi une autre facette de sa personnalité. Celle qui lui imposait de se comporter comme une femme non sociable avec idées plutôt anciennes dans la tête. Ses deux émeraudes avaient fini par fixer le barde, brillant d’une légère intensité, avant qu’un rire sincère ne s’échappe de ses lèvres. Il voulait la défendre, n’avait-il pas déjà prouvé combien il n’était pas doué avec une arme. Taquine, elle s’était contentée de lui sourire, répondant avec une simplicité et une honnêteté débordante :

- « Sans avoir l’intention de vous offenser Dardard, pour la sécurité de l’établissement, je vous serais infiniment reconnaissance de ne pas faire l’expérience de votre maîtrise d’une arme. Peu importe l’arme. » un nouveau rire un peu étouffé se fit entendre « Cependant, je vous suis grandement reconnaissante de l’importance que vous semblez m’offrir pour ainsi offrir au péril de votre vie, ma défense. »

La rousse avait doucement secoué la chevelure, quand il évoqua la question de découvrir le mystère de la plume, avant de simplement sourire quand il avait conclu un peu pour lui-même qu’il y avait des énigmes qu’il était bon de préserver intacte. Les deux billes de la rouquine avaient fini par s’écarquiller davantage aux dires du ménestrel, n’était-il pas en train d’admettre apprécier cette ambiance plus que festive, à la finalité douteuse ? S’appliquant à ignorer l’information, qu’elle aurait sans aucun doute préféré ne jamais obtenir, Aurore avait approché la tasse de ses lèvres, soufflant sur le liquide avant d’en avaler une gorgée. S’il y avait bien un élément en mesure de l’apaiser, c’était véritablement le pouvoir des infusions. Du moins, tout ceci aurait dû avoir le pouvoir de lui faire du bien et oublier quelque peu les comportements douteux… Cependant, un malheur n’arrivant jamais seul, la mage avait manqué d’avaler de travers en avisant les jeunes femmes en petit tenues débarquées pour annoncer la fameuse tournée générale. Des liquides à l’aspect fort dérangeants avaient été déposés sur la table et c’est dans une moue indiquant sans aucun doute possible sa pensée qu’elle avait regardé l’organisatrice de tous ces événements. C’était bien la dernière fois qu’elle se risquait de dormir dans un établissement qu’elle ne connaissait pas. Buvant une gorgée de son thé, la jeune femme tâchait de faire abstraction de tout ça, jusqu’à ce que le barde prononce l’ultime faux pas. Adepte de luxure, vraiment ? Elle en avait recraché sa gorgée sur la table, avant de feindre une quinte de toux particulièrement gênée.

- « Par tous les architectes, Odard, je n’ai pas besoin de savoir dans quelle moule vous avez trempé votre flûte. Croyez-moi, j’en sais déjà beaucoup plus sur votre sexualité que la sexualité en général ! C’est pour dire ! » elle fronça légèrement les sourcils, un sourire en coin « Je préfère largement que chacun conserve sa chambre, ainsi si l’idée saugrenue de partager votre couche avec une autre ou plusieurs hein, vient illuminer votre tête, je serais bien en sécurité dans ma propre chambre. »

Elle lui offre un sourire, signe que malgré des paroles plutôt dures, elle ne lui tient nullement rigueur de son comportement. Malgré les apparences, la rouquine semble plutôt tolérante. Du bout des doigts, elle avait poussé délicatement le verre à l’odeur forte de sapin jusqu’au barde. Si lui ne semblait pas émettre d’objection à avaler une substance inconnue et forte, ce n’était pas le cas de la my’tränne qui avait tout simplement refusé l’idée en bloque. L’ambiance avait soudainement augmenté en volume, si bien qu’elle ne put que lire sur les lèvres de son interlocuteur un « A la vôtre. » Grimaçant légèrement, la jeune femme avait roulé des yeux, terminant rapidement son infusion. Il était tout simplement inenvisageable pour elle de rester davantage de temps ici. Demain, la traque débuterait et il allait falloir être en forme, autant passer une bonne nuit, du moins, elle osait encore l’espérer. Se relevant doucement, elle s’était approchée du barde, déposant un bisou sur son front avant de lui tourner le dos, levant légèrement une main tout en récupérant de l’autre la clé de sa chambre. Le numéro 16.

- « Amusez-vous bien Dardard, en revanche, dès les premières lueurs du jour, comptez sur moi pour venir tambouriner à votre porte. L’aventure nous attend. »

Un nouveau mouvement de main et la chevelure rousse avait disparu dans les escaliers. Montant deux par deux les marches, elle n’avait pas tardé à arriver à l’étage, ouvrir sa chambre et la refermer à double tour, avant de s’endormir tout habillée sur le lit qui lui était destiné. Si son sommeil avait été profond et imperturbable les premières heures, elle n’avait pas pu cependant ignorer avec autant de volonté la fin de la soirée et ceux complètement ivres essayant de retrouver la bonne chambre. Sa voix s’était donc fait entendre plus d’une voix dans un « Ce n’est pas la bonne chambre, essayez encore plus loin ». La nuit allait être longue finalement, il ne fallait pas en douter, même une fraction de seconde.

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Jusqu'aux sommets des montagnes - Page 3 EmptyMer 3 Jan - 21:16
    Si les arcanes de la féminité demeuraient impénétrables et inaccessibles au plus grand nombre, les voies d’une bonne partie des dames présentes dans la taverne semblaient être tout sauf fermées, loin s’en fallait. La question de la dignité de ces gens se posait tant dans l’esprit du barde que celui de la jeune femme. Le premier s’il ne rechignait pas à une certaine débauche de temps à autre aimait à le faire dans des lieux appropriés, dédiés et où l’on ne trouvait que ce que l’on était venu y chercher, ni plus ni moins. La seconde était visiblement outrée, peu habituée et surtout peu adepte de ce genre de légèretés. Si à ses yeux toutes ces femmes étaient probablement sinon des prostituées, au moins des garces qui tenaient aussi peu à leurs corps qu’à leurs vêtements. Et pour cause, la plupart n’en portaient quasiment pas.

    Eh bien je vous en prie Aumie! J’offrirais volontier mon corps comme bouclier aux assauts d’éventuels assaillants, mais je crains que vous n’ayez raison et que ma bravade n’ait qu’un effet momentané. Mais sachez que le je ferais car oui ma mie vous m’importez!”

    Odard se demandait combien de temps son amie pourrait supporter cette situation tant l'agacement était visible voire criant sur son visage. Que la jeune femme ait ou non connu l’amour revêtait finalement peu d’importance tant tout cela était éloigné de toute forme de romantisme. Mais lui qui pensait bien faire avait été une nouvelle fois victime de sa langue trop bien pendue! Quelle idée de parler de luxure et de chambre partagée dans la même phrase, même si ses intentions étaient tout ce qu’il y avait de plus chaste. Loin de lui l’idée de la pousser à s’étouffer avec sa propre infusion. Un bref instant le barde recula sous cet assaut qui n’en était pas un mais qui le mettait profondément mal à l’aise.

    Mais ma mie je… Oh je suis navré! Je n’avais escompté aucune débauche frivole ce soir, pas plus que je ne souhaitais vous brusquer. Je vous présente mes plus plates excuses Aumie, sachez que ma, mhh, flûte n’est pas au programme de la soirée et que si je m’autorise quelques chopes cela sera bien le maximum. J’entends bien être en forme au matin très chère, votre estime et cette aventure m’importent bien plus que ces quelques courtisanes.”

    Ce n’était pas tant un assaut qu’une mise en garde. Et qu’en dépit de son sourire et de sa tolérance elle accordait de l’importance au respect que chacun avait envers soi-même avant tout. Souci que visiblement toutes ces soubrettes n’avaient pas. Malgré tout cela la jeune femme était venu déposer un baise sur son front, chose totalement inédite et inattendue de sa part qui le laissa un instant interloqué mais heureux, signe que malgré ses faux pas elle ne lui en tenait pas rigueur et que leur amitié s’installait doucement mais sûrement. C’est un beau geste de confiance et de protection, quelque chose de sincère comme ils l’étaient tous deux. En réponse il avait déposé un baiser sur sa joue, assorti d’un regard rempli d’excuses et d’un sourire qui lui exprimait toute son affection.

    Je vous souhaite une bonne nuit Aumie, même si je crains que ces gens ne cessent de s’égosiller de sitôt, j’espère que votre infusion aura eu l’effet que vous en attendiez. Et n’ayez crainte très chère , je serai pimpant dès que l’aube daignera nous illuminer de sa présence, sans quoi je vous autorise à enfoncer la porte si besoin est!”

    Il regarda la jeune femme s’éloigner et contempla un instant l’idée de joindre son Luth aux festivités en cours, mais se ravisa en se disant qu’ils faisaient déjà bien assez de bruit pour l’heure et qu’un peu de musique ne pourrait que leur donner l’envie de grimper sur les tables pour y danser, nus comme au premier jour. Et nul doute que cela ne se ferait pas sans fracas. Au lieu de ça le barde soupira brièvement avant de s’expédier le verre d’eau de vie d’Aurore et de se lever en enfilant sa veste. Une petite promenade nocturne ne lui ferait pas de mal, et ne dit-on pas que l’alcool est excellent pour lutter contre le froid? Il déposa quelques pièces sur le comptoir et franchit la lourde porte qui le séparait du silence presque figé de cette fin de soirée. Comme un saisissant contraste entre l’agitation de la taverne et l’immobilité des bancs de brume qui dérivaient ça et là au fil des rues, la chaleur d’un feu et l’air qui lui mordait le visage. Et surtout cette parfaite tranquillité, le calme presque irréel de ce décor illusoire.

    Odard alla s’asseoir sur le rebord d’un muret qui longeait la rue et s’empara de son Luth avant d’utiliser ses dons pour s’entourer de silence. Il ne voulait jouer que pour lui-même, tout en étant sûr de ne déranger personne, et laisser libre cours à ces émotions qu’il n’exprimait finalement que trop peu. Il joua ainsi des heures durant, alternant les mélodies à mesure que ses pensées dérivaient dans une direction ou dans une autre. Il se remémora le passé, ses joies et ses affres et se laissa aller à s’imaginer un avenir qu’il s’était toujours interdit de prévoir. Mais surtout c’est le présent qu’il contempla, ces nouveautés qui débarquent dans votre vie à la vitesse d’un cheval au galop sans qu’on ne les ait vu venir et qui au lieu de bousculer s’emploient à stabiliser. C’était cet équilibre qu’il contemplait, lui qui autrefois se serait rué sur cette orgie improvisée s’était vu frappé d’un éclair de sagesse et de réflection. Il appréciait la présence de son amie dans ce penchant, ce contrepoids qui le poussait à réfréner ses extravagances qui, si elles faisaient partie intégrante de ce qu’il était, lui avaient déjà joué bien des tours.

    Il joua ainsi jusqu’à se sentir léger et vide, exempt de toute émotion. Et en paix, comme s’il avait fait le point sur sa vie, il se libéra du sort qu’il avait tissé autour de lui et se leva pour regagner l’auberge qu’il traversa en adressant un signe de tête à ceux des clients qui étaient encore assez sobres et innocupés pour remarquer sa présence. La chaleur du feu lui rappela qu’il était gelé, mais il se sentait bien. Aussi monta-t-il doucement les marches et s’enferma dans sa chambre où une fois emmitouflé sous une épaisse couverture, il s’endormit en quelques instants, un léger sourire aux lèvres en songeant aux aventures à venir.

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Jusqu'aux sommets des montagnes - Page 3 EmptyJeu 4 Jan - 21:18
- «  Raaaaaaah » hurle-t-elle en balançant l’oreiller de plume contre la porte «  Ce n’est pas votre chambre c’est la mienne, LA MIENNE »

Un grognement s’était fait entendre de l’autre côté de la porte parfaitement verrouillé alors que la pression sur la poignée semblait se relâcher. Un semblant d’excuse avait été formulé dans une langue plus vraiment compréhensible. La rouquine avait lâché un long soupir, tout en roulant des yeux et en se laissant retomber sur son lit de fortune. Plus J.A.M.A.I.S elle ne viendrait ici, c’était une évidence. Ou tout du moins, pas sans savoir avoir conscience d’où elle venait de mettre les pieds. La nuit s’annonçait longue, trop longue pour être imaginée. Fermant les yeux, prenant une longue inspiration, elle espérait retrouver le sommeil perdu. Difficile de savoir comment, mais une fois parfaitement emmitouflé dans les draps et le dernier oreiller survivant sur la tête, la my’tränne avait fini par resombrer dans un sommeil profond. C’est que le début du voyage, bien que calme avait été plutôt éprouvant. D’abord, il avait fallu que le barde retarde le départ en s’adonnant au plaisir de la chair avec la serveuse, puis il avait fallu qu’ils passent la nuit ici dans un établissement visiblement peu fréquentable.

Le lever de l’étoile avait néanmoins fini par percer l’obscurité et les rayons lumineux par traverser les volets en bois couvrant la fenêtre. Le silence était roi, silence pesant, lourd, inquiétant, comme lorsqu’on émerge après une nuit compliquée. Pour le coup, ce n’était nullement celle de la rouquine qui s’était avérée courte ou étrange, mais bien celle de tous les autres sans exception. S’extirpant des tissus la recouvrant, Aurore hésitait quelque peu dans le fait de s’échapper de son lieu de protection. Tendant l’oreille, les deux pieds bien ancrés dans le plancher, la rousse n’entendait absolument rien, hormis le calme omniprésent. Un ronflement étrange semblait provenir de juste derrière sa porte, chose qui la fit hausser un sourcil perplexe. Enfilant son pantalon, ses bottes, refermant les boutons de sa chemise et remontant sa chevelure en une haute queue de cheval, la jeune femme avait fini par ouvrir la fenêtre, puis les volets dans un grincement significatif. Les rayons de l’astre avaient immédiatement terminé d’illuminer la chambre et d’éveiller entièrement la my’tränne. Ne lui restait-il plus qu’à trouver le courage de déverrouiller la porte de sa demeure d’une nuit.

Prenant une grande inspiration, la rouquine avait fini par ouvrir, laissant tomber le corps endormi d’un homme qu’elle ne connaissait nullement une main agrippée à la poigné de sa porte. Roulant des yeux dans un agacement non négligeable, elle avait attrapé son arc et ses affaires, enjambant l’inconscient afin de redescendre. En bas tout était étrange, des dessous étaient accrochés un peu partout, des corps encore endormis féminins ou masculins remplissaient les recoins dans le bruit de ronflement particulièrement prononcé. Les hommes et femmes étaient à moitié nus et la rousse n’aimerait pas être celle qui devrait nettoyer tout ça. Hors de questions de rester ici plus longtemps. Sortant en s’emmitouflant dans la veste, le chapeau et les gants chauds achetés précédemment. Dehors, l’air était de nouveau froid, provoquant un nuage de bué au rythme de la respiration de la mage. Celle-ci coule un regard l’écurie un peu plus, surprise de voir la folle sortir les deux montures parfaitement équipée, elle a même rajouté des couvertures chaudes. La croyante en deux architectes s’était approchée, doucement pour ne pas effrayer celle qui semblait être plus étrange encore que l’auberge.


- « Bonjour » murmura-t-elle
- «  Ils sont prêts » répondit l’autre brusquement «  Vous n’avez pas de quoi être fier, les sabots n’étaient pas très beaux, quoique j’ai vu pire… Enfin, ils ont l’air de vous aimer les deux nunuches. »

Aurore s’était un peu renfrognée, vexé qu’on puisse sous-entendre qu’elle ne s’occupe pas bien de ses animaux. L’ancienne affiche un sourire, premier que la my’tränne à l’occasion d’observer sur cette étrange silhouette.

- «  Ne vous offusquez pas, je fais plus peur en apparence qu’en réalité. » dit-elle simplement. « J’espère que vous n’avez pas dormi dans cet établissement là-bas » elle montre le poulpe d’un geste de la main.

- « La prochaine fois, je ne me fierais pas au nom des auberges » dit Aurore dans un demi-sourire

La bonne femme éclate de rire, mais une petite tape sur la croupe des deux chevaux puis disparaît, laissant une nouvelle fois seule, une Aurore qui n’est pas certaine d’avoir compris tout ce qui venait de se jouer. Tirant délicatement les licols, elle avait amené les deux montures justes devant l’auberge, chargeant délicatement les animaux qui ne bougeaient pas d’un centimètre. Son arc ne quittait néanmoins pas son dos, tout comme son carquois sa taille. C’était une question de sécurité, rien de plus. Avisant quelque passant qui la regardait étrangement, cherchant à jouer d’illusion pour l’impressionner, elle avait simplement fui tout contact pour se positionner sous la fenêtre où dormait encore le barde. Petits cailloux en main, la jeune femme s’adonna à une étrange habitude, celle de faire du bruit en lançant les pierres sur les volets en bois de la chambre, avec ainsi l’espoir de réveiller le ménestrel ou tout du moins d’attirer son attention, sans avoir à remonter ou plutôt rentrer dans cet étrange lieu.

- «  Odard » qu’elle murmure avec force «  Allez Odard ! Debout ! C’est le matin » poursuit-elle en jetant une nouvelle pierre

BIM. La pierre part un peu trop fort, s’infiltre entre les ouvertures du volet et voilà qu’un bruit particulièrement significatif ce fait entendre. Aurore lâche un soupir, ce n’était pas de sa faute, si la pierre s’était infiltrée au mauvais endroit. Sifflotant quelque peu, elle tourna dos à la façade, avisant les chevaux l’air de rien.

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Jusqu'aux sommets des montagnes - Page 3 EmptySam 13 Jan - 21:28
    Il y a des nuits meilleures que d’autres. Et celle-ci, ponctuée des râles de plaisir de certains et des gémissements de douleur d’autres, ne figurait pas parmi les meilleures qu’il avait pu expérimenter. Alors certes chacun avait sa propre vision du plaisir et tandis que certains s’adonnaient à des échanges tout ce qu’il y a de plus classique, des claquements et autres bruits étranges provenaient de chambres proches. Tout ce manège avait duré une bonne partie de la nuit et si par moment il avait pu ressentir une pointe d’agacement il n’osait pas imaginer ce qu’il en était pour Aurore pour qui tout cela était abominable. Leur prochaine nuit serait certainement plus dure et sauvage mais ils auraient au moins pour eux d’être seuls au monde. Et ça à cet instant précis, n’avait pas de prix.

    À l’aube les vociférations des demoiselles avaient laissé la place aux gazouillis d’un tout autre type d’oiselles. De celles qui se perchent sur le rebord des fenêtres pour y siffler on ne sait quelle ritournelle, tout en picorant allègrement le bois dans l’espoir d’y dénicher quelques vers savoureux. Le soleil s’était invité entre les lattes disjointes des volets, après tout à quoi bon chercher l’obscurité et l’intimité lorsque l’essence même de ce lieu était de voir et d’être vu? Ses rayons indiscrets s’étaient frayé un chemin jusqu’au visage du barde, détaillant au passage les volutes de poussières qui s’élevaient dans l’air confiné de la petite chambre. À sa grande honte et bien qu’il ne se l’avouerait jamais, Odard ronflait. Et l’introduction d’une mouche dans sa narine gauche coïncida avec l’arrivée brutale d’un objet inconnu contre sa fenêtre, produisant un bruit de verre suivi de celui de petits morceaux qui s’écroulent. Le choc fit qu’il s’éveilla avec un hoquet de sursaut, aspirant ainsi la mouche qui s’était pourtant cantonnée à l’entrée de cette caverne sombre qu’était son nez. Si on lui demandait un jour quelle expérience avait été la plus désagréable il répondrait qu’en dehors des Khorkoï qui lui avaient donné l’impression d’ingérer du plomb fondu, l’introduction d’une mouche terrifiée qui battait des ailes dans ses sinus occupait la plus haute marche du podium.

    Toussant et crachant le barde se leva d’un bond pour retomber à genoux et expulser l’intrus qui lui bourdonnait dans la gorge. Si la mouche survivait elle en serait marquée pour le restant de sa - courte - vie, mais c’était peu probable et la pauvre bête s’échoua dans un coin où elle resta immobile, probablement choquée par ce qui venait de lui arriver.

    Bigre! Satanés volatiles! J’espère que cette incursion aura été aussi désagréable pour vous qu’elle l’aura été pour moi!”

    Qui a dit qu’un sommeil profond et réparateur n’était qu’une vulgaire légende? Probablement la totalité des parents au monde et en cet instant précis, le barde et son amie. Odard s’était assis sur le rebord de son lit avant d’enfiler ses vêtements tout en se massant les tempes, la journée promettait d’être longue mais il ne s’était jamais laissé abattre par des choses aussi triviales, aussi ferait il bonne figure autant qu’il le pourrait! Une fois correctement apprêté il repensa au bris de verre et se demanda un bref instant si la mouche en était responsable. Après un coup d’oeil mauvais à l’insecte qui tentait timidement de bourdonner, le barde se leva pour inspecter la fenêtre.

    Brisée nette par un petit caillou qui semblait provenir des mains d’une jeune et jolie rousse qui faisait semblant de regarder ailleurs en contrebas. Afin d’éviter tout problème il jeta une illusion sur la vitre et se débarrassa des morceaux de verre qui étaient tombés au sol, les prochains occupants de la pièce n’auraient pas l’illusion d’avoir chaud mais nul doute qu’ils s’activeraient assez pour ne pas en souffrir. Cette petite entourloupe servirait de dédommagement à l’énorme entourloupe qu’était La Plume du Poulpe. Il se gardait également en réserve un dernier petit tour, plus amusant celui-ci, qui ne manquerait pas de l’amuser pendant plusieurs jours.

    Ouvrant la fenêtre avec toute la discrétion que permettent des volets n’ayant jamais été graissés et qui grincent et hurlent autant que les clientes de leur établissement. Le barde se pencha et avisa son amie qui n’avait rien manqué de l’affreux crissement, il lui adressa un grand signe de la main et un sourire sincèrement ravi. Qu’il était bon de revoir un visage amical après une nuit où tous ces gens avaient été bien trop amicaux entre eux, si tant est qu’une orgie de ce type puisse être considérée comme de l’amitié.

    Ah mais bien le bonjour Aumie! Ne m’aviez-vous pas promis de venir tambouriner à ma porte au matin? Si je ne m’abuse ce volet ne ressemble en rien à une porte mais j’imagine qu’une nuit aussi terrible a pu ébranler jusqu’aux fondements mêmes de nos esprits! Ne bougez surtout pas très chère, j’arrive de ce pas!”

    À peine la porte ouverte le spectacle était sans équivoque. Un couple, probablement fortement imbibé, s’était endormi à même le sol du couloir, nus comme au premier jour et la position de l’un comme de l’autre ne laissait absolument rien au hasard. Ignorant leurs ronflements et feignant de ne rien voir le barde passa à côté des deux amants et descendit l’escalier pour constater l’ampleur de la dévastation qui avait eu lieu dans la grande salle. Tout, absolument tout était sens dessus dessous et le personnel de ce claque qui ne s’assumait pas passerait certainement l’essentiel de la journée à tout remettre en ordre. Passant près du comptoir il y déposa quelques pièces sans savoir exactement ce qui était attendu de lui. S’il s’en tenait à ses idées et sa franchise, le fait qu’on lui ait dissimulé la vraie nature de la taverne voulait qu’il ne laisse rien en paiement, mais son honnêteté lui disait qu’il avait tout de même profité des lieux et qu’il aurait pu s’en aller si vraiment tout cela était au delà de ses forces. Alors il paya, à des fantomes puisque personne n’était en vue mais il aurait au moins la conscience tranquille. Et puis dans son métier le chômage n’était pas vraiment un risque à considérer, ni le manque de liquidités.

    Une bouffée d’air frais était tout ce que l’on pouvait espérer après avoir passé la soirée et la nuit dans les vapeurs d’alcool et les odeurs charnelles de parfaits inconnus. Il faisait froid mais beau, d’un temps sec et ensoleillé qui promettait une belle journée. Une journée propice au voyage. Avec un peu de chance et de bonnes conditions ils se trouvaient à une journée ou deux des montagnes, le relief du terrain et la neige rendraient certainement la fin du trajet plus difficile mais ils étaient tous deux prêts. Du moins c’est ce qu’ils pensaient.

    La jeune femme avait semble-t-il déjà délivré les chevaux de leur palefrenière hallucinée, ce qui était une bonne chose pour le barde qui aurait eu du mal à conserver son calme une seconde fois. Même s’il n’en voulait aucunement à cette femme, chacun était ce qu’il était et il avait déjà rencontré des monstres cent fois pires que cette simple excentrique. Une fois sur le pas de la porte Odard s’inclina devant son amie et grimpa sur Focus après lui avoir flatté l’encolure.

    Je vois que le temps est de la partie très chère, nul doute que dans ces conditions nous pourrons couvrir une distance raisonnable avant la tombée de la nuit! Et puis gageons que cette future nuit sera exempte de toute frivolité impromptue! Je suis prêt quand vous le serez chère Aurore, mais avant cela, j’ai juste une dernière chose à faire.”

    Pivotant sur lui-même le barde fit face à l’auberge et affichant un parfait sérieux qui contrastait avec l'hilarité qu’il combattait intérieurement, entreprit de lancer un dernier sort sur la façade de cette dernière. Ainsi La Plume du Poulpe devenait La Moule du Poulpe et le dessin de l’enseigne qui représentait un tentacule aventureux en devenait plus équivoque, bien plus imagé. Avec ça personne ne pourrait se méprendre quant à la nature de l’établissement.

    Voilà qui est bien mieux! Qu’en dites-vous très chère?”

    Il souriait de toutes ses dents, à la fois fier de sa petite revanche et de cette boutade qu’il jugeait appropriée. Pointant les portes et le dôme qui faisait office d’horizon du doigt Odard s’exclama.

    Draco-chère, nous voilà!”

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Jusqu'aux sommets des montagnes - Page 3 EmptyLun 15 Jan - 12:59
Le crissement de l’ouverture des volets avait obligé la rouquine à relever légèrement le visage pour constater la provenance du bruit désagréable. Avisant le visage masculin parfaitement bien connu de la jeune femme, elle avait affiché un léger sourire. La phrase du barde avait de quoi l’amuser un peu, n’avait-il nullement oublié la promesse qu’elle lui avait faite. Ne pouvait-il se douter une seconde que la my’tränne avait été coupé dans son élan par un homme agrippé à la poigné de la porte de sa chambre. Fronçant légèrement les sourcils, pour plisser le regard et éviter l’éblouissement, elle lui offrit un petit geste de la main pour le saluer et surtout l’inciter à descendre. Le duo avait déjà suffisamment perdu de temps pour attraper l’animal qu’ils nommaient affectueusement Draco-chèvre.

- « Navrée du contre temps Odard et de ne pas avoir pu honorer ma promesse. Malheureusement, j’ai dû affronter quelque…. Épreuve afin de parvenir à sortir de l’établissement. » elle afficha une moue un peu plus amusée « Aussi surprenante que cela puisse paraître, madame la palefrenière était de bonne humeur ce matin. Visiblement, le lieu que nous avons choisi est connu pour ses travers, avons donc eu simplement la réputation d’une telle fréquentation, malgré nous. »

Le barde semblait –comme souvent- d’une humeur particulière joueuse, si bien qu’il s’appliqua à lancer un petit tour de passe-passe sur l’établissement avant de monter sur son cheval. Roulant des yeux, la rouquine ne put s’empêcher d’évoquer une réalité plus que probable qui ne ferait certainement pas plaisir à son ami.

- « Vous avez tout de même conscience d’être dans une ville où chacun use de l’illusion ? Votre petite taquinerie sera très vite remise en place… Malheureusement. Enfin, je dois avouer que c’était plutôt bien trouvé. » Elle se pinça la lèvre avant de sonner le départ « En route pour Forëal, même si à mon avis nous allons devoir installer un campement entre temps. À moins d’avancer un peu de nuit. »

C’était tout. Tout ce qu’elle était en mesure de dire pour l’heure, Aurore n’avait jamais été une grande bavarde et les quelques mésaventures de la nuit ou du début de voyage n’avait semble-t-il pas aidé la jeune femme à se détendre. Sur sa monture parfaitement chargée, elle avait donné le départ, d’abord au petit trot, puis au grand galop une fois en dehors la ville. Le vent frais venait caresser sans délicatesse les visages et les lèvres, alors que le paysage typique de la région se dévoilait peu à peu aux deux aventuriers. Des plaines à en perte de vu, dont la végétation n’était pas particulièrement présente, de la neige pouvait être visible sur les montagnes et particulière sur les sommets. Des petites créatures proches de la sourit au pelage bien épais prenait la fuite devant les sabots imposants des deux chevaux. S’emmitouflant davantage dans sa tenue chaude, la rouquine semblait sujette au premier point désagréable de la région, sa froideur.

- « Pensez-vous qu’il y a beaucoup de créatures ici ? Hormis nos draco-chèvre dans les montagnes ? »

Une question qui était sortie comme souvent spontanément, n’avait-elle que simplement dans l’idée de faire la conversation. Le chemin vers Forëal était long, plus long qu’elle ne l’aurait pensé. Aurore culpabilisait un peu vis-à-vis du fait qu’elle n’avait jamais pris la peine d’explorer la zone, ou au moins de se renseigner davantage sur la région. Le trajet se déroula sans encombre notoire, si bien qu’une fois la sensation d’avoir des montures plus ou moins épuisée, le duo avait dû ralentir pour installer un campement. Dans le fond, la ville n’était pas réellement l’objectif loin de là, puisqu’ils avaient tous deux consciences que maintenant ils allaient devoir camper. Quoi qu’il en soit, les deux compères n’étaient pas si loin de la montagne, donc potentiellement des créatures qu’il fallait trouver. L’heure n’était cependant pas à la recherche, mais bien à l’installation du campement. Pied à terre, la rousse ne put s’empêcher de grelotter quelque peu.

- « La froideur de la région n’est véritablement pas une rumeur… La nuit va être rude, je pense. Pouvez-vous faire un feu, il doit y avoir les branches sur votre monture et les pierres pour la réalisation de notre unique source de chaleur. De mon côté, je vais installer nos deux tentes. La nourriture doit être sur ma monture et pensez à donner à boire à nos chevaux, je vais installer les tapis plus chaud afin qu’ils ne souffrent pas trop de la fraîcheur eux aussi. »

À peine avait-elle terminé d’évoquer les directives, la jeune femme s’était appliquée à réaliser le tout, dans le désordre. D’abord les montures, puis l’installation des tantes et des sacs de couchage bien chaud, tout en prenant le temps de sortir de quoi s’alimenter pour eux, humaine et pour les animaux. Elle avisa du coin de l’œil le barde qui semblait réaliser le feu avec quelques difficultés. Aurore s’était demandé si c’était la première fois qu’il en réaliser un. Pour le coup, il ne pouvait nullement se servir de son don pour l’aider, tout était une question de technique, qu’il finirait lui aussi, bien par obtenir.

- « Dites-moi Odard, quels sont vos projets pour la suite, une fois la corne en votre possession, quelle région avez-vous envie de visiter par la suite ? » curieuse comme toujours elle ponctua ses interrogations par un sourire sincère « Je pense que je vais voyager moi aussi, vous savez. »

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Jusqu'aux sommets des montagnes - Page 3 EmptyMar 16 Jan - 7:04
    Ils s’en étaient allés satisfaits, l’une soulagée de quitter enfin ce temple de la débauche qui ne s’assumait qu’à moitié et l’autre ravi de son petit tour. Même s’il était vrai que ce dernier ne ferait pas long feu, ne disait-on pas que les meilleures plaisanteries étaient les plus courtes? Qui sait, peut-être que ce tour ferait date et que toute la ville s’en souviendrait pendant des années, peut-être même que cela deviendrait une blague à la mode, un surnom et que d’ici quelques temps plus personne ne se souviendrait de La Plume. Et puis les clients qui s’y pressaient ne semblaient pas tant interessés par le plumage de ces dames que par le mot qui l’avait remplacé.

    Je pense savoir à quel genre de choses vous referez très chère, ces “épreuves” comme vous le dites si bien ont hurlé toute la nuit. Et dans des tonalités que je n’aurais pas soupçonné je l’avoue. Toujours est-il que percluses de fatigue ces voix se sont tues à l’instant même où le grand astre se levait, scellant ainsi la fin d’une nuit longue et mouvementée. J’irais presque jusqu’à dire qu’elle fut douloureuse, et je pense ma mie que vous m’agréerez aisément sur ce point n’est-ce pas?”

    Il semblerait qu’ils se soient tout simplement fait avoir, tant la nature de l’établissement était connue comme le loup blanc. Qu’à cela ne tienne, certaines expériences servent de vaccin pour une vie entière et le barde se promit intérieurement de ne plus jamais mettre les pieds dans quelqu’établissement que ce soit qui mentionnerait un poulpe ou bien des tentacules.

    J’imagine que le garde nous a joué un petit tour. Sachez le ma mie, j’ai beau être illusionniste je n’en pratique pour autant pas la tromperie, inutile de dire que si nous recroisons le chemin de ce dernier j’emploierai l’entièreté de mes capacités afin de lui concocter un sort unique et particulièrement adapté au crime que ce vil fenec a perpétré à notre encontre."

    Mais Odard se perdait en pensées et conjectures et suivit machinalement son amie tandis qu’elle donnait le départ de la journée. Il était satisfait du traitement qu’avaient reçu leurs chevaux, signe que l’étrangeté de la palefrenière ne visait que ses congénères. Ce qui était aisément pardonnable étant donné le caractère naturellement vil et fourbe des humains. La jeune femme avait raison, cette ville n’était qu’un empilement de strates d’illusion, savamment mêlées les unes aux autres et il était facile de se demander si au bout du compte il demeurait quoi que ce soit de naturel ici. Il était néanmoins fier de lui, et qu’elle ait apprécié sa boutade. Après tout les meilleures plaisanteries sont celles que l’on partage, à ce titre là son amie s’avérait bon public. Tant et si bien qu’il la suivit avec un grand sourire à travers les rues de Variel jusqu’aux grandes portes.

    J’ose espérer très chère que ce coup d’éclat marquera au moins un esprit, un seul, qui puisse se le remémorer de temps à autre et ainsi faire vivre le nom de La Moule Du Poulpe. Ainsi ce tour ne mourra jamais et j’emporterai avec moi un souvenir impérissable de Variel! Mais je suis ravi qu’il vous ait plu, nul doute que l’avenir nous permettra de se créer d’autres souvenirs de cet acabit n’est-ce pas? Je le souhaite en tous cas de tout coeur!”

    Une fois passé les portes le barde s’était retourné brièvement, espérant croiser le regard du garde félon qui s’était joué d’eux. Malheureusement ce dernier ne semblait pas présent, autrement eût-il pu expérimenter la désagréable sensation de voir et sentir des limaces lui ramper sous la peau, en produisant un bruit de succion à rendre malade le plus solide des guerriers. La vengeance est un plat qui se mange froid se dit-il, sa prochaine visite à Variel serait l’objet de cette réparation et occuperait une place importante dans ses projets à venir. Mais Aurore avait déjà lancé sa monture au grand galop et il en fit de même autant pour profiter d’une chevauchée à deux que pour ne pas la perdre de vue. On ne sait jamais ce qui peut arriver.

    Bien que les chevaux produisent l’essentiel de l’effort l’exercice était vivifiant, et le vent frais ne parvenait pas à les geler jusqu’aux os comme il aurait peut-être souhaité le faire. Ils profitaient de ce plaisir simple, galopant côte à côte à travers les plaines qui blanchissaient à vue d’oeil, le vent en poupe et les cheveux libres comme l’air. Malgré tout le climat fraîchissait et au loin se dessinait doucement l’immense chaîne de montagnes qui séparait le monde de l'abîme. C’était la source de toute cette expédition, leur but ultime et l'accomplissement de cette quête qui n’en finissait pas de se révéler surprenante. S’il en garderait comme souvenir sa corne pour commencer, il en ressortirait grandi d’une amitié inattendue et pourtant ô combien prometteuse. À cette pensée il sourit en regardant son amie qui fonçait la tête penchée sur l’encolure d’Alezane. Peu importe l’issue de tout ceci, il se sentait déjà privilégié.

    La question de la faune était judicieuse, pour autant qu’il en savait le froid attirait moins la vie que les jungles chaudes ou les forêts humides. Mais les créatures assez braves pour élire domicile en ces terres abruptes étaient réputées pour être des plus coriaces, quoi de plus normal en ces lieux qui ne pardonnaient pas la moindre erreur et n’offraient aux faibles que la miséricorde d’une vie courte et d’une mort rapide.

    Eh bien je ne me suis jamais posé la question ma mie, mais j’imagine que tout ce qui réside ici est de nature féroce, à l’image de nos chers Yamaany. Mais je dois dire que cette pensée n’est pas des plus rassurantes, avec un peu de chance aucune créature malveillante ne viendra nous importuner, sans quoi nous devrons la combattre. Et cela risque d’être une toute autre histoire!”

    L’approche des montagnes s’annonçait par un froid à s’en faire givrer les poils du nez. Un vent sec et intense qui ne semblait jamais relâcher ses efforts et tendait à courber le peu de végétation présente, malgré leur bonne progression ils ne pourraient pas atteindre Forëal avant la nuit et le soleil qui déclinait déjà ne leur facilitait pas la tâche. Il était temps de s’arrêter pour la nuit et c’était bien là quelque chose que le barde avait attendu avec impatience. Fini le confort des auberges ou la relative sécurité des caravanes, ils dormiraient à la belle étoile, avec leur feu pour seul rempart au froid meurtrier qui rôdait et s’infiltrait partout. Il n’avait jamais fait de feu, mais ne pouvait se l’avouer et encore moins se montrer démuni devant Aurore, aussi sauta-t-il au sol et s’empara de ses maigres connaissances en la matière ainsi que du matériel à disposition.

    Un feu? Mais naturellement très chère! Il s’agit là de ma spécialité, alors inutile de dire que tout cela ne prendra que quelques instants! Vous verrez ma mie, à peine aurez vous fini de monter les tentes que déjà de vives flammes s'élevèront du foyer! Sachez que je m’y engage!”

* * * * *

    Il faisait déjà nuit noire lorsque les premières flammèches daignèrent s’élever du cercle de pierre qu’il avait installé au centre de leur campement de fortune. Aurore avait fini depuis bien longtemps de monter les tentes ainsi que d’installer les chevaux et attendait assise sur une pierre que le miracle se produise, bien emmitouflée dans une couverture épaisse sans laquelle elle aurait gelé sur place depuis bien longtemps! Le barde sauta de joie et manqua de trébucher sur les flammes désormais bien vivaces, avant de s’asseoir à son tour sagement et de se réchauffer les mains.

    Je vous l’avais dit ma mie! Tout cela n’aura pas pris plus de quelques instants! Mais je vois qu’à votre habitude vous m’avez devancé et avez agi avec une rapidité des plus impressionnantes! Nous formons une bonne équipe très chère et je pense que nous ne manquerons de rien ce soir!”

    Son regard se perdit un instant dans les flammes, il savourait la caresse du feu sur sa peau et tournait et retournait ses mains qui elles, étaient bien gelées. Il coula un regard à son amie et sourit en pensant à un avenir auquel il n’avait jamais songé plus de quelques instants.

    À vrai dire je l’ignore très chère, j’ai toujours laissé le vent me porter où bon lui semble. Et j’avoue ne jamais avoir été déçu! Et vous alors? Vous voilà tentée de parcourir le monde? Quelles contrées envisagez vous d’explorer? Si vous le souhaitez ma mie nous pouvons mettre à profit notre halte pour pratiquer votre maîtrise de l’illusion! Qu’en dites-vous?”

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Jusqu'aux sommets des montagnes - Page 3 EmptyMar 16 Jan - 14:00
Aurore avait affiché un sourire, comme-ci l’idée d’affronter des animaux qu’elle ne connaissait pas forcement lui plaisait. Dans le fond, cela devait être le cas, même si elle ne l’admettrait jamais. Il fallait bien avouer que tout ceci avait fait naître chez elle, cette envie de découverte, d’exploration, ce besoin de vivre pleinement et non plus survivre ennuyeusement. Fermant les yeux sur sa monture, son corps se déplaçant au même rythme que sa jument, la jeune femme imagina volontiers les différentes bêtes présentes ici. Des félins aux griffes aiguisés et dont le pelage blanc rappelait la neige des hautes montagnes, des lièvres fuyant le prédateur dans des bonds vifs et rapides avant de s’enfuir dans un terrier. Des rapaces aux ailes larges et pleines de plume pour éviter de ressentir la fraîcheur de l’air environnante et puis des monstres, si gros et imposant qu’il ferait trembler n’importe quel gamin les apercevant.

- « Ne vous en faites, je suis certaine que nous n’allons pas rencontrer des difficultés si imposantes que cela. Tout est une question de stratégie de toute façon. »

Même si la jeune femme n’en avait rien dit, elle restait néanmoins inquiète vis-à-vis du Yamaany. Une bête aussi imposante, plutôt bourrin, qui ne réfléchit pas réellement était un véritable danger vivant. Le duo n’aurait certainement pas le droit à l’erreur. Conservant néanmoins un sourire qui se voulait rassurant, elle n’avait pas évoqué avec le barde la moindre de ses inquiétants, préférant progresser simplement et rapidement jusqu’à une zone convenable pour la nuit. Un peu sur les hauteurs, dans un recoin montagneux qui abriterait les deux aventuriers des vents froids. Ne restait-il plus qu’à s’installer et faire un feu. Comme souvent, Aurore avait pris les devants, évoquant les différentes tâches à effectuer, laissant l’opportunité au ménestrel de prouver ses talents en matière de feu.

- « Bon courage roi du feu, attention à ne pas faire cramer tout My’trä quand même » taquina la rouquine.

Aure avait ensuite délaissé simplement le barde, il y avait bien d’autres choses à faire avant de pouvoir souffler. Les montures s’étaient retrouvées avec des couvertures chaudes, de quoi boire et manger ainsi que surtout désencombrer tout l’équipement qu’elles devaient transporter. Ceci étant fait, la my’tränne à la chevelure aussi vive que les flammes qui ne venaient pas s’étaient mise en tête de réaliser un petit nid plutôt douillé pour les deux explorateurs. Aurore avait dû bien mettre une bonne heure à installer les tentes, les tapis de sol et les couvertures. C’était donc finalement dans une obscurité omniprésente, emmitouflé dans une couverture chaude, installée sur une grosse pierre qu’elle attendait sagement de voir un miracle se réaliser. Une pomme dans la main, elle croquait à pleine dent dans le savoureux fruit, profitant de cette pause, cette première nuit calme en extérieur. En apercevant un début de flamme, la jeune femme n’eut pas réellement le temps de contrôler cette petite étincelle dans son regard. Satisfaite que le barde soit parvenu à son objectif.

- « Oui, nous n’allons pas vous faire l’affront de compter les heures, n’est-ce pas ? Le tout c’est d’avoir un feu » se rapprochant pour se réchauffer, elle tendit de quoi manger à son ami « Je ne sais pas trop pourquoi, j’ai soudainement cette envie de voyage… J’ai simplement l’impression que je ne vais jamais pouvoir avoir un avis sur tout et surtout juste avec ma conscience, si je ne découvre pas les choses par moi-même. »

La rousse avait doucement haussé les épaules, prenant réellement conscience des choses. Jusque maintenant, elle avait toujours plus ou moins fait selon la volonté de sa famille. Maîtriser l’air, gérer la récolte, l’élevage, faire les marchés, vendre convenablement. Elle avait même été jusqu’à presque épouser quelqu’un pour faire plaisir à cette famille. Il lui avait fallu cet électrochoc pour comprendre qu’elle allait trop loin. Prenant une légère inspiration, elle préféra simplement secouer la tête et ne plus penser à tout ça. Il était grand temps qu’elle apprenne à vivre pour elle, en fonction de ses envies, de ses besoins.

- « Je pense que je vais aller où le vent me porte. Même si j’ai appris à aimer un autre architecte qu’Amisgal, j’ai tout de même une entière confiance ou elle pour m’emmener à l’endroit exact où je dois me trouver. J’ai cette naïveté de croire que même si nos décisions ont un impact sur notre vie et notre avenir, plusieurs chemins sont en revanche tracés par nos architectes… Nos choix influençant sur celui qu’on va emprunter. »

Enroulée parfaitement dans sa couverture, elle avisa quelque instant le barde, en se demandant si cette envie de voyager n’était pas aussi une forme de fuite, de ne pas accepter de s’installer, de vivre le moment présent en préférant être perpétuellement ailleurs. Aurore n’osa pas poser son interrogation, se contentant de rebondir sur la demande vis-à-vis de la magie de l’illusion. Affichant un nouveau sourire, la jeune femme s’emmitoufla davantage, laissant juste percevoir la bué provoqué par sa respiration :

- « Eh bien, je ne sais pas faire grand-chose finalement… Hormis changer d’apparence et encore sur très peu de personnes, dès que le groupe est trop important cela devient complexe. » Elle s’était mise à rire un p’tit peu « C’est bête, j’ai développé cette compétence pour ressembler plus à mes parents et passer plus inaperçu en changeant la couleur de mes cheveux… Cela n’a pas grand intérêt en soi. Je ne sais même pas vers quel type de magie je veux aller dans l’illusion, j’ai du mal à rester éternellement sur des tours de passe-passe, sans vouloir vous offenser. Mais dites-moi Odard, Pourquoi, Khugatsaa ? »

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Jusqu'aux sommets des montagnes - Page 3 EmptyMer 24 Jan - 23:44
    Pour son premier feu Odard ne s’en sortait finalement pas si mal, ou presque. Sans lui dire car cela aurait été avouer qu’il n’avait au départ pas la moindre idée de ce qu’il faisait, il était heureux que son amie ne lui en tienne pas rigueur, mieux encore elle en avait plaisanté. Signe que cette attente n’avait pas été aussi longue et pénible que ce qu’il aurait pu imaginer. Il accepta avec plaisir le fruit qu’elle lui tendit et croqua allègrement dedans, c’est que cette folle chevauchée et l’installation du campement leur avait donné un faim de loup, mais il préféra ne pas penser à des animaux qui pouvaient probablement rôder dans les parages et ne leur vouloir aucun bien. Bien sûr d’aucuns diraient que les loups ont peur des hommes, mais l’on contait des histoires où ces prédateurs rendus à demi fous par la faim en oubliaient toute circonspection et confirmaient la peur que finalement tous en avaient.

    Ah mais vous avez bien raison très chère! Ne dit-on pas que les voyages forment la jeunesse? On en apprend beaucoup plus sur soi-même en parcourant le monde qu’en écoutant ce qu’il s’y passe! Vous en ressortirez changée et grandie je peux vous l’assurer ma mie!”

    Lui ne s’était jamais véritablement posé la question, son mode de vie s’étant imposé très tôt comme une évidence à l’encontre de laquelle il n’avait pas souhaité aller. Et même si parfois cela pouvait s’apparenter à une fuite en avant il appréciait toujours autant cette vie en mouvement, chaque jour était totalement nouveau et différent à la fois de la veille et du lendemain, les gens eux aussi étaient toujours de nouvelles découvertes dont il ne se lassait pas.

    Je pense que l’essentiel est que vous soyiez en accord avec vous-même, après cela le monde ne sera plus pour vous qu’un tapis que l’on déroulera sous vos pieds à mesure que vous avancerez. Mais j’irai presque jusqu’à dire que peu importe l’Architecte que vous aimez, tous ne souhaitent finalement que notre bien, aussi la protection de l’un ou de l’autre ne revient-elle pas à recevoir l’attention du panthéon dans son ensemble? Nul doute que ces paroles me vaudraient la haine et les coups de bon nombre de nos pairs mais je pense que vous comprendrez où je veux en venir. Aller dans le sens des uns ne signifie pas aller à l’encontre des autres, tant que nous sommes cohérents et encore une fois, en accord avec nous-même.”

    Même s’il avait semblé prendre une éternité, le feu brûlait désormais vivement et les innondait d’une chaleur salvatrice sans laquelle ils n’auraient probablement pas survécu à la nuit à venir. Ces montagnes n’étaient pas l'extrémité du monde pour rien et il était finalement surprenant que des créatures puissent y vivre et y prospérer. Mais la nuit avait beau être froide elle était aussi pleine de vie et des bruits divers qui la trahissaient. Ces créatures semblaient immunisées contre un froid qui, à eux, leur paralysait les extrémités et s’infiltrait insidieusement partout où le vent pouvait le conduire. Autant dire que la cargaison de couvertures d’Aurore à laquelle le barde n’aurait jamais pensé était plus que bienvenue.

    Revenait alors la question de l’Illusion, qui leur servait aussi de monnaie d’échange dans cette expédition, même si au bout du compte il était fort probable que l’un et l’autre refuse toute forme de rétribution au terme de cette aventure. Ils se récompensaient en chaleur humaine et en amitié sincère et sans ambiguïté, et cela valait aux yeux du barde tout l’or du monde. Il se prit d’un petit rire et d’un revers de la main changea la couleur des flammes en un bleu cobalt profond qui se reflétait sur la neige aux alentours et donnait à la scène un air, justement, irréel.

    À votre avis très chère, ai-je trompé la réalité en lui faisant croire que le feu était bleu? Ou bien ai-je trompé votre esprit et vous êtes la seule à pouvoir les voir sous cet angle? Si je conçois que se cantonner à des tours de passe-passe puisse être redondant, l’Illusion peut accomplir tellement plus. Imaginez pouvoir influencer les pensées de votre pire ennemi et lui faire croire que l’air qu’il respire est toxique afin qu’il s’en prive lui-même et s’ôte ainsi la vie? Vous pouvez vous immiscer dans l’esprit de quelqu’un et agir sur ses souvenirs, lui rendre un bonheur qui lui échappe ou bien au contraire le briser aussi aisément qu’un brin de paille. Les possibilités sont infinies ma mie, et ô combien terribles quand un tel pouvoir tombe entre de mauvaises mains. Mais heureusement nous ne sommes pas de mauvaises personnes n’est-ce pas?”

    Le feu avait repris sa couleur naturelle et leur campement avait retrouvé un semblant de normalité, si tant est que quelque chose puisse être normal au milieu d’une telle conversation. Le barde désigna les flammes à son amie, l’invitant à essayer à son tour d’en modifier l’aspect ou la couleur.

    Peut-être qu’au lieu d’essayer d’influencer une ou dix personnes vous pourriez essayer de modifier directement votre cible à sa source, ainsi le nombre de spectateurs ne vous demandera que plus d’énergie, mais pas davantage de complexité. Voyons ce que vous pouvez tirer de ce bel âtre très chère! Et pourquoi Khugatsaa? Eh bien je dirais que c’est d’une part le devoir de tout Khurmi que d’honorer son Architecte, et le fait que cela s’accorde si bien avec mon métier n’a fait que renforcer ce lien et la gratitude que j’ai envers Lui.”

    Un jour quelqu’un lui avait dit que pour quelqu’un qui parlait beaucoup, il ne disait finalement pas grand chose. Chose blessante mais pas tout à fait fausse, à vrai dire Odard se réfugiait derrière ses badineries, comme un moyen de s’échapper un peu d’un quotidien parfois difficile. Il se surprenait à parler sérieusement quand justement les trois quarts de ses paroles n’étaient que bavardages et plaisanteries. Mais parler fait parfois du bien à condition d’avoir à faire aux bonnes personnes, ce qui était le cas avec Aurore.

    Et vous très chère? Pourquoi Khugatsaa? L’Illusion occupe-t-elle une place particulière dans votre coeur? Ou bien est-ce par désir de faire quelque chose qui ne soit guidé que par vos envies propres?”

    Il aurait voulu lui dire combien il sentait le poids des attentes des siens sur ses épaules, et avec quelle volonté admirable elle tentait chaque jour de les combler sans penser une seconde à elle-même. Mais il n’aurait su avec quels mots lui dire sans risquer une des bourdes dont il avait l’habitude et qui pourrait la blesser. Aussi s’abstint-il, même si la fin de sa phrase le suggérait quelque peu.

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Jusqu'aux sommets des montagnes - Page 3 EmptyDim 28 Jan - 16:02
Être en accord avec son « moi » intérieur. L’idée avait fait sourire la my’tränne qui s’imaginer passer un temps fou à dialoguer avec elle-même, à débattre de ce qu’elle aimait ou non, de ce qu’elle voulait ou non. Chose difficile et complexe que d’identifier un besoin, que de comprendre ce qui nous est nécessaire pour être heureux, notion abstraite, objectif subjectif à atteindre sans que le moindre mode d’emploi soit offert. Complexe, pour celle qui avait jusqu’ici oublié qui elle était, qui elle voulait être, pour ne former qu’un humain fait pour satisfaire les autres, pour ne pas décevoir un proche, un client, une connaissance, un ami ? Avait-elle seulement des amis ? Elle dont la solitude lui apportait en permanence quelque chose de réconfortant, de rassurant, de sécurisant. Un souffle chaud s’était échappé de ses lèvres, provoquant ce petit nuage blanc, visible à l’œil nu. Aurore avait affiché un sourire difficile, peu sincère, presque forcé. Consciente que malgré son envie de changement, cela ne serait pas aussi simple que ça. La jeune femme avait pris une légère inspiration, croquant dans le fruit qu’elle avait encore entre les mains, avisant les flammes du feu réalisé par son acolyte.
Concernant les architectes, Aurore semblait en accord avec le ménestrel. Si elle avait sa propre croyance, son propre amour plus prononcé pour deux d’entre eux, l’un par elle-même, l’autre plus poussé par sa mère. Elle n’en restait pas moins une femme ouverte pour les autres, respectant la croyance des individus qu’elle croisait, mais aussi de l’importance et la responsabilité que chacun pouvait représenter. Opinant doucement la tête, la rousse avait fini par étirer un sourire plus sincère, plus franc, moins difficile à formuler à dévoiler. La my’tränne appréciait la compagnie du barde, aussi étrange pouvait-il être, pouvait-il avoir un mode de vie et des habitudes un peu particulières, il était un homme dont la présence était agréable pour la guide.


- « Peu importe notre affiliation, chaque architecte à son importance dans la création de notre monde, n’est-ce pas ? Je suppose qu’ils méritent tous un respect et un amour sans limites. Cependant, chaque croyance à une forme différence et dans chaque peuple affilié à un architecte, il y a des êtres n’utilisant pas ce don de la bonne manière. Il y a-t-il seulement une bonne manière d’utiliser le cadeau fait par nos créateurs ? »

La question était honnête sincère, sembla suspendue dans l’air l’espace d’un instant. Avant que le sujet ne dérive lentement vers la capacité du barde et sa façon de détourner l’attention ou au contraire de l’attirer vers lui, ou un autre point précis. Aurore n’avait pas pu s’empêcher de rouler des yeux, cette capacité à changer la couleur des objets, des matériaux, ou simplement la forme d’un lieu ou d’une personne, n’était pas quelque chose qu’Aure trouvait particulièrement admirable. C’était agréable à l’œil, surprenant, cela provoquait forcément le petit effet de surprise, mais c’était tout. Même si elle était une adepte des tours de passe-passe, elle appréciait plus que de raison trouver une véritable utilité à ses dons. En revanche, pour sa question, la jeune femme trouvait la réponse parfaitement logique. Ce n’était jamais l’objet en lui-même qui était modifié, mais bien la perception de l’esprit de ceux l’entourant. Donc forcément, l’esprit d’un ou plusieurs individus. Prenant une légère inspiration, elle expliqua sa façon de percevoir cette magie.

- « En réalité, je trouve que c’est la magie la plus simple et plus complexe à utiliser. Dans le sens, où, la personne l’utilisant n’intervient nullement dans sur l’environnement, mais bien sûr l’esprit, d’une ou plusieurs personnes. » Elle réfléchit un instant « C’est simple, parce que finalement, il suffit de maîtriser un peu un individu pour le réaliser, c’est complexe, parce que je trouve qu’à trop s’infiltrer dans l’esprit des autres, on finit par se perdre un peu soit même. » Elle offrit un sourire « Pour les tours de passe, passe, ça va, mais pour le reste, c’est prendre un risque pour-soi même. »

La suite prit un tournant plus sombre, plus profond, plus douloureux pour la my’tränne. Un mot avait réussi à la tourmenter plus que de raison. Être une bonne ou une mauvaise personne. Inévitablement une voix avait résonné dans son esprit « monstre » « meurtrière », répétant inéluctablement deux mots, hantant la jeune femme au plus profond de son âme. Aurore s’était crispée, de manière non volontaire, avisant le barde qui ne devait même pas se douter à quel point il venait d’effleurer un point sensible chez elle.

- « Parce que vous pouvez dire en regardant le visage d’une personne si elle est bonne ou mauvaise » demanda-t-elle d’une manière un peu sèche « Je suis curieuse de connaître votre définition de ce mot. »

Elle avait tué, volontairement des humains. Un mois auparavant, Aurore avait succombé à sa haine, avait pris des responsabilités qu’elle n’aurait jamais dû avoir et s’endormait chaque nuit en se souvenant du bruit que faisaient les bâtons des non-mages, de ce coup de feu significatif et des BOOMS importants. Oui, chaque fois qu’elle fermait les yeux, elle voyait le visage de son peuple enchaîné, contraint d’être esclave d’homme et de femme ne partageant aucune croyance en commun avec eux. Aure se souvenait parfaitement de l’odeur de la mort, de l’angoisse, revoyait sans cesse le visage de ceux qu’elle avait abattus pour sauver la vie des siens, se remémorait chaque fois le visage de ceux qu’elle n’avait pas réussi à sauver. Elle avait choisi de privilégier une vie par rapport à une autre, avait fait couler le sang d’être vivant du même rang qu’elle, pour la première fois de sa vie. Elle était devenue un monstre, un être hideux, un individu qui n’agit que par pulsion. La question du barde vis-à-vis de sa croyance, le choix de l’architecte la sortit de cette vague de souvenir qu’elle venait de s’imposer. Le visage fermé, sans l’ombre d’un sourire, elle avait fini par relever le regard vers son interlocuteur :

- « Parce que je suis moi-même perdue…. Alors peut-être qu’en cherchant au plus profond des autres, je finirai pas trouvé ce que je cherche, pourquoi je suis là. » Ses doigts s’enroulèrent autour de son haut chaud « C’est difficile d’expliquer un lien précis qui se forme, mais j’ai l’impression que c’est le seul architecte qui me permettra vraiment de comprendre l’humain, de soulager les êtres… Imagine, Odard, imagine quelqu’un qui parvient à retirer la tristesse d’un esprit, la peur, ou la colère… Cette personne pourrait alors aider tellement de monde, ou détruire tellement de monde. »

La rouquine s’était lentement relevée, visiblement plus ébranlée par la situation que ce qu’elle voulait bien faire paraître. Elle offrit un sourire maladroit à son compère avant de disparaître dans sa tente au confort léger, mais suffisamment chaud pour éviter toute maladie.

- « Il est l’heure de dormir Odard, le Draco-chèvre nous attends demain, bonne nuit. »

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Jusqu'aux sommets des montagnes - Page 3 EmptyMar 6 Fév - 21:29
    Derrière chaque homme, chaque femme se cache un gouffre béant de douleur et de solitude que chacun voudrait masquer, combler, sans être capable d’y parvenir complètement. Parfois à l’ombre d’un regard ou d’un sourire l’on pouvait apercevoir cet abîme qui selon les gens se faisait soit discret soit dévorant. Et la douceur policée d’Aurore en disait long sur ce désir de satisfaire qui faisait qu’elle ne se contentait que rarement elle-même. C’était là ses lettres de noblesse, car son âme était aussi belle que son désir de bien faire, mais était-elle vraiment heureuse? Sans oser poser directement la question le barde en doutait, et cette pensée lui pinça le coeur. Aussi lui témoigna-t-il son soutien de par un de ses regards fraternels, ceux d’un homme à qui l’idée de convoiter cette jeune femme pour autre chose que son amitié ne viendrait même pas à l’esprit. La chaleur d’un ami simplement, sans que des mots aient besoin d’être prononcés puisqu’ils s’avéraient parfois - paradoxalement pour un être aussi bavard qu’Odard - tellement superflus.

    Y a-t-il véritablement une seule bonne manière? J’en doute très chère. Je pense que la vérité est dans les intentions et que celles-ci nous définissent vraiment. Alors certes des choses abominables ont été commises avec de bonnes intentions, mais le fond en est-il vraiment différent pour autant? Je ne pense pas ma mie, le tout est de se satisfaire de cette foi sans aller à son encontre. Ainsi peu importent nos actes notre conscience reste immaculée, du moins ce n’est que mon avis!”

    Pour quelqu’un qui balbutiait dans son apprentissage des arcanes de Khugatsaa, Aurore en avait une vision très juste, vision avec laquelle le barde était d’accord. Les petits tours restaient triviaux et sans danger, les véritables manipulations quant à elle prenaient une toute autre dimension qu’il était parfois difficile d’appréhender autant que de maîtriser. Des cohortes de mages devenus fous à la vue des horreurs tapies dans l’esprit de l’homme pourraient en témoigner, certains voyages ne sont pas faits pour être entrepris. Et lorsqu’ils le sont, on ne peut jamais totalement s’en remettre. C’est un risque que certains prenaient, qu’ils avaient même érigé en mode en vie. Comme un arme dont la puissance était sans limite, mais peu en étaient capable et encore moins pouvaient résister longtemps aux assauts du chaos qui régnait au coeur de certaines âmes.

    Odard jongla quelques instants avec des boules qui n’étaient pas là, bien qu’elles semblaient l’être et les laissa s’évanouir dans un nuage de fumée lorsqu’elles tombèrent au sol. Il rit de son “petit tour” et sourit en retour à son amie.

    Ces petites choses sont fort amusantes! Inutiles certes, mais amusantes. À vrai dire Aumie la plupart des mages s’en contenteront amplement et n’exploreront pas plus avant cette autre facette de l’Illusion qui elle est bien moins reluisante. C’est aussi simple que retors et je dois l’avouer, terriblement dangereux. On m’a conté l’histoire d’un confrère qui prêtait ses talents aux autorités du Khurmag dans la résolution de crimes et autres affaires sordides, dans le but d’arracher à l’esprit de meurtriers des informations que ces vils félons gardaient pour eux. Le pauvre bougre malgré ses bonnes intentions a malencontreusement pénétré trop loin dans l’esprit d’un détraqué et s’est perdu. Il s’est aventuré si loin qu’il est devenu le scélérat qu’il interrogeait, tandis que ce dernier est mort du choc de voir son esprit ainsi violé.”

    Il secoua la tête quelques instants. C’était une histoire que l’on contait aux jeunes mages dans le but de leur enseigner la prudence. Et qu’aussi puissant ou talentueux soit-il un Illusioniste n’était pas à l’abri d’un excès de zèle ou de confiance, qui pouvait être fatal dans le meilleur des cas. Car quel sort pouvait être pire que celui d’être dépossédé de son propre esprit? Ou de couper involontairement toutes les attaches de ce dernier et de finir enfermé dans son propre corps, incapable de bouger mais douloureusement conscient du monde qui continue à tourner. Triste sort. La voie des troubadours était plus bien plus sure et moins sinistre que ce mentalisme qui virait parfois, souvent, à la psychose.

    C’est terrible n’est-ce pas très chère? Je préfère m’en tenir à quelques petits tours purement récréatifs et ô combien divertissants. Ces arcanes mentales sont bien trop glissantes à mon goût, et puis rien n’est moins mesquin n’est-ce pas ma mie? Je veux dire, qui serais-je pour ainsi m’amuser à tripatouiller le cerveau des gens? Un bien triste individu assurément!”

    Ce fut comme un coup de vent, une bourrasque qui soulève un rideau et met à bas le mur qui façade les émotions de la chasseresse. C’est à ce moment là, réellement, qu’il perçut l’étendue de la souffrance qui habitait en permanence son amie. Et ce bref aperçu a presque manqué de le faire défaillir. Il aurait voulu se jeter sur elle, la prendre dans ses bras et lui répéter jusqu’à ne plus en pouvoir qu’il était là et surtout que tout irait bien. Mais c'eût été mentir. Non il ne serait pas toujours là, aussi fort qu’il le voudrait, et non tout n’irait pas toujours bien, la vie n’était pas faite en ce sens. Mais qu’il soit damné s’il n’essayait pas. Après tout il avait parlé d’intentions, et qui serait-il s’il ne tentait pas de changer la vie de celle qui rendait la sienne plus agréable?

    C’était comme prendre la pleine mesure d’une réalité qui ne se voulait parfaite qu’en apparence, prendre la température de l’eau et grimacer en réalisant qu’elle était bien plus froide que prévue. Mais c’était un rôle auquel il tenait, aussi jovial et insouciant que soit son personnage en temps normal. Son rôle était simplement de faire pencher la balance du bon côté.

    Oh très chère je ne suis personne pour juger mes pairs, et loin de moi l’idée de vouloir endosser un tel rôle, ça non. Mais je peux vous affirmer Aumie que vous êtes une bonne personne, peu importe ce qui peut vous pousser à penser le contraire. Vous l’êtes, je le sais. Ne pas être parfait ne signifie pas être mauvais ma mie, sans quoi nous serions tous des monstres en puissance.”

    Malgré sa douleur et ses tourments désormais clairs aux yeux du barde, Aurore persistait à vouloir aider coute que coute son prochain, soulager ces maux que les mots ont bien du mal à cerner. Agir encore une fois non pas pour elle mais pour les autres, peut-être y trouverait-elle sa rédemption? C’était une cause noble, venant d’une personne noble dotée d’une telle volonté qu’il ne faisait aucun doute que son but serait un jour atteint. Et ce malgré tout ce que cela pourrait lui coûter.

    Je vous souhaite Aumie de vous trouver au cours de votre quête, c’est une bien noble entreprise que votre équité vous permettra de mener à bien en accord avec vous-même j’en suis certain! Et si d’aventure la nécessité vous poussait à user de méthodes moins reluisantes eh bien, n’est-ce pas là le propre d’une nécessité? Je sais qu’au fond votre âme est pure, et c’est peut-être le plus important.”

    Visiblement secouée par les images qui semblaient défiler derrière ses yeux la jeune femme s’était levée. Oh Odard aurait eu la capacité de lever un instant ce voile et de découvrir par lui-même qu’elles affres la tourmentaient ainsi. Mais cela aurait été violer son intimité, il ne voulait pas savoir ce qu’elle ne souhaitait pas lui confier. Aussi lui adressa-t-il le sourire le plus chaleureux possible et posa sa main derrière son épaule en une brève caresse qui résumait à elle seule tout ce qu’il aurait pu lui dire.

    Bonne nuit très chère, inutile de dire que je serai où vous aurez besoin de me trouver.”

    Odard pénétra à son tour dans sa tente après s’être assuré de la bonne santé du feu et jeta un sort sur ce dernier pour qu’il ne soit visible qu’à quelques pas du campement. Une saine précaution en ces terres sauvages, qui sait quels prédateurs rôdent la nuit venue? Une mauvaise rencontre aurait été dommage, surtout si près du but. Il s’endormit sans avoir pris la peine de se déshabiller, la nuit était assez fraîche pour qu’il tente de conserver autant de chaleur que possible et s’interrogea à mesure que le sommeil le gagnait. Etait-il à la hauteur? Avait-il dit ou fait ce qu’il fallait? Le souffrance des autres est bien pire à contempler car on ne peut la plupart du temps rien y faire, si ce n’est essayer avec autant d’ardeur que d’affection. Encore et encore.

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Jusqu'aux sommets des montagnes - Page 3 EmptyJeu 8 Fév - 19:19
Est-ce qu’il existait une bonne manière d’utiliser la magie des architectes ? Évidemment. Est-ce que les actes mauvais restés encré dans notre conscience la tachant d’un gris désagréablement ? Évidemment. Du moins, Aurore restait convaincue que chaque action entraînait des conséquences et que même une personne pensant faire le bien en faisant le mal ne pouvait être atteinte que d’une démence probable. Même cet individu malsain se verrait entaché de gris, de noir, ou d’une tout autre couleur non agréable à l’œil. La rouquine n’en dit cependant rien, conscience que sa façon de voir les choses était certainement tout aussi extrême que certain comportement. Au fond, était-ce peut-être elle qui n’avait pas pleine saisi toute les subtilités de l’art des agissements. Rien ne pouvait être tout noir ou tout blanc, pour avoir un équilibre fallait-il un peu des deux.

- « Si l’acte commis est mauvais, même sous couvert de bonne intention, cela ne change rien à la finalité. »

Elle c’était exprimé plus pour elle-même, comme-ci cette phrase était la conclusion de ses pensées, comme-ci à ses yeux, sans que tout soit noir ou blanc, il n’y avait que la finalité qui comptait. Aurore n’était pas entièrement dans son assiette. Les images de ses échecs, mais aussi de ses réussites repassant sous ses yeux, elle n’avait toujours eu que de bonne intention, pourtant la finalité n’avait pas toujours était positive. La rouquine avait fini par déglutir, mastiquant l’aliment qu’elle tentait d’avaler, sans que la faim ne soit forcement présent. Les deux émeraudes de la jeune femme avaient fini par abandonner la contemplation du sol, pour aviser la jonglerie du barde, amusée sans l’être vraiment. Il y avait tellement de choses possibles avec cette magie, tellement de possibilités, tellement de risque aussi. Ses lèvres s’étaient entrouvertes à l’évocation de la rumeur, comme-ci elle réalisait seulement que sonder les esprits pouvait avoir des répercussions sur son propre esprit.

- « C’est horrible » souffla-t-elle «  Cela signifie qu’il faut toujours avoir un élément nous raccrochant à la réalité. Je crois que finalement, le risque est plus pour le mage utilisant ce don dans ce sens, que réellement pour celui dont l’esprit est sondé. »

La suite de la conversation n’eut pas forcement beaucoup de sens pour la my’tränne qui se contenta d’hausser les épaules, sans réellement savoir quoi en penser. Il la voyait comme une femme gentille, agréable, une bonne âme, ce qui pour Aure, n’était pas réellement le cas. Elle ne s’offusqua aucunement, ne chercha pas à débattre sur la véracité des propos. Qui avait raison, qui avait tort, difficile de le savoir, en revanche il était évident pour Aurore que l’homme ne la connaissait pas forcement aussi bien que ce qu’il prétendait, comment aurait-il pu alors que les deux jeunes gens ne parcouraient les terres que depuis une semaine à peine. Affichant un sourire qui s’était voulu sympathique, mais qui pour autant ne laisser aucunement démontrer un quelconque sentiment. Opinant simplement, comme pour lui offrir l’argument du peut-être, ou simplement lui éviter un débat qui n’aurait de toute façon, aucun intérêt que ce soit pour l’un ou pour l’autre. Aurore se contenta d’hausser encore un peu les épaules, avant de disparaître simplement dans sa tente. Oubliant même la présence du ménestrel, offrant comme unique conclusion à tout ça une bonne nuit.

La rouquine n’était pas particulièrement épuisée, pensive serait plus juste. Allongée sur le sol parfaitement emmitouflé dans une multitude de peau, de couverture chaude, elle attendait que le temps passe, que la nuit s’écoule avec cette impossibilité de s’endormir. Aurore s’enfermait dans sa bulle, dans ce mélange de souvenirs douloureux, modifié par sa propre perception des faits. La rouquine avait fini par s’endormir sur le petit matin, sombrant dans un sommeil profond. Après plusieurs heures d’endormissement plus ou moins léger, la rouquine avait fini par sortir de son sommeil, se levant. Le barde semblait déjà lever et même avoir rangé une grande partie du campement. Sortant de sa tente qu’elle débuta immédiatement à défaire et à ranger. Aure lui offrit un sourire, signe qu’elle allait bien, mais qu’elle n’avait pas réellement envie de reparler de la conversation de hier soir. Le plus important était à présent de terminer de ranger, l’heure de la chasse était enfin arrivée. Les chevaux préparés, la rousse s’était hissée sur sa propre monture, avisant son compagnon d’aventure, elle lui décrocha un sourire beaucoup plus rassuré, beaucoup plus détendu :

- «  Alors Odard, prêt pour récupérer la corne pour votre future flûte ? »

Un dernier regard, un petit signe de la tête et le duo s’étaient mis en route, suivant un petit sentier montant sur les montagnes. Il ne pouvait être que là, c’était une évidence. Abandonnant les montures dans un renfort proche d’une caverne, la jeune femme avait fini par conclure avec le barde qu’il était plus prudent de poursuivre à pied. Flèche,  carquois, arc, tout était parfaitement en place.

- « Nous allons longer le flanc » siffla-t-elle « L’objectif serait d’en trouver un isolé, idéalement dans un lieu convenable pour permettre la mise en place des pièges. »

Un signe de la tête, encore, et la chevelure rousse s’était engagée dans un sentier très étroit, le risque de chute était plus que probable et constatable, surtout au vu des multitudes de petites pierres s’engouffrant dans le vide, dégringolant sous le poids de la progression de la my’tränne. Après plusieurs minutes de marches dans un froid particulièrement éprouvant, elle finit par stopper ses pas montrant d’un geste de la main vaste, la présence en bas de la bête tant convoitée, elle n’en croyait elle-même pas ses yeux tant la difficulté de la recherche venait de s’envoler.

- «  Il faut descendre Odard ! J’espère que vous aimez l’escalade. »

Détachant de sa ceinture le grappin et la corde suffisamment solide et commença à accrocher le tout autour de la taille du barde, mais aussi à une pierre solide qui ne risquerait pas de descendre. Faisant de même avec sa propre silhouette, elle entama la descente tout en douceur, laissant son regard se déposer une dernière voir sur la corpulence de son compère.  

- « Alors Odard, prêt pour vous abandonner un peu à vos habitudes confortables ? »

Et hop. Voilà que la longue chevelure de feu disparaissait petit à petit dans le vide, cherchant toujours à se stabiliser pour ne pas faire une chute trop violente.

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Jusqu'aux sommets des montagnes - Page 3 EmptyMar 13 Fév - 7:05
    Certaines choses sont finalement bien là où on les a congédiées, dans un recoin sombre et isolé de l’esprit où à défaut d’être effacées elles offriront tout de même une relative tranquilité. Cela ne revenait-il pas à dire qu’il ne fallait pas déranger l’eau qui dort? Bien que l’adage n’ait finalement rien à voir avec tout cela la symbolique restait la même. On n’oublie pas pour rien, on ne refoule pas sans raisons et les murs de silence derrière lesquels on se terre ne sont finalement que des murailles. Gare à celui qui muni de ses bonnes intentions viendrait abattre ces défenses.

    Le barde n’insista pas, conscient qu’il se tramait dans l’esprit de la jeune femme bien plus qu’elle n’en laissait paraître. Pour un homme de parole il se surprenait à s'accommoder aussi bien du silence, mais n’était-ce pas là le moins qu’il pouvait faire pour elle? La base d’un respect mutuel qu’il n’aurait osé entâcher. Ce débat sur la magie en revanche l’intéressait au plus haut point, puisqu’il n’avait finalement que rarement eu la chance de converser avec ses pairs. Leurs arcanes étaient faites de risques, d’un danger aussi grand voir peut-être encore plus que celui de manipuler des flammes ou encore l’essence de la vie. On risquait de s’y perdre et quand bien même le corps ne risquait rien, l’esprit lui pouvait s’en trouver délité, anéanti. Les accidents magiques étaient fréquents mais leurs victimes avaient généralement la chance - relative - de s’éteindre lorsqu’aucune guérison n’était possible. Comment pouvait-on se remettre du morcellement de son âme lorsque celle-ci n’empêchait pas le corps de fonctionner? C’était là le plus grand danger, celui de se perdre pour ne jamais retrouver la lumière du jour.

    C’est terrible en effet très chère, et c’est pour cela que je m’en tiens la plupart du temps à des choses sans danger. Bien sûr la nécessité peut nous pousser à prendre des mesures radicales, mais c’est une toute autre histoire n’est-ce pas?”

*  *  *  *  *

    S’il y a une chose que le voyage permet, c’est de dormir comme si l’on avait pas fermé l’oeil depuis des jours. Les grandes chevauchées et la rigueur de la vie sauvage imposaient leur coût en force et en vitalité, mais malgré la rudesse de cette terre ils avaient apporté suffisamment de matériel pour jouir d’un certain confort et au matin le barde se sentait frais et reposé, ayant bien mieux dormi que dans certaines auberges miteuses et peu recommandables qui - hélas - étaient légion. La nuit avait été calme et si le fond de l’air n’en restait pas moins frais, il faisait beau et aucun nuage ne semblait déterminé à venir jouer les trouble-fête.

    N’étant pas le plus adroit des hommes, Odard s’était permis de placer autour de la tente de son amie un léger voile qui atténuerait les sons extérieurs. Grand bien lui avait pris car en rangeant leur campement il avait plus d’une fois trébuché les bras chargés, et les nuées d’oiseaux qui s’étaient enfuies à tire-d’aile attestaient du vacarme qu’il avait provoqué. Ne demeurait plus que le feu qu’il avait réalimenté et naturellement la tente de la jeune femme, le reste était pratiquement chargé. Il n’avait laissé à portée de main que quelques victuailles, parce que personne n’aurait l’idée de partir chasser le ventre vide n’est-ce pas?

    C’est avec ravissement qu’il accueillit Aurore, bien décidé à laisser derrière eux une conversation qui l’avait remuée plus qu’il ne l’aurait souhaité. Elle semblait prête et déterminée à profiter du beau temps pour débusquer leur proie, aussi s’estima-t-il heureux d’avoir mangé un morceau en l’attendant. Le campement les attendrait bien sagement, dissimulé derrière cette même bulle qui avait tenu les prédateurs à distance durant la nuit. Il éteint le feu et prit place à ses côtés sur sa propre monture, heureux de partager cette aventure en bonne compagnie.

    Bien le bonjour Aumie! Et comment! J’espère vous faire l’honneur d’une démonstration au plus tôt! La nuit a-t-elle été bonne? Ma foi si ce temps magnifique n’est pas gage de réussite eh bien je ne sais pas ce que c’est!”

    Après une chevauchée prudente sur ce terrain accidenté force était de constater que les chevaux n’iraient pas plus loin, aucun d’eux ne se sentait la force de descendre ces pauvres bêtes au bout d’une corde et quand bien même en auraient-ils été capable, l’idée aurait été des plus stupides! Sans compter que les chevaux auraient probablement trouvé la plaisanterie peu à leur goût. Ils avaient continué à pied après avoir vérifié que rien ne manquait, qu’il s’agisse des armes ou du matériel, ils n’auraient pas le droit à l’erreur face à ces monstres. Seraient-ils aussi idiots que ce que l’on en disait? Si ce genre d’histoires étaient souvent largement exagérées quand elles concernaient des gens, la stupidité de certains animaux était en revanche tout à fait authentique, il n’y avait qu’à regarder un chien tenter de creuser dans l’eau pour être fixé.

    Autant que le réveil et le début de journée s’étaient avérés agréables, les contreforts d’une montagne ne sont rien comparés au péril omniprésent qui rôde derrière chaque pierre, chaque plaque de glace terne et presque invisible. Chaque bourrasque glaciale et pernicieuse qui s’infiltre partout et vous gèle jusqu’à l’os. Le temps clair et agréable avait laissé place à la neige et à un vent qui rendait la vision trouble.

    Si elle l’avait vu, lui l’avait senti. Les vents tourbillonnant avaient mené jusqu’à eux cette odeur de charogne au poil sale, remugles insupportables d’abcès purulent et de sueur rance. Une horreur, il fallait espérer que la chair ne soit pas aussi forte en goût que la bête au nez. Sans quoi ils devraient se contenter de fruits secs, et plutôt deux fois qu’une. Mais un autre détail avait attiré l’attention du barde.

    Par les Saints Rognons ma mie mais c’est une horreur sans nom! Comment peut-il puer ainsi et ne pas consentir à se jeter du haut d’une falaise? Mes aïeux j’espère seulement que l’odeur disparaîtra de la corne.” Il se figea un instant. “A... Attendez une minute. De l’esca-quoi?”

    Trop tard pour protester, il s’était vu en quelques instants entouré d’une corde et avait surtout vu la jolie rousse disparaître de son champ de vision. Voilà qu’il se retrouvait seul sur cette plateforme étroite et traîtresse, pendant que son amie se balançait doucement dans le vide. Finalement beaucoup trop près de ce monstre à la cervelle d’oiseau qui semblait pour l’instant ne pas les avoir remarqués. Vu la taille de la bête, elle aurait très bien pu s’amuser à leur jeter des pierres et les pulvériser contre cette paroi abrupte, puisqu’en réalité ce qui passerait pour un caillou pour un Yaamany suffirait à réduire en bouillie un homme adulte. Mais vraiment. Est-ce qu’ils étaient obligés de descendre par là?

    Habitudes? Confortables? Oh miséricorde…”

    Puisque finalement hors de portée de voix et bien trop exposée pour prendre un tel risque, d’autant que le vent aurait mâché la moitié de ses mots, la jeune femme lui signala par télépathie qu’il pouvait descendre. Il aurait voulu protester, se battre pour rester en haut, peut-être même acheter une flûte en bois ou errer dans les montagnes à la recherche d’un spécimen déjà miraculeusement mort. Mais il savait que cela ne le conduirait à rien, et pire qu’il s’agirait presque d’une insulte pour la jeune femme qu’il avait traîné à l’autre bout du pays pour se procurer cette corne. Après tout qu’est-ce qu’une petite centaine de mètres entre vous et la créature qui pourrait bien vous expédier dans l’oubli? Bon gré mal gré Odard entama sa descente d’une manière incroyablement maladroite et lente, comme si chaque centimètre qu’il donnait à sa corde allait le précipiter en bas de cet abîme dont il n’osait heureusement pas regarder le fond.

    Combien de temps cela avait-il pris? Une demie heure? Une heure? C’est un barde fébrile et ruisselant de sueur qui arriva au bout de sa corde, pour s’agenouiller à même le sol comme si celui-ci était la plus belle chose qu’il avait jamais vu. Il considéra un instant l’idée d’effacer de son propre esprit le souvenir de cette expérience, mais c'eût été courir un trop gros risque. Mais si la descente s’était révélée un exercice difficile, qu’en serait-il de la remontée? Il chasse cette pensée de son esprit et regarda Aurore sans oser parler. Bien que le vent ait gagné en force et qu’il était peu probable que leurs voix portent, il vallait mieux se montrer prudent.

    * Eh bien nous y voilà très chère! Finalement nous avons fait le plus simple, il ne nous reste plus qu’à occire cette chose et remonter sa carcasse putride jusqu’à notre charrette! *

    Cela risquait de prendre des jours, ou bien devraient-ils le démembrer sur place et emporter ce qu’ils pourraient de viande dans leurs sacs? Finalement oui, ils n’avaient accompli que la partie facile du voyage. Cette bête était tout ce qui se dressait entre eux et le monde civilisé, monde qui manquait déjà cruellement au barde. Pas étonnant que ces chèvres soient devenues stupides à force de vivre dans un tel environnement. Pas l’ombre d’une taverne ni d’un fût de bière, pas la moindre chanson et encore pire, personne à tourmenter.

    Le vent soulevait d’épaisses quantités de neige qui tourbillonnait dans l’air rendant la vision trouble, saccadée. Le monstre était immobile à une centaine de pas devant eux, face à une pierre saillante qu’il semblait observer avec beaucoup d’attention. Il semblait presque insensible au froid et à la neige qui pourtant aurait bien pu fondre devant une telle puanteur.

    Odard avait des idées, il n’en manquait généralement pas. Sa première action fut de leur accorder une invisibilité presque totale, hormis leurs empreintes de pas dans la neige ils étaient parfaitement dissimulés et pourraient s’approcher discrètement. Pour le reste il leur fallait un plan d’action, qui n’impliquait pas de finir écrasés contre cette grosse pierre.

    * Je propose de l’aveugler ma mie, il ne peut déjà pas nous voir mais je pense qu’il s’agit là d’une saine précaution n’est-ce pas? Ensuite eh bien pensez-vous que votre arc pourra percer son épaisse carcasse? Sans quoi il faudra le pousser à s’ôter lui-même la vie, pensez-vous qu’il y en a d’autres aux alentours? *

    Comme avait dit un vieil homme, le sort en était jeté. Et comme il n’était pas exclu qu’ils meurent tous deux en tentant de s’enfuir, autant tenter le tout pour le tout et arracher une bonne fois pour toute sa corne à ce fichu animal. Et dire que ces machins là peuvent survivre à un Khoral. Odard sourit à son amie autant pour lui assurer de son soutien que pour se rassurer lui-même, avant de finir par se demander dans quoi ils s’étaient fourrés.

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Jusqu'aux sommets des montagnes - Page 3 EmptyMar 13 Fév - 14:44
Les mains sur les roches glacées, Aurore cherchait des prises stables, que ses doigts gantés pouvaient encore supporter. Le vent était froid, la faisant trembler légèrement, ses lèvres teintées légèrement vers le bleuté brbrbrbr Khurmag et son climat si particulier. Lentement, la silhouette féminine descendait, avec pour unique sécurité la corde maintenue au sommet par un amas de roche, elle, parfaitement bien ancrée dans le pan de la montagne. Relevant légèrement la tête, la rouquine avisa le barde, encore bien à l’abri sur le rebord de la falaise, hésitant, peu confiant. Son comportement l’amusa beaucoup, si bien qu’Aure eut quelque difficulté à ne pas éclater de rire. Il avait de la chance qu’elle soit dans l’obligation de rester concentrer, sans quoi, elle ne se serait pas privée. L’action, la vraie, adieu le confort de l’auberge, d’un bon lit, bienvenue dans le froid de la région et le petit pique d’excitation lors des situations complexes et dangereuses :

- « Alors Odard, vous abandonnez déjà ? Nous sommes qu’au tout début de notre mission. Pensez à votre magnifique corne à la délicieuse odeur sauvageonne. » Elle l’avisa, relevant le menton « Un peu de courage messire, ça vous fera de belles tirades à raconter à ne pas en douter.»

Sa voix avait été portée par sa position, mais aussi par le vent, facilitant le dialogue, malgré l’activité. La température et la difficulté des prises rendaient le tout plutôt périlleux, et malgré une certaine habitude, Aurore montra quelque faiblesse, manquant de glisser à plusieurs reprises. La corde n’était qu’une sécurité, oui, mais une sécurité bien utile. Lentement, mais sûrement, le duo toujours aussi particulier progressait pour la plus grande satisfaction de la chasseuse. Une fois les deux pieds sur le sol dur, froid et recouvert de neige, la my’tränne afficha un sourire, s’étirant, avisant ses gants désormais blancs. Aurore avait froid, un peu, chose plus évidente. Elle fut surprise d’entendre la voix d’Odard dans son esprit et lui jeta plusieurs coups d’œil avant de réaliser qu’il se servait de son don pour Khugatsaa. Décrochant un nouveau sourire, elle fut amusée par les pensées positives du ménestrel et y répondit plus ou moins avec le même entrain.

- «  Plus que… Je serais fort impressionnée de vous voir remonter seul ce poids énorme sur vos épaules, le tout, en escaladant la montagne dont vous avez déjà eu du mal à descendre… Mais, rassurez-vous Dardar, je suis certaine que vous allez réussir de la plus belle des façons »

Plissant les yeux, Aurore instaura un vent léger en tourbillon autour d’eux, afin de calmer les flocons de neige qui s’abattaient en trombe sur le lieu. Repère entre deux montagnes, petit coin calme et particulièrement dangereux en cas d’avalanche. La my’tränne réfléchissait, activement sur un plan à mettre en place. L’animal n’avait semble-t-il pas encore remarqué les deux jeunes gens, trop occupés à observer une gigantesque pierre. La voix du barde avait fini par de nouveau se faire entendre dans l’esprit d’Aurore qui se contenta de répondre par un froncement de sourcils. L’aveugler ? Ce n’était pas qu’une d’aveuglement, il fallait surtout le mettre hors d’état de nuire et il était très peu probable qu’une ou plusieurs flèches de son arc parviennent à réduire en poussière cette pauvre bête. Un instant, les deux émeraudes d’Aurore s’arrêtèrent sur le haut de la montagne, petit recoin ou s’accumulait une quantité impressionnante de neige, juste en dessous se trouvait le Draco-chèvre… Ne serait-il pas plus simple de provoquer une avalanche ?

- « Tu vois là-haut ? » demanda-t-elle toujours en parlant par la pensée « Si il reste concentré comme ça et qu’on provoque l’avalanche alors… il y a des chances qu’il se fasse engloutir. On n’aura plus cas creuser pour le récupérer. Ne reste plus qu’à savoir comment…. » elle fit une pause « Je sais, tu vas ramasser les pierres, des petites, et tirer sur la pierre pour lui faire croire qu’elle s’anime. C’est tellement stupide, que ça devrait réussir… De mon côté, je m’occupe de déclencher l’avalanche. »

D’un geste de la tête, elle lui indiqua un petit monticule de pierres, elle évita de lui souligner qu’il n’avait vraiment pas intérêt de louper, sans quoi, il était fort probable qu’il se retrouve avec un animal stupide, mais très dangereux aux fesses.

Lancement des dés : a écrit:

Odard : pour réussir il faut faire un dé égal ou supérieur à 14
Jusqu'aux sommets des montagnes - Page 3 18021302441540352
Résultat : Réussite o/

Aurore : Pour réussir il faut faire  un dé égal ou supérieur à 14
Jusqu'aux sommets des montagnes - Page 3 180213024415274284
Résultat : Réussite o/

Pendant que Odard s’appliquait à réussir de justesse à occuper l’énorme monstre, ou tout du moins à attirer entièrement son attention sur l’énorme roche. Aurore, elle tentait déjà de remonter la montagne du côté ou la neige s’accumulait, tout en étant suffisamment éloignée, pour ne pas se faire emporter elle-même par le tout. En équilibre, les fesses sur une roche plus imposante, elle dégaina une flèche à laquelle elle ajouta une pierre. Ne restait plus qu’à réussir à la faire partir en la direction de l’accumulation de la neige, le tout en accentuant la force du vent. Elle prit une légère inspiration, pria les architectes pour sa réussite, en particulier amisgal avec l’espoir de ne pas se louper, pas cette fois. La flèche finie par fuser, et si au début on aurait pu croire qu’elle tombait dans le vide, elle fut rapidement réajustée par la force du vent qui projeta l’ensemble pile-poil en haut de la petite hutte de neige, puis dans un silence tout relatif, l’objectif fut atteint. La neige se mit doucement en mouvement, jusqu’à emporter la totalité dans une course folle. L’avalanche arrivait et mieux valait pour Odard qu’il est réussi et à occuper le monstre, mais aussi à s’éloigner ou se mettre à l’abri. De son côté, Aurore tâchait de se maintenir, sans chuter, elle n’avait pas de sécurité et l’intensité du tout fut si forte que les parois semblaient trembler avec de plus en plus de force. S’agrippant comme elle le pouvait, elle espérait sincèrement ne pas chuter ou glisser.

Lancement des dés : a écrit:

Aurore : Pour réussir, il faut faire un dé égal ou supérieur à 16
Jusqu'aux sommets des montagnes - Page 3 180213024415488750
Résultat : Réussite \o/ j’ai eu chaud les fesses !

Certaine de ses appuis, Aurore s’agrippait autant qu’elle le pouvait, son corps complètement contre les roches froides et recouvertes d’une fine neige. Il neigeait toujours, de plus en plus fort, et le vent avait fini par se lever. Le brouhaha de la substance blanche dégringolant avec une force en devenait presque désagréable, sonnant comme une fin du monde proche. Malgré cette idée, c’était bien la première fois qu’Aurore observait l’événement, à la fois surprise et impressionnée par la violence de l’avalanche. Légèrement inquiète pour son compère, elle le cherchait du regard alors qu’une fois le calme revenu, elle descendait lentement de son perchoir. Le pire restait à venir, avaient-ils réussis ou allaient-ils devoir affronter une bête particulièrement agitée.

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Jusqu'aux sommets des montagnes - Page 3 EmptyDim 18 Fév - 20:57
    Pour une corne à la délicieuse odeur sauvageonne. Cela sonnait comme un nom de ballade épique dont les gens raffoleraient. S’ils survivaient à cette entrevue avec le monstre aux mille odeurs. Ce qui était aussi inquiétant était que la bête soit capable d’empuantir un pan entier de montagne, en plein vent et à une centaine de pas de distance. Quelle odeur aurait-elle lorsqu’elle giserait inanimée sur leur chariot, dépossédée de ses cornes et de sa chair? Une telle viande était-elle tout simplement mangeable? Odard imaginait le goût d’une côte de Yamaany à mi-chemin entre l’agneau et le chevreuil, en beaucoup plus fort et avec un parfum de putois.

    * Un conte épique à n’en pas douter ma mie! Une ritournelle qui fera notre gloire éternelle. Je pressens que nous en rierons encore dans plusieurs années très chère et aussi peu enclin que je sois à la cruauté il ne me reste plus qu’à affirmer une simple chose : Cette chèvre doit mourir. *

    C’était de drôles d’idées qui traversaient l’esprit du barde alors qu’ils mettaient au point leur plan d’action. Aurore avait raison, remonter cette chose par le même chemin serait impossible, ou alors en plusieurs morceaux. Curieusement cette idée ne l’enchantait pas particulièrement, mais en y réflechissant bien, comptaient-ils vraiment traîner ce monstre jusqu’à leurs montures? L’odeur à elle seule aurait pu tuer un cheval, nul doute qu’ils apprécieraient peu leur nouvelle cargaison.

    * Absolument très chère! De la plus belle des façons vous avez entièrement raison. Mais je… Une avalanche? *

    L’idée était aussi géniale qu’elle était une insulte totale à la nature sauvage de l’animal. Pouvait-on noyer un poisson? Avait-on déjà vu un aigle replier ses ailes et tomber du ciel comme une pierre? C’était peu probable. Mais ensevelir un animal de quelques centaines de kilos sous des tonnes de neige et de pierre était un beau pied de nez aux lois de la nature. Un bon moyen d’affirmer que l’homme avait sa place partout et en tous temps. Ce n’était pas un Yéti puant qui viendrait contester des millénaires de domination du monde et de la chaîne alimentaire. Même si c’était dans le même temps incroyablement dangereux, le moindre faux-pas et ils ne pourraient plus rien faire. Mais c’était tellement osé, tellement beau qu’ils ne pouvaient que tenter leur chance et constater par eux-mêmes l’étendue de leurs talents respectifs.

    * Bigre ma mie c’est du pur génie! Bien que j’ai quelques doutes quant à ma dextérité je tiens à voir un tel miracle de mes propres yeux. Et si jamais nous échouions, eh bien sachez que faire connaissance aura été un honneur aussi gratifiant qu'inattendu. Vous aurez mon respect même si cette chose nous martèle l’un contre l’autre jusqu’à ce que nous ne soyions plus qu’un seul tas de neige rougeâtre et méconnaissable. *

    Après tout c’était lui qui l’avait entraînée dans tout ça. Il aurait été bien en peine de faire demi-tour maintenant. Et puis la vie n’est-elle pas faite de risques? Certes habituellement les risques sont mesurés, mais certaines choses valent la peine qu’on se remonte les manches. Le barde se saisit d’une pierre et recula de quelques pas pour se mettre hors de portée d’avalanche tandis qu’Aurore escaladait la paroi pour se mettre en position de tir. S’il y a des moments où l’on se relâche totalement, où l’on est assez à l’aise pour laisser tomber les masques et agir spontanément. C’est bien l’instant où l’on s’apprête à tenter le tout pour le tout. Grelottant de froid et secoué par les bourrasques de vent mêlé de neige Odard baissa la tête et soupira en la secouant avant d’armer son bras.

    Bordel de merde.”

    Il avait murmuré trop doucement pour que l’animal ait pu l’entendre par-delà les vents qui hurlaient entre les corniches et les crevasses du flanc de montagne. Mais c’était une forme de soulagement, comme un gri-gri qui pourrait - peut-être - lui porter bonne fortune. Sans quoi il espérait juste qu’Aurore parviendrait à s’enfuir. Juste avant de tirer sa première le barde repensa à l’une de ses fameuses tirades, un soir où comme celui-ci il avait fait fi du bon sens et de la prudence pour jouer les artilleurs avec une pierre dans la main. Il était là son gri-gri, son mantra qui à défaut de lui porter chance lui permettrait d’immortaliser cette scène dans son esprit. Est-ce que Khugatsaa les observait en ce moment? Si aucun d’eux ne pouvait le savoir il espérait que si ce fut le cas, il pourrait rendre son Architecte fier. Aussi s’adressa-t-il en pensée à la fois à Aurore et au Griffon s’il se trouvait dans les parages. Peut-être que cela aiderait.

    * Je vous abomine ô vil cloporte, puisse votre mère sentir aussi mauvais que la fange dans laquelle vous vous vautrez chaque jour. *

    Et la pierre qu’il tenait à la main vola, emportant avec elle tous les espoirs de finir cette aventure en vie. Elle vola comme dans un rêve, avec une lenteur impossible qui rendait l’attente insupportable et leur tordait les boyaux à tous les deux. Mais comme dans un rêve elle vint s’écraser exactement au sommet du rocher qu’observait le monstre, dans un clic à peine étouffé par le bruit du vent. Ce dernier s’en empara avec un rictus d’incompréhension ridicule, incapable de se figurer que les pierres ne se matérialisaient par d’elle-mêmes. Il la soupesa de son énorme main et frappa même sur le rocher avec, comme pour s’assurer qu’elle était réelle. Cette pauvre bête n’avait décidément rien pour elle.

    Odard ne vit pas la flèche fuser, pas plus qu’il ne pouvait voir son amie cramponnée sur une paroi abrupte. Cette chasse et cette mort qui planait arrivaient dans l’anonymat le plus total. Rien au monde n’aurait pu alerter le Yamaany de la menace qui pesait sur lui. Et c’est totalement inconscient de ce qu’il se passait qu’il se fit engloutir par la coulée de neige et de pierres. Est-ce que quelque chose pouvait survivre à un tel choc? C’était peu probable si l’on oubliait les récits qui vantaient la résistance de ces créatures. Mais tout de même, rien que s’extirper de cet amas de mort demanderait des heures au monstre s’il avait survécu. Quoi qu’il faudrait creuser pour le sortir de là s’il était bel et bien mort.

    Une part du barde trouvait tout cela trop rapide, trop simple pour que cela puisse être bon signe. Le temps s’étirait et faisait de chaque seconde une vie entière, les yeux rivés sur le monticule de neige qui ne semblait - p
our l’instant - pas décidé à entrer dans une colère folle.

Citation :
Jet de résistance

- Endurance du Yamaany : 15
 15 réussi
Loupé...

    * Je dois avouer ma mie que vous avez été héroï… *

    Dans un hurlement de fin du monde le tas de neige explosa pour libérer un Yamaany fou de rage, blessé mais bien vivant. Du sang sourdait de ses narines et la lueur de folie dans son regard signifait qu’il souffrait terriblement. Ce qui le rendait encore plus dangereux et imprévisible. Par chance le voile d’invisibilité couvrait toujours les deux aventuriers qui étaient en relative sécurité. Pour l’instant.

    * Par les Saints Rognons ma mie vous allez bien? Diantre ces choses ont la peau bigrement dure! Restez où vous êtes, nous allons devoir improviser avant qu’il ne comprenne quelque chose, même si je doute fort que cela soit possible. *

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Jusqu'aux sommets des montagnes - Page 3 EmptyMer 21 Fév - 11:54
Tout s’était mis à trembler devant la force de la neige dégringolant la paroi montagneuse. Aurore avait tenu par on ne sait trop quel miracle. Accroché à des pierres, les mains tremblantes, le souffle saccadé, la jeune femme avait tenu bon, ordonnant à ses membres de tenir le choc. Elle n’avait nullement de sécurité, nullement de corde pour lui offrir une chance de survie en cas de chute, non, il n’y avait qu’elle et sa volonté, son refus d’abandonner, d’échouer. Comme pour souligner le pied de nez qu’elle faisait a l’environnement, le vent s’était levé, rendant sa position et son maintien plus délicat. Le bruit de l’avalanche résonna encore un long moment, jusqu’à ce que la neige emporte avec force tout ce qui se trouvait en bas, jusqu’à ce que les mouvements de l’élément cessent, puis ce fut le silence, horrible silence, morbide silence. Le calme après la tempête, cette phrase connue portait très bien son nom. La my’tränne hésitante dont les doigts commençaient à geler malgré la présence de gant finit par se résoudre à entamer la descente, maladroite, de manière incertaine. Aurore espérait au plus profond d’elle-même que le barde ait survécu à tout ça, sans quoi, hormis le fait de ne pas être payé, elle aurait perdu un ami en devenir d’une importance cruciale.

Après plusieurs longues minutes de descente, la chasseuse avait fini par poser pieds sur le sol recouvert d’une imposante épaisseur de neige, un peu plus loin une montagne de poudre blanche se laissait entrevoir et derrière, le barde. Du moins, elle ne pouvait que l’espérer. Laissant son inquiétude la guider, Aurore abandonna sa position de statue pour se diriger vers la source de son souci principal, les jambes légèrement tremblantes, légèrement perdues par la force de l’idée qu’elle avait pu avoir. Être original avait quelque chose d’un peu fou-fou, un accord passé avec soi moi intérieur, une promesse de ne jamais s’ennuyer, mais quand même… Elle venait de risquer à la fois sa propre vie, qui n’avait tenu qu’à une minuscule petite pierre, mais surtout celle du ménestrel, qui lui n’avait rien demandé de particulier. Prenant une légère inspiration, elle contourna le grand monticule blanc, pour entrevoir pour son plus grand soulagement la silhouette masculine. La voix de son client s’était elle aussi fait entendre dans son esprit, terminant de rassurer la jeune femme. Prenant enfin la peine de retirer les résidus de neige de ses cheveux, mais aussi de ses vêtements, elle passa ses doigts sur les substances étrangères pour les retirer. Affichant un sourire victorieux, elle allait annoncer qu’ils allaient pouvoir enfin récupérer la corne et rentrer, quand la montagne provoquée par l’avalanche s’agita, laissant s’échapper le Yamaany. Par réflexe, la rousse s’était jetée sur le barde, n’ayant pas conscience qu’aux yeux de l’animal, ils n’existaient pas à cause du subterfuge du barde. Sur le sol allongé sur le ménestrel et dans la neige, elle se redressa légèrement, pour aviser la créature qui hurla d’une rage folle.

Sous l’intensité du cri, qui fut accentué par le creux du lieu, les montagnes environnantes semblèrent trembler de douleur. La bête, elle pivota sur elle-même, pour s’acharner contre la poudre blanche qu’il tenait visiblement pour responsable. L’animal ne cessait de hurler, offrant des coups toujours plus fort contre la neige, creusant dans celle-ci à la recherche d’une raison, puis finit par s’acharner sur la montagne elle-même plus loin. Si le Yamaany n’était pas très intelligent de base, la violence de l’avalanche n’avait semble-t-il aucunement arrangée les choses. Un doigt sur les lèvres d’Odard, Aurore semblait vouloir lui signifier de ne pas faire de bruit. Même si cela paraissait atrocement logique, elle doutait quelque peu que celui qui lui avait prouvé à mainte reprise avoir la langue bien tendue parvienne à se retenir dans ces circonstances. La concentration était de mise. Avisant le lieu, la rouquine se releva, laissant l’opportunité au ménestrel de respirer un peu et de faire de même.

Une fois sur ses deux jambes, l’analyse de la situation pouvait reprendre, fallait-il trouver LA solution à un problème de taille –et odorant-. Si la bête n’avait semble-t-il pas compris que le responsable de tout ceci était les humains –qu’il n’avait, semble-t-il, toujours pas repérer-. Prenant une légère inspiration, la rouquine ne sembla pas avoir une idée lumineuse. Aure restait dubitative vis-à-vis du comportement de l’énorme et imposant animal. N’ayant jamais chassé le Yamaany elle n’aurait jamais cru qu’il pouvait être à ce point stupide. Fallait-il certainement jouer sur cet état de fait. Reprovoquer une avalanche n’était pas envisageable ni possible, aussi le duo devait trouver une autre solution.


- «  Je n’ai pas d’idée » avoua mentalementla my’tränne avec une certaine hésitation, « Peut-être qu’il pourrait s’assommer à force de taper sa tête contre la montagne ? »

La phrase pouvait prêter à sourire, faire rire même, mais c’était bien l’action que réalisait la bête, dont un filet de sang se laissait à présent percevoir. Caressant du bout des doigts une de ses flèches, la jeune femme se demanda si il n’était pas possible de l’énerver davantage afin qu’il réalise avec plus de force l’action. Une nouvelle fois sa réflexion resta sans résultat. Préférant jouer la carte de la sécurité, elle fit un signe de la tête au barde afin d’aller s’installer derrière une imposante pierre. Autant être prudent.

- «  Ne pourriez-vous pas lui faire croire qu’il est attaqué par la montagne ? » elle secoua la tête «  Nous devrions lui jeter des pierres des deux côtés, comme ça, il imaginerait se faire attaquer et frapperait par conséquent, beaucoup plus fort. C’est la seule option que je vois pour l’heure. Après tout, il est déjà un peu secoué par les restants de l’avalanche. »

Aurore roula des épaules, par réellement convaincu par cette proposition. Voyait-il cependant une autre solution lui, en ce cas elle restait attentive. Si ce n’était pas le cas, elle ramassait déjà une multitude de pierres pour exécuter son plan. Le tout étant évidemment d’amoindrir les forces de l’animal ou qui sait de le voir s’écrouler d’épuisement après plusieurs heures d’acharnement. Il suffira ensuite de percer sa peau visiblement résistance pour le laisser se vider de son sang. Pas très respectueux de la bête, mais au moins cela serait une réussite pour les deux aventuriers.

- «  Prêt ? » questionna-t-elle mentalement « Allons-y, j’espère que vous allez viser aussi bien que la première fois. »


Lancement des dés pour Odard a écrit:

Pour réussir il faut faire au moins 15 ou plus :
Résultat : 19, réussite


Lancement des dés pour Aurore : a écrit:

Pour réussir, il faut faire un dé supérieur ou égal à 13
Résultat : 18, réussite

Après avoir obtenue l’accord d’Odard, la my’tränne positionné sur le côté gauche de l’animal, suffisant loin pour ne pas être vu, s’appliqua à jeter au même moment que le ménestrel. La petite pierre dégringolant le long du flan atterrissant tout droit sur la tête de l’animal qui s’enragea soudainement beaucoup plus. Frappant sa tête avec plus de force.


Lancement des dés pour le Yamaany : a écrit:

Pour réussir, il faut qu’il fasse un dé d’au moins 15 -+1 à cause de la violence de l’avalanche- donc 16
Résultat : 14, échec

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